Reliques et images de saint Galgano à Sienne (XIII-XVe siècles) - article ; n°28 ; vol.14, pg 93-112
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Description

Médiévales - Année 1995 - Volume 14 - Numéro 28 - Pages 93-112
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Lucie Gernez
Reliques et images de saint Galgano à Sienne (XIII-XVe siècles)
In: Médiévales, N°28, 1995. pp. 93-112.
Citer ce document / Cite this document :
Gernez Lucie. Reliques et images de saint Galgano à Sienne (XIII-XVe siècles). In: Médiévales, N°28, 1995. pp. 93-112.
doi : 10.3406/medi.1995.1326
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1995_num_14_28_1326Médiévales 28, printemps 1995, pp. 93-112
Lucie GERNEZ
RELIQUES ET IMAGES DE SAINT GALGANO À SIENNE
(XIII«-XVe SIÈCLE)
Le nom de « San Galgano » évoque aujourd'hui une abbatiale ci
stercienne échouée aux portes de la Maremme, à une trentaine de kilomèt
res au sud-ouest de Sienne. L'atmosphère romantique du lieu a inspiré
nombre d'artistes et, récemment, le cinéaste Andrei Tarkovsky a emprunté
le cadre de l'édifice pour poser en son centre la dernière image de son
film Nostalghia1 . Depuis quelques années les bâtiments de l'abbaye2
accueillent d'anciens drogués à la sortie de leur cure de désintoxication.
La nef est amarrée au pied d'une colline, le mont Siepi3 dans
une plaine cernée de bois. Sur le mont Siepi, une chapelle ronde abrite
une épée plantée dans la roche. L'épée, de facture récente, est la repro
duction de celle de saint Galgano.
L'ermite du mont Siepi
Galgano Guidotti était né en 1 148 à Chiusdino, un « castello » situé
à quelques kilomètres du mont Siepi, dans une famille de chevaliers4.
1. Andrei Tarkovsky, Nostalghia, 1983. Andrei Tarkovsky raconte avoir voulu
faire un film sur un Russe, Gortchakov, en long voyage d'études en Italie. Le cinéaste
écrit dans ses mémoires : « L'Italie que Gortchakov perçoit au moment de son tragi
que conflit avec la réalité... s'étale devant lui en ruines majestueuses, qui semblent
comme surgies du néant », dans Andrei Tarkovsky, Le temps scellé, Paris, Éditions
de l'Étoile/Cahiers du cinéma, 1989, p. 190.
2. Antonio Canestrelli, L'abbazia di San Galgano. Monografia storico-artistica
con documenti inediti e numerose illustrazioni, Florence, Fratelli Alinari Editori, 1896,
rééd. Pistoia, Tellini Editore, 1989. À côté de l'église abbatiale ouverte à tous les vents,
ont subsisté plusieurs parties du couvent.
3. Le mont Siepi, aujourd'hui dit « Poggio délia Cappella », culmine à une alt
itude de 345 m ; la chapelle est à l'altitude de 338 m (carte IGM 1/25 000 Chiusdino).
4. Franco Cardini, Leggenda di Santo Galgano Confessore, Sienne, 1982, p. 30.
(f° Dans 117v°), l'introduction un dessin à l'édition de Celso du Cittadini manuscrit, reproduisant l'auteur signale, les armes dans de la la marge famille du manuscrit Guidotti.
Franco Cardini les décrit ainsi : « campo d'oro alla banda di rosso ». Ces armes tra
duisent une appartenance chevaleresque. 94 L. GERNEZ
II est venu planter dans le roc son épée pour en faire une croix, choi
sissant ainsi le mont Siepi pour y mener une vie érémitique indépen
dante, sans se rallier à un ordre religieux. Il meurt en ce lieu en
décembre 1181.
L'évêque Ugo de Volterra, s'empresse alors de demander au pape
l'ouverture d'une enquête5, pour préparer la canonisation de l'ermite,
dont \a.fama était déjà largement répandue dans la région. Dès 1185,
trois prélats sont dépêchés par la curie papale. Parmi les vingt témoins,
paraît Dionigia, la mère de Galgano. Elle raconte la vie de son fils
unique, en insistant sur sa conversion. Galgano lui avait rapporté les
apparitions successives de saint Michel : l'archange incité Gal
gano à se faire chevalier, puis l'avait conduit sur le mont Siepi, là
où le jeune homme ficha son épée qui prit figure de croix, puis il
renonça au monde pour vivre une vie érémitique dans le désert sylves
tre de la Maremme toscane. À un moment, il prit conseil auprès des
disciples de Guillaume de Maleval, implantés au sud de la Maremme.
Puis, il partit en pèlerinage pour Rome. Il rendit visite au pape, peut-
être pour lui demander l'autorisation de fonder un ordre érémitique.
En retournant au mont Siepi, Galgano trouva son ermitage saccagé.
Avec l'aide des compagnons qui l'avaient rejoint, il construisit une
chapelle ronde où il replanta son épée.
Selon André Vauchez6, les témoignages recueillis pour démontrer
la sainteté de Galgano constituent le premier procès de canonisation
conservé. Toutefois, rien ne prouve que l'enquête ait débouché sur
une canonisation effective. Le texte a été rapporté par l'érudit sien-
nois Sigismondo Tizio dans ses Historiae Senenses ab initio urbis Sena-
rum usque ad annum 15281. Il est conservé à la Bibliothèque Com
munale de Sienne.
En 1220, Roland de Pise, moine cistercien, rédige une Vita de saint
Galgano, directement inspirée des témoignages de l'enquête. Puis la fin
du XIIIe et surtout le XIVe siècle voient la multiplication des « leg-
gende ». Ces textes en latin ou en langue vulgaire sont l'œuvre de rel
igieux florentins ou siennois, vallombrosans ou augustins. L'origine de
leurs auteurs confirme le caractère toscan du culte de saint Galgano.
Après Franco Cardini8 qui a édité la Vita augustinienne en lan
gue vulgaire, Eugenio Susi9 a édité la Vita cistercienne en latin. Les
5. Le texte de l'enquête a été publié par Fedor Schneider, « Der Einsiedler Gal-
gan von Chiusdino und die Anfânge von S. Galgan », Quellen und Forschungen aus
italianischen Archiven und Bibliotheken, XVIII, 1914-24, pp. 71-77, dans les notes sui
vantes, abrégé : Procès.
6. André Vauchez, La sainteté en Occident aux derniers siècles du Moyen Age
d'après les procès de canonisation et les textes hagiographiques, Rome, 1988, pp. 41-42.
7. Bibliothèque Communale de Sienne, B. III. 6-13 ; texte édité par Fedor Schnei
der, Procès.
8. Franco Cardini, op. cit., pp. 101-111.
9. Eugenio Susi, L'eremita cortese. San Galgano fra mito e storia nell'agiogra-
fia toscana del XII secolo, Spolète, Centro Italiano di Studi sull'Alto Medioevo, 1993.
pp. 185-213. Au début de son ouvrage, Susi répertorie les différentes sources écrites. RELIQUES ET IMAGES DE SAINT GALGANO À SIENNE 95
travaux des deux auteurs ont révélé les liaisons de la légende de saint
Galgano avec la tradition courtoise de la littérature chevaleresque10
et avec la tradition folklorique11.
À la mort de Galgano, le lieu de son ermitage est devenu un pôle
sensible de la piété populaire locale ; les guérisons, les libérations de
prisonniers12 réalisées par Termite, associées à son mode de vie, ont
concouru à la réputation des lieux et assuré la fama locale. Bientôt,
les compagnons de Galgano se dispersent en Toscane13, à l'exception
de trois disciples qui se joignent aux Cisterciens, venus fonder, au
pied du mont, un monastère. Achevée en 1224, l'abbaye prend le relais
de l'ermitage et s'intitule San Galgano. Le lieu, entre Chiusdino et
Monticiano, est en position frontière entre les terres de la commune
de Sienne et celles de l'évêque ou de la commune de Volterra. En
matière ecclésiastique, il relève de Volterra, au politique, de Sienne14.
Le monastère qui investit le lieu va tisser des liens serrés avec la com
mune de Sienne15 c'est-à-dire la puissance montante, et jouer un rôle
économique, administratif et religieux croissant. Dans le même temps
les ermitages se multiplient dans la Toscane méridionale16.
Dans ce contexte, au culte rural et populaire des reliques du saint
ermite, va peu à peu se juxtaposer l'élaboration d'un spectaculaire
10. Les exemples sont nombreux, nous en citons un : le nom même de Galgano,
Galvanus en latin, se rapproche singulièrement du nom de Gauvain. Dans les textes
ils sont tous deux blonds et jeunes et les parents de Galgano appartiennent à la che
valerie du « castello » de Chiusdino. L'aspect courtois de la légende de Galgano est
surtout mis en valeur dans les textes tardifs, par exemple dans l'épisode de la fiancée
Polissena de Civitella qui vient rendre visite à Galgano sur le lieu de son ermitage.
Cette scène est ciselée sur le reliquaire de la tête de san Galgano (Fig. 2) puis reprise
sur une tablette de bois peinte par Andrea di Bartolo. En

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