La politique vivrière de Sultan Ageng (1651-1682) - article ; n°1 ; vol.50, pg 83-118
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Description

Archipel - Année 1995 - Volume 50 - Numéro 1 - Pages 83-118
36 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 9
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Claude Guillot
La politique vivrière de Sultan Ageng (1651-1682)
In: Archipel. Volume 50, 1995. pp. 83-118.
Citer ce document / Cite this document :
Guillot Claude. La politique vivrière de Sultan Ageng (1651-1682). In: Archipel. Volume 50, 1995. pp. 83-118.
doi : 10.3406/arch.1995.3065
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1995_num_50_1_3065Claude GUILLOT
La politique vivrière
de Sultan Ageng (i65i-i682)
attirés Banten par est le poivre, bien sûr venaient connu comme échanger l'un leurs des produits grands ports des de marchands l'Archipel origioù,
naires de tous les rivages de l'Océan indien et de la Mer de Chine. On se sou
vient de la liste impressionnante des nations que les Hollandais, étonnés et
ravis, rencontrèrent dans cette ville en 1596 lors de leur premier voyage en
Asie du Sud-Est: Persans, Gujeratis, Malabars, Kelings, Pegouans, Malais,
Chinois, Turcs, Arabes et Abyssins sans compter les Portugais qui y traf
iquaient alors depuis près de quatre-vingts ans. A cette déjà longue liste, il faut
ajouter, pour la seconde moitié du XVIIe siècle, les Anglais, les Danois, les
Français et bien entendu les Hollandais.
Le commerce international dont l'importance transparaît au travers de cette
simple enumeration a, il est vrai, joué un si grand rôle dans l'émergence et le
développement de Banten, comme d'ailleurs des autres sultanats, que la major
ité des études ont eu quelque peu tendance à négliger un autre aspect de son
économie, l'agriculture, et à présenter Banten comme une sorte de Cité-État
alors que son territoire s'étendait de Tangerang à Tulang Bawang et de Pela-
buan Ratu à Silebar. Il est évident qu'il y a là une lacune à combler et qu'il
importe pour mieux rendre compte de la complexité de la société de Banten
d'analyser la place occupée par la production agricole vivrière dans l'écono
mie du sultanat ainsi que la profondeur de l'enracinement terrien la ment
alité de sa population. La nécessité de disposer de sources suffisamment
détaillées pour aborder cette question, nous a obligé à concentrer cette étude
sur la production vivrière pendant le seul règne de Sultan Ageng (1651-1682)
mais il va de soi que cela ne nous interdira pas d'effectuer des incursions dans
les autres périodes, moins bien documentées, de l'histoire du pays pour don
ner à notre vision une plus grande profondeur de champ.
[Archipel 50 - Paris, 1995 - pp. 83-118.] 84 Claude Guillot
Chronologie des grands projets agricoles
1659
La première mention connue d'une action entreprise par Sultan Ageng dans
le domaine agricole remonte à 1659. On apprend qu'en septembre de cette
année-là (*), Kiayi arya Mangunjaya, le très énergique et fidèle ministre d'État
de Sultan Ageng, réunit les chefs de tous les territoires du royaume et leur
ordonna de collecter des plants de cocotiers à raison de cent unités par homme
sous leur juridiction. Ces arbres devaient être plantés près de la rivière
d'Ontong Java (Cisadane) c'est-à-dire près de la frontière avec Batavia. Il
s'agit là d'une opération d'une importance considérable si l'on considère que
la plantation d'une centaine de cocotiers exige une superficie d'environ un
hectare (2)!
L'importance accordée par le gouvernement à ce projet ne fait aucun doute
puisque par une décision complémentaire, le sultan ordonnait le transfert et
l'installation sur cette nouvelle plantation de cinq mille hommes sains accom
pagnés de leur famille <3). Même en faisant une estimation basse de la famille
moyenne, en l'évaluant à quatre personnes, un couple et deux enfants, on arri
ve au total assez considérable d'environ vingt mille personnes qui ont ainsi été
déplacées et installées le long du Cisadane. Il est malheureusement impossible
de faire une estimation vraiment sérieuse de la superficie nouvellement plan
tée en cocotiers. Cependant, pour donner un ordre de grandeur, on peut propo
ser comme plausible l'octroi à chaque famille d'un terrain d'un hectare, la
cocoteraie aurait eu, dans ce cas, une superficie d'environ 5 000 hectares. A
n'en pas douter ce déplacement de population s'accompagna de la création
d'une dizaine de villages au moins puisqu'on sait par certaines descriptions du
XVIIe siècle que les villages de Java-ouest à cette époque n'avaient générale
ment pas plus de cinq cents habitants chacun (4).
Il est évident que cette opération de grande envergure avait une significa
tion politique puisqu'elle correspondait à une implantation de population sur
des territoires situés à la frontière avec le voisin inquiétant que demeurait
Batavia malgré le traité de paix qui venait d'être signé entre les deux États.
Mais elle n'avait pas pour unique raison d'être cette fonction de défense puis
qu'elle s'inscrivait manifestement dans un projet plus vaste d'aménagement
régional. En effet, dès octobre 1659 (5\ soit un mois après la décision de colo
nisation de Ontong Java, le résident hollandais en poste à Banten informait
Batavia «que le Sultan avait l'intention de faire creuser un canal de la rivière
de Tanara (Cidurian) jusqu'à la rivière d'Ontong Java (Cisadane)».
Illustration
Paysans au marché de Banten en 1596.
Il s'agit en fait de "religieux" non-musulmans, portant un froc en papier d'écorce
(dhluwang), originaires de Pasuruan et installés à "Sura", au pied du mont Karang.
(D'eerste schipvaart..., planche 23) Si!ii|i#i 'fi' ^ iiir! ! ! flliilll. ^ 86 Claude Guillot
1663-1664
Ce projet devait se réaliser quatre ans plus tard en 1663. On apprend que
Sultan Ageng souhaitait faire commencer à la fin du mois de Ramadan, qui
tombait le 27 avril 1663, le creusement d'un canal reliant la rivière de Tanara
à la rivière de Pasilian, appelée aussi Cimanceuri, qui passe à Balaraja, sur
une longueur de trois mijlen soit entre cinq et six kilomètres. Le résident
signalait qu'il n'était pas nécessaire de poursuivre le canal jusqu'au Cisadane
puisqu'il existait une gorge (kloof) reliant la rivière de Pasilian au
(6). Ce canal devait «permettre aux habitants des villages de cette région
d'apporter plus facilement leur riz et les autres produits à Tanara puis, de là, à
Banten». Le résident hollandais rassurait en outre Batavia qui s'inquiétait de
l'aspect stratégique que pouvaient avoir ces travaux pour sa propre sécurité,
en ajoutant que ce canal servirait non seulement de moyen de communication
mais aussi de réserve d'eau pour l'irrigation des rizières V\ Les travaux com
mencèrent avec plusieurs mois de retard en septembre de 1663. Le 9 sep
tembre de cette année, le sultan partit de Banten avec 150 navires et 5 000
hommes (le texte du Daghregister donne le chiffre de 50 000 qui nous semble
trop élevé pour ne pas être fautif) pour le creusement du canal qui fut terminé
très rapidement W.
Le but de l'opération était manifestement la mise en culture de nouvelles
terres agricoles puisque, parallèlement au creusement du canal, le sultan créa
des rizières autour du canal et fit immédiatement construire un grenier à riz
(9). A l'évidence, ce projet importait beaucoup au souverain qui s'y investit
entièrement et tenta d'y intéresser l'élite du pays. Il se fit construire une mai
son de plaisance à Tanara sur le lieu du projet (I0> et resta sur le chantier de
façon quasi continue durant près de trois mois. On le vit aussi faire venir ses
femmes et la cour sur le terrain durant quatre ou cinq jours (u> pour leur mont
rer sa réalisation et les faire sans doute assister aux premières semailles.
Cette première plantation de riz retenait toute son attention. Au milieu de
février, il retourna à Tanara «pour examiner les champs de riz» (12) et voir
sans doute comment s'effectuait la croissance des plants. En mars, il repartit
encore pour Tanara, entraînant une fois de plus toute sa cour avec lui, pour
moissonner le riz (13). La preuve de la réussite de ce projet agricole est donnée
par le résident hollandais qui servait au moins autant d'agent de renseigne
ment que d'agent commercial. Intrigué par le séjour prolongé du sultan dans
cette région nouvellement ouverte à l'agriculture, il décida, en effet,

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