Septime Sévère et ses fils, Restitutores Vrbis : la personnalisation des mérites impériaux - article ; n°160 ; vol.6, pg 175-199

Anne Daguet-Gagey

Description

Revue numismatique - Année 2004 - Volume 6 - Numéro 160 - Pages 175-199
Summary. — A new monetary legend, that of restitutor Vrbis, appeared under the joint reign of Septimius Severus and his sons Caracalla and Geta. This formula is to be found on several issues dating to the years AD 200-201, and again in 207. It was intended to convey the idea that the African emperor had restored order to the capital after the chaotic reign of Commodus. This restoration had double significance: Septimius Severus gave the impulse for numerous public works in order to restore ancient buildings and erect new monuments. He was also the emperor who restored Rome to the plenitude of its power and dominion. Septimius Severus associated his sons in this vast project, in particular the elder Caracalla. The legend restitutor Vrbis should be studied in the context of others which appeared during the same period: rector orbis, fundator, pacator orbis as well as propago imperii. This latter emphasised the continuity of power in the Seveřan family. The tendency to personalise imperial virtues, already noticeable from the reign of Hadrian, increased markedly in this period.
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Publié par: REVUE_NUMISMATIQUE
• Publié le: 01 janvier 2004
• Nombre de lectures: 28
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Anne Daguet-Gagey
Septime Sévère et ses fils, Restitutores Vrbis : la
personnalisation des mérites impériaux
In: Revue numismatique, 6e série - Tome 160, année 2004 pp. 175-199.
Abstract
Summary. — A new monetary legend, that of restitutor Vrbis, appeared under the joint reign of Septimius Severus and his sons
Caracalla and Geta. This formula is to be found on several issues dating to the years AD 200-201, and again in 207. It was
intended to convey the idea that the African emperor had restored order to the capital after the chaotic reign of Commodus. This
restoration had double significance: Septimius Severus gave the impulse for numerous public works in order to restore ancient
buildings and erect new monuments. He was also the emperor who restored Rome to the plenitude of its power and dominion.
Septimius Severus associated his sons in this vast project, in particular the elder Caracalla. The legend restitutor Vrbis should be
studied in the context of others which appeared during the same period: rector orbis, fundator, pacator orbis as well as propago
imperii. This latter emphasised the continuity of power in the Seveřan family. The tendency to personalise imperial virtues,
already noticeable from the reign of Hadrian, increased markedly in this period.
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Daguet-Gagey Anne. Septime Sévère et ses fils, Restitutores Vrbis : la personnalisation des mérites impériaux. In: Revue
numismatique, 6e série - Tome 160, année 2004 pp. 175-199.
doi : 10.3406/numi.2004.2557
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/numi_0484-8942_2004_num_6_160_2557Daguet-Gagey* Anne
Septimě Sévère et ses fils, Restitutores Vrbis
La personnalisation des mérites impériaux
(PL XIII)
Résumé. — Une nouvelle légende monétaire apparaît sous le règne conjoint de Septimě
Sévère (193-21 1) et de ses fils, Caracalla et Géta : celle de restitutor Vrbis. Cette formule se ren
contre sur plusieurs séries d'émissions, dans les années 200-201 ap. J.-C, puis en 207 ap. J.-C.
Elle veut signifier la remise en ordre de la capitale à laquelle l'empereur africain s'est attelé,
après les désordres du règne de Commode, une restauration qu'il faut entendre au double sens
du terme : Septimě Sévère engagea, en effet, de nombreux chantiers de restauration auxquels
vinrent s'ajouter de nouvelles constructions ; il fut aussi celui qui rétablit Rome dans la plénitu
de de sa puissance et de sa domination. Septimě Sévère ne manqua pas d'associer ses fils à cette
vaste entreprise, et tout particulièrement l'aîné, Caracalla. La légende Restitutor Vrbis peut, par
ailleurs, être rapprochée de quelques autres qui fleurissent dans les mêmes années : rector orbis,
fundator pads, pacator orbis ainsi que propago imperii, qui insiste sur la continuité du pouvoir
au sein de la famille des Sévères. La tendance à la personnalisation des mérites impériaux, sen
sible depuis le règne d'Hadrien connaît alors une nette accélération.
Summary. — A new monetary legend, that of restitutor Vrbis, appeared under the joint reign
of Septimius Severus and his sons Caracalla and Geta. This formula is to be found on several
issues dating to the years AD 200-201, and again in 207. It was intended to convey the idea that
the African emperor had restored order to the capital after the chaotic reign of Commodus. This
restoration had double significance: Septimius Severus gave the impulse for numerous public
works in order to restore ancient buildings and erect new monuments. He was also the emperor
who restored Rome to the plenitude of its power and dominion. Septimius Severus associated his
sons in this vast project, in particular the elder Caracalla. The legend restitutor Vrbis should be
studied in the context of others which appeared during the same period: rector orbis, fundator,
pacator orbis as well as propago imperii. This latter emphasised the continuity of power in the
Seveřan family. The tendency to personalise imperial virtues, already noticeable from the reign
of Hadrian, increased markedly in this period.
Introduction
L'empereur Septimě Sévère prit le pouvoir sur le Danube en avril 193
ap. J.-C. et se fit reconnaître à Rome au mois de juin suivant. Ce n'est toutefois
qu'en 197 qu'il réussit à s'imposer comme le maître incontesté de l'œkoumè-
ne. Réorganiser un empire perturbé par les dérèglements du règne de Commo-
* Université Paris VIII-Vincennes/Saint-Denis, 2, rue de la Liberté, 93200 Saint-Denis
RN2004,p. 175-199 76 Anne Daguet-Gagey 1
de et les péripéties d'une guerre civile longue de près de quatre années, restau
rer la figure impériale mise à mal au temps du dernier Antonin, veiller, enfin,
à ce que Г impérium demeurât durablement au sein de la gens Septimia, tels
sont les objectifs pour le moins ambitieux que Septimě Sévère se fixa, et qu'il
atteignit en grande partie.
Pour convaincre tout un chacun dans l'empire qu'un véritable chef d'État
siégeait au Palatin, le souverain disposait de l'arsenal « publicitaire » habituel :
rhéteurs, portraits, inscriptions, monnaies..., exaltant tous la personne du sou
verain, ses vertus, ses réalisations. Parmi les nombreuses émissions monétaires
alors réalisées, il est une série qui mérite à notre sens d'être « revisitée » : il
s'agit des monnaies saluant en l'empereur africain et en ses héritiers les resti-
tutores Vrbis. Cette formule apparaît, en effet, sur des frappes monétaires, à
l'époque des premiers Sévères. La présence, sur des pièces, du terme restitutor
n'est assurément pas nouvelle ; le mot se rencontre à plusieurs reprises sur des
revers des Ier-IIe s., appliqué à tout ou partie de l'empire, mais c'est avec les
Sévères que le vocable fait son apparition, associé à la capitale du monde
romain, à cette Vrbs de plus en plus fréquemment qualifiée de sacra.
Le sens à donner à la formule restitutor Vrbis est parfaitement clair : les pre
miers Sévères furent à la fois les rénovateurs de la Ville, au sens architectural et
urbanistique du terme, et les restaurateurs d'une ville, capitale d'empire, siège
de souveraineté, rétablie grâce à eux dans la plénitude de son rôle politique.
À étudier de près le monnayage du règne conjoint de Septimě Sévère et de
ses fils l, il apparaît que la formule restitutor Vrbis ne peut être dissociée de plu
sieurs autres, qui vantent plus particulièrement les qualités de pacificateurs
(fundator pads, pacator orbis) et de maîtres du monde (rector orbis) des
membres du collège impérial. Ces différentes légendes apparaissent toutes plus
ou moins simultanément, si l'on s'en tient du moins à la classification des
émissions proposée par P. V Hill.
L'examen attentif de ce monnayage conduit encore à constater la forme par
ticulièrement personnalisée des légendes de revers. Il est manifeste que les
premiers Sévères ont explicitement voulu exalter leur propre personne plus
encore que leurs réalisations politiques et militaires, et l'on peut se demander
s'il s'agit là d'une pratique numismatique nouvelle ou seulement de l'accen
tuation d'une tendance précédemment initiée. À cet égard, du fait que les monn
aies partagent avec les inscriptions la faveur d'être des supports privilégiés de
la propagande impériale et des vecteurs idéologiques efficaces, il nous a paru
utile d'élargir notre enquête à la sphère épigraphique, certaines inscriptions
1 . Voir RIC : M. Mattingly, E. A. Sydenham, C.H. V Sutherland, The Roman Imperial
Coinage, vol. IV, 1, Londres, 1936 (réimp. 1962) ; BMC : H. Mattingly, Coins of the Roman
Empire in the British Museum, vol. V, Londres, 19752 ; P. V Hill, The Coinage ofSeptimius Seve-
rus and his Family of the Mint of Rome, A. D. 193-21 7, Londres, 1 9772. Cette dernière étude tente
de reconstituer la série des différentes émissions successivement lancées sous Septimě Sévère et
Caracalla.
RN2004,p. 175-199 Sévère et ses fils, Restitvtores Vrbis 177 Septimě
présentant avec les frappes monétaires des similitudes évidentes, voire parfois
une antériorité chronologique significative.
I - Les émissions de 200-201 ap. J.-C. : dans l'attente du retour des
souverains à Rome
Porté au pouvoir en 193 ap. J.-C, Septimě Sévère eut à lutter dans un pre
mier temps contre plusieurs compétiteurs, Pescennius Niger, éliminé en