Un disciple libre penseur de Al-Afghani : Adib Ishaq - article ; n°1 ; vol.52, pg 138-149
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Description

Revue du monde musulman et de la Méditerranée - Année 1989 - Volume 52 - Numéro 1 - Pages 138-149
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 55
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Mustapha Khayati
Un disciple libre penseur de Al-Afghani : Adib Ishaq
In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée, N°52-53, 1989. pp. 138-149.
Citer ce document / Cite this document :
Khayati Mustapha. Un disciple libre penseur de Al-Afghani : Adib Ishaq. In: Revue du monde musulman et de la Méditerranée,
N°52-53, 1989. pp. 138-149.
doi : 10.3406/remmm.1989.2295
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/remmm_0997-1327_1989_num_52_1_2295Mustafa KHAYATI
UN DISCIPLE LIBRE PENSEUR DE AL-AFGHANI
ADIB ISHAQ
Rarement un homme a fait autant de disciples aussi brillants et aussi combatifs
que Jamal-al-Din al-Afghani. Aucun de ceux qui l'ont connu de près n'a échappé
à l'attrait de sa fougue et de sa vaste culture, et n'en a d'une façon ou d'une autre
hérité. L'inventaire de tous ceux, hommes d'idées ou hommes d'action, dont le
contact avec le révolutionnaire persan a bouleversé le cours de la vie, est encore
loin d'être achevé. Arabes de toutes régions (Egypte, Grande Syrie, Irak, Maghr
eb), Turcs ou Persans, leur rôle réformateur, voire ouvertement révolutionnaire,
va marquer l'histoire du monde musulman durant plusieurs décennies. Générale
ment, on pense qu'Afghani, promoteur de YIslah moderne, n'a eu que des disci
ples musulmans. En fait, il n'en est rien. Il y eut des chrétiens, des juifs, des agnos
tiques et d'autres encore. La présence d'Afghani au Caire, entre 1871 et 1879,
a historiquement coïncidé avec l'arrivée en masse des intellectuels chrétiens syro-
libanais (les Shawâmm) en Egypte, et l'éclosion de la presse écrite dans ce pays.
C'est dans ces circonstances que le jeune Adib Ishaq a pu rencontrer J. al-Afghani
et devenir son disciple et collaborateur.
BIOGRAPHIE POLITIQUE ET INTELLECTUELLE
Adib Ishaq est né le 21 janvier 1856 â Damas1. Dès son jeune âge, son père
l'inscrit à l'école des Pères Lazaristes2 où il apprend à fond les langues arabe et
française, et manifeste des signes précoces d'intelligence et un amour marqué pour
les lettres. Son maître, dit-on, ne cessait d'annoncer à son père : «ton fils sera un
RE.M.M.M. 52/53, 1989-2/3 Adib Ishaq I 139
diseur (qawwal)*, c'est-à-dire un poète. Car ses paroles étaient «rimées et rythmées»
alors qu'il n'avait pas encore appris les règles de la langue; et il composa ses pre
miers poèmes à l'âge de dix ans, alors qu'il ignorait tout de la prosodie. Il n'a pas
douze ans lorsqu'il quitte l'école pour aller travailler aux douanes (afin de venir
en aide à sa famille) pour un salaire mensuel de 200 piastres. C'est alors qu'il s'initie
à la langue turque — qu'il ne tarde pas à posséder, au point de l'écrire3 et de la
parler — et d'améliorer ainsi sa situation d'employé. Mais sa passion reste la poés
ie et l'écriture. Ses premiers écrits d'adolescent sont publiés dans la revue al-Jinan,
éditée à Beyrouth par Butrus al-Bustani4. A 15 ans, Adib rejoint son père à Bey
routh au service des postes. Là, il fait la connaissance des écrivains et poètes de
cette ville, se mêle à leurs débats et partage leurs préoccupations. Il revient au
service des douanes, mais sa passion de l'écriture le pousse vers le journalisme;
il s'associe à l'équipe du journal «al-Taqaddum» (le Progrès), où il se distingue
par son style et son éloquence. Il n'a pas dix-sept ans quand il traduit, à la demande
du directeur de son journal, une partie du dictionnaire biographique français «les
contemporains» (traduction qui ne vit jamais le jour). Il lui traduit aussi un livre
sur les mœurs et coutumes et un autre sur la santé, tous deux publiés sans ment
ion du traducteur (Al-Durar, 1909, 6). Il adhère à l'association culturelle Zahrat
al-adab, en devient le président, et y prononce une série de discours, de conféren
ces et de poèmes.
En 1875, Salim Shahada, au fait de son savoir étendu et de sa connaissance appro
fondie du français, lui demande de collaborer à une œuvre encyclopédique intitu
lée : «Athar al-Adhar» (Le ruines des temps) qui sera publiée en 3 volumes, et
où il rédige plusieurs articles.
A la même époque, il traduit pour le consul de France à Beyrouth, Andromaque
de Racine5, et fait la connaissance de Salim Naqqash, un des pionniers du théâ
tre arabe. Ensemble ils composent et arabisent plusieurs pièces qui seront jouées
en Syrie comme en Egypte. C'est d'ailleurs la liaison des deux hommes qui est
à l'origine de l'émigration d'A. Ishaq en Egypte, en 1876, à l'âge de 20 ans. Ins
tallé à Alexandrie, il reprit la traduction dAndromaque et ne s'occupe pratique
ment plus que de théâtre.
«Puis», dit son frère et biographe, «il tendit vers quelque chose de plus élevé
et de plus noble que le théâtre, vers le rang que le destin lui a réservé» (Al-Durar,
7). Il alla donc au Caire et y fit la rencontre de sa vie, avec J. al-Afghani. On ne
sait qui présenta A. Ishaq au père du réformisme musulman. Rachid Ridha6,
citant Salim Anhuri7, dit que c'est un homme nommé Henein Khoury qui envoya
Adib chez Afghani, tandis que le fameux Dr Shibli Shumayyil (cité par A. al-Jundi
in al-Sharqfi Fajr el-yaqzà) dit que c'est lui qui présenta A. Ishaq à J. al-Afghani
dans le domicile du Consul de Belgique au Caire, Hanna'Id8. Quoi qu'il en soit,
le «savantissime et célèbre philosophe» lui fit un bon accueil et l'admit dans son
cercle. D'autant qu' Afghani «encourageait les personnes douées à exercer le métier
de la presse et à y consacrer leurs efforts»9.
En fait nous pensons que c'est à cette époque, 1877, qu'Adib rejoint la loge orga
nisée par al-Afghani. Mais laissons Adib Ishaq nous parler de son maître :
«j'ai connu (Afghani) en Egypte et je fus parmi ses disciples et ses amis les plus proches,
tout au long de mon séjour au Caire et à Alexandrie. Ce que je dis donc de lui est le
résultat d'une connaissance et d'une expérience directes». 140 / M. Khayati
Ainsi Adib, qui se défend de toute «passion» en parlant d' Afghani, nous apprend
que celui-ci a été éloigné de Constantinople au Hijaz à la suite d'un incident avec
le Cheikh ai-Islam, et que c'est Riadh Pacha qu'il a connu dans la capitale ott
omane qui l'invita, en 1871, à venir s'installer sur les bords du Nil, pour enseigner
à al-Azhar. Mais très vite, il entra en conflit avec certains Ulamas, et dut se retirer
dans son domicile, où il organisa un cercle d'enseignement. Celui-ci était fréquenté
non seulement par des étudiants et des enseignants, mais aussi par «les éléments
les plus intelligents parmi les hommes du gouvernement et les notables. Il dévoil
ait à certains d'entre eux ses idées libres, et enseignait à tous la voie du salut con
tre la superstition et l'ignorance. Mais il resta ignoré du grand public jusqu'à la
parution, dans le journal Misr, de ses écrits et de ceux de ses disciples. Ses articles
tantôt signés de son nom, tantôt d'un pseudonyme (Mazhar ibn Waddah) le rendi
rent très vite célèbre» (Al-Durar, 220-224).
Or le journal Misr n'est autre que le journal créé par A. Ishaq à l'instigation
de J. al-Afghani pour répandre les idées de son cercle. Awni nous apprend
qu'Adib, après avoir obtenu l'autorisation de parution, prépara la matière du journal
en une seule journée, et le lendemain, «(celui-ci) parut dans la plus belle parure
de l'éloquence». Pour tout budget, Adib avait vingt francs en poche (Al-Durar,
7). C'était début juillet 1877. Misr rencontra l'audience escomptée, et A. Ishaq,
toujours conseillé par Afghani, décida de le transférer à Alexandrie, ville cosmop
olite s'il en fut en cette fin du XIXe siècle, plus propice donc à la réception et
à la diffusion des informations. Afghani et ses compagnons les plus brillants, tels
Mohammad Abduh et Abdallah al-Nadim constituaient, avec A. Ishaq et Salim
Naqqâsh, l'équipe rédactionnelle du journal le mieux rédigé de son temps. Ishaq
et devant le succès de l'hebdomadaire Misr, créèrent un quotidien inti
tulé at-tijâra (le commerce) qui parut à partir de 1878. Ces deux journaux connur
ent,

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