La noblesse bordelaise au lendemain de la Restauration - article ; n°3 ; vol.5, pg 381-405

Michel Figeac

Description

Histoire, économie et société - Année 1986 - Volume 5 - Numéro 3 - Pages 381-405
Abstract In all likelihood, the bordelaise nobility — a dynamic group of more than 800 families — underwent a quantitative fall during the Revolution. Indeed, in 1831, half of the names disappeared from the list of electors : the departures, the deaths because of events, without counting biological extinction which seems important, explain this historical fact. However - in spite of this numerical collapse minimized by a new nobility and arrivals — nobility got again its social and political pre-eminence during the Restauration. They became mayor, « conseiller général » or deputy, people reconstituted vineyards because riches were more and more invested in real estate. By seeing fiscal lists, nobility's economic power seemed equal in value to that of trade. The quick and relentless decline only began with « la Monarchie de Juillet ».
Résumé La noblesse bordelaise, groupe dynamique de plus de 800 familles, semble avoir quantitativement souffert de la Révolution puisqu'en 1831 la moitié des noms ont disparu sur les listes électorales. Aux départs purs et simples s'ajoutent les décès liés aux événements sans parler de l'extinction biologique qui paraît rapide. Pourtant, malgré cet affaiblissement numérique en partie compensé par des arrivées et la création de nouveaux nobles, la Restauration est une période de reconquête de la prééminence socio-politique. On devient maire, conseiller général ou député, on reconstitue les domaines viticoles car la fortune est de plus en plus foncière. Au vu des listes fiscales, la puissance économique de la noblesse semble équilibrer celle du négoce. Le déclin inexorable et rapide ne devait s'amorcer que sous la Monarchie de Juillet.
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: HISTOIRE-_ECONOMIE_ET_SOCIETE
• Publié le: 01 janvier 1986
• Nombre de lectures: 52
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Michel Figeac
La noblesse bordelaise au lendemain de la Restauration
In: Histoire, économie et société. 1986, 5e année, n°3. pp. 381-405.
Résumé La noblesse bordelaise, groupe dynamique de plus de 800 familles, semble avoir quantitativement souffert de la
Révolution puisqu'en 1831 la moitié des noms ont disparu sur les listes électorales. Aux départs purs et simples s'ajoutent les
décès liés aux événements sans parler de l'extinction biologique qui paraît rapide. Pourtant, malgré cet affaiblissement
numérique en partie compensé par des arrivées et la création de nouveaux nobles, la Restauration est une période de
reconquête de la prééminence socio-politique. On devient maire, conseiller général ou député, on reconstitue les domaines
viticoles car la fortune est de plus en plus foncière. Au vu des listes fiscales, la puissance économique de la noblesse semble
équilibrer celle du négoce. Le déclin inexorable et rapide ne devait s'amorcer que sous la Monarchie de Juillet.
Abstract In all likelihood, the bordelaise nobility — a dynamic group of more than 800 families — underwent a quantitative fall
during the Revolution. Indeed, in 1831, half of the names disappeared from the list of electors : the departures, the deaths
because of events, without counting biological extinction which seems important, explain this historical fact. However - in spite of
this numerical collapse minimized by a new nobility and arrivals — nobility got again its social and political pre-eminence during
the Restauration. They became mayor, « conseiller général » or deputy, people reconstituted vineyards because riches were
more and more invested in real estate. By seeing fiscal lists, nobility's economic power seemed equal in value to that of trade.
The quick and relentless decline only began with « la Monarchie de Juillet ».
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Figeac Michel. La noblesse bordelaise au lendemain de la Restauration. In: Histoire, économie et société. 1986, 5e année, n°3.
pp. 381-405.
doi : 10.3406/hes.1986.1432
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1986_num_5_3_1432LA NOBLESSE BORDELAISE
AU LENDEMAIN DE LA RESTAURATION
par Michel FIGEAC
Abstract Résumé
La noblesse bordelaise, groupe dynamique de plus In all likelihood, the bordelaise nobility — a dyna
mic group of more than 800 families — underwent a de 800 familles, semble avoir quantitativement souf
fert de la Révolution puisqu'en 1831 la moitié des quantitative fall during the Revolution. Indeed, in
1831, half of the names disappeared from the list of noms ont disparu sur les listes électorales. Aux départs
purs et simples s'ajoutent les décès liés aux événements electors : the departures, the deaths because of events,
sans parler de l'extinction biologique qui paraît rapide. without counting biological extinction which seems
important, explain this historical fact. However - in Pourtant, malgré cet affaiblissement numérique en
partie compensé par des arrivées et la création de nou spite of this numerical collapse minimized by a new
nobility and arrivals — nobility got again its social veaux nobles, la Restauration est une période de r
econquête de la prééminence socio-politique. On de and political pre-eminence during the Restauration.
They became mayor, « conseiller général » or deputy, vient maire, conseiller général ou député, on reconsti
people reconstituted vineyards because riches were tue les domaines viticoles car la fortune est de plus en
more and more invested in real estate. By seeing fiscal plus foncière. Au vu des listes fiscales, la puissance
lists, nobility's economic power seemed equal in value économique de la noblesse semble équilibrer celle du
négoce. Le déclin inexorable et rapide ne devait s' to that of trade. The quick and relentless decline only
began with « la Monarchie de Juillet ». amorcer que sous la Monarchie de Juillet.
« Le vieux gentilhomme le menait chaque soir dans une
vieille voiture, traînée par de vieux chevaux mal attelés,
accompagné de ses vieux laquais mal habillés, dans une so
ciété royaliste composée de débris de la noblesse parlement
aire et de la noblesse d'épée. Réunies depuis la Révolu
tion pour résister à l'influence impériale, ces deux nobles
ses s'étaient transformées en une aristocratie territoriale.
Écrasé par les hautes et mouvantes fortunes des villes mar
itimes, ce faubourg Saint-Germain de Bordeaux répondait
par son dédain au faste qu'étalaient alors le commerce, les
administrations et les militaires ».
C'est ainsi qu'au début du Contrat de Mariage (1), Honoré de Balzac brosse un ta
bleau sévère de la noblesse bordelaise sous la Restauration. La description de Paul de
Manerville traînant son ennui dans un milieu à l'idéologie passéiste, est-elle née dans
l'esprit du littérateur ou repose-t-elle sur des observations concrètes ? Si tel est le cas,
que serait devenue la noblesse riche et prospère, ouverte aux Lumières, contestatrice
de la Monarchie absolue que nous avions décrite dans un mémoire de maîtrise (2) ?
A-t-elle été emportée par la vague déferlante d'une Révolution dont l'aspect paroxysti
que aurait provoqué un réflexe de défense de la part d'hommes qui, dans leur majorité,
demandaient en 1 789 une monarchie à l'anglaise ? Dépossédés par la vente des biens
nationaux, les nobles sont-ils désormais trop pauvres pour animer la vie sociale et poli
tique de l'Empire et de la Restauration ? Autant de questions restant sans réponse car
si la noblesse a donné lieu à de grands ouvrages au XVIIIe siècle (3), peu d'auteurs ont
essayé de la suivre par delà les vicissitudes de la Révolution (4).
En avant-propos à une étude plus vaste qui confrontera la noblesse girondine aux 382 HISTOIRE ÉCONOMIE ET SOCIÉTÉ
événements politiques se succédant entre 1789 et 1830 (5), nous cherchons à préciser
la place socio-économique de ce groupe dans la région bordelaise à la fin de la Restaur
ation. Le noble d'Ancien Régime, membre du second ordre, se définit par un statut
juridique précis qui permet de quantifier rapidement ce milieu social (6). Avec l'aboli
tion des privilèges, il se noie dans l'anonymat des listes électorales ou des listes fiscales,
ce qui rend le travail plus aléatoire. Une évaluation de la noblesse bordelaise au lende
main de la Restauration était pourtant indispensable pour situer la place de ce groupe
qui fut le plus affecté par les bouleversements politiques. Quelles familles se sont
éteintes ? Quels nobles ont préféré changer de région et inversement, combien sont ve
nus de l'extérieur renforcer un groupe fatalement affaibli par la tourmente révolution
naire ? Cette simple opération de comptage nous fournira une idée sur la force de la
noblesse sous la Restauration, complétée par un essai d'estimation des niveaux de for
tune à partir des sources fiscales. Comment analyser les modifications dans le compor
tement politique et économique, dans les relations sociales, sans essayer de chiffrer au
départ le poids de la catégorie que nous nous proposons d'étudier ? En 1 830, la nobles
se est-elle toujours, avec le négoce, au pinacle de la société bordelaise, tel est bien l'en
jeu de la question.
QUARANTE ANS APRES : RETROUVER LA NOBLESSE
Partir à la recherche des nobles en 1789 était relativement facile car la réunion de
l'Assemblée de la noblesse de Guyenne pour la préparation des Etats généraux ainsi
que les rôles séparés de la capitation isolaient le groupe du reste de la société. Beaucoup
plus malaisée s'annonce notre recherche en 1830 car Bouquier, Laine ou Laborie cô
toient désormais sur les listes des homonymes qui n'ont pas une seule goutte de « sang
bleu » dans les veines. Pour dresser une liste des nobles habitant alors la Gironde, on
pense, bien sûr, aux sources fiscales et notamment à la contribution foncière ; malheu
reusement, celle-ci n'a pas été conservée par le dépôt des Archives Départementales de
la Gironde. Faute de mieux, il fallait donc se rabattre sur les listes électorales qui four
nissent également les contributions acquittées par les électeurs et leur domicile princi
pal. Si les listes de notabilités dressées en l'an XI, en 1807, puis en 1812 (7) sont inté
ressantes, car elles offrent un tableau des élites sous l'Empire, e