Les libertini : des mots et des choses  - article ; n°1 ; vol.11, pg 330-379
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Description

Dialogues d'histoire ancienne - Année 1985 - Volume 11 - Numéro 1 - Pages 330-379
LIBERTINI : WORDS AND THINGS.
The generally accepted double interpretation given for libertinus — meaning both son of the libertus and the libertus himself— is the consequence of 1) an overused interpretation of a polemical text by Suetonius, which is contradicted by all the other uses of the word, 2) an interpretation which reduces its meaning by limiting its use to freed slaves only, thereby obscuring the meaning of many documents —. Libertinus may mean any recently freed citizen, and is fore most both in the vocabulary of political controversy and invective, and in what relates to the status of individuals.
La double interprétation généralement admise pour libertinus — qualifiant à la fois le fils du libertus et le libertus lui-même — résulte : 1) d'une sur-interprétation d'un texte polémique de Suétone, contredit cependant par tous les usages du mot; 2) d'une interprétation réductrice qui en limite l'usage aux seuls esclaves affranchis — et obscurcit de ce fait la signification de nombre de documents — Libertinus peut qualifier tout citoyen de fraîche date, et tient une place de premier plan tant dans le vocabulaire de la controverse politique et de l'invective, que dans celui qui a trait au statut des personnes.
50 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1985
Nombre de lectures 42
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Madame Janine Cels-Saint-
Hilaire
Les libertini : des mots et des choses
In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 11, 1985. pp. 330-379.
Abstract
"LIBERTINI" : WORDS AND THINGS.
The generally accepted double interpretation given for "libertinus" — meaning both son of the "libertus" and the "libertus"
himself— is the consequence of 1) an overused interpretation of a polemical text by Suetonius, which is contradicted by all the
other uses of the word, 2) an interpretation which reduces its meaning by limiting its use to freed slaves only, thereby obscuring
the meaning of many documents —. "Libertinus" may mean any recently freed citizen, and is fore most both in the vocabulary of
political controversy and invective, and in what relates to the status of individuals.
Résumé
La double interprétation généralement admise pour "libertinus" — qualifiant à la fois le fils du "libertus" et le "libertus" lui-même —
résulte : 1) d'une sur-interprétation d'un texte polémique de Suétone, contredit cependant par tous les usages du mot; 2) d'une
interprétation réductrice qui en limite l'usage aux seuls esclaves affranchis — et obscurcit de ce fait la signification de nombre de
documents — "Libertinus" peut qualifier tout citoyen de fraîche date, et tient une place de premier plan tant dans le vocabulaire
de la controverse politique et de l'invective, que dans celui qui a trait au statut des personnes.
Citer ce document / Cite this document :
Cels-Saint-Hilaire Janine. Les libertini : des mots et des choses . In: Dialogues d'histoire ancienne. Vol. 11, 1985. pp. 330-379.
doi : 10.3406/dha.1985.1667
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/dha_0755-7256_1985_num_11_1_1667330 J. CELS-SAINT-HILAIRE
Janine CELS-SAINT-HILAIRE
LES LIBERTINI : DES MOTS ET DES CHOSES.
La double interprétation généralement admise pour libertinus — qualifiant
à la fois le fils du libertus et le liber tus lui-même — résulte : 1) d'une sur-inte
rprétation d'un texte polémique de Suétone, contredit cependant par tous les
usages du mot; 2) d'une interprétation réductrice qui en limite l'usage aux
seuls esclaves affranchis — et obscurcit de ce fait la signification de nombre
de documents — Libertinus peut qualifier tout citoyen de fraîche date, et
tient une place de premier plan tant dans le vocabulaire de la controverse
politique et de l'invective, que dans celui qui a trait au statut des personnes.
Janine CELS-SAINT-HILAIRE
LIBERTINI : WORDS AND THINGS.
The generally accepted double interpretation given for libertinus — meaning
both son of the libertus and the libertus himself— is the consequence of 1) an
overused interpretation of a polemical text by Suetonius, which is contradic
ted by all the other uses of the word, 2) an interpretation reduces its
meaning by limiting its use to freed slaves only, thereby obscuring the mea
ning of many documents — . Libertinus may mean any recently freed citizen,
and is fore most both in the vocabulary of political controversy and invective,
and in what relates to the status of individuals.
MOTS-CLEFS : libertus, libertinus. DHA 11 1985 331-379
LES LIBERTINI : DES MOTS ET DES CHOSES
Janine CELS - SAINT-HILAIRE
Université de Tours (France)
et UA 0338 (Besançon)
Qu'est-ce qu'un libertinus ?
A cette question de prime abord simple, le Thesaurus Linguae Latinae
(1) donne une réponse apparemment claire et sans ambiguïté, appuyée sur des
références précises ; celles-ci sont regroupées sous deux rubriques (d'impor
tances d'ailleurs très inégales) :
1 . Selon l'usage ancien, libertinus désigne le fils du libertus.
2.commun, il désigne le libertus/a lui-même.
L'on comprend ordinairement par là que le libertinus peut être l'ancien
esclave qui a été affranchi, ou son fils.
Or un certain nombre de documents - tant littéraires que juridiques ou
épigraphiques - sont loin de s'accommoder d'une telle clarté, non plus que de
cette simplicité.
Sans doute, les titres proposés par le Thesaurus regroupent un choix de
références qui devraient permettre de mieux cerner ce qu'était, dans sa réalité
concrète, la place du libertinus. Elles tendent à illustrer une définition au de
meurant très généralement admise, et qui n'est évidemment pas erronée : dans
bon nombre de cas, des liberti sont qualifiés de libertini. Cependant aucune de
ces références ne livre à proprement parler une définition du mot. Qu'il s'agisse
de textes littéraires, historiques, ou juridiques, ils ne font guère que suggérer
une signification par le contexte, qui laisse un large champ aux incertitudes et
aux ambiguïtés (j'y reviendrai). Peut-on être certain, dans ces conditions, que le
mot libertinus ait désigné seulement les anciens esclaves - ce que sont à pro
prement parler les liberti - ou leurs fils ?
Il est en tout cas au moins un secteur de la recherche où la question se
pose, aujourd'hui, avec une particulière acuité : celui qui touche au culte impé- 332 J. CELS-SAINT-HILAIRE
rial - et dès lors, on voit mal comment il pourrait ne se poser que là -. Un certain
nombre d'études, en effet, ont été menées, au cours des dernières décennies, sur
des personnages que certaines sources nous donnent assurément pour des liberti
ni : les seviri augustales. Or si l'on admet les conclusions auxquelles elles ont
abouti, on doit conclure que l'origine servile de ces personnages n'est nullement
assurée : en ce cas, comment comprendre le qualificatif de libertini qui leur a
été appliqué ?
En effet R. Etienne a montré, pour la Péninsule Ibérique (2) que si cer
tains seviri sont d'authentiques affranchis (leurs inscriptions le disent sans
équivoque), d'autres semblent bien être des indigènes libres - des peregrins -
pour lesquels le sévirat paraît un indice d'intégration à la romanité. Après lui,
M. Clavel-Lévêque pour Béziers (3), et tout dernièrement M. Gayraud pour
Narbonne (4), ont abouti aux mêmes conclusions. Seul A. Pelletier, pour Vienne,
voit en eux des affranchis ou des descendants d'affranchis (5). Plus générale
ment, l'analyse des inscriptions de seviri augustales, sur l'ensemble de la Narbon-
naise (6), permet de déceler, parmi eux, un nombre d'indigènes libres en voie de
romanisation au moins aussi important que celui des affranchis sortis de l'escla
vage, sinon plus important : la proportion relative des deux catégories variant,
d'ailleurs, avec les structures socio-économiques des cités, et avec leur composit
ion ethnique - plus «indigènes» pour certaines (Nîmes ou Vienne), plus «ita
liennes» pour d'autres (Narbonne ou Béziers) (7).
Pourtant il est des chercheurs pour penser que les seviri augustales sont,
pour la plupart, d'anciens esclaves affranchis (8) ; thèse évidemment inconcil
iable avec les conclusions que je viens de citer pour la Péninsule Ibérique et
pour la Gaule narbonnaise. Je ne m'étendrai pas ici sur les arguments - inspirés
par les analyses de l'onomastique régionale - qui conduisent à déceler des péré-
grins en bien des seviri dont la documentation épigraphique a gardé le souvenir,
me bornant à renvoyer aux études qui leur ont été consacrées. Mais il est clair
que de tels résultats invitent à mettre en doute le fait, jusque là couramment
admis, que les seviri augustales étaient avant tout d'anciens esclaves : le sévirat
augustal fait donc l'objet d'interprétations contradictoires, inconciliables.
L'interprétation classique repose, pour l'essentiel, sur trois textes litté
raires : une satire d'Horace (9), et deux scholies qui la commentent, l'une du
Pseudo-Acron à la fin du Ile siècle de notre ère (10), l'autre de Porphyrion au
temps des Sévères (11).
La satire d'Horace met en scène un libertinus, moins individu réel que
personnage de comédie, chargé de caractères qui le font représentatif, en fait,
de plusieurs types à la fois : fervent dévot des divinités des compita, il leur
demande chaque matin de le dérober à la mort, «chose facile aux dieux».
Horace insiste : «II avait le bon usage de ses deux oreilles et de ses deux yeux».
Mais, ajoute-t-il, «pour l'esprit, à moins d'aimer les procès, son maître eût fait
une réserve, s'il avait eu à le vendre». Le personnage incarne donc à la fois le D'HISTOIRE ANCIENNE 333 DIALOGU

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