La crise de transmission de la fonction pastorale - article ; n°1 ; vol.48, pg 29-40
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Description

Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique - Année 1995 - Volume 48 - Numéro 1 - Pages 29-40
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 16
Langue Français

Extrait

Pierre Encrevé
Jean-François Hérouard
La crise de transmission de la fonction pastorale
In: Autres Temps. Cahiers d'éthique sociale et politique. N°48, 1995. pp. 29-40.
Citer ce document / Cite this document :
Encrevé Pierre, Hérouard Jean-François. La crise de transmission de la fonction pastorale. In: Autres Temps. Cahiers d'éthique
sociale et politique. N°48, 1995. pp. 29-40.
doi : 10.3406/chris.1995.1817
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1995_num_48_1_1817CRISE LA
DE TRANSMISSION
DE LA FONCTION
PASTORALE
« J' entends plus la guitare » (Philippe Garel)
Pierre Encrevé et Jean-François Hérouard
Les auteurs de ce texte, liés d'amitié, sont l'un (Pierre Encrevé) fils
de pasteur, et l'autre (Jean-François Hérouard), venu vers vingt ans
du catholicisme à V expression réformée de la foi chrétienne. Deux it
inéraires contrastés pour s' interroger sur les mécanismes de la trans
mission (de la Parole ? de la foi ? d'un habitus protestant ? de la foi
par le protestantisme ?), abordés à travers la question de la « relève »
par les enfants de pasteur(s).
Sont ici utilisés quelques éléments d'un article paru en juin 1986
(Pierre Encrevé : Fils de pasteur ou enfants de pasteur(s) ? Paris,
Actes de la Recherche en Sciences sociales, n° 62163). Mais pour l'es
sentiel, ce texte n'est que la mise en forme d'un entretien enregistré
entre ses signataires, qui ont hésité à le publier en l'état, bien
conscients qu'ils sont de son côté approximatif. La conceptualisation
y est à peine ébauchée. Ainsi des dernières pages, qui sous-entendent
une représentation du protestantisme comme d'une religion proposant
une foi sans croyances. Avec ce texte imparfait (mais le rôle d'Autres
Temps est aussi d'accueillir des « working papers »), nous souhaitons
ouvrir quelques pistes de réflexion et, peut-être, lancer un débat
Pierre Encrevé est professeur de socio-linguistique à l'Ecole des Hautes Etudes en
Sciences sociales. Jean-François Hérouard est consultant en ressources humaines.
29 nourri par les lecteurs, quitte à proposer ultérieurement une réflexion
plus articulée.
Tous les chiffres cités pour 1980 proviennent de la grande enquête
de Jean-Paul Willaime (Profession : pasteur, Genève, Labor et Fides,
1986). Les autres sont des statistiques non officielles et provisoires
que la commission des ministères de l'Eglise réformée de France
(ERF) a bien voulu nous confier, à titre d'ordres de grandeur. Nous
l'en remercions vivement ici.
Jusqu'à la génération des fils de pasteur né avant 1945, l'auto-repro-
duction partielle du corps pastoral français est un fait bien établi par
les historiens et sociologues du protestantisme. « Chez les Monod, les
Monnier, les Bruston et dans bien d'autres familles, on est pasteur de
père en fils, en petit-fils, en arrière-petit fils ». (Emile G. Léonard : Le
protestant français, Paris, PUF, 1953). En 1980, on compte encore
20,9 % de pasteurs fils de pasteurs parmi les 908 pasteurs en activité
(moins l 'Alsace-Moselle), 21,3 % les seuls de l'ERF,
proportion sensiblement constante depuis presque deux siècles. Mais à
la même date, il n'y a que 2,2 % de pasteurs parmi les enfants de pas
teurs en activité.
Les chiffres les plus récents, même s'ils doivent être consolidés,
confirment la disparition du modèle héréditaire de transmission de la
fonction pastorale. Certes, parmi les 515 pasteurs de l'ERF en activité
en 1995 (pour 446 retraités), une cinquantaine (soit environ 10 %
contre 20,9 % quinze ans plus tôt), sont enfants de pasteurs et une
vingtaine issus de familles pastorales (grand-pères, oncles et cousins).
Mais quid de la relève ? Sans compter les 7 ministres venant d'une
Eglise d'Allemagne entrés au service de l'ERF en 1995, une partie s
ignificative de ses futurs pasteurs ne sont plus ni enfants de pasteurs (la
même année, sur 31 proposants - 17 hommes et 14 femmes -, on ne
trouve que 4 enfants de pasteurs - 3 femmes et 1 homme — ), ni même
issus de l'ERF pour 1/3 (11) d'entre eux, formés dans d'autres Eglises
protestantes, exception faite de 4 proposants issus de l'Eglise catho
lique romaine, chiffre à rapprocher des 14 pasteurs en activité ancien
nement prêtres de cette même Eglise.
Parallèlement, un phénomène nouveau doit être pris en compte, et in
terrogé quant à son impact sur la transmission de la fonction pastorale :
la féminisation relative du corps pastoral et l'émergence de couples « bi-
pastoraux ». Les Eglises luthériennes, puis à leur suite, réformées, d'Al
sace - Moselle consacrent des femmes au ministère pastoral depuis une
décision du synode en 1965. Pour cette seule Eglise, entre 1979 et 1990
inclus, 50 femmes sont entrées au service de l'ERF comme pasteurs,
30 33 exercent encore leur ministère en 1992 (13 ayant demandé un dont
congé, 4 n'ayant pas fini leur stage). Sur ces 33+13 personnes, presque
les 2/3, soit 22 sur 36, sont épouses de pasteurs.
Enfin, on trouve en 1995 dans les 15 Eglises membres de la FPF,
138 femmes sur un total de 1754 pasteurs1, soit 7,86 %. Cette proport
ion augmente si l'on décide de prendre en compte les 63 femmes offi
ciers de l'Armée du Salut. Elle passe à 19,75 %, si l'on exclut du cal
cul cette dernière congrégration ainsi que les 6 Eglises dans lesquelles
on ne trouve aucune femme pasteur. Les 7 restantes comptent en effet
138 femmes pour 699 pasteurs.
Comment faut-il interpréter ces chiffres et les phénomènes sociolo
giques, mais aussi spirituels qu'ils traduisent, notamment du point de
vue de la transmission ? Mais ce terme, choisi pour titrer l'ensemble
du dossier, convient-il à notre propos ? Il est ambigu. D'un côté, pour
l'aspect purement sociologique de notre approche, le mot « reproduct
ion » serait plus rigoureux. De l'autre côté, si l'on s'interroge sur ce
qui est transmis (et reçu), on pourrait parler d'héritage, de tradition, de
la foi de nos pères, de la nuée des témoins. Mais de transmission ? La
foi se transmet-elle ?
En tout cas, de père pasteur à fils pasteur, classiquement un habitus
pastoral se transmettait. Grossièrement dit, cet ensemble structuré de
comportements et de discours réglés et structurants, repérable en tant
que tel, l'habitus, excède les contenus de la conscience subjective et
ne se réduit pas aux témoignages externes de la foi : il peut l'inclure,
mais on sait aussi qu'il perdure en l'absence de la confession d'une foi
personnelle. L'habitus est transmis, il se transmet. Ainsi de l'habitus
pastoral (à ce stade de la réflexion, nous ne nous interrogeons pas en
core sur ce qu'il transmet).
Dans son auto-définition, le métier de pasteur a pour contenu essent
iel la prédication et le commentaire de la Parole, par laquelle la foi
peut s'éveiller. Quoi qu'il en soit du sacerdoce universel, le métier de
pasteur est un élément-clé de la pérennité de la structure ecclésiale ;
dans le cas très particulier de l'histoire du protestantisme français, il
contribue décisivement à la pérennité de la communauté privée
d'église visible, dans le temps de persécution. L'anniversaire du tr
icentenaire de la naissance du pasteur Antoine Court, restaurateur des
Eglises réformées après la Révocation, nous le rappelle opportuném
ent2.
Les chiffres pré-cités mettent donc en évidence deux phénomènes :
l'habitus pastoral a cessé de se transmettre comme il le faisait jusque
vers le milieu du XXe siècle, à travers les fils de pasteurs ; les consécra-
31 tions féminines se multiplient de façon significative, et un mouvement
de formation de couples bi-pastoraux, qui est plus qu'un frémisse
ment, semble se dessiner.
L' habitus et la foi
Notre question concernant les enfants de pasteur peut donc se fo
rmuler ainsi : continuent-ils ou non de transmettre ce que leurs pères
(et depuis quelques décennies, leurs mères) transmettaient dans leur
ministère ? La foi ? Un habitus, l'incluant ou non ? En première ana
lyse, ce qui est le plus visiblement transmis, c'est le vocabulaire : des
configurations de mots et de phrases originaux. L'enfant t

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