Le professeur Jean-Louis Lamarque : un entrepreneur scientifique en politique - article ; n°1 ; vol.2, pg 136-150

Méryil Dubois

Description

Pôle Sud - Année 1995 - Volume 2 - Numéro 1 - Pages 136-150
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: POLE_SUD
• Publié le: 01 janvier 1995
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Mme Méryil Dubois
Le professeur Jean-Louis Lamarque : un entrepreneur
scientifique en politique
In: Pôle Sud, N°2 - 1995. pp. 136-150.
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Dubois Méryil. Le professeur Jean-Louis Lamarque : un entrepreneur scientifique en politique. In: Pôle Sud, N°2 - 1995. pp.
136-150.
doi : 10.3406/pole.1995.894
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pole_1262-1676_1995_num_2_1_894professeur Jean-Louis Lamarque : Le
un entrepreneur scientifique en politique^
par M. Dubois
logique d'échange politique 5 qu'on voit Connaissant la position des professeurs
de droit et de médecine dans le champ du s'affirmer dans le cas du professeur
pouvoir2, connaissant la texture de leur Lamarque, conseiller municipal et districtal
pouvoir social 3, il n'est pas surprenant de la ville de Montpellier. Son échec aux
qu'un professeur de médecine s'engage élections législatives de 1993 fera apparaître
la distance qui sépare le scientifique du dans le champ politique local, a fortiori s'il
fait partie des couches dominantes de la politique.
société 4. L'expérience politique de Jean-
Louis Lamarque débute en 1989, année où
il devient conseiller municipal de la ville de Vambiguïtê de Ventrée en poli
Montpellier, derrière le maire socialiste de tique
la ville Georges Frèche. Se pensant et se
Rien apparemment ne prédisposait présentant sous la figure du professional
J.-L. Lamarque à se séparer politiquement anglo-saxon, soucieux de promouvoir ses
"produits scientifiques" (en particulier le de son milieu. "Mon patron m'a dit à
propos de mon engagement auprès de dépistage précoce du cancer du sein), cet
entrepreneur scientifique proclame un rap Georges Frèche en 1989 : « Mon petit, tout
port instrumental avec la politique. Il se ce que tu as fait est bien, mais là, je ne peux
plaît à envisager le pouvoir comme un pas te pardonner, avec les communistes ! ».
Je rentrais dans un conseil municipal où il y relais d'influence, définissant son engag
ement politique comme le moyen de avait des communistes donc, pour mes
concrétiser son projet de santé publique. Sa pairs, c'était insupportable". Doté d'un
logique politique paraît ainsi totalement solide capital symbolique, socialement
surdéterminée par une logique scientifique hérité et acquis, le professeur Lamarque est
né en 1932 à Montpellier : ses grands- et professionnelle. Dans la mesure où la
production de politiques publiques sup parents appartenaient à la bourgeoisie ter
pose des capacités d'expertise scientifique, rienne et son père était un eminent profes
on comprend que les experts cherchent en seur de médecine. Jean-Louis Lamarque a
retour à en faire un usage politique, qu'il eu successivement comme patron à la
s'agisse d'investir dans les champs poli faculté de médecine de Montpellier son
tiques locaux ou le champ politique natio père (chaire de cancérologie), puis son oncle
nal. Ce type de stratégie est rendu (chaire de radiologie). Issu d'une dynastie
d'autant plus aisé que le pouvoir en place de médecins hospitaliers, il illustre de
manière emblématique ces héritiers "légiti- peut en tirer profit. C'est cette stratégie et
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mes et inclinés à hériter l'héritage6", prédis- professionnelle7 qu'il tenait de son père le
posés à l'incorporer et à l'objectiver. portant vers les formes les plus légitimes du
travail scientifique, il a multiplié les place-
Pour qu'un héritage symbolique per- те1Ш dans ^ diyerses formes de trayail
dure, il faut, comme le mort saisit le vif, universitaire . enseignement, recherche,
qu'il s'inscrive et se prolonge dans l'héritier. eXpertise. L'analyse des "Titres et travaux"
II fallait donc à J.-L. Lamarque confirmer de J._L. Lamarque permet de mettre en évi-
sa légitimité au sein des champs universi- dence sa stratégie d'acquisition et de ren-
taire et médical. Le modèle d'excellence forcement de son capital scientifique.
TITRES UNIVERSITAIRES ET FONCTIONS
- Chef de Laboratoire à la Faculté de Médecine, Chaire de carcinologie - 1960
- Assistant à la Chaire de Pathologie et Thérapeutiques Générales - 1961 à 1964
- Diplôme d'Études Spéciales d'Électroradiologie - 1963
- Docteur en Médecine - 1964
- Maître de Conférence de Radiologie - 1966
- Professeur sans Chaire (1974) puis titulaire de la Chaire de radiodiagnostic - Montpellier - 1971
TITRES HOSPITALIERS ET FONCTIONS
- Externe (1955) puis interne (1960) des Hôpitaux
- Assistant d'Électroradiologie des Hôpitaux et du Centre Anticancéreux de Montpellier - 1965
- Maître de Conférence, non chef de service, service de Radiodiagnostic - Hôpital St Éloi - 1966
- Chef du service de Radiodiagnostic, Hôpital St Éloi - 1968
- Directeur de l'École de manipulateurs d'électroradiologie
- Chef du Département d'Imagerie Médicale - Hôpital Lapeyronie - 1984
PRIX UNIVERSITAIRES ET SCIENTIFIQUES
- Lauréat de la Faculté de Médecine de Montpellier
- Prix Belot- 1964
- Prix Bouisson et Prix Clin-Comar (meilleure scolarité médicale) - 1965
- Prix Fontaine et Prix Beytout de Montpellier (meilleure thèse de l'internat des hôpitaux) - 1965
- Lauréat de l'internat des hôpitaux et lauréat de l'Académie Nationale de Médecine
- Prix Angèle Paoletti - 1965
- Médaille d'Or - XIIIe Congrès International de Radiologie - Madrid - Octobre 1973
- Citation de la "Radiological Society of Norm America" - 1974
- 1er Prix de l'exposition scientifique du "Congressus Tertius Societatis Radiologicae Europae" - Edinburgh
1975
- 1er Prix de l'exposition scientifique : Société française de Radiologie Médicale - Paris - Novembre 1976
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Dominant dans les champs universitaire Euromédecine en 1985, s'engagera en 1989
et hospitalier montpelliérains en tant que sur la base d'une logique d'échange solid
professeur à la faculté de médecine et chef ement éprouvée : la création d'un grand
du service de radiologie à l'hôpital département d'imagerie médicale à l'hôpit
Lapeyronie, membre de l'élite de la profes al Lapeyronie en 1984. Pourtant, le déca
sion médicale8, J.-L. Lamarque occupe des lage par rapport à son milieu n'est peut être
fonctions de responsabilité (président, fon pas seulement l'effet de calculs. Le jeu de
dateur ou membre) dans de nombreuses l'élection réciproque entre G. Frèche et
sociétés savantes (en France mais aussi à J.-L. Lamarque ne tient pas aux seuls inté
l'étranger). À l'université et dans le secteur rêts stratégiques, il découle aussi d'un itiné
privé, il conjugue activité de formation et raire professionnel, et en premier lieu de
expertise. Auteur de nombreux ouvrages et l'engagement syndical de Lamarque qui lui
publications scientifiques, il participe à de confère sinon une figure d'opposant, du
nombreux colloques internationaux dans moins une réputation d'homme "à part" au
lesquels il figure comme l'expert français de sein de la faculté de médecine. Alors que la
sa spécialité. Bref, il peut justement reven réforme hospitalière de 1958 contraint
diquer "s'être fait un nom". Mieux, d'avoir l'élite à se consacrer à plein
"gardé" le nom. temps à l'hôpital public10, "avec tous les
jeunes loups de la radiologie", il fait basculer Dès lors, le choix d'un engagement poli
en 1968, le CERF (Conseil d'Enseignement tique marqué "à gauche" paraît probléma
de la Radiologie Française) et fonde, avec tique. On sait que les caractéristiques
un professeur de médecine "qui était un sociales des médecins les conduisent ten-
socialiste bon teint", le Syndicat médical danciellement à s'engager à droite, le plus
des temps pleins hospitaliers dont il sera le souvent au RPR9. Les préférences poli
secrétaire pendant 7 ans. "Comme j'avais tiques de J.-L. Lamarque l'inclinaient à
fait du syndicalisme, j'étais considéré voter, jusqu'à sa rencontre avec Georges
comme un gauchiste, surtout que j'ai touFrèche, pour le candidat UDF François
jours