Remarques sur le mot et l'idée de Révolution - article ; n°1 ; vol.2, pg 42-55

Robert Pelloux

Description

Revue française de science politique - Année 1952 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 42-55
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

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• Publié le: 01 janvier 1952
• Nombre de lectures: 13
• Langue: Français
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Extrait

Monsieur Robert Pelloux
Remarques sur le mot et l'idée de Révolution
In: Revue française de science politique, 2e année, n°1, 1952. pp. 42-55.
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Pelloux Robert. Remarques sur le mot et l'idée de Révolution. In: Revue française de science politique, 2e année, n°1, 1952.
pp. 42-55.
doi : 10.3406/rfsp.1952.392114
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1952_num_2_1_392114sur Remarques
Le Mot et Idée de Révolution
ROBERT PELLOUX
IL
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nous nous demanderons si la révolution ainsi entendue est encore
concevable et possible dans les conditions techniques et écono
miques du monde actuel
Le mot de révolution est surtout employé par opposition au
mot de tradition et au mot évolution1 La tradition implique
une continuité qui exclut pas tout changement évolution impli
que des changements qui excluent pas toute continuité La révo
lution implique au contraire des changements plus profonds et
en même temps plus brutaux est-à-dire une rupture de con
tinuité Attachons-nous préciser ce que doivent être ces chan
gements et dans quel esprit ils doivent se faire pour que on
puisse parler de révolution Nous constaterons un pareil phéno
mène suppose en dehors éléments objectifs et concrets cer
taines dispositions subjectives un certain animus il est difficile
de préciser
La révolution suppose abord un changement profond dans
les institutions Un simple remplacement de personnel politique
ne suffit pas en pareil cas il peut avoir coup Etat il
pas révolution Les modifications survenues dans équipe gou
vernante intéressent la révolution que dans la mesure où elles
sont antécédent ou la suite un véritable bouleversement des
institutions La révolution affecte les institutions politiques mais
on con oit hui difficilement un pays puisse opérer des
changements purement politiques sans toucher son régime éco
nomique et social la Révolution de 1830 par exemple ne fut
guère un changement de dynastie Et est pourquoi les histo
riens et les sociologues contemporains insistent beaucoup sur cet
aspect de la question
est le lieu de rappeler la phrase par laquelle Mathiez com
mence étude de La Révolution fran aise Colin Les
Révolutions les véritables celles qui ne se bornent pas changer
les formes politiques et le personnel gouvernemental mais qui
transforment les institutions et déplacent la propriété cheminent
longtemps invisibles avant éclater au grand jour sous effet de
Sur le sens et la définition voir notamment BURDEAU Traité de science
politique no 275 et suiv. BURNHAM ère des organisateurs et
suiv. JANK VITCH Révolution et tradition Paris Janin 1947 RALEA
idée de révolution dans les doctrines socialistes thèse lettres Paris 1923
SoROKiN The Sociology of Revolution New York 1925 Robert Pettoux
quelques circonstances fortuites II est évident que parmi les
transformations opérées par la Révolution fran aise accession
des paysans la propriété été une des plus profondes et des
plus riches en conséquences Et longtemps semble-t-il on pu
considérer une révolution se dénnissait surtout en fonction du
régime de la propriété et de attribution du droit de propriété
puisque les propriétaires détenaient la fois le pouvoir écono
mique propriété de la terre propriété des entreprises industrielles
et commerciales et le pouvoir politique suffrage censitaire ou
quasi censitaire privilèges de droit ou de fait pour accès aux
fonctions publiques et aux postes de gouvernement
hui il en va différemment puisque le droit de pro
priété privée dans les pays où il subsiste ne accompagne pas
toujours de pouvoir économique dépossession des propriétaires et
des actionnaires par les administrateurs et les technocrates limi
tation de la libre gestion et des bénéfices par intervention de
Etat et accompagne de moins en moins de pouvoir poli
tique la force des trusts reste grande mais il ne faut pas
négliger la force des syndicats et de tous les groupements in
térêts Aussi est-il plus délicat autrefois de déterminer si
telles modifications dans le régime économique sont assez pro
fondes pour que on puisse parler de révolution Soit le fascisme
en Italie et le national-socialisme en Allemagne suffit-il que
Etat exerce un contrôle rigoureux nationalise certaines entre
prises dirige la production par le rationnement des matières pre
mières et une planification partielle édicté une législation sociale
apparemment favorable aux travailleurs pour que soient réalisées
les conditions économiques et sociales une révolution Plus
près de nous on peut invoquer exemple des nationalisations
fran aises on en félicite ou on le regrette il faut recon
naître elles ont en rien revêtu le caractère une mesure
révolutionnaire et la situation du personnel des entreprises natio
nalisées est pas essentiellement différente de ce elle était
auparavant
Si les changements considérés doivent être assez profonds il
faut aussi pour on puisse légitimement les qualifier de révolu
tionnaires ils se soient réalisés avec rapidité avec brusquerie
voire avec violence Les sociétés humaines évoluent la plupart
du temps suivant ce mouvement lent et uniforme dont parlait
Hauriou dans la préface de son Précis de droit constitutionnel
2e éd Mais de temps autre il se produit une accélération
kk Le Mot et Idée de Revolution
un rapide de histoire suivant la formule que Jacques
Madaule employait un jour pour définir les révolutions Les évé
nements se précipitent parfois ailleurs parce une lente évo
lution antérieure les préparés et des bouleversements profonds
et décisifs se produisent en un temps extrêmement court on
se rappelle la densité des événements survenus et des réformes
réalisées en cinq ans de Révolution fran aise on pense la
densité de histoire russe de 1917 1924 environ
Ces changements rapides sont aussi des changements brusques
II rupture de ordre juridique antérieur proclamation solen
nelle un ordre nouveau qui ne se rattache pas juridiquement
ancien exemple les Etats-Généraux se proclament Assemblée
nationale constituante et jurent de ne pas se séparer avant avoir
donné une Constitution la France Les juristes qui ont étudié
les effets juridiques des révolutions se sont généralement attachés
cette rupture de continuité juridique pour définir la notion Mais
là aussi dès difficultés sont possibles Devons-nous refuser le
caractère de révolutions tels bouleversements contemporains
supposer ils réunissent les autres conditions requises pour la
seule raison ils se sont opérés au début au moins dans la
légalité ex avènement du national-socialisme en Allemagne
Ces changements rapides et brusques quand bien même ils
ne marquent pas une rupture complète avec ordre juridique
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