La folie maniaque-dépressive - article ; n°1 ; vol.16, pg 164-214
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Description

L'année psychologique - Année 1909 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 164-214
51 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1909
Nombre de lectures 30
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Alfred Binet
Th. Simon
La folie maniaque-dépressive
In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 164-214.
Citer ce document / Cite this document :
Binet Alfred, Simon Th. La folie maniaque-dépressive. In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 164-214.
doi : 10.3406/psy.1909.3791
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1909_num_16_1_3791VII
LA POLIE MANIAQUE-DÉPRESSIVE
I. — HISTORIQUE
Les anciens. — Pour aucune maladie mentale, l'historique n'a
plus d'intérêt que pour la maladie si anciennement connue sous
les noms de manie et de mélancolie, et que Kraepelin a appelée tout
récemment la folie maniaque-dépressive. En parcourant cet histo
rique, on voit comment les idées des aliénistes se sont modifiées au
cours des âges; on voit surtout comment tel critérium qui a paru
bon à une certaine époque, pour reconnaître et constituer une
forme morbide, a été ensuite rejeté pour faire place à un critérium
meilleur. Ce fut comme une lutte constante pour essayer de saisir,
à travers des apparences changeantes et trompeuses, une réalité
qui longtemps a réussi à se cacher.
Ce sont surtout les apparences qui frappèrent les premiers alié
nistes; ou, pour parler en termes plus techniques, les premières
classifications des aliénistes furent essentiellement symptomatiques.
Ils avaient affaire à deux groupes de phénomènes, les uns consti
tués surtout par de l'agitation, les autres surtout par de la dépres
sion ; les caractères de chaque groupe étaient si frappants, et en
même temps si opposés à ceux de l'autre groupe, que d'emblée on
fut conduit à admettre qu'il y avait là deux maladies distinctes,
absolument indépendantes. A la première, celle de l'agitation, on
donna le nom de manie, et à la seconde, celle de la dépression, le
nom de mélancolie.
Ces termes sont parmi les plus anciens de l'aliénation. Il est
parlé de maniaques dans Hippocrate et la description par Celse de
la mélancolie est restée classique et, par beaucoup de traits, exacte.
Au siècle dernier, Pinel et Esquirol continuent de séparer la manie
de la mélancolie. Ils en faisaient deux affections autonomes, et certes
ils auraient eu raison de le faire, s'il était permis de constituer les
maladies d'après leur aspect extérieur, car rien ne diffère plus d'un
maniaque qu'un mélancolique : autant le premier est excité, exu
bérant et gai, autant le second est déprimé, taciturne, douloureux.
La première conception unitaire. Les folies circulaires. — Cependant,
on trouve déjà dans Esquirol de vagues réserves. Il observait des
malades qui, de maniaques, devenaient mélancoliques, et inverse- ET SIMON. — LA FOLIE MANIAQUE-DÉPRESSIVE 165 BINET
ment. Ce passage d'un état à l'autre chez le même malade prit
plus tard dans l'esprit des aliénistes une importance croissante. Il
les amena à mettre au premier plan comme principe de classifica
tion des maladies mentales la considération de leur évolution;
c'était une brèche à la classification symptomatique des premiers
auteurs.
En 1834, Falret et Baillarger démontrent en effet, de manière
irréfutable, que manie et mélancolie peuvent ne constituer qu'une
seule et même affection, et ils arrivent à cette notion d'une maladie
qui, en poursuivant son cours, donne lieu à deux périodes tout à
fait différentes séparées par des intervalles lucides plus ou moins
longs, avec retour des accès. Nous n'avons pas l'intention de décrire
ici toutes les particularités de cette maladie. Elle a été désignée
sous des noms bien divers. Ceux de folie circulaire, folie à double
forme, folie à formes alternes, rappellent les combinaisons sous le
squelles se présente l'union de la mélancolie et de la manie1. Mais
cette succession de manie et de avec transformation de
l'une dans l'autre ne s'observait pas non plus constamment, et l'on
continuait à admettre, pour les cas qui restaient en dehors de la
conception précédente de Falret, une manie et une mélancolie
simples, distinctes l'une de l'autre, c'est-à-dire deux entités mor
bides caractérisées uniquement par de la manie et l'autre
uniquement par de la mélancolie.
La folie intermittente. — La tendance unitaire s'accuse davantage
avec Magnan. Il enseigne que lorsqu'un malade présente des accès
de même nature, que ces accès soient uniquement mélancoliques
ou uniquement maniaques, du moment qu'ils affectent un carac
tère intermittent, c'est-à-dire qu'ils sont séparés par des intervalles
de pleine santé mentale, on peut, on doit attribuer ces accès à la
folie périodique et appauvrir d'autant les manies et mélancolies
simples. Sans doute le caractère uniforme des accès, accès toujours
maniaques par exemple, semble éloigner ces malades de la folie
circulaire de Falret-Baillarger. Mais cette différence ne paraît plus
aussi importante qu'autrefois.
Il se produit alors un changement dans la terminologie. On ne
peut plus conserver pour l'affection le nom de folie à double forme,
bien que souvent, à la suite de plusieurs accès maniaques simples,
on vit chez le même malade la forme alterne s'établir. C'est l'exis
tence d'intervalles entre les accès à répétition qui paraît le point de
contact de toutes ces variétés, c'est ce caractère intermittent qui
devient beaucoup plus important que le ton émotionnel de chaque
accès. Le terme de folie intermittente est alors substitué par Magnan
aux dénominations précédentes; il est plus vaste que l'ancien, il
atteste une préférence plus accentuée en faveur de l'idée d'évolution.
Krsepelin et la folie maniaque-dépressive. — Le travail d'unifica
tion n'était cependant pas encore complet. A côté de la folie inter-
1. Cf. pour un historique plus étendu de toute cette période : Ritti. La
folie à double forme. Paris, 1882. 166 MÉMOIRES ORIGINAUX
mittente, Magnan maintient, comme entités distinctes, la manie et
la mélancolie. Un malade peut avoir un accès maniaque, guérir,
et ne plus jamais retomber. On ne peut parler à son sujet de folie
intermittente. Erreur, dit Kraepelin. Qu'un malade n'ait dans toute
son existence qu'un accès ou qu'il en ait plusieurs, il n'en est pas
moins atteint de la même maladie. Mais c'est abandonner l'idée
d'intermittence. Par un singulier retour des idées la conception de
l'évolution, conception grâce à laquelle on avait fait l'unité, perd
maintenant de sa valeur.
Kraepelin n'a pas réalisé la réforme en une fois. C'est d'ailleurs
une remarque générale à faire que ses idées changent beaucoup
d'une édition à l'autre de son Traité ; il ne modifie que lentement
la position qu'il a prise d'abord. Esprit scrupuleux, il met
de réserve à proposer les modifications qu'il apporte et on a quel
quefois même de la difficulté à connaître où il en est de son évolu
tion, car il s'abstient, et avec raison; de donner à ses propositions
un caractère définitif.
Ici, il paraît avoir été frappé d'abord par des analogies cliniques.
Ayant scruté un accès de manie simple et un accès de manie inter
mittente, il écrit : « Je mets au défi quelque aliéniste que ce soit de
distinguer un cas de manie simple d'un accès de manie à répéti
tion, tant les manifestations en sont semblables1. » Sur ce point, il
est en opposition avec la plupart des aliénistes français, mais nous
croyons bien que c'est lui qui a raison. Ainsi s'abat la séparation
en apparence si légitime et en fait si fructueuse qu'avait créée
l'évolution. Krœpelin ne repousse pas cependant l'idée d'évolution,
mais il l'envisage d'un autre point de vue, il n'attache d'importance
qu'à la terminaison des accès; or ici elle est identique : récupérat
ion par le malade de ses facultés mentales, une fois passés les
accidents d'excitation.
Pour la mélancolie, Krœpelin reste plus hésitant. Il y a une
forme de mélancolie qu'il a longtemps eu de la répugnance à
faire entrer dans la folie maniaque-dépressive

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