Régimes globaux de prohibition et trafic international de drogue - article ; n°131 ; vol.33, pg 537-552
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Description

Tiers-Monde - Année 1992 - Volume 33 - Numéro 131 - Pages 537-552
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ethan A. Nadelmann
Régimes globaux de prohibition et trafic international de drogue
In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°131. pp. 537-552.
Citer ce document / Cite this document :
Nadelmann Ethan A. Régimes globaux de prohibition et trafic international de drogue. In: Tiers-Monde. 1992, tome 33 n°131.
pp. 537-552.
doi : 10.3406/tiers.1992.4706
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1992_num_33_131_4706GLOBAUX DE PROHIBITION RÉGIMES
ET TRAFIC INTERNATIONAL DE DROGUE*
par Ethan A. Nadelmann**
Présentation
Ce texte est extrait d'un article plus général de l'auteur sur les régimes
globaux de prohibition dans la société internationale. Cet article a pour
objet d'étudier les dynamiques d'émergence et de développement des
normes en matière de prohibition au niveau international et au niveau des
Etats nationaux. Ainsi traite- t-il successivement : de la piraterie maritime,
de l'esclavage et du trafic d'esclaves, du faux monnayage, du détournement
aérien, du trafic de femmes et d'enfants à des fins de prostitution et du tra
fic de substances psychoactives contrôlées, en introduisant d'autres
domaines comme l'environnement qui constitue un champ nouveau essentiel
sous contrôle.
Ce texte offre une mise en perspective très large des problèmes de la
drogue et de la prohibition fondée à la fois sur l'histoire et sur la comparais
on. La référence comparative porte non seulement sur les différents
domaines d'interdiction, mais aussi et surtout sur les différentes substances
psychoactives, illégales et légales, avec notamment le cas de l'alcool.
D'autres articles de ce numéro de Tiers Monde ont montré la place
centrale de l'intervention de l'Etat et de la loi, avec les régimes de prohibit
ion, dans la formation des marchés, tant du côté de l'offre que de la
demande. Ici, le texte montre, en plus, comment la construction des normes
internationales constitue un enjeu entre les pays et un instrument de pou-
* Cet article de Ethan Nadelmann, intitulé Global prohibition regimes : the evolution of norms
in international society, a été publié dans la revue International Organisation, 44, 4, Autumn 1990.
Nous remercions la World Peace Foundation et le Massachusets Institute of Technology de nous
permettre de reproduire cet extrait.
*♦ Ethan Nadelmann est professeur à la Woodrow Wilson School of Public and International
Affaire, Princeton University, Etats-Unis.
Revue Tiers Monde, t. XXXIII, n° 131, Juillet-Septembre 1992 538 Ethan A. Nadelmann
voir de certains d'entre eux, notamment du Nord sur le Sud, avec le rôle
actuellement dominant des Etats-Unis en matière de drogues illicites. Il
discute aussi les limites de l'efficacité des régimes globaux de prohibition
dans ce domaine.
P. S. et M. S.
Le désir qu'éprouvent les individus de modifier leur état psychique est
l'une des rares constantes dans l'histoire de l'humanité civilisée : il en est de
même pour ce qui est de l'usage des substances psychoactives pour y parven
ir1. L'alcool, le tabac, l'opium, le cannabis, le café et la coca ont été respec
tivement utilisés dans différentes sociétés sous diverses formes pendant plu
sieurs centaines et dans certains cas plusieurs milliers d'années — tout
comme nombre d'autres substances psychoactives2. Il en a été fait usage
dans un but médical, rituel ou comme divertissement et elles ont été perçues
autant comme un grand mal que comme un grand bien ; chacune a été sou
mise à un contrôle gouvernemental ; leur usage et leur commerce ont fait
l'objet de sanctions allant de la peine de mort à l'amende, l'assignation à
résidence et autres mesures prévues par la réglementation. Chacune de ces
drogues a été abondamment disponible sur un marché entièrement
incontrôlé. Avant le XXe siècle aucun modèle global n'a pu être élaboré à
partir des normes et des mesures légales régissant le commerce et l'usage de
ces substances. Aujourd'hui, la grande majorité des Etats a adhéré au
régime de la prohibition globale des drogues. Presque tous ont maintenant
ratifié la Convention unique des Drogues narcotiques de 1 96 1 et 90 environ
ont signé celle qui, en 1 97 1 , lui a succédé. La production, la vente et même
la possession de cannabis, de cocaïne et de la plupart des opiacés, hallucino
gènes, barbituriques, amphétamines et tranquillisants, en dehors des
canaux strictement réglementés de la médecine et de la science, sont main
tenant passibles de sanctions pénales dans pratiquement tous les pays ; les
organes de justice pénale se sont sérieusement impliqués tant dans les
enquêtes que dans la répression des violations des lois antidrogue et la
1. Voir Andrew Weil, The Natural Mind (Boston, Houghton Mifflin, 1972), p. 37-38. A propos
de cette affirmation, on peut noter une exception historique : les Esquimaux, dont l'environnement
limite considérablement la possibilité de cultiver quoi que ce soit, semblent n'avoir jamais utilisé de
substances psychoactives avant d'avoir été en contact avec les civilisations occidentales.
2. Voir Ernest Abel, Marijuana : The first Twelve Thousand Years (New York, Plenum Press,
1980) ; Charles E. Terry et Mildred Pellens, The Opium Problem (New York, Bureau of Social Hyg
iene, 1928), p. 53-60 ; Joseph Kennedy, Coca Exotica (New York, Cornwall Books, 1985) ;
F. W. Fairholt, Tobacco Its History and Associations (Londres, Chapman & Hall, 1859) ; et Louis
Lewin, Phantastica Narcotic and Stimulating Drugs, 2e éd., trans. P. H. A. Wirth (Londres, Kegan
Paul, 1931). Régimes globaux de prohibition 539
rhétorique de la « guerre des drogues » a, elle aussi, été globalisée. Le pro
cessus de l'évolution de ce régime doit être compris comme la confluence
des perceptions, des intérêts et des valeurs morales dans les couches domi
nantes des Etats les plus puissants — une influence particulière étant
exercée par les partenaires nord-américains, dans l'élaboration du régime
qui serait conforme aux normes qu'ils souhaitent privilégier.
Jusqu'à la première partie du XIXe siècle, le gouvernement britannique
a été le partenaire principal du commerce de l'opium. Les intérêts
financiers étaient si importants que les efforts déployés vers la fin de 1830
par le gouvernement de la Chine impériale dans le but de stopper les arr
ivages d'opium en provenance des Indes britanniques ont été réprimés par
la force armée1. Toutefois c'est à l'intérieur de la Grande-Bretagne que
— pendant la Guerre de l'Opium — naquit l'opposition au commerce de
ce produit et cette opposition se renforça au cours des années qui suivi
rent. Comme ce fut le cas lors du mouvement anti-esclavagiste, les Quak
ers britanniques se distinguèrent rapidement en tant que pionniers de la
campagne antidrogue ; en effet un grand nombre de dirigeants de cette
organisation s'impliquèrent activement dans l'un et l'autre de ces deux
mouvements 2. En 1874, les Quakers fondèrent la Société anglo-orientale
pour la Suppression du Commerce de l'Opium. Cette dernière joua un
rôle prépondérant durant les quatre décennies suivantes, en mobilisant
l'opinion contre ce trafic, par le prosélytisme auprès du public et aussi par
la pression exercée sur le gouvernement3. Les membres de l'organisation
furent soutenus dans leurs efforts par les missionnaires (qui rendaient
l'opium responsable de leur sérieux échec en Chine)4, par d'autres associa
tions anti-opium et par des hommes politiques appartenant en majorité
au Parti libéral. Des parallèles avec la campagne anti-esclavagiste ont été
établis par les militants anti-opium, et soulignés dans le pamphlet publié
en 1898 par la Société pour la Suppression du Commerce de l'Opium inti
tulé « The Unchangeableness of Sin : The Slave Trade a Century ago and
1. Voir John King Fairbank, Trade and Diplomacy on the China Coast (Cambridge Mass., Har
vard University Press, 1953) ; P. W. Fay, The Opium War 1840-1842 (Chapel Hill, University of
North Carolina 1975) ; et Brian Inglis, The War (Londres, Hodder & Stoughton, 1976).
2. Voir Bruce D. Johnson, Righteousness Before Revenue : The Forgotten Moral Crusade
Against the Indo-Chinese Opium Trade, Journal of Drug Issues, 5 (automne 1975), p. 304-326 ; Peter
D. Lowes, The Genesis of International Narcotics Control (Genève, Libr

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