Recherches sur les processions blanches - 1583-1584. - article ; n°4 ; vol.1, pg 511-563
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Description

Histoire, économie et société - Année 1982 - Volume 1 - Numéro 4 - Pages 511-563
53 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Denis Crouzet
Recherches sur les processions blanches - 1583-1584.
In: Histoire, économie et société. 1982, 1e année, n°4. pp. 511-563.
Citer ce document / Cite this document :
Crouzet Denis. Recherches sur les processions blanches - 1583-1584. In: Histoire, économie et société. 1982, 1e année, n°4.
pp. 511-563.
doi : 10.3406/hes.1982.1305
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hes_0752-5702_1982_num_1_4_1305RECHERCHES SUR LES PROCESSIONS
BLANCHES - 1583-1584
parDenisCROUZET
L'histoire des relations de l'homme au Sacré dans la France moderne est ancrée
dans la trilogie. Mais si les cheminements idéologiques qui soustendent l'essor de la r
éforme protestante au XVIème siècle (1) et l'ébauche d'une déchristianisation au
XVIIIème siècle (2) ont fait l'objet d'études remarquables, le terme intermédiaire dans
la chronologie de la vie religieuse, l'horizon de la Réforme catholique, quoique cerné
dans les manifestations de ses gestes, de ses spiritualités et de ses structures d'encadre
ment (3), reste assez mal connu dans sa maturation de la fin du XVIème siècle. Pour
tant Marc Venard a démontré au sujet de l'église d'Avignon que nombre de traits de
dévotion postérieurs à 1570, soit inscrits dans la continuité et désormais orientés selon
les vues de la réforme tridentine (4), soit inaugurant de nouvelles formes d'exaltation
ou d'émotion, constituent une réponse face à l'hérésie, accentués ou instaurés «pour
la paix et la sécurité de la Sainte Eglise et pour la victoire des fidèles du Christ contre
les hérétiques et les ennemis...» (5). Dans une perspective semblable R.R. Harding a
reconnu, dans une séquence chronologique qui s'étend de 1567 à 1594, l'adéquation
entre la formation et la multiplication de confréries laïques et la naissance d'un nouvel
esprit catholique qui succède au traumatisme et au doute des années 1560 (6). Les
1. P. Chaunu, Le temps des Réformes. La crise de la Chrétienté, l'éclatement, 1250-1550, Paris,
1975, et Église, Culture et Société - Essais sur Réforme et Contre-Réforme, 151 7-1620, Paris, 1981 ;
J. Toussaert, Le sentiment religieux en Flandre à la fin du Moyen-Age, Paris, 1963 ; E.G. Leonard,
Histoire Générale du protestantisme, 3 vol., Paris, 1961 ; J. Delume au, Naissance et affirmation de la
Réforme, Paris, 1968 ; F. Rapp, L'Église et la vie religieuse en Occident à la fin du Moyen-Age,
Paris, 1971...
2. M. Vovelle , Piété baroque et déchristianisation en Provence au XVIIIème siècle, les attitudes
devant la mort d'après les clauses des testaments, Paris, 1973, et P. Chaunu, La mort à Paris, XVIème,
XVIIème et XVIIIème siècles, Paris, 1978.
3. R. Sauzet, Contre-Réforme et Réforme catholique en Bas-Languedoc au XVIIème siècle — le
diocèse de Nîmes de 1598 à 1694 (étude de sociologie religieuse), 2 volumes, Service de reproduction
des thèses, université de Lille III, 1978 ; D. Julia, «La Réforme posttridentine en France, d'après les
procès verbaux de visites pastorales. Ordre et résistances», dans La societa religiosa nell'eta moderna,
actes du Convegno de Cappucio, 1972, Naples, 1973 ; J. Delumeau, Le catholicisme entre Luther et
Voltaire, Paris, 1971 ;H. Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux, Paris, 1975.
4. M. Venard, L'église d'Avignon au XVIème siècle, Service de reproduction des thèses, université
de Lille III, 1980, t. IV, p. 1393.
5. Ibid., t. II, pp. 819-820.
6. R.R. Harding, «The mobilization of confraternities against the Reformation in France»,
n° 2, 1980, p. 103. Sixteenth century Journal, XI, 512 Denis CROUZET
confréries du Saint-Sacrement, de pénitents, du Rosaire, du Saint Nom de Jésus, se
constituent ou se renouvellent le plus souvent à l'initiative de la hiérarchie ecclésiasti
que, parfois avec l'accord des autorités municipales, en tant que pôles de résistance et
de réaction ; outre la volonté explicite d'inculquer la piété selon les lignes directrices
du concile de Trente et un tissu d'obligations défini à travers des statuts très précis, le
souci primordial est implicitement un véritable esprit de reconquête, souci d'organiser
et de regrouper dans un certain secret, parfois d'armer des groupes sociaux traditio
nnellement inorganisés. Parallèlement, dans leurs recherches actuelles, D. Richet et R.
Descimon voient dans les milieux dévots du XVIIème siècle beaucoup de solutions de
continuité avec la société parisienne de la Ligue. Il apparaît donc évident que l'implan
tation première de la Contre-Réforme est largement une résultante da la crise religieuse,
dans la dualité dynamique d'un combat sacralisé contre les forces diaboliques et d'un
besoin pathétique de processions, de pèlerinages, de culte de reliques, de prières, de pé
nitences, d'adhésion plus profonde au mystère christique. Cette intensification des
«pulsions d'adorer» (7) se traduit de plusieurs manières ; il y a bien sûr tout d'abord la
violence : à Montpellier les pénitents ne sont pas étrangers aux scènes d'agression du 4
août 1568 (8), tandis qu'à Aix à la même époque ils semblent avoir été les instigateurs
des massacres. Dans son Histoire de Marseille, A. de Ruffi rapporte que les protestants
de Marseille adressèrent à Coligny la «figure peinte d'un pénitent pour lui faire con
naître l'habit de leur persécuteur», tout en déclarant que tant qu'il y aurait des péni
tents, «il leur serait impossible» d'y prêcher la parole de Dieu et «d'y demeurer mêmes
en assurance» (10). La confrérie du St. Esprit de Maçon sera accusée par Coligny de
porter la responsabilité de multiples incidents violents, dont le meurtre du lieutenant
d'une compagnie d'ordonnance de d'Andelot (11). Les Saint-Barthélémy ne s'inscri-
vent-elles pas dans la trame d'une progressive recharge de l'adoration collective, tout
comme l'institutionnalisation de la violence à l'époque de la Ligue ? Les cycles d'agres
sions catholiques, 1562, 1572, 1589-93, sont comme les révélateurs d'une cristallisa
tion. Précisément, le cycle ultime fonde la problématique des lignes qui suivent, dans la
mesure où la Ligue tranche sur les comportements antérieurs du peuple catholique, où
elle est une cristallisation collective majeure, tant par sa durée que par ses formes. Tand
is que Paris en 1589 se plonge dans une dévotion hiérusalémite, à Marseille, sous la
dictature de Casaulx, en 1597, ce sont près de 4 000 personnes qui sont intégrées aux
12 confraternités, chiffre d'autant plus considérable que la ville ne compte que quelque
40 ou 45 000 habitants (12). Si le message que diffusent en chaire les prédicateurs dans
toute la France de 1589 est reçu de façon positive par une large frange de la populat
ion, c'est qu'il objective certaines anxiétés collectives, de l'image du royaume livré à
l'hérésie à la représentation du tyran barbare ; mais la révolte contre le Pouvoir corre
spond à une rupture si essentielle dans le psychisme du collectif que j'ai pensé intéres
sant de tenter de rechercher si, avant 1589, il n'y avait pas d'autres pulsions momentan
ées, conditionnant les déterminations et les principes de la spiritualité de la Ligue.
Certes le renouveau catholique, dans l'optique tridentine, est un fait reconnu à la mort
des Guise, mais il reste à établir par quel réseau causal, par quelles forces d'impulsion,
7. L'expression est d'A. Dupront, «La religion-anthropologie religieuse», in J. Le Goff et P. Nora,
Faire de l'Histoire, Paris, 1974, t. Ill, p. 111.
8. L. Guibert, Les confréries de pénitents en France et notamment dans le diocèse de Limoges,
Limoges, 1879, p. 25.
9. Ibid., p. 63.
10. A. de Ruffi, Histoire de Marseille, 2ème édition, Marseille, 1696, t. II, p. 89.
1 1. R.R. Harding, op. cit., p. 90.
12. Ibid., p. 93. PROCESSIONS BLANCHES 513
au-delà de paniques ou de haines immédiates, il a pu s'implanter et se différencier.
Dans la mesure où le matériau brut d'une anthropologie du Sacré tient, selon la formul
e d'A. Dupront, dans le «Sacral-objet», les processions et pèlerinages peuvent être <

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