Stratégies de coopération et formation d'un marché : les nouveaux services de télécommunication - article ; n°1 ; vol.56, pg 71-100

Eric Brousseau, Bertrand Quélin

Description

Revue d'économie industrielle - Année 1991 - Volume 56 - Numéro 1 - Pages 71-100
This article analyzes the so called « value added » telecommunication services market. These services are the result of a combination of « functions » assumed by different types of economic agents.
Therefore to control the organization of the production, economic agents have to gain control over the assembling process. This control follows from the ownership of specific and not substitutable assets.
This article enables us to analyze the constitution of a new market and to deepen the theoretical thinking on the firm. Indeed, for the supply side as well as for users, these new services show that economic activity implies the recognition of a « community » beyond legal boundaries.
L'article analyse les services de communication « à valeur ajoutée ». Ces services sont constitués par l'assemblage de fonctions qui relèvent de la compétence d'acteurs économiques différents. Dès lors, le contrôle de l'organisation de l'offre passe par la maîtrise de l'assemblage de ces fonctions. Celle-ci dépend pour une large part de la détention d'actifs spécifiques et non substituables.
Cet article permet d'analyser la formation d'un nouveau marché et d'approfondir la réflexion théorique sur le statut et la nature de la firme. En effet, pour les offreurs (qui doivent collaborer) comme pour les utilisateurs, les nouveaux services de communication traduisent la reconnaissance d'un « collectif » dépassant les frontières juridiques classiques dans la réalisation de l'activité économique.
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: REVUE_D-ECONOMIE_INDUSTRIELLE
• Publié le: 01 janvier 1991
• Nombre de lectures: 24
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 3 Mo

Extrait

Eric Brousseau
Bertrand Quelin
Stratégies de coopération et formation d'un marché : les
nouveaux services de télécommunication
In: Revue d'économie industrielle. Vol. 56. 2e trimestre 1991. pp. 71-100.
Abstract
This article analyzes the so called « value added » telecommunication services market. These services are the result of a
combination of « functions » assumed by different types of economic agents.
Therefore to control the organization of the production, economic agents have to gain control over the assembling process. This
control follows from the ownership of specific and not substitutable assets.
This article enables us to analyze the constitution of a new market and to deepen the theoretical thinking on the firm. Indeed, for
the supply side as well as for users, these new services show that economic activity implies the recognition of a « community »
beyond legal boundaries.
Résumé
L'article analyse les services de communication « à valeur ajoutée ». Ces services sont constitués par l'assemblage de fonctions
qui relèvent de la compétence d'acteurs économiques différents. Dès lors, le contrôle de l'organisation de l'offre passe par la
maîtrise de l'assemblage de ces fonctions. Celle-ci dépend pour une large part de la détention d'actifs spécifiques et non
substituables.
Cet article permet d'analyser la formation d'un nouveau marché et d'approfondir la réflexion théorique sur le statut et la nature de
la firme. En effet, pour les offreurs (qui doivent collaborer) comme pour les utilisateurs, les nouveaux services de communication
traduisent la reconnaissance d'un « collectif » dépassant les frontières juridiques classiques dans la réalisation de l'activité
économique.
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Brousseau Eric, Quelin Bertrand. Stratégies de coopération et formation d'un marché : les nouveaux services de
télécommunication. In: Revue d'économie industrielle. Vol. 56. 2e trimestre 1991. pp. 71-100.
doi : 10.3406/rei.1991.1367
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rei_0154-3229_1991_num_56_1_1367ERIC BROUSSEAU
CREÍ — Université Paris-Nord
BERTRAND QUÉLIN
Professeur-assistant — Groupe HEC
STRATÉGIES DE COOPERATION
ET FORMATION D'UN MARCHÉ :
LES NOUVEAUX SERVICES
DE TÉLÉCOMMUNICATION
INTRODUCTION
L'analyse des formes de coopération inter-entreprises qui se sont développées
dans la dernière décennie soulève deux types d'interrogations : celles relati
ves à la nature de la firme, et celles liées à l'organisation de la concurrence. Seul
un cadre d'analyse des dynamiques industrielles en jeu permet d'approfondir la
compréhension des logiques en œuvre. D'une part, Coase (1937), Richardson (1972)
et Williamson (1975) sont parmi les auteurs les plus importants à avoir sondé la
nature de la firme, sa relation au marché, ses formes d'organisation interne. Il
convient donc d'analyser les processus de formation d'un marché nouveau (les
services de télécommunications) compte tenu des structures industrielles en place
et de l'organisation intégrée, ou non, des entreprises concernées. D'autre part,
les stratégies de coopération développées par les acteurs pèsent sur l'organisation
de la concurrence et vont orienter la formation d'un marché nouveau. Les types
de coopération retenus vont dépendre du métier d'origine de la firme et de la seg
mentation des activités concernées. L'enjeu fondamental de la formation d'un mar
ché réside dans la gestion et la valorisation par l'entreprise de ses compétences
et de ses actifs spécifiques (Teece, [1988]) pour mettre en place une structure de
l'activité favorable à ses intérêts stratégiques. Tels sont les ressorts de la dynami
que industrielle de la formation du marché des nouveaux services de
télécommunications .
L'informatisation des entreprises et la croissance des réseaux publics de tél
écommunications se sont généralement réalisées de manière disjointe. Ce dévelop
pement séparé n'a pas permis la formation d'un système de traitement et de com
munication de l'information tout à fait cohérent. Cette double évolution s'est tra-
REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 56, 2e trimestre 1991 71 duite par des ruptures de charge au sein des entreprises et entre elles. Il existe pour
tant un important besoin de communications et de traitement conjoint de
l'information.
Trois nécessités y concourent : le pilotage des flux de marchandises des four
nisseurs aux clients ; la coordination entre les intervenants d'une filière de pro
duction ; et la distribution d'informations à caractère technique ou commercial
primordiale pour renforcer l'efficacité de la production ou pour alimenter les déci
sions. A ce triple besoin qu'éprouve toute entreprise s'ajoute celui, pour certains
producteurs de services, d'offrir leurs prestations à distance. Les « Services à Valeur
Ajoutée (SVA) » répondent précisément à ces besoins (cf. encadré 1).
Le vocable de SVA recouvre toute une gamme de services qui consistent soit
à traiter l'information véhiculée par les réseaux de communication, soit à offrir
à distance des services sur ces mêmes réseaux. L'interrogation de bases de don
nées, la réalisation sur réseau de transactions financières ou de réservations aérien
nes, la télétraduction, la consultation à distance de systèmes experts, la télésur
veillance, etc. relèvent de cette définition. A l'heure actuelle, le montant des reve
nus attribuables à ces services reste modeste. Pour la Communauté Européenne,
il s'élève à environ 6,3 milliards de francs, soit un peu plus de 1 % de l'ensemble
des revenus des services de télécommunications (450 milliards de francs). Ils repré
sentent cependant un ensemble de marchés en forte croissance.
Le potentiel de gains de productivité que recèlent les SVA est la cause de cette
croissance. Les utilisateurs sont pour l'essentiel des professionnels. Ces services
représentent un ensemble de moyens leur permettant :
— de diminuer le temps de réaction à des variations de plan de production ;
— d'améliorer la fiabilité de la réponse au marché ;
— d'accéder de manière rapide et intelligente à l'information commerciale, juri
dique, financière, technique etc.
Dans cet article on se propose d'analyser la structuration de ce marché. Après
avoir explicité la logique selon laquelle se contruit progressivement une demande
essentiellement professionnelle et fortement différenciée sectoriellement (I), nous
décrirons les éléments qui contraignent et pèsent sur le développement de l'offre
(II). Celle-ci doit s'adapter à une demande qui n'émerge que progressivement et
recourir à des compétences et savoir-faire complémentaires mais non maîtrisés.
Ces éléments permettront d'expliciter ensuite l'articulation des différentes straté
gies des industriels en présence (III). La concurrence se développe dans un cadre
plus ou moins coopératif.
Notre principal propos repose sur la thèse que les nouveaux services de com
munication sont constitués par l'assemblage de fonctions qui relèvent de la
pétence d'acteurs économiques différents. Dès lors, le contrôle de l'organisation
de la production et donc de la répartition de la valeur ajoutée entre les différents
protagonistes passe essentiellement par la maîtrise de l'assemblage. Nous mont
rons que cette maîtrise revient pour une large part aux acteurs qui détiennent les
actifs les plus rares et les moins substituables. Dans de nombreux cas, ces actifs
correspondent à une connaissance précise des besoins réels des usagers. Aussi, les
utilisateurs finaux et certaines SSII apparaissent les mieux armées pour maîtriser
l'assemblage des SVA.
72 REVUE D'ÉCONOMIE INDUSTRIELLE — n° 56, 2e trimestre 1991 1 Encadré
Le poids des aspects réglementaires
La définition effective de la notion de Service à Valeur Ajoutée est controversée. Quel est le
statut de tels services : correspondent-ils à une diversification des services de télécommunication
par l'intégration des fonctions de transmission et de traitement, ou bien est-ce un marché à part
ent