Pour une histoire et une sociologie des pratiques d'évaluation en formation - article ; n°1 ; vol.63, pg 47-60

J.-M. Barbier

Description

Revue française de pédagogie - Année 1983 - Volume 63 - Numéro 1 - Pages 47-60
Une approche historique et sociologique des pratiques d'évaluation en formation peut-elle constituer le préalable d'une démarche d'identification de leurs fonctions et de leur mode de fonctionnement ? C'est la question que se pose le texte qui suit, qui n'a en rien pour objectif d'établir une historiographie de l'évaluation, mais qui se propose de formuler quelques hypothèses d'interprétation des conditions d'émergence et de développement de ces pratiques en formation. De l'énoncé de ce type d'hypothèses on escompte en effet que soit favorisée la mise au point d'outils permettant de mieux comprendre les pratiques contemporaines d'évaluation, dans leur complexité et la grande richesse de leurs formes et de leurs objets (1).
For a history and sociology of assessment procedures during training. - The author intends to formulate some interpretation hypotheses about -conditions of emergence and development of these procedures so as to help the realization of « tools able to let understand better the complexity and the variety of their shapes and objectives ».
Para una historia y una sociología de las practices de evaluación en formación. - El autor se propone formular algunas hipótesis de interpretación de las condiciones de emergencia y de desarrollo de estas practicas, con el objeto de favorecer la realización de instrumentes que permitan comprenderlas mejor en su complejidad y su riqueza de formas y objetos.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_FRANCAISE_DE_PEDAGOGIE
• Publié le: 01 janvier 1983
• Nombre de lectures: 47
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Mr Jean.-Marie Barbier
Pour une histoire et une sociologie des pratiques d'évaluation en
formation
In: Revue française de pédagogie. Volume 63, 1983. pp. 47-60.
Résumé
Une approche historique et sociologique des pratiques d'évaluation en formation peut-elle constituer le préalable d'une démarche
d'identification de leurs fonctions et de leur mode de fonctionnement ? C'est la question que se pose le texte qui suit, qui n'a en
rien pour objectif d'établir une historiographie de l'évaluation, mais qui se propose de formuler quelques hypothèses
d'interprétation des conditions d'émergence et de développement de ces pratiques en formation. De l'énoncé de ce type
d'hypothèses on escompte en effet que soit favorisée la mise au point d'outils permettant de mieux comprendre les pratiques
contemporaines d'évaluation, dans leur complexité et la grande richesse de leurs formes et de leurs objets (1).
Abstract
For a history and sociology of assessment procedures during training. - The author intends to formulate some interpretation
hypotheses about -conditions of emergence and development of these procedures so as to help the realization of « tools able to
let understand better the complexity and the variety of their shapes and objectives ».
Resumen
Para una historia y una sociología de las practices de evaluación en formación. - El autor se propone formular algunas hipótesis
de interpretación de las condiciones de emergencia y de desarrollo de estas practicas, con el objeto de favorecer la realización
de instrumentes que permitan comprenderlas mejor en su complejidad y su riqueza de formas y objetos.
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Barbier Jean.-Marie. Pour une histoire et une sociologie des pratiques d'évaluation en formation. In: Revue française de
pédagogie. Volume 63, 1983. pp. 47-60.
doi : 10.3406/rfp.1983.1891
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfp_0556-7807_1983_num_63_1_1891REVUE FRANÇAISE DE PEDAGOGIE N° 63 avnl-mai-juin 1 983, 47-60
Si nous convenons de désigner provisoirement l'éva
luation en formation comme un acte délibéré et social
ement organisé aboutissant à la production d'un jugement
de valeur et si nous nous interrogeons sur ses conditions
historiques d'apparition et de développement, il nous faut
POUR UNE HISTOIRE constater que tout se passe comme s'il n'y avait pas une
histoire de l'évaluation, mais deux, relativement parallèET UNE SOCIOLOGIE
les : DES PRATIQUES D'ÉVALUATION
— l'histoire des pratiques d'évaluation des personnes
EN FORMATION en formation ;
— l'histoire des pratiques d'évaluation des actions
en formation.
L'HISTOIRE DE L'EVALUATION DES PERSONNES EN
FORMATION
En première analyse, cette histoire paraît marquée
par trois faits : par J.-M. BARBIER
Une extension limitée des pratiques d'évaluation dans
les formes sociales pré-capitalistes.
Alors que, comme le note J. C. Passeron(2), le sys
tème d'enseignement de l'Antiquité a inventé un grand
nombre des instruments et des procédés sur lesquels
repose encore la formation scolaire moderne, il semble
que ni les écoles et enseignants indépendants de l'Anti
quité, ni les petites écoles de l'Ancien Régime n'aient
connu de système réglé d'examen ou de notation.
D'extension limitée, les pratiques d'évaluation des
personnes en formation n'ont pas pour autant été à l'abri
de sophistications éventuelles ; la preuve du contraire
nous est donnée par exemple par le système mandarinal
chinois et à un moindre degré par l'Université du Moyen-
Age, qui a inventé comme on le sait la plupart des gra
des universitaires modernes.
En fait dans les situations où ces pratiques apparais
sent et se développent elles semblent prendre significa
tion par rapport à la mise en place ou à la reproduction de
corps sociaux très spécifiques (fonctionnaires royaux, Une approche historique et sociologique des prati
administrateurs, conseillers, légistes, scribes, enseiques d'évaluation en formation peut-elle constituer le
gnants, médecins, etc.), se caractérisant notamment par préalable d'une démarche d'identification de leurs fonc deux traits : tions et de leur mode de fonctionnement ? C'est la quest
tout d'abord par l'exercice de tâches s'effectuant dans ion que se pose le texte qui suit, qui n'a en rien pour
le cadre d'une relation de subordination d'activité et, objectif d'établir une historiographie de l'évaluation, mais
apparemment, indépendamment de la détention préalable qui se propose de formuler quelques hypothèses d'inter
d'un capital matériel : tous ces corps sont en fait des corps prétation des conditions d'émergence et de développe
de fonctionnaires, agissant pour le compte de l'autorité ment de ces pratiques en formation. De l'énoncé de ce
royale ou impériale ; type d'hypothèses on escompte en effet que soit favorisée
ensuite par, une structure hiérarchique relativla mise au point d'outils permettant de mieux comprendre
ement formalisée comprenant différentes positions dont les pratiques contemporaines d'évaluation, dans leur
complexité et la grande richesse de leurs formes et de la distribution se révèle également indépendante de la
.détention d'un capital matériel à valeur marchande alors leurs objetsC\).
47 on voit se multiplier examens et diplômes, présentant que l'importance d'un tel capital constitue au contraire
notamment deux caractéristiques : un principe général de distribution des positions dans les
ensembles sociaux auxquels ils appartiennent (3) ; comme — Ils deviennent le lieu le plus tangible des liaisons
le note Piobetta(4), l'échec aux examens dans le sys entre enseignement et société.
tème mandarinat vouait les candidats malheureux à
C'est en effet d'abord par rapport à la sortie des sysl'exercice d'une profession « mercantile ». tèmes éducatifs et à l'entrée dans la vie sociale que se Tout se passe donc comme si dans les formes socia définissent leurs fonctions initiales : les bacheliers des les pré-capitalistes des pratiques d'évaluation des per lycées napoléoniens par exemple n'étaient pas à l'origine sonnes en formation tendaient à apparaître lorsque se de futurs étudiants, mais de futurs fonctionnaires ou trouvent réunies au moins deux conditions : une relative soldats. autonomisation d'un facteur « travail », et une différencia
Avec leur développement leur poids social tend tion de ce facteur dans l'exercice de fonctions dépendant
donc à s'accroître (8) ; dans certains cas ils deviennent le es et hiérarchisées. Lorsque ces deux conditions sont
pivot des hiérarchies sociales et la clé des carrières publiréunies, il semble que tende à se mettre en place un mé
ques ou privées. Aussi voit-on se renforcer de manière canisme de reconnaissance sociale des capacités person
continue le contrôle de l'état sur leur délivrance (9). nelles des individus concernés, en particulier sur les lieux
et dans les moments de leur formation. — Ils tendent à se subordonner l'organisation des
enseignements : avant d'être des plans d'études, les pr
ogrammes des classes touchées directement ou indirect
• Une généralisation de ces pratiques au moment ement par les diplômes deviennent des programmes d'exa
où s'organisent les grands systèmes éducatifs modernes. men, ce qui entraîne d'ailleurs le développement de pra
tiques ou de dispositifs extra-éducatifs ayant pour but la Alors que jusqu'à la fin du XVIII0 siècle, les disposit
conquête du diplôme par tous les moyens et qu'on a signi- ifs de scolarisation se présentaient comme parcellisés, ficativement désignés sous le terme de bachotage (10). peu clairement finalisés, et qu'il n'existait aucune légis Le diplôme tend à fonctionner comme le but de l'enselation sur les examens et concours en dehors des diverses
ignement et non comme le moyen de le contrôler. procédures fixées par les règlements locaux, significative-
ment on constate que les projets révolutionnaires de la Phénomène tout aussi important, ces transformat
seconde moitié du siècle réclament un système d'ense ions proprement scolaires ne s'effectuent pas de manière
ignement fondé tout à la fois sur l'ouverture à tous (ce qui isolée, mais en li