Thèse part II [v4.0] (TEXTE
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161Deuxième partieLes administrations et leslégislations forestières françaiseset italiennes162I) L’administration forestière contemporaine en France et enItalie : origines, missions et organisation :Dire que le monde est en pleine mutation est devenu un lieu commun, la planète1change, les sociétés évoluent et les hommes s’adaptent . Les forestiers et leur administrationont suivi ce mouvement de progrès qui a transformé l’Europe, l’Occident et la planète entièredepuis deux siècles. Il ne faut pourtant pas négliger de relever tous les indices qui témoignentde la permanence du passé et montrent que le progrès aussi fulgurant soit-il reste tributairede pratiques, de modes de pensée, de croyances, hérités de notre histoire. L’évolutioncontemporaine de l’administration forestière en offre l’exemple. Toujours soucieuse derépondre aux sollicitations de plus en plus nombreuses et variées de la société, elle a adaptéeson organisation, ses structures, son personnel et ses modes d’intervention sans jamaisrompre avec ses traditions (héritées du passé mais aussi largement générées par lesmissions du présent) constituées de nombreux éléments : une relation presque passionnelleavec la forêt, la persistance d’un certain esprit de conservation, le respect de la mémoire des2aînés, l’attachement à certains attributs ou prérogatives . On pourrait croire que le train duprogrès n’a que peu ressenti les influences de ces réminiscences de l’expérience forestière,ce n’est ...

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Langue Français

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161
Deuxième partie
Les administrations et les
législations forestières françaises
et italiennes162
I) L’administration forestière contemporaine en France et en
Italie : origines, missions et organisation :
Dire que le monde est en pleine mutation est devenu un lieu commun, la planète
1change, les sociétés évoluent et les hommes s’adaptent . Les forestiers et leur administration
ont suivi ce mouvement de progrès qui a transformé l’Europe, l’Occident et la planète entière
depuis deux siècles. Il ne faut pourtant pas négliger de relever tous les indices qui témoignent
de la permanence du passé et montrent que le progrès aussi fulgurant soit-il reste tributaire
de pratiques, de modes de pensée, de croyances, hérités de notre histoire. L’évolution
contemporaine de l’administration forestière en offre l’exemple. Toujours soucieuse de
répondre aux sollicitations de plus en plus nombreuses et variées de la société, elle a adaptée
son organisation, ses structures, son personnel et ses modes d’intervention sans jamais
rompre avec ses traditions (héritées du passé mais aussi largement générées par les
missions du présent) constituées de nombreux éléments : une relation presque passionnelle
avec la forêt, la persistance d’un certain esprit de conservation, le respect de la mémoire des
2aînés, l’attachement à certains attributs ou prérogatives . On pourrait croire que le train du
progrès n’a que peu ressenti les influences de ces réminiscences de l’expérience forestière,
ce n’est pas certain du tout.
Il est difficile de dire exactement à quel moment apparurent les forestiers. On prend
généralement comme référence les premiers textes qui font allusion aux forêts et au
personnel chargé de leur gestion. Ainsi en Italie dans les dernières années de la République
romaine des textes précisèrent les tâches du personnel qui devait surveiller les forêts; en
France : «Baudrillart cite un capitulaire de Charlemagne (813) dans lequel il est question
des attributions de certains administrateurs des propriétés royales appelés forestarii et
3chargés de la conservation des forêts, du gibier et des étangs » . Mais on peut penser que
1 Voir L. Genet, R. Rémond, P. Chaunu et A. Marcet, Le monde contemporain, Paris, Hatier,
1966, 640 p.
2 Voir B. Kalaora et D. Poupardin, Le corps forestier dans tous ses états de la Restauration à la
Belle Époque, Rungis, I.N.R.A., Décembre 1984, 189 p.
3 Francis Meyer, Législation et politique forestières, Paris, Berger-Levrault, 1968, p. 186.163
l’existence de structures qui avaient, entre autres, des devoirs forestiers doit être encore
antérieure et que les forestiers sont apparus avec l’État. Sans État, il n’y a pas de forestiers.
Les grandes fractures qui ont, à l’époque contemporaine, remit en cause l’État, la
révolution de 1789 en France et la création d’un royaume unifié en Italie en 1860, ont donc
posé le problème de l’administration forestière; en France pour la mettre en conformité avec
le droit nouveau, en Italie pour unifier les diverses organisations qui existaient avant 1860.
1) La mise en place des administrations forestières :
On a vu qu’au début du XIX ème siècle les objectifs des politiques forestières
françaises et italiennes étaient assez clairement définis, malgré une évolution historique
assez semblable par certains aspects, deux traditions forestières très distinctes se mettent en
4place . La France donnait une importance économique à la forêt et sa production et pour cela
en imposait la conservation et l’amélioration. La production de bois en vue de satisfaire les
besoins stratégiques et économiques, nécessité impérieuse de l’époque, s’inscrivait alors
comme l’aboutissement logique de l’évolution des pratiques forestières nationales entamait
depuis le XV ème siècle et renforçait par l’Ordonnance de 1669. L’Italie, par contre, pays
plus méditerranéen, confrontait de façon plus constante aux perturbations écologiques
produites par l’exacerbation des facteurs climatiques, géologiques et topographiques
consécutive au déboisement, faisait du rôle protecteur du couvert végétal (pas forcément
forestier) la fonction essentielle de la forêt et des espaces naturels. Rôle économique en
France, hydrogéologique en Italie, la mise en place des administrations forestières devait se
faire en tenant compte de ces grandes fonctions attribuées à la forêt et dans le but de les
assurer. La grande réformation administrative prit aussi des allures différentes, rupture
soudaine et douloureuse fruit du grand déchirement révolutionnaire en France, elle fut plus
lente et peut-être moins radicale qu’on ne pourrait le croire en Italie.
4 Voir supra p. 114 à 132.164
1.1 En France, l’Administration forestière contemporaine, un héritage de la
Révolution :
a) L’étincelle révolutionnaire :
a.1) L’état de sous-administration forestière du sud de la France :
Le Midi de la France a pendant longtemps était sous-administré au point de vue
forestier, en 1788 : «tandis que la France entière comptait 20 grandes maîtrises des eaux et
forêts, les généralités de Toulouse, de Montpellier et du Roussillon d’une part, celles de Pau,
Bordeaux, Montauban et Auch d’autre part, embrassant ensemble plus du sixième du
5territoire, ne formaient que deux grandes maîtrises » . Si l’on y ajoute la grande maitrise
du Lyonnais, Dauphiné, Provence, Auvergne et celle de l’Ile de Corse, prés de la moitié du
territoire national située au sud de la ligne Bordeaux- Annecy ne comprenait que quatre
grandes maîtrises (voir carte 5). On peut expliquer ce désintérêt pour le Midi en évoquant le
piètre état des forêts, la faible part des forêts de l’État ou la vigueur avec laquelle les
provinces et communautés méridionales ont préservé leur indépendance, notamment en ce qui
concerne le contrôle des espaces forestiers, longtemps la Provence n’a pas eu de maitrise.
Pourtant ce type d’explication n’est que partiellement satisfaisant, s’il est vrai que l’état
général de la forêt méridionale ne peut rivaliser avec celui de la forêt du Nord, certaines
zones comme les Pyrénées, surtout l’Ariège, disposent de ressources non négligeables et les
forêts des collectivités assujetties aux règles forestières sont aussi nombreuses dans le Midi.
En fait, il semble que la logique forestière de l’époque qui voyait dans la conservation
des ressources existantes le seul moyen de satisfaire la demande en bois, ne pouvait
s’appliquer avec bénéfice que dans les bois du Nord, où le climat, les sols et les pratiques
agraires étaient plus favorables à l’arbre, le contrôle des activités humaines par une
surveillance constante pouvait permettre à la forêt de se régénérer et favoriser la
production. Dans le Sud pour atteindre le même résultat, il aurait été nécessaire de pratiquer
une politique active de reconstitution, les conditions naturelles étant peu favorables à la
végétation.
Or l’organisation générale de l’Administration forestière d’Ancien Régime et
5 Axel Loze, Déforestation et reboisement dans la région pyrénéenne, Paris, librairie de la
société du Recueil Sirey, 1910, p. 63.165
notamment le mode d’attribution des offices donnaient aux régions à fort taux de boisement
(pour l’époque) et fortes potentialités forestières et qui plus est, où les forêts royales
étaient nombreuses des avantages certains. Pour accéder aux fonctions publiques, de toutes
sortes, les titulaires achetaient leurs charges ne s’attachant par la suite qu’à faire fructifier
leur investissement, et cela pas toujours de façon honnête. Comme parallèlement, le pouvoir
royal recherchait sans cesse de nouvelles recettes pour le trésor, il y avait une tendance à
l’inflation dans la création des offices. Et les offices forestiers n’échappèrent pas à la règle.
Ainsi, le nombre de grands-maîtres ne cessa de croitre : «de six à l’origine, ce nombre fut
successivement porté à huit, puis à seize par édit de février 1689; enfin on en comptait vingt
6au XVIII ème siècle » . Pour que les offices soient attrayants, il fallait que les forêts
concernées le soient. Il était plus rentable d’acquérir un office forestier dans le Nord que dans
le Sud. Le pouvoir royal créa donc des offices là où ils se vendaient, cec

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