Métrique de l alexandrin d Yves Bonnefoy  : essai d analyse méthodique - article ; n°1 ; vol.49, pg 30-48
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Métrique de l'alexandrin d'Yves Bonnefoy : essai d'analyse méthodique - article ; n°1 ; vol.49, pg 30-48

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Description

Langue française - Année 1981 - Volume 49 - Numéro 1 - Pages 30-48
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 58
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Benoît de Cornulier
Métrique de l'alexandrin d'Yves Bonnefoy : essai d'analyse
méthodique
In: Langue française. N°49, 1981. pp. 30-48.
Citer ce document / Cite this document :
de Cornulier Benoît. Métrique de l'alexandrin d'Yves Bonnefoy : essai d'analyse méthodique. In: Langue française. N°49, 1981.
pp. 30-48.
doi : 10.3406/lfr.1981.5081
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1981_num_49_1_5081Benoît de Cornulier, Faculté des sciences de Luminy, Marseille
MÉTRIQUE DE L'ALEXANDRIN
D'YVES RONNEFOY :
ESSAI D'ANALYSE MÉTHODIQUE*
Une condition nécessaire et essentielle pour qu'une suite de mots soit un
vers au sens classique (un vers métrique) est qu'à certains égards elle soit,
d'une manière instinctivement sensible, exactement égale à une ou plusieurs
autres suites qui par réciprocité de l'égalité sont aussi des vers. La propriété
que des de mots doivent avoir en commun pour être collectivement
senties comme vers est ce qu'on appelle leur mesure. La plupart ou la totalité
des systèmes de versification connus dans diverses langues fondent l'égalité
métrique sur la structure syllabique, dont ils peuvent exploiter divers aspects,
selon, par exemple, que les syllabes sont pareilles ou opposées par l'accent,
la longueur, le ton. Si on donne au mot mesure son sens, décrire la mesure
d'un vers, ce n'est pas simplement décrire sa structure rythmique indivi
duelle et particulière, ni la décrire exhaustivement; c'est isoler, dans sa struc
ture rythmique, ce qui le rend égal d'une manière exacte et sensible à toutes
les suites de mots qui sont vers conjointement avec lui. C'est donc nécessai
rement décrire d'un seul coup la métrique de toutes ces suites que leur égalité
mutuelle constitue en vers.
Analyser métriquement un poème, ou même, quand c'est possible, un
ensemble cohérent de poèmes ou une œuvre, c'est déterminer quelles suites
de mots y sont égales à quelles autres comme vers, et sur quelle
propriété, dans chacune des classes ainsi définies, se fonde l'égalité des vers.
Dans une large mesure, on peut se fier à l'intuition pour faire l'analyse
métrique d'un poème ou même d'un ensemble cohérent de poèmes, principa
lement parce l'égalité métrique devant être sensible pour que les vers soient
vers, la nature de cette égalité est souvent évidente. Force est de constater
cependant que surtout depuis un ou deux siècles, les critiques littéraires et
métriciens français, qui ont presque tous en commun de fonder leurs analyses
métriques essentiellement sur l'intuition, sont très souvent en désaccord y
compris sur des points importants. Untel croit que le vers Waterloo, Waterl
oo, Waterloo, morne plaine (Hugo, « L'expiation ») est tout simplement du
* Version remaniée du chapitre 7 de mes Problèmes de métrique (pp. 349-372) qui la complètent sur
quelques points.
30 point de vue métrique un vers de « 12 syllabes », le fait d'avoir douze syl
labes suffisant à le justifier comme vers dans son contexte; pour tel autre, la
structure métrique d'un tel vers est d'avoir « six, puis six syllabes » (c'est à
peu près le point de vue des anciens métriciens, et le mien); pour tel autre, ce
vers est métriquement une suite de 4 segments de 3 syllabes chacun, et en
vertu de cette analyse est digne du noble nom de « tétramètre »; et cetera; ces
analyses, plus ou moins contradictoires, plus ou moins combinables entre
elles, sont assez souvent tenues pour évidentes par ceux qui les proposent. Il
suffit de les confronter, de constater leur profonde diversité, pour s'assurer
qu'elles n'ont en commun que d'être douteuses. L'analyse métrique du vers
français, du fait même de ces désaccords, doit être argumentée.
A propos de l'alexandrin chez un poète contemporain, Yves Bonnefoy,
je voudrais illustrer, fût-ce d'une manière partielle, une des manières dont on
peut étayer, si faiblement que ce soit, une analyse métrique. Une première
condition, non pas suffisante, mais nécessaire, pour fonder une analyse
métrique est de définir assez précisément l'ensemble des vers qu'on prétend
analyser, le « corpus ». Un corpus bien défini et accessible est justement
fourni par l'édition (1978) des Poèmes de Bonnefoy au Mercure de France;
y sont repris Y Anti-Platon (version de 1962, abrégée d'une version origi
nale de 1947), Du mouvement et de l'immobilité de Douve (version 1953
inchangée), Hier régnant désert (version originale 1958, reprise en 1970, à
peine retouchée ici), Dévotion de 1959), Pierre écrite
(version originale de 1965) et Dans le leurre du seuil (version originale de
1975). A l'intérieur de ce corpus j'ai essayé d'isoler une classe de « vers de
12 syllabes ». Comment justifier, dans un corpus donné, la pertinence d'une
telle classe? La question se pose vraiment; car on pourrait bien, par exemple,
isoler la « classe » des phrases du Code civil qui « ont 12 syllabes », mais quel
sens y aurait-il à le faire? Rien sans doute ne montrerait que ce nombre soit
pertinent, ni ne permettrait de trancher si une phrase qu'on peut prononcer
en 11, 12 ou 13 syllabes en a précisément douze, plutôt que onze ou treize
(ou l'inverse).
Dans les Poèmes, d'une manière générale (quoique avec quelques
variantes) on constate une mise en lignes, ou en paragraphes (ou en « para
graphes-lignes ») qui est traditionnellement associée au découpage en vers.
Tablant sur cette apparence (que je ne discuterai pas ici), je me suis imposé
de ne comparer la structure syllabique que des suites qui étaient des para
graphes-lignes ou « vers graphiques »; du fait de cette restriction, sont él
iminés à tort ou à raison de la présente étude un certain nombre d'assez plau
sibles « alexandrins », spécialement dans le « Théâtre » de Douve.
Sur quelle base peut-on juger que des vers graphiques ont un nombre
syllabique métriquement déterminé et pertinent? Il existe, d'abord, des cri
tères qu'on peut appeler externes; supposons par exemple que dans une
œuvre donnée, on trouve un grand nombre de vers graphiques qui ont 12 syl
labes, et très peu qui en ont 11 ou 13; c'est un indice de pertinence du nombre
1 2 ; si de plus les très rares vers qui admettent une interprétation 1 1 ou
1 3-syllabique admettent tous aussi une interprétation 12-syllabique, ce peut
être un indice qu'il faut les interpréter comme 12-syllabiques précisément. Si
au lieu d'un tel contraste on trouvait chez Bonnefoy une espèce de vague
courbe distributionnelle du genre : environ 900 vers « de 12 syllabes », envi
ron 950 vers « de 1 1 syllabes », 800 vers « de 13 », la major
ité des 1 1 ou 12-syllabes étant irréductibles au nombre 12, on ne serait pas
fondé pour si peu à parler avec sens (du point de vue métrique) de « vers de
31 12 syllabes » chez Bonnefoy. On peut imaginer bien d'autres espèces de cri
tères externes de pertinence métrique : par exemple, la régularité de distribu
tion (si les « vers de 1 2 syllabes » vont, par par groupes cohérents
ou strophes, c'est un indice de pertinence; si leur distribution est aléatoire,
ce n'en est pas un).
Il peut exister des critères « internes » de pertinence métrique d'un
nombre syllabique. Par exemple si tous les vers « de 12 syllabes » d'un poète
donné ont une limite de mots à une position déterminée, mettons, entre la
6e et la 7e voyelle, c'est un indice de ce qu'ils ne sont pas 12-syllabiques par
hasard — sous condition, bien entendu, que tous les vers non
n'aient pas une limite de mot au même endroit. La situation n'est pas si
simple chez Bonnefoy, qui ne versifie pas tout à fait comme Boileau, mais
enfin on verra que des considérations de ce genre, seulement plus variées et
nuancées, semblent autoriser à parler chez lui de « vers de 12 syllabes » et
même d'alexandrin. Ces critères de métrique interne sont le principal objet
de la présente étude, et de la méthode que j'y applique.
Je négligerai ici totalement l'argumentation « externe ». En fait, la pr&

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