La sanction : rejet familial et rejet scolaire - article ; n°1 ; vol.5, pg 70-85
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Description

Langue française - Année 1970 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 70-85
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1970
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Joseph Sumpf
H. Braun
La sanction : rejet familial et rejet scolaire
In: Langue française. N°5, 1970. pp. 70-85.
Citer ce document / Cite this document :
Sumpf Joseph, Braun H. La sanction : rejet familial et rejet scolaire. In: Langue française. N°5, 1970. pp. 70-85.
doi : 10.3406/lfr.1970.5469
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1970_num_5_1_5469J. Sumpf et H. Braun, Paris-Vincennes et Paris-Nanterre.
LA SANCTION : REJET FAMILIAL
ET REJET SCOLAIRE
1. Introduction.
On ne peut concevoir une pédagogie sans sanction. Que celle-ci soit
physique ou psychologique, gratifiante ou brutale, d'une manière ou d'une
autre, il y a sanction parce que le discours pédagogique vise à combler un
écart entre ce qui doit être (ou ne doit pas être) et ce qui est, l'enfant errant.
Aussi la théorie de la sanction est-elle souvent la difficulté majeure et la
manifestation la plus instructive de tel ou tel système pédagogique. En
un sens, au niveau descriptif où nous nous situons toujours, elle constitue
le système en tant que tel. Si les consignes et les questions sont, à la rigueur,
des embrayeurs (moyens de déclencher le discours), la sanction, elle, éta
blit la coupure par laquelle le système définit ce qui n'est pas lui : c'est une
limite. Comprendre au moyen des limites est, depuis Kant, l'une des voies
essentielles de la réflexion sur l'homme, sur sa raison (la critique, c'est-à-
dire les limites de la raison pure chez Kant, ou la « folie » chez M. Foucault),
sur la culture (le caractère non-historique de certaines cultures chez Lévi-
Strauss), etc. Un certain nombre de concepts (coupure, négation de, crise,
anomie) y sont intimement liés. L'interrogation linguistique, qui est la
nôtre, ne peut encore une fois que se défier de l'abus du mot « crise » et de
toute rhétorique tragique sur la fin de l'histoire, etc. Nous restons dans
une description volontairement synchronique. Nous ne savons pas ce qui
est à condamner ou à faire; nous cherchons seulement à savoir ce qui se
fait, allant le plus loin possible, du niveau explicite, institutionnel, au
niveau profond, implicite.
Nous savons que l'enfant est « rejeté » de l'institution lorsqu'il manif
este certains traits, qu'il est sanctionné dans l'accomplissement de la
tâche provoquée par les consignes ou les questions. C'est un constat
(« mal dit, mauvais élève, élève qui ne peut pas suivre ») engendrant le
performatif « excluons-le ». Mais cet impératif n'est pas explicité; il
70 n'appartient pas, à proprement parler, à notre corpus. Si le « fou » est,
quant à lui, dit dangereux et enfermé, les formules qui excluent l'enfant
ne sont pas du même ordre. De prime abord, il n'y a pas de système de
l'exclusion et une interrogation du même type que celles qui portent sur les
limites de la raison ou de la déraison.
Nous avons donc tenté une analyse dans un univers de discours dont
le thème est la sanction. Du point de vue de l'institution, on peut cons
tituer un corpus à partir d'un ensemble d'énoncés sur la sanction en posant
que toute sanction est graduée : la sanction est une hiérarchie. Or, si la
sanction est plus ou moins explicite, c'est que la hiérarchie n'est pas
apparente dans la vie scolaire, même si les textes prévoient une gradation
entre la retenue et l'exclusion. Le « rejet » est le résultat d'une série d'énon
cés qui, pris séparément, sont assez anodins, en tout cas vagues. Il serait
possible de s'interroger sur cette attitude, comme le fait S. Moscovici x,
à propos de l'acceptation de la psychanalyse par la société française. Une
analyse de contenu nous fournirait peut-être les indices d'une sorte de
« refoulement du rejet ». De même que le psychanalyste doit, pour être
accepté par la société française, se transformer, de même l'enfant rejeté
est jusqu'au bout dans les normes de l'institution scolaire, ce bout étant le
moment où l'exclusion se produit. En fait, comme on va le voir, le pro
blème de la constitution du corpus est complexe, à plus forte raison son
interprétation. Quatre voies ont été explorées du point de vue de la li
nguistique : l'attitude des parents et celle des censeurs dans cet article, le
rejet dans les dossiers scolaires (article suivant de J. Dubois, J. Sumpf et
0. Motteau) et dans l'orthographe (v. article de J. J. et
M. Meyrat). Néanmoins avant d'exposer les quelques résultats acquis par
les méthodes linguistiques, il est utile de s'interroger sur la notion de
norme et celle, correliée, d'anomie, telles qu'elles apparaissent en sociologie.
2. Norme et anomie.
C'est chez Durkheim (Règles de la méthode sociologique) que l'on
trouve l'élaboration classique la plus complexe de ces notions. La théorie
dominante aux États-Unis jusqu'à une date récente (celle de Mer ton) est
issue de la tradition instaurée par Durkheim.
Pour Durkheim est normal ce qui est général, est anormal ce qui est
exceptionnel. « Nous pouvons formuler les trois règles suivantes : 1) Un
fait social est normal pour un type social déterminé, considéré dans une
phase déterminée de son développement, quand il se produit dans la
moyenne des sociétés de cette espèce, considérées dans la phase correspon
dante de leur évolution. 2) On peut vérifier les résultats de la méthode
précédente en faisant voir que la généralité du phénomène tient aux condi
tions générales de la vie collective dans le type social considéré. 3) Cette
vérification est nécessaire quand ce fait se rapporte à une espèce sociale qui
1. La Psychanalyse, son image et son public, PUF, 1961 (650 p.).
71 n'a pas encore accompli son évolution intégrale 2. » On voit, par ce texte,
que la normalité ne correspond pas à des normes idéales (par exemple
l'utilité) ni à des normes biologiques (la santé), elle correspond à un fait
statistique, la moyenne, mais compte tenu de la place et de l'espèce sociales,
c'est-à-dire du type de société considérée dans son organisation synchro-
nique. La moyenne ne suffît pas à définir la normalité. Si par exemple
un million de rhumatisants, pris au hasard, présente une mortalité sens
iblement supérieure à la moyenne, on a de bonnes raisons pour attribuer ce
résultat à la diathèse rhumatismale. Mais, en sociologie, comme chaque
espèce ne compte qu'un petit nombre d'individus, le champ des compar
aisons est trop restreint pour que des groupements de ce genre soient
démonstratifs 3. La liaison entre le type social et les données statistiques
doit être établie même si le type social n'est pas apparent dans l'institution.
Appliqué à notre problème, cet ensemble de thèses se vérifie assez
facilement. On ne peut parler de moyenne que dans une classe (scolaire)
donnée, c'est-à-dire selon l'ensemble social, le type de classe constitué par
le professeur et les élèves. L'anormalité, et donc le rejet, ne se définit
que dans ces limites. Dans le cas où les données statistiques changent
(par exemple, le succès au baccalauréat, la moyenne nationale des exclu
sions, etc.), il faut relier cela à un autre type d'institution qui est encore
à naître. C'est ce qu'affirme aujourd'hui tout le monde devant l'évolution
des classes, des examens, etc. Les phénomènes en apparence anormaux sont
finalement ramenés à des données statistiques et à des types sociaux (fac
teurs religieux, types de suicide, etc.), comme cela a été fait par Durkheim
pour le suicide. Toute la réflexion de la sociologie américaine sur l'anomie
demeure dans la tradition durkheimienne, mais elle affine l'analyse de la
situation de l'individu par rapport à la norme. Ainsi Merton définit l'ano
mie comme un écart entre les buts fixés par la norme et les moyens que
détient l'individu. L'anomie vient du fait que l'individu poursuit des fins
qui ne correspondent pas à ces moyens. Contre Merton, dont l'analyse est
jugée trop globale, Douglas va vers une micro-sociologie de l'acte déviant
(déviation du fanatisme conformiste ou rébellion par exemple 4). Mais on
reprend aussi l'étude durkh

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