De la géographie des grandes endémies à la géographie de la santé et à la géographie tout court : vingt ans de travaux de l'ORSTOM en Afrique. - article ; n°1 ; vol.13, pg 59-65

Gérard Salem, Pascal Hand-Schumacher, Jean-Pierre Hervouët, Frédéric Paris

Description

Espace, populations, sociétés - Année 1995 - Volume 13 - Numéro 1 - Pages 59-65
Des études sur les grandes endémies à l'analyse des relations entre urbanisation et santé, les recherches en géographie de la santé constituent un fil directeur des travaux menés à l'ORSTOM en Afrique. Mais, loin de devenir une discipline autonome, la géographie de la santé s'est de plus en plus affirmée comme une façon comme une autre de faire de la géographie : la géographie des grandes endémies est inséparable des modes d'occupation de l'espace, de même que les différentiels d'état de santé en ville sont liés aux formes de ségrégation spatiale et de territorialisation. En retour, la démarche et les méthodes des géographes contribuent à des avancées décisives dans l'étude épidémiologique des problèmes de santé qui affectent le Tiers Monde.
From Geography of Great Endemic Diseases to Geography of Health and to Geography : Twenty Years of orstom's Research in Africa.
From the studies on the great endemic diseases to the analysis of the relationships between urbanization and health, research into geography of health has always been a main theme of the work run in Africa by the ORSTOM researchers. But, far from being an independent discipline, geography of health has always been asserting itself only as a way of doing geography : geography of great endemic diseases cannot be isolated from human occupation forms, as differential health conditions are linked to spatial segregation forms and to territorialization. In return, geographers' processes and methodologies are contributing to decisive progress in epidemiological study on health problems in the developing countries.
7 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: ESPACE-_POPULATIONS-_SOCIETES
• Publié le: 01 janvier 1995
• Nombre de lectures: 25
• Langue: Français

Extrait

Jean-Pierre Hervouët
Pascal Handschumacher
Frédéric Paris
Gérard Salem
De la géographie des grandes endémies à la géographie de la
santé et à la géographie tout court : vingt ans de travaux de
l'ORSTOM en Afrique.
In: Espace, populations, sociétés, 1995-1. La géographie de la santé en question. pp. 59-65.
Résumé
Des études sur les grandes endémies à l'analyse des relations entre urbanisation et santé, les recherches en géographie de la
santé constituent un fil directeur des travaux menés à l'ORSTOM en Afrique. Mais, loin de devenir une discipline autonome, la
géographie de la santé s'est de plus en plus affirmée comme une façon comme une autre de faire de la géographie : la des grandes endémies est inséparable des modes d'occupation de l'espace, de même que les différentiels d'état de
santé en ville sont liés aux formes de ségrégation spatiale et de territorialisation. En retour, la démarche et les méthodes des
géographes contribuent à des avancées décisives dans l'étude épidémiologique des problèmes de santé qui affectent le Tiers
Monde.
Abstract
From Geography of Great Endemic Diseases to Geography of Health and to Geography : Twenty Years of orstom's Research in
Africa.
From the studies on the great endemic diseases to the analysis of the relationships between urbanization and health, research
into geography of health has always been a main theme of the work run in Africa by the ORSTOM researchers. But, far from
being an independent discipline, geography of health has always been asserting itself only as a way of doing geography :
geography of great endemic diseases cannot be isolated from human occupation forms, as differential health conditions are
linked to spatial segregation forms and to territorialization. In return, geographers' processes and methodologies are contributing
to decisive progress in epidemiological study on health problems in the developing countries.
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Hervouët Jean-Pierre, Handschumacher Pascal, Paris Frédéric, Salem Gérard. De la géographie des grandes endémies à la
géographie de la santé et à la géographie tout court : vingt ans de travaux de l'ORSTOM en Afrique. In: Espace, populations,
sociétés, 1995-1. La géographie de la santé en question. pp. 59-65.
doi : 10.3406/espos.1995.1671
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/espos_0755-7809_1995_num_13_1_1671HERVOUET* GIP-ORSTOM Jean-Pierre
17, rue Abbé de l'Epée Pascal HANDSCHUMACHER*
34 000 Montpellier Frédéric PARIS* ORSTOM Gérard SALEM* Centre de
911, Avenue Agropolis
BP5045
34032 Montpellier Cedex 1
* Géographes de l'ORSTOM
De la géographie des grandes endémies à la
géographie de la santé et à la géographie tout
court: vingt ans de travaux de l'ORSTOM en
Afrique
S'il est un lieu où l'état de santé de la popul les recherches menées à l'ORSTOM.
ation semble plus déterminé aux conditions La date de naissance de la géographie de la
générales du milieu que partout ailleurs, santé à l'ORSTOM est cependant imprécise,
c'est bien l'Afrique: de Sorre à Burkitt, de bien des recherches d'inspiration géographi
Lapeysonnie à Jammot, une attention soute que ayant été menées sous d'autres appella
nue a toujours porté aux relations entre gran tions [1, 6], qu'il s'agisse de travaux d'en
des endémies africaines et milieu géogra tomologistes, attentifs aux conditions du mi
phique. lieu naturel, de nutrionnistes, intéressés à la
Sans doute est-ce pour cette raison que les production agricole, ou simplement de géo
recherches en géographie de la santé consti graphes, traitant de problèmes de santé
tuent un aspect non négligeable de la géo dans le cadre de recherches plus générales
graphie africaniste, comme en témoignent [5, 14, 15].
LES ETUDES MENEES SUR LES GRANDES ENDEMIES EN ZONE RURALE
Etudier les modes d'occupation de l'e pant au programme de lutte contre l'oncho
space pour comprendre l'onchocercose cercose, ont notamment permis d'élaborer
Le premier programme de géographie de la une critique de la valeur géographique des
santé proprement dit fut celui de J.P. données entomologiques et parasitologiques
Hervouët, en 1976, intitulé «Ecologie hu disponibles et de mettre en évidence des cor
rélations importantes entre systèmes agraimaine des vallées dépeuplées par l'oncho
cercose». La perspective géographique res [10], densités humaines supportées par
les terroirs riverains des vallées et gravité adoptée permit de reconsidérer l'endémie
onchocerquienne dans ses relations avec les de l'atteinte par la cécité des rivières [11].
modes d'occupation de l'espace [7, 9]. Les Le renforcement de l'équipe géographique
collaborations rapidement établies avec des fin 1979 par un nouveau chercheur, permit
d'élargir les champs d'investigation aux val- collègues de formation biomédicale 60
lées de la Bougouriba, de la Volta Noire et d'intensification de l'agriculture, modulant
de la Léraba. Un élargissement du champ le degré d'exposition individuelle des indi
spatial et une investigation historique plus vidus aux piqûres. Dans le même temps, F.
approfondie permirent de multiplier les s Paris soupçonnait le rôle des mobilités hu
ituations et les scénarios de peuplement des maines internes à leurs aires ethniques dans
vallées soudaniennes. Cela permit de relati la distribution spatiale de la maladie loin
viser les conclusions quantitatives obtenues des lieux de transmission [12], montrant
sur les bassins des Volta Blanche et Rouge ainsi un peu plus encore mode d'organi
en montrant, par exemple, que si des seuils sation sociale, mode d'occupation de
de densités de peuplement préservant les l'espace et état sanitaire.
populations d'une onchocercose grave exis Les premiers foyers étudiés étant sous con
taient presque partout, ils étaient beaucoup trôle du programme o.C.P. [68], on n'y trou
plus élevés sur la Bougouriba et la Volta vait plus le vecteur de la maladie, la recher
Noire [12, 13]. Ainsi l'impact des systèmes che s'effectuait, dans une certaine mesure,
d'occupation de l'espace sur les niveaux sur des «foyers fossiles»: un certain nombre
d'endémicité fut confirmé ainsi que les dis de phénomènes épidémiologiquement im
parités épidémiologiques existant entre portants ne pouvaient plus y être étudiés,
«foyers» et surtout au sein des mêmes bas tels que la dispersion des simulies en fonc
sins hydrologiques [7]. tion des activités humaines et les différen
Le débat concernant le poids du rôle de l' on ciations spatiales en découlant, ou tels que
chocercose dans les dynamiques de peuple les comportements de chasse des vecteurs
ment des vallées [14, 15] restait malgré tout en fonction de la présence plus ou moins
ouvert, mais il était démontré que la mala pérenne des hommes.
Les travaux menés sur la géographie de l' ondie n'était pas un phénomène inéluctable et
que sa gravité sociale était largement dépen chocercose ont également mis en évidence
dante de la gestion des terroirs et du degré que ces vallées étaient des espaces d'inter
de maîtrise des sociétés sur leur environne actions pathologiques où étaient intervenues
- et où pouvaient encore intervenir - d'autres ment. A propos du «mystère géographique
du vide humain des vallées soudaniennes», pathologies liées aux espaces humides
Paris [17] a notamment développé l'idée que comme la maladie du sommeil (1), ou la
les systèmes d'occupation de l'espace privi fièvre jaune (2). En termes géographiques,
mieux cerner le rôle de l' onchocercose légiant les sommets d'interfluves plus que
les vallées répondaient à des logiques d'une part et la place d'autres pathologies
sécuritaire et alimentaire, et que cette att dans le façonnement des «vallées»
itude délibérée de retrait vis-à-vis des vallées soudaniennes impliquait des changements
conditionnait les interactions pathologiques d'échelles et de lieux et le développement
des grandes endémies à vecteurs sylvatiques. de nouveaux programmes.
Les travaux réalisés par Hervouët, Prost