Lectures matérialistes de la Bible - article ; n°1 ; vol.7, pg 179-197
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Description

Dialogues d'histoire ancienne - Année 1981 - Volume 7 - Numéro 1 - Pages 179-197
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Michel Clevenot
Lectures matérialistes de la Bible
In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 7, 1981. pp. 179-197.
Citer ce document / Cite this document :
Clevenot Michel. Lectures matérialistes de la Bible. In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 7, 1981. pp. 179-197.
doi : 10.3406/dha.1981.1430
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dha_0755-7256_1981_num_7_1_14307 1981 179 - 197 DHA
LECTURES MATERIALISTES DE LA BIBLE
En mai 1974, les éditions du Cerf (maison catholique) publiaient un
livre au titre curieux : Lecture matérialiste de l'évangile de Marc. L'intérêt
aussitôt soulevé par l'ouvrage, son succès en librairie, sa traduction rapide
en plusieurs langues avaient déjà de quoi étonner. Mais, en outre, de mult
iples «groupes de lectures matérialistes» se formaient, en France, en Bel
gique, en Hollande, en Allemagne etc. Des sessions étaient organisées, des
rencontres internationales avaient lieu, des articles, des livres s'attachaient
à étendre et approfondir le champ des «lectures matérialistes de la Bible» .
De quoi s'agit-il donc ? Comment cette «méthode» est-elle née ? En
quoi consiste-t-elle ? Quels problêmes pose-t-elle ?
I - HISTORIQUE
1 . Fernando Belo et «Marc»
L'auteur de Lecture matérialiste de l'évangile de Marc est portugais.
II s'appelle Fernando Belo. Ingénieur, puis prêtre, il ne supportait pas l'au
toritarisme réactionnaire du cardinal de Lisbonne, très lié au dictateur Salazar.
Il s'exile en Belgique, où il poursuit des études de théologie à Louvain, puis
à Paris, où il se marie et a deux enfants. En relation avec les mouvements de
libération qui se développent alors dans les anciennes colonies portugaises,
ainsi qu'en Amérique latine (où s'élaborent des «théologies de la libération»),
il se trouve affronté à une contradiction qu'il formule ainsi : «La foi n'est-
elle pas une idéologie contradictoire avec les pratiques de libération dans
lesquelles nous essayons d'être partie prenante ? Sur quel terrain épistémolo-
gique peut-on poser cette question ? Sur celui du matérialisme historique où
se situe le concept d'idéologie, ou celui de la théologie où se situe celui de
foi ?»
Choisissant délibérément «le champ épistémologique du matérialisme
historique», il décide d'analyser plutôt les pratiques chrétiennes et de s'a
ttacher d'abord à ces «récits de pratiques» que sont les évangiles. Et il se met
à lire YEvangile de Marc, «parent pauvre des évangiles, oublié au profit des
autres, plus riches de discours, d'enseignements, plus élaborés théologique-
ment» . .
Pendant sept ans, travaillant à mi-temps l'après-midi, Belo se consacre
chaque matin à sa «lecture», pour laquelle il a recours aux travaux qu'il
découvre un peu au fur et à mesure : Althusser, Derrida, Lacan, Barthes,
Benveniste, Bataille ... Audacieusement, il utilise, essaie et met au point des
concepts nouveaux : 180 Michel CLÉVENOT
- Yordre symbolique qui régit les textes législatifs de l'Ancien Testament selon
deux optiques opposées : pureté/souillure, don/dette.
- le mode de production subasiatique de la Palestine ancienne, où le Temple
de Jérusalem apparaît comme le point de concentration des contradictions de
la formation sociale.
- Yecclésiologie matérialiste, qui permet de rendre compte des transformations
complexes subies par les groupes chrétiens primitifs et des Eglises qui les ont
supprimés et remplacés.
- une théorie des rapports entre Récit-Pratique-Idéologie, qui éclaire le carac
tère subversif de certains textes, conçus comme pratiques (écriture-lecture)
de récits de pratiques subversives...
Pour résumer son ambitieuse entreprise, Belo a cette formule : «rendre
possible la confrontation entre une pratique politique se voulant révolution
naire et une pratique chrétienne ne se voulant plus religieuse». Et il la symbol
ise par le sigle «C/X», c'est-à-dire «faire lire Marc par Marx», ce qui est aussi
un hommage à Roland Barthes et à son fameux S/Z.
2. Rencontres, édition
Outre ses lectures, Belo faisait aussi des rencontres, notamment parmi
ceux que l'on appelle les «chrétiens de gauche», entre autres le pasteur
Georges Casalis, le dominicain Paul Blanquart, l'équipe de la revue LETTRE
et l'équipé nationale de la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne), à laquelle
appartenait alors,en qualité d'aumônier, le signataire de ces lignes.
En 1970, la JEC se remettait à peine du «coup de crosse» de Mgr
Veuillot en 1965 : démission de l'équipe nationale et suppression de la
branche étudiante. On en était à tirer les conséquences de mai 68 et le Conseil
national d'Amiens (mai 70) venait d'adopter un rapport d'analyse sur l'école
qui préfigurait «L'école capitaliste en France» de Baudelot et Establet
(Maspero 1971).
Or, la contradiction était flagrante entre cette pratique politique
«se voulant révolutionnaire» et notre pratique chrétienne qui n'arrivait
pas à sortir d'une «religion» dont nous ne voulions plus. Parmi cent exemp
les possibles, qu'il me soit permis de citer celui qui me touche de plus
près : le statut clérical apparut à beaucoup, clercs et laïcs, comme incomp
atible avec une pratique chrétienne authentique; cette caste de mâles céli
bataires, financièrement dépendants, interdits de travail, de sexe et de po
litique, nous paraissait «anti-évangélique». C'était le moment où le mouve
ment «Echanges et dialogue» battait son plein.
L'une des réactions que nous eûmes alors (parmi d'autres) fut de ten
ter une relecture de la Bible. Par une illusion fréquente, nous nous imagi
nions pouvoir retrouver, par delà vingt siècles de compromissions et de D'HISTOIRE ANCIENNE 181 DIALOGUES
réaction, la pureté des origines, puisée à la source des textes fondateurs. Nous
devions nous apercevoir très vite qu'il n'existe pas de pureté originelle (les
premières communautés chrétiennes ne pratiquaient pas toutes ni sans disput
es le «communisme» admiré par Engels) et même qu'il n'y a pas d'origines,
car, s'il est certain qu'a existé un Jésus de Nazareth, le personnage des Evang
iles et des épîtres est raconté («fabriqué») en fonction des besoins des comm
unautés...
Nous en étions là quand nous times la rencontre de Fernando Belo.
C'était au cours d'une réunion autour de Giulio Girardi, qui venait de se faire
chasser de son enseignement à Rome sous l'accusation de «marxisme»...
Maigre et barbu, Fernando se mit à nous expliquer sa lecture de Marc. C'était
cela que nous cherchions ! Pendant trois ans, nous avons travaillé avec lui,
lui permettant, par là même, d'essayer ses analyses sur un auditoire, de les
préciser, d'en affiner l'énoncé.
En mai 1974, alors que Fernando venait de rentrer au Portugal, qui vi
vait la «révolution des oeillets», son livre paraissait en librairie.
3. Diffusion, travaux, recherches
Le succès de ces quatre cents pages touffues et complexes avait de quoi
surprendre. Pourtant il ne s'agissait pas d'un de ces éphémères «succès de
librairie» qui font parfois vendre des ouvrages que beaucoup achètent et que
peu lisent... Il faut croire que celui-là répondait à un besoin, car de multiples
«groupes de lectures matérialistes» se créèrent un peu partout, travaillant en
semble «le Belo», lisant YEvangile de Marc, publiant des comptes-rendus,
essayant de s'attaquer à d'autres textes en adaptant la méthode.
La revue LETTRE fut la première à s'y intéresser. Pendant deux ans,
le groupe étudia le livre; un numéro spécial (février 1975) lui fut consacré,
présentant, vulgarisant et critiquant ses thèses. Moi-même, sollicité de tous
côtés pour «expliquer Belo» (qui était au Portugal), je publiai en janvier 1976
des Approches matérialistes de la Bible, vite traduites en six langues.
En novembre 1978, les premières Rencontres internationales des grou
pes de lectures de la Bible réunissaient à Paris plus de cent

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