La syntaxe peut-elle être logique ? - article ; n°1 ; vol.40, pg 25-96
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Description

Communications - Année 1984 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 25-96
72 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 28
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Pierre Jacob
La syntaxe peut-elle être logique ?
In: Communications, 40, 1984. pp. 25-96.
Citer ce document / Cite this document :
Jacob Pierre. La syntaxe peut-elle être logique ?. In: Communications, 40, 1984. pp. 25-96.
doi : 10.3406/comm.1984.1597
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1984_num_40_1_1597Pierre Jacob
La syntaxe peut-elle être logique *?
Introduction : grammaire generative, psychologie et biologie.
1. La théorie standard.
1.1. La structure catégorielle.
1.2. Les relations grammaticales.
1.3. La sous-catégorisation.
2. La théorie standard étendue.
2.1. La théorie des traces.
2.2. La sous-jacence.
2.3. La condition du sujet spécifié et la condition des îlots propositionnels.
3. Le concept de forme logique.
3.1. La règle de montée logique des quantificateurs.
3.2. La sémantique permet-elle de trancher entre différentes structures
superficielles possibles?
3.3. La règle de montée logique des syntagmes interrogatifs.
3.4. Le principe des catégories vides, le mouvement syntaxique des syntagmes
interrogatifs, la montée logique des quantificateurs et la montée logique des
syntagmes interrogatifs.
4. Explications linguistiques en termes de structure, d'intentions et de
tion.
5. Conclusions.
Introduction : grammaire generative, psychologie et biologie.
Le concept central de la linguistique generative est celui de grammaire.
Une langue se compose de phrases. Les phrases sont des suites de mots
appartenant au vocabulaire (ou au lexique) de la langue. Certaines suites
de mots français, comme « Le chat est sur le paillasson », sont des phrases ;
d'autres, comme « paillasson le sur est chat le », n'en sont pas. La
* Je remercie R. Carter, G. Fauconnier, G. G. Granger, R. Kayne, D. Osherson,
J.-Y. Pollock, F. Récanati et D. Sperber. Mes leurres sont leurs.
25 Pierre Jacob
signification des phrases dépend systématiquement de la signification des
mots et des morphèmes qui les composent, c'est-à-dire qu'elle dépend
notamment de l'ordre des mots et de leur agencement structural. « Le gros
chien noir a mordu la petite fille aux nattes rousses » n'a pas la même
signification que « La petite fille aux nattes rousses a mordu le gros chien
noir », bien que les deux phrases contiennent exactement les mêmes
mots.
Quoiqu'un dictionnaire du français ne contienne qu'un nombre fini de
mots, le français contient vraisemblablement un nombre infini de
phrases. Puisque, par définition, une liste est un ensemble fini de
symboles, on ne peut pas dresser la liste des phrases du français. C'est l'un
des mérites de Noam Chomsky, dont le nom est justement associé à la
linguistique generative, d'avoir formulé le problème dans un cadre
scientifique : une grammaire du français est un ensemble fini de règles (ou
d'instructions) capables ^engendrer toutes les phrases du français et
aucune des suites de mots français qui ne sont pas des phrases. Le but
d'une grammaire generative est de fournir une caractérisation explicite
(axiomatique) des informations fournies par les traités traditionnels de
grammaire sur la structure interne des phrases, la nature de leurs
constituants et les relations grammaticales qui unissent ceux-ci.
Étant donné un ensemble fini de phrases d'une langue, différentes
grammaires, incompatibles les unes avec les autres, pourront en décrire la
formation. Elles auront, dans la terminologie de Chomsky 1965 (p. 60), la
même « capacité generative faible ». Pour les départager, il faudra
examiner leur « capacité generative forte », c'est-à-dire les différentes
« descriptions structurales » qu'elles assignent aux phrases qu'elles énu-
mèrent. En 1957, Chomsky faisait paraître un petit volume, Syntactic
Structures, qui fut salué comme une révolution en linguistique l. Il faisait
état de résultats mathématiques démontrant les limitations de certains
modèles de grammaire fréquemment envisagés à l'époque. Il démontra
que les chaînes de Markov ne permettaient pas d'engendrer toutes les
phrases d'une langue naturelle et que l'analyse en constituants immédiats,
largement employée par ses prédécesseurs, les structuralistes américains,
fournissaient de certaines phrases des descriptions structurales inélégant
es. Il proposa, pour remédier à ces défauts, un modèle de grammaire dite
« transformationnelle », contenant à la fois des « règles de réécriture »
contenues dans les analyses en constituants immédiats et des règles
distinctes des règles de réécriture.
Il y a deux manières de considérer une grammaire transformationnell
e : du point de vue de ses composantes et du point de vue de ses niveaux de
représentation. Une grammaire transformationnelle contient plusieurs
niveaux de représentation, par exemple la « structure profonde » et la
« structure superficielle ». Chacun d'entre eux contient un type particulier
d'informations sur la structure des phrases et le passage de l'un à l'autre
se fait grâce aux règles transformationnelles. Elle contient également
plusieurs composantes, par exemple une composante syntaxique, une
composante phonologique et une composante sémantique. Au cours des
années, Chomsky a modifié le détail de ses conceptions touchant au
26 La syntaxe peut-elle être logique?
nombre et à la nature des niveaux de représentation et des composantes.
Mais il a maintenu certaines conceptions générales, qui confèrent à la
linguistique generative une place à part dans l'ensemble des études
linguistiques : la thèse de Y imprévisibilité du comportement linguistique,
la prédilection pour des méthodes configurationnelles, le style galiléen, le
refus de la bifurcation et la thèse de la modularité.
Les locuteurs francophones utilisent des phrases pour communiquer,
pour penser, pour accomplir une quantité de ce qu' Austin nommait des
« actes illocutionnaires ». Une même phrase, comme « J'ai soif », peut
servir à dire des choses différentes, dans des circonstances différentes, si
elle est énoncée par des personnes différentes, à des moments différents.
Une même phrase, comme « Je reviendrai demain », peut aussi être
énoncée avec une force illocutionnaire différente, selon que celui qui
l'énonce a l'intention de faire une promesse, une prédiction, un avertis
sement, une menace, et ainsi de suite. Les concepts pragmatiques élaborés
par Austin et ses successeurs permettent de décrire certains aspects de la
communication réalisée grâce à renonciation de phrases. Mais Chomsky
semble considérer que, dans l'état actuel de nos connaissances, il est
prématuré de chercher à expliquer et à prédire le comportement linguis
tique observable : ce que les gens disent dans des circonstances particul
ières. Il a en effet toujours qualifié, en opposition aux conceptions
behavioristes, le comportement linguistique humain de « créateur ». Selon
lui, nous ne disposons d'aucune théorie du comportement qui nous
permette d'attribuer une probabilité rationnelle à renonciation d'une
phrase particulière (ayant une structure phonétique donnée), compte tenu
des stimulations sensorielles auxquelles serait soumis le locuteur à
l'instant précédant son énonciation. Il range d'autre part 1' « usage
créateur » du langage parmi les « mystères », plutôt que parmi les
« problèmes » sur lesquels le développement prévisible de la science
devrait, selon lui, jeter des lumières dans un avenir envisageable.
Les théories grammaticales, quant à elles, ne prétendent nullement
expliquer ou prédire le comportement linguistique observable. D'un côté,
le comportement linguistique est formidablement complexe. De l'autre,
une grammaire (ou un fragment de grammaire) du français caractérise
certaines propriétés des phrases du français. Un locuteur francophone, qui
fait preuve d'un comportement créateur, a « connaissance » des propriétés
grammaticales attribuées aux phrases. Il sait que telle suite, à la différence
de telle autre, est une phrase du français. La grammaire cherche donc à
caractériser Y état cognitif qui permet au locuteur de se montre

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