Evaluation des structures de répit pour le patient atteint de maladie d’Alzheimer (et syndrome apparentés) et son aidant principal : revue de la littérature 1 2,3,4 1 2,3,4 1,3,4 Hélene Villars , Virginie Gardette , Sandrine Sourdet , Sandrine Andrieu , Bruno Vellas 1 Gérontopôle, Service de Médecine Interne Gériatrique, CMRR, CHU de Toulouse, 170 avenue de Casselardit 31300 Toulouse 2 Service d’Epidémiologie, économie de la Santé et Santé communautaire, 37 allées Jules Guesdes 31073 Toulouse Cedex 3Université de Toulouse, UPS 118 Route de Narbonne 31062 Toulouse Cedex 9 4 INSERM U558 37, allées. Jules Guesde 31073 Toulouse Cedex Introduction La dimension « familiale » de la maladie d’Alzheimer, caractéristique essentielle de cette affection, a été à l’origine du développement du concept de « répit » pour les aidants. La notion de répit dans la maladie d’Alzheimer a été définie par certains auteurs comme la prise en charge temporaire physique, émotionnelle et sociale d’une personne dépendante dans le but de permettre un soulagement de son aidant principal (Weber et al., 1993 ; Glimour et al., 2002). En effet, il a été mis en évidence, dans de nombreux travaux, que le « fardeau » que peut représenter la maladie d’Alzheimer sur l’aidant principal est souvent élevé et peut avoir un impact sur son niveau de stress, d’anxiété et de dépression (Andrieu et al., 2003 ; Gaugler et al., 2003 ; Zarit et al.,1998). Le « répit » est donc apparu ...
Evaluation des structures de répit pour le patient atteint de maladie dAlzheimer (et syndrome apparentés) et son aidant principal : revue de la littérature Hélene Villars1, Virginie Gardette2,3,4, Sandrine Sourdet1, Sandrine Andrieu2,3,4, Bruno Vellas1,3,4 1 Gérontopôle, Service de Médecine Interne Gériatrique, CMRR, CHU de Toulouse, 170 avenue de Casselardit 31300 Toulouse 2 Service dEpidémiologie, économie de la Santé et Santé communautaire, 37 allées Jules Guesdes 31073 Toulouse Cedex 3Université de Toulouse, UPS 118 Route de Narbonne 31062 Toulouse Cedex 9 4 INSERM U558 37, allées. Jules Guesde 31073 Toulouse Cedex Introduction La dimension « familiale » de la maladie dAlzheimre, caractéristique essentielle de cette affection, a été à lorigine du développement du concept de « répit » pour les aidants. La notion de répit dans la maladie dAlzheimer a ét édéfinie par certains auteurs comme la prise en charge temporaire physique, émotionnelle et sociale dune personne dépendante dans le but de permettre un soulagement de son aidant principal (Weber et al., 1993 ; Glimour et al., 2002). En effet, il a été mis en évidence, dans de nombreux travaux, que le « fardeau » que peut représenter la maladie dAlzheimer sur laidta nprincipal est souvent élevé et peut avoir un impact sur son niveau de stress, danxiété et d edépression (Andrieu et al., 2003 ; Gaugler et al., 2003 ; Zarit et al.,1998). Le « répit » est donc apparu comme une nécessité pour les cliniciens. Toutefois, les modalités de son organisation ont été très variables selon les pays. Définitions Le « répit » est généralement dénommé « respite care » dans la littérature anglophone. Les auteurs, le plus souvent Nord Américains, Britanniques ou Australiens distinguent plusieurs types de répit. Il faut souligner que dans la littérature Britannique, le terme de « short term care » est employé pour éviter celui de répit qui aurait, pour certains, une connotation négative. Cependant, le terme de « répit » (« respite care ») est accepté internationalement. Il se définit tout dabord comme un type de prise ne charge appartenant au groupe des « community-based support services ». Ce groupe hétérogène se décompose en aides à domicile (« in-home respite »), accueil en centre de jour (« day care ») (parfois de soir ou de nuit) et hébergement temporaire en maison de retraite ou à lhôpital (« institutional respite »). Lhébergement temporaire pouvant également se nommre « overnight respite ». Il existe deux grand type de centres de jour aux USA : les centres de jour de type médicaux (Medical Adult Day Center (ADS)) et sociaux (Social ADS), chacun offrant des programmes différents. Les travaux de la littérature comparant les différents types de programmes daccueil de jour sont également nombreux (Leistch et al., 2001 ; Burch et al., 2001). Il existe dautres formes de répit, comme le répit informel par les proches et la famille (« informal respite »), le répit en famille daccuiel (« host family respite) et le répit par video « video respite ». Enfin, il existe des travaux plus anecdotiques concernant « laccueil de nuit ». Ce dernier na jamais été évalué, mais il afait lobjet détudes qualitatives dans des revues soignantes (Treolar et al., 2001 ; Rosenheimer et al.,1995). Il est important de noter que le recours aux aides à domicile (IDE, auxiliaire de vie, aide ménagère, garde malade) est la forme de répit la plus utilisée aux Etats-Unis, alors que ce type daide nest pas considéré 1
comme du « répit » en France et en Europe. Nous nous intéresserons donc, dans ce travail, au répit en centre de jour et au répit en hébergement temporaire en maison de retraite. Les travaux concernant le répit à lhôpital et le répi ten tant que partie dune intervention multidimensionnelle seront également été considérés (cf partie méthodologie) Historique Le répit sest développé dans les années 1940 à Motnréal pour les sujets atteints de troubles psychiatriques et leurs proches. Après la seconde guerre mondiale, le premier « centre de jour » (initialement un hôpital de jour) pour les sujets âgés a ouvert en Grande-Bretagne. Ce type de structure sest ensuite développé, initialement associé et accolé à une maison de retraite (Jeon et al., 2005). Dans le même temps aux USA sont apparus les « centre de jour » ou « day care » pour les sujets âgés. Leur popularité sest accrue avec le mouvement de désinstitutionalisation des années 1960. Les premiers travaux de recherche sur ces centres de jour sont apparus dans les années 1970. Comme laccueil en centre de jour offrait la possibilité de déléguer laide, les chercheurs ont émis lhypothèse quil pouvait réduire la détresse émotionnelle et psychologique de laidant et donc, secondairement, retarder lentrée en maison de retraite. Ce sujet sest ensuite grandement développé dans les revues soignantes (Strang et al., 1999). Le répit a été présenté comme lunique intervention ciblant à la fois laidant et le patient (Strang et al., 1999 ; Thei set al., 1994). Toutefois, son efficacité a été par la suite très controversée, du fait dune part du caractère flou du cadre conceptuel de « répit » et dautre part des limites méthodologiques des principaux travaux conduits. (Mason et al., 2007 ; Lee et al., 2004) Les structures de répit se sont également développées en Europe et en France. Selon la Direction Générale de la Santé, il existait en France en 2005, 4085 places daccueil de jour et 2500 places dhébergement temporaire (DGS 2006, Inserm 2007). De façon plus récente, la fondation Médéric Alzheimer a recensé en 2007, 740 accueils de jour (soit 5297 places) et 563 établissements dhébergement temporaire (soit rpès de 1200 places) (Fondation Méderic, 2007). En France les centres de jour sont soit autonomes, soit rattaché à un EHPAD, un service daide et de soin à domicile ou à lhôpit.a lToutefois, en labsence de définition claire de leurs objectifs et de leurs missions, les modalités de fonctionnement et les prestations offertes par les structures de répit sont extrêmement disparates, en dépit du fait que plusieurs textes ont permis de mieux les circonscrire (Circulaire de 30 mars 2005, Lekeu et al., 2001 ; Stotlz et al., 2000 ; Longshaw et al., 2000). Actuellement et notamment en France, les objectifs ouvertement affichés des structures de répit, en particulier les accueils de jour, se veulent « thérapeutiques » pour le malade et de « soutien et soulagement » pour laidant (Menecier et al., 2008). Ceci est basé sur lhypotèhse selon laquelle le soulagement temporaire du rôle daidant pourrait diminuer le srtess et le fardeau de laidant et donc permettre de prolonger le maintien à domicile, c'est-à-dire retarder lentrée en institution, hypothèse quont examiné les principaux travaux del a littérature présentés ci-dessous.Méthodologie La stratégie de recherche a été conduite dans la base de données « Medline » et « Cochrane », avec les mots clés suivants : [respite] OR [respite care] OR [respite services] OR [support services] OR [community-based support services] OR [day care] OR [adult day care] OR [day care program] OR [institutional respite] OR [hospital respite] OR [short-term admission] AND [Dementia] OR "Alzheimer Disease"[Mesh])] AND [therapy] . Cette 2
recherché a porté sur la période allant de 1987 à 2008. Un total de 125 références répondant à cette stratégie a ensuite été étudié. Les articles ont été sélectionnés sur le contenu de leur abstract. Au final 76 articles ont été retenus et leurs références bibliographiques ont consultées. Les travaux originaux évaluant lefficacité du répti en centre de jour, en institution, à lhôpital et au sein dinterventions multidimensionnelles on tété étudiés. L« intervention multidimensionnelle » se définit comme lassociation de plusieurs types de répit entre eux (« respite package »), ou lassociation du répit à un autre ou plusieurs types dinterventions (soutien, éducation, information, conseil) (« multidimentional package »). Les méta-analyses portant sur les travaux conduits en population âgée démente ont également été étudiées (tableaux n°5). En revanche, les travaux de revue systématique ont été exclus (Shantz et al., 1995 ; Flint et al., 1995 ; MacNally et al., 1999 ; Roberts et al., 2000 ; Hanson et al., 1999). Deux méta-analyses ont également été exclues car les sujets âgés déments ne représentaient quune très petite proportion de la population des travaux étudiés dans celles-ci. (Sorensen et al., 2002 ;Yin et al., 2002 ). Les travaux portant sur le répit à domicile nont aps été étudiés. Les travaux reposant sur des comparaisons dans lesquelles le groupe contrôle bénéficie du répit en tant que « soin usuel » ont également été exclus (Droes et al., 2000 ; Droes et al., 2004). En préambule, nous nous sommes intéressés aux études portant sur les caractéristiques des personnes (patients et aidants) ayant recours aux structures de répit. Les résultats des travaux originaux sont ensuite présentés dans les tableaux (tableau 1, 2, 3 et 4) en fonction du type de répit étudié. Dans le corps du texte, les résultats seront présentés en fonction du critère de jugement étudié, concernant laidant ou le patient. Caractéristiques des patients et des aidants ayant recours aux structures de répit Il existe de nombreux travaux dans la littérature étudiant les motifs de recours des aidants aux structures de répit. Dune manière générale, les familles identifient le répit comme lun de leur plus grand besoin (Toseland et al., 2002). Cependant, même si le besoin de répit est bien présent, les structures de répit en elles-mêmes sont sous-utilisées (Toseland et al., 2002 ; Zarit et al.,1998), en particulier chez les malades jeunes (Luscombe et al.,1998). Trois hypothèses ont été avancées pour expliquer ce phénomène. Tout dabord, les structures de répit ne répondraient pas toujours aux attentes et besoins véritables des aidants. Ainsi, une étude Finoise étudiant ladéquation des services aux besions des aidants (dont le répit en maison de retraite) montre, chez 1943 aidants, que 39% seulement pensent que ces services répondent à leurs besoins et en sont satisfaits (Raivo et al., 2007). Dautre part, certaines études qualitatives montrent que les familles sous-utilisent les structures de répit car elles ont la conviction que cela peut occasionner plus de stress que de soulagement (Hanson et al., 1999 Strang et al., 1999 ; Smyer et al., 1999). En effet, certains auteurs ont mis en évidence que le temps passé à accompagner le patient au centre de jour pouvait être trop important (Gottlieb et al.,1995) par rapport au bénéfice attendu. Enfin, Dunkin et al pointent le besoin dinformation et déducation des aidants sur les bénéfices potenitels du répit, avant de pouvoir lutiliser de façon effective (Dunkin et al., 1998). Certains ont identifié des facteurs influençant lexpérience de laidant vis-à-vis du répit, tels uqe la nature de la relation préexistante, les attentes sur le rôle daidant, le type et la qualiét du répit proposé, et la durée quotidienne 3
passée en soin par laidant (Strang et al., 1999). En dernier lieu, le recours à ces structures peut saccompagner dun sentiment de culpabilité sv-ià-vis du proche, comme cela a été souligné dans certaines études qualitatives menées par les soignants (Hanson et al., 1999). Il existe également des travaux sintéressant aux acractéristiques des malades (Neville et al., 2002) et des aidants qui utilisent le répit (Tosleand et al., 2002 ; Biegel et al.,1993) en particulier en maison de retraite (Smyer et al., 1999) ou en maison de retraite et centre de jour (Cox et al., 1997). Dans létude américaine de Cox,il a été montré que les aidants les moins anxieux, ceux dont le fardeau est le plus élevé et ceux dont le proche à latteinte cognitive la plus sévère utilisent plus fréquemment les structures de répit (à domicile, accueil de jour et hébergement temporaire). Certains auteurs ont également mis en évidence que les aidants ont recours aux structures de répit assez tard dans lvéolution de la maladie (Lawton et al., 1989 ; Cox et al.,1997 ). Il semble toutefois que la précocité du recours au centre de jour ne retarde pas lentrée en institution (Gaugler et al., 2005.) Résultats Les tableaux présentent les résultats des travaux classés en fonction du type de répit proposé. -le tableau n°1 présente les résultats des études portant sur lacueil en centre de jour-le tableau n°2 présente les résultats des études portant sur lhébergement temporaire en maison de retraite -le tableau n°3 présente les résultats des études portant sur lhébergement temporaire à lhôpital -le tableau n°4 présente les résultats des études portant sur les interventions multidimensionnelles comprenant soit plusieurs types de répit à la fois soit du répit associé à dautre type dintervention (soutien, éducation, fionrmation, conseil) Les essais randomisés comparatifs sont présentés en premier dans chaque tableau, suivis des études quasi-expérimentales puis des autres types de travaux. Dans le corps du texte, les résultats sont présentés selon quils concernent laidant (paragraphe 1) ou le patient (paragraphe 2). RCT : Randomised Controlled Trial : Essai Randomisé Contrôlé (ou comparatif) 4
Tableau 1 : Résultats des études concernant le répit en centre de jourAuteur,DesignPopulationIntervention/duréeCritèresdejugementRésultatsAnnée BaumgartenRCTn=251sujetsâgés(>60ans)Patient : Pas de impact de laccueil en centre de jour sur lanxiété, la 2002 déments(saufstadesAccueilencentredejour,6heuresparjour-dépressivité(CESD=CenterforEpidemiologicStudiesdépression,nilestatutfonctionneldupatient.sévères)etnondéments1à2foisparsemainependant3mois.DepressionScale)Pasdimpactsurlefardeaudelaidant.(définisparunscore-anxiétésurlaSTAI(StateTraitAnxietyInventory)MMSE<22)Groupedecomparaison:sujetsinscritssurla-statutfonctionnel(MultidimentionalFunctionalAssessmentCoûtplusélevédanslegroupeinterventionmaisdifférence30/108sujetsMMSE<22listedattentepourladmissionencentredeScaledelOlderAmericanResearchandServices)nonstatistiquementsignificative.danslegroupeinterventionjour.Aidant : et26/104sujetsMMSE<22-fardeau(CaregiverBurdenInventorydeNovak)danslegroupecontrôle3moisCoût HedrickRCTPatient : Pas de impact de laccueil en centre de jour sur les critères 1993n=586aidantset826sujetsCentredejourdesvétérans-surviedejugementdupatientnidelaidant.âgésfragilesàrisque-autonomiefonctionnelle(ADL:ActivityofDailyLivingdinstitutionnalisation(etGroupedecomparaison:soinusuelKatz)parmi eux sujets ayant une -satisfaction atteintecognitivemaispas1anAidant : dediagnosticdedémence)-fardeausatisfaction -Coût QuayhagenRCTAccueilencentredejourpendant8Patient : Pas dimpact sur les critères de jugement du patient. 2000n=103couplespatientsemaines,4heures/semainepourlepatient-mémoireimmédiateetretardée,fluenceverbale,résolutiondéments/aidant(2X4heurespouraidant)RépitetactivitésdeproblèmesChezlaidant,unediminutionsignificativedelhstoilitéSujetsatteintsdedémencestructurées(activitésdesocialisation,Aidant : vis-à-vis du patient a été mise en évidence. par rapport aux (toutecause)possibleouactivitésdeloisirs,,exercicephysique,-degrédesatisfactionconjugale(MaritalNeedsSatisfactiontroisautresgroupes.probablelégèreamodéréeimplicationdanslacommunauté,sorties).Scale).(GDSetMattis)-statutémotionnel(BriefSymptomInventory)3groupesdecomparaison:autrestypes-humeur(GeriatricCenterMoraleScale).dinterventionsnonpharmacologiques-statutphysique(stimulationcognitive,conseil,soutien)3moisZankEtuden=148patients(démentsetAccueilencentredejour,8heuresparjour1Patient : Laccueil en centre de jour a montré un bénéfice sru le bien 2002quasi-nondéments)(79%deà5foisparsemaine+aidesàdomicile.-bienêtresubjectifquicomprendêtredupatientetlessymptômescognitifsdedémence.expérimentalepatientsdémentsdansle-leLifeSatisfactionQuestionnaireavant/aprèsgroupeinterventionet63%Groupedecomparaison:aidesàdomicile-lestimedesoiPasdedifférencesignificativesurlessymptômesnondanslegroupecontrôle)seulement-ladépression(MontgomeryandAsbergDepressionratingcognitifsdedémencenilestatutfonctionnel.scaleMADRS)5mois-symptômescognitifsdedémence(MMSEetNurembergPasdimpactsurlesvariablesdelaidant.Test)-symptômesnoncognitifsdedémence(MemoryandPrésencedanalysemutlivariées.BehaviorProblemchecklist)-Autonomie fonctionnelle (ADL) Aidant : 5