Rituels et identité culturelle iatmul (Vallée du Sépik - Papouasie Nouvelle-Guinée) - article ; n°2 ; vol.79, pg 131-148
19 pages
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Rituels et identité culturelle iatmul (Vallée du Sépik - Papouasie Nouvelle-Guinée) - article ; n°2 ; vol.79, pg 131-148

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Description

Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient - Année 1992 - Volume 79 - Numéro 2 - Pages 131-148
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 82
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Christian Coiffler
Rituels et identité culturelle iatmul (Vallée du Sépik - Papouasie
Nouvelle-Guinée)
In: Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Tome 79 N°2, 1992. pp. 131-148.
Abstract
Iatmul Rituals and Cultural Identity (Sepik Valley, Papua New Guinea)
by Christian Coiffier
In the valley of the Sepik the inhabitants of the village of Yentchen organise for passing groups of tourists a spectacle which the
tour guides say is a "traditional ritual". The detailed description of the various component elements of this spectacle show that it is
indeed a reflection of the basic institutions of the community, but comparison with real rituals reveals the inaccuracy of the term
"traditional ritual". By linking the elements of the performance to three regional myths, however, the author demonstrates that the
novel aspects thereof constitute a strategy enabling both the living and the dead to play a role in the perpetuation of the villagers'
cultural tradition.
Citer ce document / Cite this document :
Coiffler Christian. Rituels et identité culturelle iatmul (Vallée du Sépik - Papouasie Nouvelle-Guinée). In: Bulletin de l'Ecole
française d'Extrême-Orient. Tome 79 N°2, 1992. pp. 131-148.
doi : 10.3406/befeo.1992.1875
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/befeo_0336-1519_1992_num_79_2_1875et identité culturelle iatmul Rituels
(Vallée du Sépik - Papouasie Nouvelle-Guinée)
Christian COIFF1ER
Introduction
Les Iatmul 1 forment une société d'environ 10 000 horticulteurs-pêcheurs installés
depuis au moins deux siècles sur un vaste territoire marécageux baigné par le cours
moyen du fleuve Sépik (situé au nord-ouest de l'État de Papouasie Nouvelle-Guinée).
Ils se différencient eux-mêmes en trois groupes qui possèdent chacun leurs institutions
spécifiques 2, les Nyaura en amont du fleuve, les Palimbeï au centre (auxquels appart
ient le village de Yentchen, où se situe le spectacle décrit ci-dessous) et les Woliagwi
en aval. Leurs villages et leurs jardins sont édifiés sur des plates-formes limoneuses
constituant les berges temporaires du fleuve. Ils échangent leur surplus de poisson
contre de la farine de sagou produite par leurs voisins arboriculteurs vivant dans les
marécages situés en arrière du lit principal du fleuve (les peuples Sawos au nord et les
peuples de la région des lacs : Chambri, Blackwater et Kovenmas au sud) (cf. figure 1).
Jusqu'à la dernière guerre mondiale, ces divers groupes étaient en conflit perman
ent. La « chasse aux têtes » faisait partie d'un ensemble complexe de rituels reposant
sur le principe dualiste de la division du macrocosme comme du microcosme. Les têtes
ainsi appropriées étaient censées assurer la prospérité des diverses communautés. Les
villages actuels sont toujours divisés en deux moitiés totémiques patrilinéaires endo-
games : d'un côté, la moitié Nyamenemba associée à la terre et à la nuit, de l'autre, la
moitié Nyawinemba associée au soleil et au jour, mais cette division s'est parfois alté
rée. Chaque village, équivalent symbolique d'un crocodile, possède au moins une
grande maison cérémonielle qui est le centre rituel de la communauté. Celle-ci, située
au milieu d'une longue place, est réservée aux hommes initiés. Elle est divisée en moit
iés totémiques (ndamangeko et ngumbungeko), partagées elles-mêmes en deux sub
moitiés initiatiques (Bateson, 1971 : 251) opposées lors des rites d'initiation, l'une étant
alternativement l'aînée de l'autre ; la mort de la majorité des membres de la classe la
plus élevée des tshidjali provoquant l'alternance (Coiffier, 1993 : I, 3.1). Les moitiés
totémiques sont divisées respectivement en clans patrilinéaires subdivisés chacun en un
certain nombre de paires de sous-clans exogames dont la filiation remonte à une paire
de frères, un de ces clans étant toujours l'aîné de l'autre (cf. figure 2). Une lignée est
1 . Le terme iatmul a été utilisé par Bateson pour désigner un groupe linguistique non austronésien
appartenant à la famille ndu. Ce groupe est dispersé sur environ 100 kilomètres et se reconnaît comme
une entité distincte de ses voisins sous le nom de Iatmuliambonaï (Korn, 1977 : 193). Le sous-clan
Iatmul, présent dans divers villages, ne représente qu'un des nombreux sous-clans composant le peuple
iatmul.
2. « II y a, néanmoins, plusieurs variations locales : détails superficiels, mais aussi différences très
nettes dans le système de parenté, le système clanique et l'organisation de la vie cérémonielle »
(Bateson, 1932a : 450, cité par F. Korn, 1977 : 193).
BEFEO 79.2 (1992), p. 131-148. 132 Christian Coiffier
toujours divisée en deux mbapma, suivant le principe des générations alternées regrou
pant grands-pères et petits-fils.
Les villages, rituellement plus ou moins autonomes, possèdent leur propre organi
sation et sont militairement indépendants. Des coalitions peuvent se former pour mener
une action de représailles contre un autre village. S'il n'y a pas de chefferie comme en
Polynésie, ce sont les hommes les plus anciens des lignages, les tshidjali (appelés en
pidgin big men)3, appartenant à l'échelon le plus élevé du système initiatique, qui
prennent les décisions concernant la communauté après d'âpres discussions autour d'un
tabouret d'orateur. Ce tabouret, dont le dossier figure toujours un personnage masculin,
est plutôt une sorte d'autel situé près du pilier central de la maison cérémonielle (Coiff
ier, 1992 : 46). Il marque l'unité de l'ensemble des composantes claniques de celle-ci.
Lors des cérémonies, la face du personnage est décorée de fleurs d'hibiscus rouges et
blanches, emblèmes des deux moitiés de la communauté qui ont construit cette maison
(Coiffier, 1993 : III, 2.5). Toutefois, le tshidjali responsable de la maison cérémonielle
joue parfois un rôle prépondérant en tant que chef de l'Assemblée des anciens et assiste
le council, représentant élu du village, dans la nouvelle organisation administrative de
l'État papou. L'ensemble des institutions villageoises est ainsi organisé suivant un
schéma dualiste allant de pair avec un monisme sous-jacent. Les Iatmul conçoivent sans
ambiguïté qu'un élément puisse être à la fois double et unique, comme les esprits ances-
traux des eaux, les wagan. Toute chose possède son double ou son reflet.
Depuis une trentaine d'années, de nombreuses familles se sont expatriées et instal
lées dans les villes de la côte nord-est du pays. Au village, l'argent provenant de celles-
ci tend à substituer lentement une économie de marché de produits manufacturés au
système traditionnel d'échanges.
Le rituel chez les Iatmul. Définition du terme mbangu
Jadis, la vie communautaire des Iatmul était rythmée par de très nombreuses céré
monies qui permettaient à ces derniers de s'intégrer étroitement à leur univers. Depuis
les débuts de la colonisation, voici maintenant une centaine d'années, le nombre des
rituels pratiqués a considérablement diminué. Ce phénomène est lié particulièrement à
deux traumatismes : l'interdiction par l'administration australienne des guerres inte
rethniques et de la « chasse aux têtes » à la fin des années 20 et l'émigration temporaire
des jeunes hommes comme travailleurs sous contrat dans les plantations de Nouvelle-
Bretagne (Bateson, 1971 ; Coiffier, 1985). Le recrutement intensif, qui priva pendant de
nombreuses années certains villages de leur population masculine, fut encouragé par les
administrations coloniales successives. La vie cérémonielle étant organisée principa
lement par les guerriers, le système initiatique et les nombreux rituels qui lui étaient liés
tombèrent rapidement en désuétude par manque d'acteurs et de main-d'œuvre. La
guerre du Pacifique, avec l'invasion japonaise et les combats qui s'ensuivirent, fut peu
propice au rééquilibrage de cette vie cérémonielle. Le développement des missions et la
poursuite du recrutement après cette guerre achevèrent de perturber profondément les
représentations iatmul, principalement dans la région est. Cependant, un certain nombre
de rituels relatifs aux ancêtres contin

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