Le mariage à Madagascar - article ; n°1 ; vol.4, pg 9-46
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Description

Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris - Année 1913 - Volume 4 - Numéro 1 - Pages 9-46
38 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1913
Nombre de lectures 79
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

G. Grandidier
Le mariage à Madagascar
In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, VI° Série, tome 4 fascicule 1, 1913. pp. 9-46.
Citer ce document / Cite this document :
Grandidier G. Le mariage à Madagascar. In: Bulletins et Mémoires de la Société d'anthropologie de Paris, VI° Série, tome 4
fascicule 1, 1913. pp. 9-46.
doi : 10.3406/bmsap.1913.8571
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bmsap_0037-8984_1913_num_4_1_8571GRANDIDIER. — LE MARIAGE A MADAGASCAR 9 G.
LE MARIAGE A MADAGASCAR.
Par M. G. Grandidier.
La puberté est assez précoce chez les peuplades des côtes de l'ile de
Madagascar de même que chez les indigènes du centre à faciès négroïde;
elle l'est moins chez ceux du type malais. Cette précocité est souvent
avancée par suite des relations que les petites filles ont fréquem
ment avec des jeunes gens avant d'être nubiles : sur la côte Ouest, chez
les Antifiherenana, par exemple, une fille perd très souvent sa vir
ginité avant d'être réglée, parce que, disent les mères, « s'il n'en était
pas ainsi, le sang ne sortirait pas et les étoufferait » ; il faut attribuer à
la même crainte superstitieuse l'usage dont parle Vincent Noël : « les
jeunes filles du Boina se déflorent elles-mêmes quand elles n'ont pas été
déflorées dès leur bas âge par leur mère ».
La menstruation apparaît d'ordinaire de 11 à 12 ans, quelquefois seu
lement de 12 à 13 ans, chez les femmes malgaches d'origine indo-méla
nésienne, à cheveux crêpés, et de 12 à 13 ans seulement, comme en
Europe, chez celles d'origine javanaise, à cheveux droits et lisses. Elles
sont, en général bien réglées; l'écoulement menstruel, peu abondant,
cesse vers la 40e année en moyenne ; elles n'ont jamais de relations avec
les hommes pendant les époques.
Le mariage à Madagascar diffère totalement du mariage tel qu'il existe
en Europe, où, depuis longtemps, il est considéré, tout à la fois, comme
un sacrement et comme un pacte légal qui établit entre les époux un double
lien religieux et civil, en quelque sorte comme un contrat synallagma-
tique par lequel les époux se promettent assistance, amour et fidélité, où
la jeune fille apporte en dot sa virginité. A Madagascar, c'est un accord
purement verbal, une association de deux contractants résultant du simple
échange des volontés requises par la coutume, accord, association toujours
précédés, avant que la famille soit appelée à les sanctionner, d'une période
plus ou moins longue d'essai, d'union libre.
La beauté morale de la virginité et de la chasteté, le charme de la
pudeur ne sont ni compris, ni appréciés par les Malgaches qui n'attachent
aucune importance a la chasteté des jeunes filles, ni à la virginité de
leurs épouses : « la chasteté, écrivait Eilis, en 1863, est contraire à la loi
malgache et jamais un homme qui se marie n'y compte », et Razafiman-
dimby, un fin lettré malgache bien connu sous le pseudonyme de Nimbol
Samy, dit : « Nous ne tenons pas à la virginité; au contraire, elle nous
1 Cette étude est le résumé du chapitre sur : Le Mariage, qui paraîtra prochai
nement dans le tome II de Y Ethnographie de Madagascar, par A, et G. Grandidier/ 10 16 janvier 1913
rend défiants, inquiets ». Les parents favorisent les rapports de leurs
filles avec les hommes ; dès qu'elles sont en âge de comprendre, souvent
même avant la puberté, avant la menstruation, à 10, à 11 ans et
plus tôt, leur éducation de femme commence et elles peuvent a leur gré
se livrer à qui bon leur semble, ce dont elles ne se font pas faute,
sans avoir à craindre de ne pas trouver à se marier plus tard, car plus une
femme a d'enFants, plus elle est recherchée : un Malgache à qui deux
femmes plaisent également, prend toujours pour épouse légitime cellequi
a déjà eu des enfants, surtout celle qui les a encore vivants, et ces enfants
11 les aime comme les siens. Il est en effet .universellement admis que
les jeunes filles, dès qu'elles sont pubères, doivent suivre leurs inclina
tions; les relations sexuelles entre un jeune homme et une jeune fille,
entre un homme et une femme sont, aux yeux des Malgaches, un acte
tout naturel, nullement reprehensible et qui n'a pas à redouter le grand
jour, et la jeune fille comme la femme non mariée se donne ou plutôt
se prête à qui elle veut, sans qu'il en rejaillisse sur elle le moindre
discrédit ni la moindre défaveur, pourvu toutefois qu'elle respecte
certaines interdictions. Il ne convient pas cependant qu'une jeune fille
change continuellement d'amoureux, à moins qu'elle n'y trouve son inté
rêt, car où il y a profit, il n'y a pas de honte-
Dans quelques clans de la côte Sud-Est, les jeunes filles ont plus de
retenue et on y trouve assez souvent de grandes jeunes filles encore
vierges; le Dr Catat dit que « entre Fort-Dauphin et Vangaindrano, con
trairement à ce qui se voit partout ailleurs à Madagascar, le mariage est
le commencement de la vie de la femme, au lieu d'en être la fin ».
Du temps deFlacourt, au xvue siècle, «les femmes et les filles n'étaient
pas si débordées (débauchées) chez les Zafibrahim (Zafy Boraha, habitants
de l'île Sainte-Marie et de la côte voisine qui descendaient d'immigrants
juifs) que du côté d'Anosy et du Malitanana; elles sont d'aussi difficile
accès que nos filles de France, car les pères et les mères les gardent aussi
soigneusement ». On peut s'écrier « Quantum mutatus ab Mo!», car, aujourd
'hui, elles sont toutes pareilles aux autres Malgaches, probablement
depuis que les pirates européens ont, au xvme siècle, établi leurs repaires
sur cette côte et que leurs bâtards en sont devenus les maîtres. Vincent
Noël dit que, dans le Boina, « les princesses, contrairement à l'usage
général, restent intactes ou du moins sont censées demeurer telles jus
qu'à leur mariage. Manifester le moindre doute à cet égard est- un crime
de lèse majesté ». Les princes du Nord-Ouest ont en effet adopté, dans
une certaine mesure, les mœurs musulmanes.
11 semble ressortir de ce que nous venons de dire que la pudeur et là
chasteté sont, ou du moins étaient tout récemment encore, des vertus
inconnues des Malgaches ; ce qui n'a rien d'étonnant, étant données leur
morale spéciale et la vie que leur imposent le climat de leur pays et
leur état social ; cependant il faut dire avec Flacourt : « les femmes
malgaches ont en certaines choses de la vergogne », car elles ont honte
d'accomplir certains actes en public, de montrer leur nudité, surtout aux GRANDIDIER. — LE MARIAGE A MADAGASCAR 1 1 G.
très proches parents et on ne peut pas dire qu'elles soient sans pudeur.
Quant à la chasteté, elle est, à quelques rares exceptions près, ignorée,
incomprise de la jeune fille malgache aussi bien que de la femme mariée,
qui n'ont ni scrupules, ni retenue sexuelle ; il y a cependant des cas par»
ticuliersoùla femme entre en retraite et doit, sous peine des plus terribles
châtiments, momentanément garder une chasteté absolueetles malgaches
arabisés, Roandriana ou Nobles Antanosy et surtout Nobles Antaimorona,
s'abstiennent ou plutôt s'abstenaient de toutes relations, même avec leurs
femmes légitimes, pendant le dernier mois de l'année, le mois de jeûne
et d'abstinence qu'ils appellent Mifehi-vava.
Puisque la jeune fille malgache, tant qu'elle n'est pas mariée, est
maîtresse absolue de son corps, dont elle use et abuse a son gré, il n'est
pas étonnant que, avant le mariage, le concubinage ou plutôt les unions
libres soient de règle à peu près partout à Madagascar.
Les parents, en effet, ignorants des devoirs que nous enseignent la
civilisation et la morale chrétienne, ne se préoccupent nullement de sauve
car,' comme garder la vertu de leurs filles, dont ils trafiquent volontiers,
nous l'avons dit, la virginité n'a nul prix à leurs yeux tandis qu'au con
traire la grossesse est un honneur. « La crainte de Dieu n'est, dit Flacourt,
aucunement connue de la nation malgache, qui ne vit que selon la loi
naturelle et bestiale. Les petits garçons et l

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