Les obsessions d Henri Béraud - article ; n°1 ; vol.40, pg 62-74
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Description

Vingtième Siècle. Revue d'histoire - Année 1993 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 62-74
Henri Béraud's obsessions, Frédéric Monier.
The career of Henri Béraud, an intellectual, editorial writer and pamphleteer for the weekly Gringoire, was marked by a break in 1934. Until then, Béraud was mainly a famous and recognized writer. Afterwards, he expressed his anti-semitic, anti-Communist and anti-English commitment which was to lead to collaboration with the Germans. In addition to the traditional explanations of the passage from the socialistic left to the admiration of fascism, Béraud's case shows the desire to be an intellectual with an audience and the inner contradictions of a man torn between a paternal Dreyfusard-type heritage and obsessive anti-semitism.
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 54
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Frédéric Monier
Les obsessions d'Henri Béraud
In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°40, octobre-décembre 1993. pp. 62-74.
Abstract
Henri Béraud's obsessions, Frédéric Monier.
The career of Henri Béraud, an intellectual, editorial writer and pamphleteer for the weekly Gringoire, was marked by a break in
1934. Until then, Béraud was mainly a famous and recognized writer. Afterwards, he expressed his anti-semitic, anti-Communist
and anti-English commitment which was to lead to collaboration with the Germans. In addition to the traditional explanations of
the passage from the socialistic left to the admiration of fascism, Béraud's case shows the desire to be an intellectual with an
audience and the inner contradictions of a man torn between a paternal Dreyfusard-type heritage and obsessive anti-semitism.
Citer ce document / Cite this document :
Monier Frédéric. Les obsessions d'Henri Béraud. In: Vingtième Siècle. Revue d'histoire. N°40, octobre-décembre 1993. pp. 62-
74.
doi : 10.3406/xxs.1993.3000
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xxs_0294-1759_1993_num_40_1_3000LES OBSESSIONS
D'HENRI BÉRAUD
Frédéric Monier
Comment un intellectuel français, En un sens, tout l'homme est là, pour
pacifiste et plutôt à gauche verse-t-il suivre la formule consacrée. Pourtant, il
de manière plus ou moins subite dans serait juste de faire remarquer que tout
l'admiration du fascisme et ensuite l'homme oscille entre ces deux dates.
dans la Collaboration, laissant libre Béraud, en novembre 1933, est journaliste
cours à un antisémitisme débridé? En et écrivain, rien de plus. Homme de lettres
marge des explications traditionnell somme toute assez célèbre, il a derrière
es — l'antibolchevisme, Fanglophobie, lui une quinzaine d'ouvrages, romans
la culture des tranchées —, existent sou pour la plupart, qui se vendent bien en
vent des déterminants personnels, librairie, surtout depuis qu'en 1922 le prix
comme dans le cas de Béraud, intellec Goncourt lui a été attribué pour Le vitriol
tuel «embourgeoisé», avide de recon de lune et Le martyre de l'obèse, tous deux
naissance sociale et sur qui pèse parus chez Albin Michel, en 1921 et 1922
l'ombre d'un père dreyfusard, source respectivement. Novembre 1933, c'est ju
d'un «complexe personnel». stement la date d'impression de son der
nier ouvrage de fiction, Ciel de suie, aux
Éditions de France. Ensuite, plus rien. Le 1er novembre 1933, le prix Albert
Béraud disparaît du monde des lettres Londres, récompensant le meilleur
jusqu'en avril 1941, moment où il achève reportage de l'année, est attribué
son deuxième tome de Mémoires : Qu 'as- pour la première fois. A. Londres est mort
tu fait de ta jeunesse? le 16 mai 1932. Parmi les membres du
Homme de lettres, Béraud est aussi, jury, à côté d'Andrée Viollis, Edouard Hel-
d'abord, homme de presse. Pierre Assou- sey, Louis Roubaud, Roland Dorgelès et
line, dans sa biographie d'Albert Londres, d'autres: Henri Béraud. Le Temps du
le range sans hésiter dans ce groupe res5 octobre 1935: l'article intitulé «Le manif
treint, «à peine de quoi remplir deux este des intellectuels» mentionne que
wagons»1, des grands reporters, l'élite de «parmi les signataires du manifeste des
la profession, les flâneurs salariés; intellectuels français pour la paix en
l'expression est de Béraud justement, qui Europe et la défense de l'Occident, nous
relevons dans l'ordre où ils arrivent les
noms de MM. Henri Béraud, Alphonse de 1. Pierre Assouline, Albert Londres, Paris, Balland, 1989,
p. 19. Chateaubriand, Pierre Mac Orlan».
62 HENRI BERAUD
intitule ainsi un choix de ses grands repor raud, de son premier article le 12 janvier
tages, réécrits comme il se doit à l'époque. 1934 à son dernier papier le 8 octobre 1943,
Le recueil paraît en 1927 l. Des recueils a glissé de l'opposition à Daladier à
d'enquêtes journalistiques, Béraud en l'admiration inconditionnelle pour Pétain.
publie neuf entre 1924 et 1934, soit un La rupture entre cet avant et cet après
par an, sauf en 1930, année d'inactivité. 1934 est si nette, si tranchée, qu'elle en
Son premier grand reportage politique, a presque l'air caricaturale. Bien mieux,
«Un voyage au pays des Soviets», plus l'engagement politique est total. Il acca
connu sous le titre du recueil, Ce que j'ai pare Béraud si complètement qu'il lui fait
vu à Moscou2, aurait fait augmenter le tirer un trait sur son métier, le reportage,
tirage du Journal dirigé par François- et sur son œuvre littéraire. Pourtant, à y
Irénée Mouthon de 25000 exemplaires3. regarder de plus près, 1934 ne constitue
Si la rumeur est invérifiable, faute d'archi pas une rupture au plan des idées de
Béraud. Son évolution a commencé bien ves, elle reste une bonne indication de
l'aura de célébrité qui nimbe Béraud jour auparavant.
naliste. Sa dernière série d'articles comme L'entrée à Gringoire n'est qu'un temps
reporter paraît à l'automne 1933 dans Le fort, dans la mesure où elle libère l'expres
Petit Parisien, et en février 1934 en sion de ses positions et de ses partis pris.
C'est ce que révèle l'analyse détaillée de recueil, sous le titre: Vienne, clef du
monde. Béraud, flâneur salarié, disparaît l'antisémitisme de Béraud. Celui-ci n'est
ensuite du monde de la presse. pas le fruit de son changement de carrière
Journaliste et écrivain moins connu que et d'une exaspération politique datant des
d'autres, mais qui compta de son vivant, années 1930. Déjà en 1921, on le sent
il fait partie de cette «strate intermédiaire» latent. Son glissement jusqu'aux extrêmes,
de l'intelligentsia repérée par J.-F. Siri- de 1941 et 1942, ne s'effectue pas de façon
nelli4. On hésiterait néanmoins à l'étiquet- linéaire, mais avec des hésitations, des
ter comme intellectuel jusqu'à l'année détours et des scrupules révélateurs de la
1933. Au-delà, c'est presque à un autre personnalité d'Henri Béraud. Au fond,
homme que l'on a l'impression d'avoir dire un mot de sa curieuse trajectoire indi
affaire. Sa carrière subit un retournement viduelle permet d'approfondir, à travers
comme on en connaît peu. Béraud un cas particulier, la question si classique
devient l'homme d'un journal, Gringoire, de la politisation de l'intelligentsia fran
hebdomadaire politico-littéraire et, de fait, çaise dans l'entre-deux-guerres.
au fil des ans, de plus en plus politique
O ANNÉE 1934 : L'ENTRÉE À GRINGOIRE et de moins en moins littéraire. En théorie
éditorialiste, en réalité pamphlétaire, Bé- Plusieurs éléments rendent compte de
l'entrée, définitive, de Béraud à Gringoire,
au début de l'année 1934. Celle-ci n'obéit 1. Henri Béraud, Le flâneur salarié, Paris, Editions de France,
1927 et Paris, 10/18, 1985 (coll. -Grands Reporters.), 286 p. pas qu'à une seule logique, et le souci
Excellente préface de Francis Lacassin. de faire carrière a joué autant que le désir 2. Henri Béraud, Ce que j'ai vu à Moscou, Paris, Éditions
d' «engagement politique». Ce passage du de France, novembre 1925- La série d'articles parut dans Le
Journal, du 6 septembre au 6 octobre 1925. grand reportage et des romans aux 3. F.-I. Mouthon fut directeur du quotidien parisien Le Jour
nal de 1918 à 1930, date de sa mort. Comme le notait Pierre pamphlets et à la lutte politique constitue,
Albert, en dépit des changements de propriétaires, ainsi en bien entendu, l'originalité, l'intérêt et 1925, il -était le maître- de la publication. Voir, sur ce sujet,
l'exemplarité du parcours de Béraud. Pour Claude Bellanger (dir.), Histoire générale de la presse française,
tome 2, de 1871 à 1940, Paris, PUF, 1972, p. 251. reconstruire sa cohérence, il ne suffit pas 4. J.-F. Sirinelli, -Biographie et histoire des intellectuels",
de parler d'une rupture, trop nette, en dans • Problèmes et méthodes de la biographie ■, Sources. Tra
vaux historiques, 3, décembre 1985, p. 61. mettant en avant le choc causé chez cet
63 :
FREDERIC MONIER
«II se trouva qu'un beau jour Béraud me ancien combattant par le 6 Fév

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