Les partis albanais en République de Macédoine : le cercle vicieux de l ethnopolitique (1990-2006) - article ; n°4 ; vol.38, pg 83-114
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Revue d’études comparatives Est-Ouest - Année 2007 - Volume 38 - Numéro 4 - Pages 83-114
Cet article analyse les dynamiques de l'ethnopolitique en République de Macédoine entre 1990 et 2006 en se concentrant sur la minorité albanaise qui représente quelque 25 % de la population. Depuis les débuts du processus de démocratisation, les partis albanais ont joué un rôle majeur dans la vie politique macédonienne. Celle-ci a été principalement structurée autour de clivages ethniques, même si elle comprend également des éléments de clivage social et confessionnel. Lorsque la Macédoine est devenue indépendante en 1991, sa population albanaise avait subi des décennies de discrimination structurelle. L'ethnicité a dès lors été hautement politisée, d'où le développement d'une structure unanimement ethnique du vote. Si la participation des partis albanais au gouvernement depuis 1992 illustre leur implication dans la vie du pays, elle est également motivée par le désir de partager la rente du pouvoir. Le clientélisme ethnique et la corruption ont fortement érodé leur légitimité, ce qui, conjugué à l'intransigeance des hommes politiques macédoniens, a contribué à l'explosion de violence de 2001. Bien que la plupart des demandes albanaises aient été depuis lors satisfaites, les partis politiques albanais continuent à pratiquer le seul jeu qu'ils connaissent : celui de la mobilisation ethnique.
Albanian parties in the Republic of Macedonia:
The vicious circle of ethnopolitics (1990-2006)
The Albanian minority, which makes up about 25% of Macedonia's population, suffered from decades of structural discrimination before the country's independence in 1991. Since democratization, Albanian political parties have played a major role in the politics of Macedonia, a country where cleavages run along mainly ethnic but also social and confessional lines. Highly politicized ethnic identities have led to unanimous voting patterns. Although the participation of Albanian parties in government since 1992 is evidence that they are stakeholders in the country, it has also been motivated by the desire to share in the spoils of power. Ethnic patronage and corruption have undermined the legitimacy of Albanian parties. This, along with the intransigence of Macedonian politicians, led to the outbreak of violence in 2001. Although most Albanian demands have been met in the meantime, their parties still play the only game they know: the ethnic one.
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2007
Nombre de lectures 61
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Ulf Brunnbauer
Nadège Ragaru
Les partis albanais en République de Macédoine : le cercle
vicieux de l'ethnopolitique (1990-2006)
In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 38, 2007, N°4. Les politisations de l'identité dans les Balkans
contemporains. pp. 83-114.
Citer ce document / Cite this document :
Brunnbauer Ulf, Ragaru Nadège. Les partis albanais en République de Macédoine : le cercle vicieux de l'ethnopolitique (1990-
2006). In: Revue d’études comparatives Est-Ouest. Volume 38, 2007, N°4. Les politisations de l'identité dans les Balkans
contemporains. pp. 83-114.
doi : 10.3406/receo.2007.1864
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/receo_0338-0599_2007_num_38_4_1864Résumé
Cet article analyse les dynamiques de l'ethnopolitique en République de Macédoine entre 1990 et 2006
en se concentrant sur la minorité albanaise qui représente quelque 25 % de la population. Depuis les
débuts du processus de démocratisation, les partis albanais ont joué un rôle majeur dans la vie
politique macédonienne. Celle-ci a été principalement structurée autour de clivages ethniques, même si
elle comprend également des éléments de clivage social et confessionnel. Lorsque la Macédoine est
devenue indépendante en 1991, sa population albanaise avait subi des décennies de discrimination
structurelle. L'ethnicité a dès lors été hautement politisée, d'où le développement d'une structure
unanimement ethnique du vote. Si la participation des partis albanais au gouvernement depuis 1992
illustre leur implication dans la vie du pays, elle est également motivée par le désir de partager la rente
du pouvoir. Le clientélisme ethnique et la corruption ont fortement érodé leur légitimité, ce qui, conjugué
à l'intransigeance des hommes politiques macédoniens, a contribué à l'explosion de violence de 2001.
Bien que la plupart des demandes albanaises aient été depuis lors satisfaites, les partis politiques
albanais continuent à pratiquer le seul jeu qu'ils connaissent : celui de la mobilisation ethnique.
Abstract
Albanian parties in the Republic of Macedonia:
The vicious circle of ethnopolitics (1990-2006)
The Albanian minority, which makes up about 25% of Macedonia's population, suffered from decades of
structural discrimination before the country's independence in 1991. Since democratization, Albanian
political parties have played a major role in the politics of Macedonia, a country where cleavages run
along mainly ethnic but also social and confessional lines. Highly politicized ethnic identities have led to
unanimous voting patterns. Although the participation of Albanian parties in government since 1992 is
evidence that they are stakeholders in the country, it has also been motivated by the desire to share in
the spoils of power. Ethnic patronage and corruption have undermined the legitimacy of Albanian
parties. This, along with the intransigence of Macedonian politicians, led to the outbreak of violence in
2001. Although most Albanian demands have been met in the meantime, their parties still play the only
game they know: the ethnic one.o
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Les partis albanais en République de Macédoine
Le cercle vicieux de l'ethnopolitique (1990-2006)
Ulf BRUNNBAUER
Maître de conférences, Institut d'études est-européennes,
Université libre de Berlin (ulf@zedat.fu-berlin.de)
Résumé : Cet article analyse les dynamiques de l'ethnopolitique en République de
Macédoine entre 1990 et 2006 en se concentrant sur la minorité albanaise qui
représente quelque 25 % de la population. Depuis les débuts du processus de dé
mocratisation, les partis albanais ont joué un rôle majeur dans la vie politique
macédonienne. Celle-ci a été principalement structurée autour de clivages ethni
ques, même si elle comprend également des éléments de clivage social et confes
sionnel. Lorsque la Macédoine est devenue indépendante en 1991, sa population
albanaise avait subi des décennies de discrimination structurelle. L'ethnicité a dès
lors été hautement politisée, d'où le développement d'une structure unanimement
ethnique du vote. Si la participation des partis albanais au gouvernement depuis
1992 illustre leur implication dans la vie du pays, elle est également motivée par
le désir de partager la rente du pouvoir. Le clientélisme ethnique et la corruption
ont fortement érodé leur légitimité, ce qui, conjugué à l'intransigeance des hom
mes politiques macédoniens, a contribué à l'explosion de violence de 2001. Bien
que la plupart des demandes albanaises aient été depuis lors satisfaites, les partis
politiques albanais continuent à pratiquer le seul jeu qu'ils connaissent : celui de
la mobilisation ethnique. Ulf Brunnbauer 84
Abdi Redziev, un Albanais de 28 ans, sans emploi, qui avait voté pour le
Parti pour la prospérité démocratique (PPD1) lors des premières élections
pluripartites de novembre 1990 en République de Macédoine2, a déclaré
avoir effectué ce choix « parce qu'ils défendent mes droits et les droits de
ma famille, les intérêts de tous les Albanais ». De la même manière, Me-
rhem Ramiseli, un ouvrier albanais de 42 ans, précisait : « J'ai voté pour
le Parti pour la prospérité démocratique parce que c'est mon parti. Les
Macédoniens ne voteront pas pour mon parti et je ne voterai pas pour les
leurs. Nous sommes différents »3. Ces déclarations de deux citoyens « ordi
naires » éclairent certains des problèmes qui seront abordés ici.
En Macédoine, l'enjeu politique principal est l'ethnicité : les Macédon
iens votent pour des partis politiques ethniquement macédoniens tandis
que les Albanais votent pour des partis albanais4. Depuis
sa transition vers la démocratie et le pluralisme politique, le pays a vu les
gouvernements se succéder et les partis proliférer. Le seul élément stable
de la vie politique macédonienne est la part des suffrages que se partagent
les blocs « macédonien » et « albanais », restée virtuellement inchangée.
Les membres de la communauté albanaise ont toujours considéré que
leurs intérêts particuliers étaient mieux représentés par des partis albanais,
lesquels s'emploient à convaincre les Albanais que leurs problèmes sont
intrinsèquement liés à leur affiliation ethnique, de sorte que seul un parti
albanais est en mesure de représenter adéquatement leurs intérêts5.
La différenciation de l'arène politique selon les affiliations ethniques et
l'émergence de partis ethniques font de la Macédoine un cas d'étude perti
nent pour l'analyse des dynamiques de l'ethnopolitique et des conflits ethni-
1. Dans cet article, nous citons les acronymes des partis politiques albanais dans leur langue
d'origine ; la liste des principaux d'entre eux figure en annexe.
2. Une note terminologique s'impose ici : nous utiliserons l'expression « République de Ma
cédoine », c'est-à-dire la traduction du nom que la Macédoine s'est officiellement donné
lorsqu'elle a proclamé son indépendance en octobre 1991 (Republika Makedonija). La
Grèce s'étant violemment élevée contre ce choix qui témoignait, selon elle, des ambitions
territoriales de la Macédoine, la reconnaissance internationale de celle-ci eut lieu en avril
1993 et elle fut admise à l'ONU sous le nom provisoire d'« Ancienne République yougos
lave de Macédoine » (ARYM), qui fait toujours l'objet de négociations. En 2004, toutefois,
les États-Unis se sont ralliés à l'expression « République de Macédoine », à la consternation
de leur partenaire au sein de l'OTAN, la Grèce.
3. Cités dans Uzunov & Caneva, 1992, p. 264.
4. En anglais, il est de coutume d'utiliser « ethnie Macedonians » pour désigner la frange
de la population macédonienne qui s'autodétermine, dans un registre ethnique et culturel,
comme « macédonienne » (et non l'ensemble des citoyens de la Macédoine) et « ethnie Al
banians » pour définir les habitants de la Macédoine dont l'identité est albanaise. Cet usage
étant rare en français, les deux expressions ont été respectivement traduites par «

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