La cité hydraulique angkorienne : exploitation ou surexploitation du sol ? - article ; n°1 ; vol.66, pg 161-202
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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1979 - Volume 66 - Numéro 1 - Pages 161-202
42 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Bernard Philippe Groslier
VII. La cité hydraulique angkorienne : exploitation ou
surexploitation du sol ?
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 66, 1979. pp. 161-202.
Citer ce document / Cite this document :
Groslier Bernard Philippe. VII. La cité hydraulique angkorienne : exploitation ou surexploitation du sol ?. In: Bulletin de l'Ecole
française d'Extrême-Orient. Tome 66, 1979. pp. 161-202.
doi : 10.3406/befeo.1979.4014
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1979_num_66_1_4014LA CITÉ HYDRAULIQUE ANGKORIENNE :
EXPLOITATION OU SUREXPLOITATION DU SOL ?
PAR
Bernard Philippe GROSLIER
La « Cité hydraulique » qui apparaît à la fin du ixe siècle dans la
plaine de Siemreap constitue pour nous une des caractéristiques essent
ielles de la période angkorienne car elle assure sa vie économique.
Création remarquable en expansion constante jusqu'à la fin du xie siècle,
elle semble ensuite se bloquer et finir dans une sorte d'impasse. C'est
ce que nous voudrions montrer ici.
J'ai déjà eu l'occasion1 de décrire le système et je n'en rappelerai
que les traits essentiels. Installée dans la plaine alluviale parcourue de
rivières permanentes, entre le plateau des Kulên — énorme éponge de
grès qui forme château d'eau — et la berge septentrionale du Lac, la
cité hydraulique est un réseau de canaux et de réservoirs captant les
eaux fluviales et la mousson, puis les redistribuant dans des rizières
permanentes aménagées à partir de cette ossature. Sans parler des
réserves nécessaires aux habitants et au bétail en saison sèche, elle assure
sinon partout une culture sous irrigation, du moins un écrêtement des
écarts climatiques, donc une sécurité accrue de la production agricole.
C'est elle qui a nourri les concentrations humaines requises, entre autres
manifestations du pouvoir royal, pour la construction des grands
temples d'Angkor.
Données géographiques
Quelles qu'aient été, par ailleurs, les raisons historiques qui ont
fait élire la plaine de Siemreap, celle-ci présente des traits uniques qui
ont pu, en partie, dicter son exploitation.
Tout d'abord elle constitue, au Nord du Grand Lac, la seule zone
de quelque ampleur émergée en permanence, et ceci du fait des Kulên
(1) En dernier lieu B. P. Groslier, Agriculture et religion dans V Empire angkorien. Études
rurales, 1974, nos 53-56, pp. 95-117. 162 BERNARD PHILIPPE GROSLIER
prolongée, vers l'Est, par les phnom Ta So et Ta Beng. A l'Ouest, entre
Puok et Mongkolborei, se déroule une vaste plaine rase, inculte parce
qu'inondée la moitié de l'année, qui est bien un des paysages les plus
caractéristiques du Cambodge septentrional. Les photos de satellites
viennent d'en révéler l'origine, au moins dans son dernier état. Il s'agit
d'un énorme cône de déjection affectant la forme d'un trapèze dont le
sommet seraient les Dangrèk occidentaux, et la base la rive Nord-Ouest
du Grand Lac et ses approches marécageuses, entre le versant occidental
du slung Puok et le versant oriental du stung Preah Neth Preah. Le
stung Sreng coule dans le sillon médian. C'est, selon toute probabilité,
la conséquence de l'érosion intense qui a formé, en partie, les lacs.
M. J. P. Carbonnel a établi l'origine et la date probable de ceux-ci1. Il a
pu penser que cette cuvette, remplie à la dernière pluviale, avait d'abord
été aménagée par un premier cours du Mekong. Je serais beaucoup plus
tenté de croire que cette dépression s'est remplie à la dernière pluviale
— qui a provoqué l'érosion intense des Dangrèk — , puis s'est frayée
un déversoir selon l'axe du terrain, c'est-à-dire du Tonle Sap. Le
Mékong, dont les photos aériennes indiquent le cours fort divaguant
plus à l'Est, serait venu ultérieurement capter, à hauteur de Phnom
Penh ou un peu en amont, ce dégorgeoir du Nord-Ouest cambodgien.
Quoi qu'il en fût nous avons là un pays très particulier qui s'arrête à la
frontière occidentale de la plaine d'Angkor, et s'en distingue nettement.
La zone de Siemreap fut protégée de cette même érosion précisément
par les Kulên, ainsi que les bassins de Beng Mealea et du Preah Khan
de Kompong Svay plus à l'Est. En effet le drainage des Dangrèk, dans
ce secteur, dut se faire vers l'Est et a donc façonné le haut bassin du
stung Sen, qui coule d'abord W.-N.-W.-E.S.E. pour contourner les
phnom Ta Beng et rejoindre, après un brusque coude et cette fois sur
une direction N.N.E.-S.S.W., le Grand Lac. Ainsi le pays d'Angkor,
pour nous, commence à l'Ouest en bordure orientale de la plaine détri
tique du slung Sreng et se poursuit vers l'Est entre Kulên et Lac, arrosé
par les cours permanents N.N.E.-S.S.W. descendant de ces dernières
hauteurs. Nous allons voir les conséquences historiques de cette struc
ture (Cartes 1 et 7).
Les Terres exondées.
Si la plaine de Siemreap se trouve ainsi exondée en permanence
— en contraste avec les pays à l'Ouest — -, elle ne s'en termine pas moins
sur le Lac et ses confins méridionaux subissent les fluctuations de celui-ci.
Les capitales khmères se sont d'abord établies à proximité même du
Tonle Sap. La limite des terres émergées en permanence est donc
importante pour nous puisqu'elle détermine, à la fois, le seuil de débouché
des rivières et la limite aval des terres qui pouvaient être bâties et
devaient être irriguées.
Nous avons tracé (cartes 1 et 7) la frontière méridionale des ouvrages
(1) J.-P. Carbonnel, Le Quaternaire cambodgien. Paris, O.R.S.T.O.M., 1972. LA CITÉ HYDRAULIQUE ANGKORIENNE 163
khmers, très nettement établie par nos prospections aériennes puis sur
le terrain. Il est possible que quelques sites actuellement masqués par
le limon aient existé en aval, mais j'en doute. Entre les embouchures
actuelles des stung Siemreap et Roluos cette « rive archéologique »
correspond en pratique à la cote +16 m1. A l'ouest de l'embouchure
actuelle du St. Siemreap le terrain s'abaisse : nous entrons dans la plaine
détritique du stung Sreng, plus exactement ses confins occidentaux
avec le delta du St. Puok : la rive archéologique remonte donc vers le
Nord. Au Sud du Baray occidental (carte 2) elle semble jadis avoir été
plus au Nord que sur nos cartes. Toute cette zone est de consolidation
relativement récente, et nous verrons plus loin l'action des grands
travaux angkoriens dans cette évolution. Nous avons — cas rarissime —
un recoupement épigraphique sur ce point. L'inscription К 521 du
prasat Сак, petit temple situé à 2,7 km au N.O. de Siemreap, signale
en 850, sous Jayavarman III et donc avant les premières cités hydraul
iques, que ce secteur était alors « terre de berge » et que là, ou à proximité
immédiate, existait un lieu-dit « barque pour traverser », en bref que
la rive du Lac était voisine2. Plus à l'Ouest enfin, au Sud de Puok,
les terres inondées remontent davantage encore vers le Nord, en fait
presque jusqu'à la route Siemreap-Battambang (qui n'a pas peu contri
bué à les fixer d'ailleurs). Nous sommes ici dans la partie orientale du
delta du stung Puok (carte 1), qui se jette actuellement dans celui du
stung Sangker mais dont on suit, grâce aux bras morts et aux bourrelets
de berge, les divagations nombreuses. Il est certain qu'à une date mal
heureusement impossible à fixer, il débouchait directement dans un Lac
remontant lui-même davantage vers le Nord.
A l'Est du stung Roluos, enfin, la limite des terres exondées en
permanence remonte aussi vers le Nord mais pour une autre raison.
Nous avons ici la berge concave Nord-Est du Grand Lac où viennent
s'accumuler directement les boues du stung Sangker. C'est en fait la
rive « molle » du Lac qui s'élargit au Sud-Est de Siemreap plutôt qu'un
changement de modelé de la plaine.
Au Sud de notre « rive archéologique » s'étend une zone de battement
régulièrement inondée puis découverte par les Lacs et donc fort
propice à des cultures de berge, au riz flottant. Ces cultures — surtout
celle du riz repiqué à la décrue — y sont toujours pratiquées : elles ont
même été systématiquement développées ces derni

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