Michel Leiris, 1901-1990 - article ; n°117 ; vol.30, pg 5-6

Denise Paulme

Description

Cahiers d'études africaines - Année 1990 - Volume 30 - Numéro 117 - Pages 5-6
2 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: CAHIERS_D-ETUDES_AFRICAINES
• Publié le: 01 janvier 1990
• Nombre de lectures: 14
• Langue: Français

Extrait

Madame Denise Paulme
Michel Leiris, 1901-1990
In: Cahiers d'études africaines. Vol. 30 N°117. 1990. pp. 5-6.
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Paulme Denise. Michel Leiris, 1901-1990. In: Cahiers d'études africaines. Vol. 30 N°117. 1990. pp. 5-6.
doi : 10.3406/cea.1990.2122
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cea_0008-0055_1990_num_30_117_2122Michel Leiris
1901-1990
La figure de Michel Leiris restera comme celle un témoin irrempla able
de son époque ne serait-ce que par sa double appartenance ethnologue et
écrivain Vous avez bien connu Comment était-il sur le terrain Les
deux propositions me laissent perplexe je ne ai pas connu en Afrique
où son expérience de terrain limitée aux deux séjours que la mission
Dakar-Djibouti 1931-33 fit chez les Dogo et en Abyssinie est magnifi
quement présentée dans Afrique fantôme prévu abord comme le
journal de bord de la mission lu chaque soir ses compagnons entreprise
tourna vite au journal intime document une inépuisable richesse et qui
est encore hui le livre initiatique de bien des adolescents Il ne
faudrait toutefois pas oublier que ouvrage sa parution par son absolue
franchise fit scandale dans le petit milieu qui intéressait alors ethno
graphie et fut désavouée par Marcel Griaule chef une mission qui appa
raît hui comme la dernière grande mission coloniale La réaction
brutale de Griaule suscita chez Leiris un profond désarroi La rupture entre
les deux hommes fut totale et laissa chez Leiris une blessure profonde
Afrique fantôme restera pour lui un livre maudit mis au pilon sous le
gouvernement de Vichy il en fut pas moins réédité par la suite et demeure
avec Au coeur des ténèbres de Joseph Conrad comme un des chefs-
uvre inspira Afrique
est son retour en 1934 que je connus Leiris tudiante débutante
je le voyais très lointain auréolé du prestige des grands voyageurs entouré
de ses amis surréalistes et aurais pas osé approcher Nous apprîmes
nous connaître au cours de installation de exposition de la mission
laquelle je participai modestement et où sa maladresse manier le marteau
et la pince nous réjouissait tous Puis ce fut pour moi aussi Sanga où une
bourse Rockefeller me permit de séjourner en 1935 avec mon amie Deborah
Lifchitz qui devait plus tard être engloutie par Auschwitz Curieusement
cette séparation nous rapprocha Leiris et moi car je retrouvai Sanga
ses informateurs qui parlaient de lui comme un ami demeuré très proche
mon retour dans les sous-sols du musée de Homme rebâti pour expo
sition de 1937 deux petits bureaux mitoyens nous abritèrent et est
ensemble que nous nous vîmes confier par le Dr Rivet la charge du dépar
tement Afrique noire Le travail organisa tout naturellement je
occupai des collections veillant leur inventaire au classement des objets
et leur installation alors que dans la pièce voisine Leiris recevait amis et
visiteurs dont beaucoup artistes désireux ou non un contact avec les
objets plus direct que celui offraient les galeries publiques
Cahiers tudes africaines IIJ XXX-i 1990 pp 5-6 MICHEL LEIRIS
Nos amis et collègues André Schaeffner le premier nous nous étions
mariés en 1937) qui dirigeait le département ethno-musicologie Alfred
Métraux et bien autres se joignaient aussi souvent nous pour de longues
discussions informelles où chacun occasion évoquait ses expériences per
sonnelles Nous vécûmes occupation terrés au musée nous savions que les
uns et les autres avions une activité clandestine mais évitions en parler
La libération aussi fut vécue en commun Par la suite Leiris demeura fidèle
son bureau du musée mais sans plus guère se soucier du département
dont en le quittant en 1958 je laissai la charge Jacqueline Delange
Nous voyant moins souvent nous en demeurâmes pas moins très proches
la mort de mon mari
la réflexion la personnalité de Leiris ethnologue apparaît unique
au long une carrière poursuivie sans problème au CNRS il jamais
donné enseignement appartenant aucune école il aura formé
aucun disciple idée seule lui en aurait paru absurde Son influence qui
est grande tient entièrement sa personne Leiris est un révolté il admet
pas le monde tel il est fait et refuse dans un premier mouvement la
condition homme Dans Biffures il explique comment il été amené
choisir un métier ethnographie qui le placerait croyait-il en marge
du temps et une activité la poésie la littérature qui le séparerait de acti
vité commune art littéraire était pour lui la fois une fin et un moyen
grâce auquel homme et le monde au lieu de abîmer dans une uvre
chargée de les manifester se découvrent tels en eux-mêmes.
oeuvre en cours accompagne auteur comme un double et on ne lui voit
pas autre terme que celui de Mais la lutte contre le temps est
illusoire et son inlassable exigence de vérité envers lui mais aussi envers
les autres aura conduit Leiris une dénonciation du colonialisme où de
Afrique fantôme aux Contacts de civilisation en Martinique et en
Guadeloupe 1971) il demeure fidèle lui-même la fois unique et
exemplaire
Denise PAULME
UVRE ETHNOLOGIQUE DE MICHEL LEIRIS
Afrique fantôme Paris Gallimard 1934
La langue secrète des Dogons de Sanga Paris Institut ethnologie 1948
Race er civilisation Paris Unesco 1961
La possession et ses aspects théâtraux chez les thiopiens de Gondar Paris Pion 1958
Afrique noire en collaboration avec Jacqueline DELANGE Paris Gallimard 1967
Univers des formes
Cinq études ethnologie Paris Unesco 1969
Contacts de civilisation en Martinique et en Guadeloupe Paris Unesco/Gallimard 1971