La maternité mise à nu par ses propriétaires - article ; n°1 ; vol.36, pg 39-50
13 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La maternité mise à nu par ses propriétaires - article ; n°1 ; vol.36, pg 39-50

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
13 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Les Cahiers du GRIF - Année 1987 - Volume 36 - Numéro 1 - Pages 39-50
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 48
Langue Français

Extrait

Hélène Rouch
La maternité mise à nu par ses propriétaires
In: Les Cahiers du GRIF, N. 36, 1987. De la parenté à l'eugénisme. pp. 39-50.
Citer ce document / Cite this document :
Rouch Hélène. La maternité mise à nu par ses propriétaires. In: Les Cahiers du GRIF, N. 36, 1987. De la parenté à
l'eugénisme. pp. 39-50.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/grif_0770-6081_1987_num_36_1_1738maternité mise à nu par ses propriétaires La
Hélène Rouch
Les nouvelles techniques de reproduction, particulièrement la FIVETE,
sont, sur le plan scientifique, très intéressantes non seulement parce qu'elles
permettent de rendre accessibles et manipulates les débuts de la vie mais
parce que, comme dans les derniers développements de la neurobiologie, en
elles convergent les progrès de la biologie cellulaire, de la biologie molécul
aire et de la génétique.
Le développement de la biologie moléculaire s'est accompagné du retour
de la pensée réductionniste, pensée très opératoire quant aux progrès des
connaissances, mais réductrice dans sa conception de l'être vivant dans son
milieu et soutendue par une conception de la nature particulièrement docile
aux intérêts de nos sociétés capitalistes et patriarcales.
Pour montrer comment cette pensée réductionniste est à l'uvre dans la
FIVETE, je ferai d'abord un détour par la biologie moléculaire et le rôle de
l'ADN (acide désoxyribonucléique) qui offre - tel qu'on peut le lire dans le
livre de Jacques Monod, le Hasard et la Nécessité1 un exemple paradig-
matique du réductionnisme. -
Les molécules d'ADN présentes dans le noyau de toutes les cellules
contiennent sous forme codée les informations nécessaires à la structure et
au fonctionnement de la cellule. L'ensemble des informations constitue le
patrimoine génétique d'un individu qui fait qu'il est vache, cochon, poulet
ou être humain.
Le fait que pour tous les êtres vivants, de la bactérie à l'homme, le code
génétique soit toujours écrit en ADN et surtout que les mécanismes de
transcription - traduction du code soient apparus, dans un premier temps,
communs à tous les êtres vivants, a constitué un dogme de la biologie moléc
ulaire. Un certain réductionnisme a alors été au sommet ï il suffisait de
trouver le code chez un être vivant unicellulaire, à ADN relativement simp
le, et d'en généraliser les résultats aux êtres plus complexes. C'est l'idée
que toute complexité peut se réduire à un mécanisme simple, lequel, inver
sement, par paliers successifs qui se déduisent les uns des autres, permet
d'obtenir le palier final. C'est installer un système de causalité linéaire où le
palier a entraîne le palier b qui entraîne le palier c... Par exemple TADN 39 la cause du fonctionnement de la cellule, qui est la cause de celui de est
l'organe, qui est la cause de l'organisme. Dans ce système, b ne peut év
idemment induire a, ce qui signifie que, dans cet exemple, l'ADN agit sur la
cellule mais la cellule ne peut agir sur lui : à partir du moment où on le fait
fonctionner comme cause, il perd sa qualité de faire partie de l'ensemble de
la cellule. Le réductionnisme est incapable de le concevoir à la fois comme
élément causal et comme élément faisant partie d'un tout qui pourrait inter
réagir avec lui. Ces vues, contestées par Barbara McClintock - dont le
travail a été longtemps sous-estimé par la communauté scientifique2-, ont
été modifiées depuis. Néanmoins, l'idée réductionniste que toute complexité
est réductible par niveaux successifs à un phénomène relativement simple,
universel et immuable ne désarme pas et on la retrouve, intacte, aussi bien
dans la sociobiologie d'un Wilson3, qui affirme que tout comportement hu
main est réductible à un fonctionnement de gènes, que dans la neurobiologie
d'un Jean-Pierre Changeux4qui ramène ce comportement à un fonctionne
ment physico-chimique de neurones 5.
Face à la pensée réductionniste qui affirme que le tout n'est que la
somme hiérarchisée des parties qui le constituent et qu'on pourra reproduire
le tout si on sait reproduire les parties, se développe, surtout dans les pays
anglo-saxons, une pensée globaliste (l'holisme) qui postule que chaque n
iveau d'organisation et de fonctionnement n'est pas seulement la reprise des
éléments du niveau inférieur en une stricte chaîne causale et qui privilégie
l'interrelation à un même niveau et entre niveaux différents6..
11 y a dans la pensée réductionniste une confusion entre ce qu'on peut
appeler le support (par exemple l'ADN est bien le support moléculaire es
sentiel de l'hérédité, et ce de la bactérie à l'homme), et la façon dont fonc
tionne ce support, différente selon les niveaux d'organisation dans lesquels il
est inséré. ;
On peut dire aussi que fonctionne dans la pensée réductionniste le mythe
de l'origine. S'il est vrai que toute l'évolution des êtres vivants a pris son
départ à partir de quelques cellules primitives, sans doute ces cellules primi
tives contenaient-elles en germe les possibilités de l'évolution. Mais cela ne
veut pas dire qu'inversement tout être vivant peut s'expliquer, fût-ce au prix
d'une patiente et complexe déconstruction, par le fonctionnement d'une cel
lule primitive, telle une bactérie.
Il y a enfin l'idée que le monde vivant s'inscrirait dans la nature par un
système de lois simples -r à découvrir -, immuables, universelles ; qu'il obéi
rait donc à un déterminisme biologique ; que ses capacités de changement
ne seraient que celles que ses structures permettent. Depuis que les biologis-
40 tes ont l'ADN ils n'ont plus besoin de Dieu (les sciences dites autrefois maintenant biologiques, semblent être toujours en retard théorie naturelles,
quement sur les sciences physiques). Les biologistes n'ont plus besoin de
Dieu pour expliquer le monde vivant, et surtout ils pensent pouvoir manipul
er le monde vivant au plus près de ce qui a été son commencement et aussi
en maîtriser les formes et, bien entendu, le devenir.
De Dieu à l'uf
Ce détour (très réducteur !) par la biologie moléculaire devrait, me semb
le-t-il, permettre de mieux comprendre comment le réductionnisme est à
l'uvre dans les conceptions scientifiques qui sous-tendent les NTR.
Les NTR ont pour but avoué de pallier des stérilités, c'est-à-dire des
ratages de la procréation. Après avoir bricolé du côté des hypofertilités ou
stérilités masculines par les inséminations artificielles, du côté des hypofertil
ités féminines par les traitements hormonaux ou chirurgicaux, et quelquef
ois des deux côtés, les biologistes et médecins ont décidé de prendre les
choses sérieusement et fermement en main. Que veut-on ? Un enfant. Pour
cela il faut d'abord avoir un embryon, et encore avant un uf. Et pour
avoir un uf, il faut un spermatozoïde et un ovocyte qui devront fusionner.
Comme fusionnent dans l'eau de mer qui les entoure les spermatozoïdes et
les ovules des animaux ou végétaux à fécondation externe, ceux sur qui on a
découvert les mécanismes de la fécondation il y a un peu plus d'un siècle, et
avec lesquels on a réalisé les premières fécondations en laboratoire. .
Le problème pour les Mammifères est que la fécondation est interne et
que si le recueil des spermatozoïdes est aisé (les inséminations artificielles
sont pratiquées depuis longtemps), ni les ovocytes, ni le lieu de la fécondat
ion ne sont facilement accessibles.
Malheureusement pour l'obtention des ovocytes, la femme n'en produit
que très peu (un par cycle). On va donc contraindre les ovaires à en pro
duire à la demande et en nombre, avec des inducteurs d'ovulation. Induct
eurs connus puisque déjà utilisés pour traiter les cas présumés de paresse
ovarienne. Un ovaire hyperstimulé produit plusieurs ovocytes qu'on livrait
autrefois au hasard plus ou moins programmé d'un rapport sexuel ou d'une
insémination artificielle et qu'on est, maintenant, capable de prélever dans
l'ovaire. On connaît par les dosages h

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents