La correspondance de George Sand éditée par ses enfants - article ; n°90 ; vol.25, pg 61-75
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La correspondance de George Sand éditée par ses enfants - article ; n°90 ; vol.25, pg 61-75

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Description

Romantisme - Année 1995 - Volume 25 - Numéro 90 - Pages 61-75
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 57
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Mme Brigitte Diaz
La correspondance de George Sand éditée par ses enfants
In: Romantisme, 1995, n°90. pp. 61-75.
Citer ce document / Cite this document :
Diaz Brigitte. La correspondance de George Sand éditée par ses enfants. In: Romantisme, 1995, n°90. pp. 61-75.
doi : 10.3406/roman.1995.3053
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1995_num_25_90_3053Brigitte DIAZ
La correspondance de George Sand éditée par ses enfants
« Que mes lettres deviennent ce qu 'elles pourront. ..» '
Pour retracer l'histoire de l'édition d'une correspondance, rien de mieux sans
doute qu'une autre correspondance, de préférence celle des éditeurs. C'est à une telle
source que je suis allée puiser, pour comprendre les ambitions et les stratégies des
premiers éditeurs de la correspondance de George Sand : ses propres enfants, Maurice
Sand et Solange Clésinger. Réconciliés pour l'occasion, c'est ensemble qu'ils ont sou
haité et conçu la publication des lettres de leur mère. L'un demeurant à Paris, l'autre à
Montgivray, près de La Châtre, c'est par courrier qu'ils s'efforcèrent de régler les
nombreuses divergences de vues qui les opposaient en la matière. Ce qui nous vaut
un extraordinaire dialogue sur la façon de concevoir, en cette fin du XIXe siècle, une
correspondance d'écrivain. C'est l'occasion de faire la radioscopie de cette première
édition de la correspondance de George Sand, qui n'a pas grand chose à voir avec ce
qu'elle deviendra au siècle suivant, entre les mains expertes de Georges Lubin.
Dès la mort de George Sand, en 1875, Maurice et Solange commencèrent à songer
à la publication de ses lettres, mais ce n'est qu'en 1882 que parut, chez Calmann-
Lévy, le premier volume de la « correspondance générale » de l'écrivain, bientôt suivi
par cinq autres volumes, de 1882 à 1884. C'est dire que cette publication, si elle est
loin d'avoir la rigueur, l'exhaustivité, la fiabilité aussi, des éditions actuelles, a été
longuement préparée, souvent de façon maladroite et brouillonne, par Maurice et
Solange, peu rodés aux basses besognes de l'éditeur de correspondances, et qui, sur
tout, étant à la fois juges et parties, manquaient de l'objectivité impassible que la
tâche exigeait. Durant la décennie 1875-1885, leur correspondance est une polémique
constante autour des innombrables choix qui s'ouvraient devant eux. Elle nous permet
de suivre pas à pas toutes les étapes du processus editorial.
« Une mine d'or sous des feuillets épistolaires » 2
Dans l'éventail des motifs qui ont pu pousser Maurice Sand à se lancer dans ce
travail, dont il ne prévoyait sans doute pas l'ampleur, le plus immédiat est sans doute
« l'air du temps ». Le XIXe siècle, on le sait — et le présent volume est là pour le rappeler —
1. George Sand, Correspondance, Garnier, édition de Georges Lubin, à Marie-Laetitia de Solms,
novembre 1857, t. XIV, p. 538. Toutes les lettres de George Sand citées ici renvoient à cette édition.
2. « Ne te figure donc pas que tu auras trouvé une mine d'or sous ces feuillets épistolaires », c'est ce
qu'écrit Solange à son frère, à la veille de la publication du premier volume de la Correspondance générale
de George Sand (B. N., N.a.fr. 16271, fol. 153, 29 février 1881). Cette lettre, comme une grande partie des
lettres citées ici, est inédite et appartient au fonds George Sand de la Bibliothèque nationale (ici désigné par
bn). Les autres lettres citées appartiennent au fonds George Sand de la historique de la ville
de Paris (ici désigné par bhvp).
ROMANTISME n° 90 (1995-4) 62 Brigitte Diaz
a eu le goût des correspondances. Sainte-Beuve, observateur vigilant des pratiques li
ttéraires et grand amateur de littérature épistolaire, situait les prémices de cet engoue
ment au début du siècle, sous l'Empire, période pendant laquelle, écrit-il, « une
librairie intelligente réimprimait [...] de petits choix de lettres de Mme de
Montmorency, de Mme de Scudéry, de Mme de Coulanges...» 3. Ainsi amorcé, le
mouvement ne cessa de s'amplifier, pour atteindre son apogée à la fin du siècle.
Quelques jalons permettent d'en saisir la mesure : en 1878, le vicomte Spoelberch de
Lovenjoul, ami proche de Lina et de Maurice Sand, publie chez Calmann-Lévy, la
correspondance de Balzac en deux volumes ; la même année verra la publication de
celle de Berlioz ; un peu plus tard, en 1884, Maupassant fournit une première édition
de la correspondance de Flaubert. Mais auparavant, bien des lettres d'écrivains et
d'artistes auront paru en revue, ou insérées dans des volumes, parfois même du vivant
de l'auteur. C'est le cas des quelques lettres de George Sand que Sainte-Beuve avait
divulguées, un peu cavalièrement, dans une réédition de ses Portraits contemporains,
en 1869. Barbey d'Aurevilly, de son côté, n'épargne pas ses sarcasmes à l'égard de
tous « les éditeurs patentés, les légataires universels, les nièces ou les parentes que
lconques [qui] vident exaspérément leurs vieux tiroirs » 4, pour exhumer lettres
d'amour, poulets, et autres notes de blanchisseuses, propres à satisfaire à la fois leur
avidité pécuniaire et la curiosité mal placée du public. La polémique sur l'intérêt qu'il
y a à dévoiler ainsi les coulisses épistolaires de la vie d'artiste est à l'ordre du jour, si
l'on en croit les articles de presse qui fleurissent sur le sujet. Ainsi celui d'Albert
Wolff, journaliste au Figaro, qui s'indigne - à propos de la rumeur annonçant, en
1881, une prochaine parution de la correspondance entre George Sand et Musset - de
la « misérable spéculation littéraire » à laquelle se livrent bien des héritiers.
Maurice et Solange ne sont pas insensibles à cette mode éditoriale qui doit leur
permettre d'exploiter le trésor épistolaire dont ils disposent. D'autant plus que
d'autres guignent le fameux trésor, et que nos deux héritiers sont l'objet de sollicita
tions fréquentes de la part de tous ceux qui exploiteraient volontiers pour leur propre
compte les lettres qu'ils détiennent. C'est le cas, par exemple, de Georges d'Heylli, le
gendre des époux Bascans, dont Solange, enfant, fréquenta la pension, et qui demande
à Maurice, en 1878, la permission de publier les lettres de George Sand adressées à sa
belle-mère. Le postulant a beau assurer qu'il n'entre dans sa démarche « aucun esprit
de spéculation » et qu'il prétend avant tout faire « œuvre filiale » 5, Maurice refuse
catégoriquement :
Je m'occupe de la publication de la correspondance de ma mère et je ne doute pas que
les lettres adressées par elle à Mme Bascans aient un intérêt. Mais permettez-moi de
vous dire que réduites à elles seules la relative à Mme Clésinger n'aura
pas pour le public l'intérêt que vous lui supposez. Si vous voulez bien m' envoyer copie
des lettres que vous voudriez voir publier, ou les originaux des lettres plus intimes, je
vous en serai très reconnaissant, mais quant à publier un recueil séparé ayant rapport
aux années d'éducation de la sœur, je ne puis vous en donner l'autorisation 6.
En 1878, le projet de publication est donc déjà fixé. Pourtant, Maurice, et surtout
Lina, son épouse, dont on connaît la dévotion à la mémoire de sa belle-mère, semblent
3. Sainte-Beuve, Portraits de femmes, Paris, Gamier, 1845, p. 473.
4. Barbey d'Aurevilly, Les Critiques ou les juges jugés, Frinzine, 1885, p. 72.
5. BHVP, N. 135, 11 mars 1878.
6.N. 135, mars 1878. George Sand éditée par ses enfants 63
encore, à cette époque, incertains sur l'opportunité d'une telle publication. Un échan
ge intéressant, daté de février 1878, entre Lina et le vicomte Spoelberch de Lovenjoul,
témoigne de ces hésitations. C'est à la fois au correspondant, à l'ami de George Sand
et, bien sûr, au spécialiste des correspondances que Lina s'adresse. Elle aimerait, lui
écrit-elle, s'enquérir des éventuelles recommandations qu'aurait pu formuler l'écrivain
sur cette question. Si elle est persuadée que George Sand « désapprouvait hautement
pour elle et pour

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