L'adhésion des lycéennes de terminale C au modèle de l'excellence scolaire - article ; n°1 ; vol.16, pg 7-26

Pierre Merle

Description

Sociétés contemporaines - Année 1993 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 7-26
In France, The maths track, leading to the « С » high school degree, « baccalauréat » is traditionally considered to be the path to excellence. In this section, the proportion of female teenagers is considerably lower than males. A survey of high school seniors by questionnaires has led us to assume that female teenagers choosing the maths track are compelled to adopt a pattern of educational excellence : if they want to compete with their male counterparts in maths and scientific subjects, they still have to stick to high standards in the humanities and in litterary subjects in order to keep the door open for an eventual access to female jobs.
La forte valeur scolaire dont est investie socialement la section С de l' enseignement secondaire incite à s'interroger sur la sous-représentation des filles. L'étude menée à partir ď une enquête par questionnaire auprès d'élèves de terminale С permet de formuler l'hypothèse selon laquelle les lycéennes scolarisées en cette terminale seraient dans la nécessite sociale d'adopter un modèle ď excellence scolaire : concurrencer les garçons dans les matières scientifiques ne les dispense pas de préserver leur valeur scolaire dans les matières littéraires de se garder la possibilité d'une réorientation dans les domaines de compétences afin de se garder la possibilit traditionnellement dévolus aux femmes.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: SOCIETES_CONTEMPORAINES
• Publié le: 01 janvier 1993
• Nombre de lectures: 20
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Pierre Merle
L'adhésion des lycéennes de terminale C au modèle de
l'excellence scolaire
In: Sociétés contemporaines N°16, Décembre 1993. pp. 7-26.
Abstract
In France, The maths track, leading to the « С » high school degree, « baccalauréat » is traditionally considered to be the path to
excellence. In this section, the proportion of female teenagers is considerably lower than males. A survey of high school seniors
by questionnaires has led us to assume that female choosing the maths track are compelled to adopt a pattern of
educational excellence : if they want to compete with their male counterparts in maths and scientific subjects, they still have to
stick to high standards in the humanities and in litterary subjects in order to keep the door open for an eventual access to female
jobs.
Résumé
La forte valeur scolaire dont est investie socialement la section С de l' enseignement secondaire incite à s'interroger sur la sous-
représentation des filles. L'étude menée à partir ď une enquête par questionnaire auprès d'élèves de terminale С permet de
formuler l'hypothèse selon laquelle les lycéennes scolarisées en cette terminale seraient dans la nécessite sociale d'adopter un
modèle ď excellence scolaire : concurrencer les garçons dans les matières scientifiques ne les dispense pas de préserver leur
valeur scolaire dans les matières littéraires de se garder la possibilité d'une réorientation dans les domaines de compétences afin
de se garder la possibilit traditionnellement dévolus aux femmes.
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Merle Pierre. L'adhésion des lycéennes de terminale C au modèle de l'excellence scolaire. In: Sociétés contemporaines N°16,
Décembre 1993. pp. 7-26.
doi : 10.3406/socco.1993.1138
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/socco_1150-1944_1993_num_16_1_1138♦ ♦♦♦♦♦♦ řlllll MHLI ♦ ♦♦♦♦♦♦
L'ADHÉSION DES LYCÉENNES DE TERMINALE С
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La « variable sexe » a été longtemps reléguée au rang de variable de contrôle
dans les analyses quantitatives, au même titre, et en quelque sorte au même niveau,
que l'âge ou le diplôme. L'usage sociologique de cette variable sexe favorise
actuellement les approches transversales, le déplacement et la ге-définition partielle
des frontières disciplinaires. Ainsi, la Famille, l'École, le Travail ne peuvent être
considérés comme des objets sociologiques autonomes que s'ils sont construits sur
ce qu'il est pudiquement possible d'appeler un oubli : l'inégalité sociale des rapports
de sexe. Fr. de Singly (1982, 1987), M.-A. Barrère-Maurisson (1984) et
M. Duru-Bellat (1990) notamment ont montré tout l'intérêt d'une mise en relation
des champs : certains aspects du familial, du scolaire et du fonctionnement du marché
du travail ne peuvent être totalement appréhendés que par la prise en compte des
complémentarités organisationnelles qui régissent la structuration sociale
apparemment autonome de chacun de ces objets d'étude. Une recherche sur les
lycéennes scolarisées en terminale C, leurs rapports aux études, leurs comportements
en classe et leurs projets scolaires exigent, lorsque se pose la question de
l'interprétation des données recueillies, de rapporter les comportements déclarés aux
modes d'organisation et de fonctionnement du marché du travail, du système éducatif
et de l'institution familiale.
Plusieurs objectifs ont guidé la construction et l'interprétation des données. Les
études sur les comportements scolaires se sont focalisées d'abord, et depuis assez
longtemps, sur les écoles maternelle et primaire et le premier cycle, et ces niveaux
1 . Je remercie Michèle Ferrand de sa lecture critique d'une première version de ce texte.
Sociétés Contemporaines (1993) n "16 (p. 7-26) PIERRE MERLE ♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦♦
de scolarisation restent un domaine de recherche très actuel comme en témoignent
des travaux récents tels ceux de Sirota (1988), Grisay (1992), Terrail (1992), Felouzis
(1993). A contrario, l'étude des comportements scolaires en lycée constitue un
champ d'investigation relativement neuf et davantage en cours d'exploration
(Galland, 1988 ; Dubet, 1991 ; Baudelot et Establet, 1992) en raison sans doute de
Г accroissement exponentiel des effectifs lycéens au cours des années 1980 et du
renouveau concomitant de la question de la démocratisation de l'enseignement. Un
des objectifs de cette recherche est de chercher à connaître la durabilité des
comportements scolaires des filles observés dans les petites classes du primaire et
du collège : l'excellence dans l'exercice du métier d'élève est-elle durable ?
L'ambition professionnelle constatée au niveau du collège (Terrail, 1992) s'est-elle
effritée ou affirmée ? Et comparativement, les garçons qui sont scolarisés en
terminale С exercent-ils leur métier d'élève comme les autres garçons ou un modèle
univoque et asexué de l'excellence scolaire s'impose-t-il à l'ensemble des lycéens
de la « voie royale »? Il s'agit donc de confirmer, d'invalider partiellement et de
compléter éventuellement les raisons déjà avancées (Galland, 1988 ; Aebischer,
1991 ; Duru-Bellat, 1991 ; Marro et Vouillot, 1991) pour comprendre le rapport
spécifique des filles à l'institution scolaire, et le lien éventuel que ce rapport singulier
entretient avec leur faible représentation dans les terminales С et les filières
post-baccalauréat scientifiques les plus prestigieuses 2.
L'investigation menée repose sur une enquête par questionnaire passée pendant
une heure de cours à une population de 452 élèves des terminales В, С et G. Seule
la population des 170 élèves de terminale С est retenue dans la présente étude : une
comparaison globale des comportements des deux sexes par agrégation des
déclarations de l'ensemble des filles et des garçons n'aurait guère de sens en raison
de la distance sociale et scolaire qui caractérise la population étudiée (les filles
d'origine populaire sont, par exemple, sur-représentées dans les classes de G). Mieux
vaut, par l'étude d'une sous-population caractérisée par une égalité approximative
des identités scolaire et sociale, chercher à saisir, ceteris paribus, les différences de
comportements et d'attentes qui séparent les deux sexes 3.
2. - Au cours des années quatre-vingt, l'accès des deux sexes à la terminale С est devenu plus inégalitaire
(dans les panels 1973 et 1980 étudiés par la Direction de l'évaluation et de la prospective, la part des
filles en terminale С passe de 3,2 % à 3 % de 1973 à 1980 et celles des garçons passe de 3,7 % à 5 %
pour les mêmes cohortes ( Baudelot, Establel, 1990, p. 346). - Notons, au passage, une asymétrie sur
les destinées scolaires des deux sexes selon leur origine sociale qui n'est sans doute pas sans rapport
avec la sous-représentation des filles en terminale scientifique : les garçons, à l'heure d'origine aisée,
s'orientent massivement vers la terminale C, i.e. l'élite scolaire des lycées (dans l'Académie de Lille,
43,8 % des garçons d'origine aisée sont scolarisés en terminale С et seulement 6,15 % d'entre eux sont
en terminale A). A contrario, les filles, à l'heure d'origine aisée, s'orientent plus fréquemment vers la A (pour 28 % d'entre elles ; Convert et Pinet, 1989, p. 22). Autrement dit, élites scolaire et
sociale sont confondues en grande partie pour les garçons, ce qui n'est pas le cas pour les filles. De
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