Les démences - article ; n°1 ; vol.16, pg 266-348
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Description

L'année psychologique - Année 1909 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 266-348
83 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1909
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 5 Mo

Extrait

Alfred Binet
Th. Simon
Les démences
In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 266-348.
Citer ce document / Cite this document :
Binet Alfred, Simon Th. Les démences. In: L'année psychologique. 1909 vol. 16. pp. 266-348.
doi : 10.3406/psy.1909.3793
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1909_num_16_1_3793IX
LES DEMENCES
I. — HISTORIQUE
Importance de la notion de la démence. — L'historique de la
démence présente pour l'aliéniste un intérêt de premier ordre ; qui
dit affirme un affaiblissement intellectuel, une dégrada
tion des fonctions psychiques; mais la question est terriblement
compliquée de savoir quand, dans quels cas, chez quels malades
ledit affaiblissement intellectuel a effectivement lieu. D'après une
idée courante, que l'on admet sans chercher à la préciser, il y a
certaines maladies mentales qui respectent les facultés intellec
tuelles et en pervertissent seulement l'usage, les font s'appliquer
de travers, tandis que d'autres maladies les atteignent plus direc
tement, les usent, les diminuent, les abolissent. Ces dernières
maladies sont considérées justement comme beaucoup plus graves;
mais les formes cliniques sous lesquelles se présentent ces deux
ordres de maladies ne sont pas très différentes; ou du moins des
accidents de même ordre s'y observent; il en résulte qu'avec tous les
malades ou presque, il y lieu de se poser cette question, véritabl
ement épineuse : quel est l'état de leurs facultés intellectuelles? Si
on constate des hallucinations, des délires, de l'incohérence, des
réactions violentes ou désordonnées, les observations qu'on peut
faire à cet égard restent incomplètes, les interprétations qu'on
peut fournir des manifestations multiples du malade risquent
d'être inexactes, le diagnostic devient incertain, le pronostic hési
tant, aussi longtemps que l'état vrai, profond, durable des facultés
intellectuelles n'a pas été déterminé. On comprend donc à quel
point il est nécessaire d'avoir de la démence une conception pré
cise et combien aussi il sera précieux de posséder des procédés
pour la découvrir dans les cas où elle est peu accusée, afin de
dégager la réalité cachée sous l'apparence. C'est un des problèmes
les plus vastes de l'aliénation, puisqu'il se pose comme une alterna
tive pour presque tous les diagnostics, et que la démence est capable
en quelque sorte de doubler tous les états vésaniques.
Pinel et Esquirol. — La démence était un des principaux chefs de
la classification de Pinel, qui se composait, nous le rappelons, des
termes suivants : Manie, mélancolie, démence, idiotisme. Il désignait BINET ET TH. SIMON. — LES DÉMENCES 267 A.
par démence « une débilité particulière des opérations de l'ente
ndement et des actes de la volonté qui prend tous les caractères
d'une rêvasserie sénile1 ». Voilà déjà une comparaison bien singu
lière entre la démence et la rêvasserie. Quand on se reporte à la
description qu'il donne de la démence, on voit qu'il a été frappé
surtout de trouver chez ces malades un décousu de l'idéation. « Les
idées, écrit-il, sont comme isolées et naissent à la suite les unes
des autres, mais elles ne sont nullement associées 2. » C'est par suite
en la comparant à la manie qu'il est amené à faire principalement
le diagnostic de la démence, ce qui, malgré tout, nous surprend un
peu aujourd'hui. Mais sa définition est bien insuffisante; parmi les
caractères donnés comme spécifiques de la démence, il cite « la
succession rapide ou plutôt alternative, non interrompue, d'idées
isolées et d'émotions légères et disparates, les mouvements désor
donnés, etc. » En réalité, ces symptômes banaux peuvent relever,
à l'occasion, de causes toutes différentes, qui n'ont rien de commun
avec la démence. Il était véritablement trop tôt, en ce temps-là,
pour comprendre le sens profond du mot démence, et il faudra
attendre jusqu'à l'époque contemporaine pour en arriver là.
Tout au moins, Pinel et ses successeurs pouvaient faire une pre
mière approximation ; c'était d'établir une distinction entre l'idiotie
et la démence. On attache d'ordinaire une certaine importance à
cette distinction, mais nous ne la croyons que secondaire, car elle
ne va pas au fond des choses et, en clinique, on n'a pas souvent
besoin de distinguer déments et idiots; la distinction bien plus
subtile, plus utile et plus philosophique est entre la démence et les
autres maladies mentales. En tout cas, nous devons constater que
Pinel n'a pas eu l'honneur de cette séparation entre l'idiotie et la
démence. Il l'admet bien en théorie, sa classification en fait foi,
mais il ne la justifie pas; ou plutôt sa pensée reste si incertaine
qu'on peut seulement lui attribuer un pressentiment des choses.
D'une part, il écrit, il est vrai, que « dans la démence, la pensée
est abolie ». Mais c'est nous qui soulignons. D'autre part, il appelait
idiotisme « une sorte de stupidité plus ou moins prononcée, un
cercle très borné d'idées et une nullité de caractère3 ». Il n'est pas
étonnant que, guidées par des notions aussi indécises, les observa
tions soient mal distribuées dans les classifications du temps.
C'est bien véritablement à Esquirol que l'on doit la distinction
nécessaire, et aujourd'hui classique. Ce qu'il y a d'important dans
l'idée de démence, Esquirol l'indique, et il y revient sous plusieurs
formes : « Dans la démence, dit-il, les insensés déraisonnent parce
que les organes de la pensée ont perdu leur énergie et la force
nécessaire pour remplir leurs fonctions. Dans l'imbécillité ou
l'idiotie, les organes n'ont jamais été bien conformés pour que
1. Pinel. Traité médico-philosophique sur l'aliénation mentale, Paris,
1809, p. 139.
2. Idem., p. 179.
3.p. 139. 268 MÉMOIRES ORIGINAUX
ceux qui en sont atteints puissent raisonner juste '. »P.ar ces mots,
Esquirol a fait admirablement la distinction entre l'acquis et le
congénital; l'acquis, c'est la démence; le congénital, c'est l'idiotie 2.
La paralysie générale. — Après Esquirol, la conception de la
démence et la composition du groupe des démences reçoivent
d'importantes modifications. La composition du groupe, pour com
mencer par là, s'enrichit et se précise d'abord par la découverte de
Bayle. En d822, cet auteur décrit pour la première fois, et d'après
six observations, la paralysie générale. Jusque-là cette espèce de
démence qui s'accompagne, comme on sait, d'embarras de la
parole, était considérée comme une complication de la folie, comme
sa terminaison fréquente; avec Bayle, la voilà qui constitue un
groupe particulier, une entité morbide bien définie. L'anatomie
pathologique lui fournit une base solide. Calmeil achève de la di
stinguer des affaiblissements intellectuels, du ramollissement céré
bral et de l'hémorragie, qui constituent d'autres démences, de nature
différente. Et ainsi commence à se constituer tout un groupe de
démences, liées à des lésions organiques du cerveau, et qui reçoi
vent leur autonomie du fait que leur anatomie est devenue évidente.
La paralysie générale est une démence à lésions diffuses, le ramol
lissement et l'hémorragie sont des démences à lésions circonscrites.
Pendant que le groupe des s'enrichit par cet apport,
d'autre part, et comme compensation, il s'appauvrit, par suite d'un
nouveau travail de précision qui s'opère sur l'idée de démence.
Esquirol l'avait définie par son caractère d'acquisition; il mettait
l'accent sur ce caractère, il le considérait comme important au point
d'être suffisant. Aussi, ayant constaté que certains malades que
Pinel avait rangés dans l'idiotisme présentaient un état de stupeur
qui était acquis, il avait fait de ces malades des déments, bien que
leur stupidité éclatât brusquement et

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