Un fidèle ami de Lamennais, le comte Benoît d Azy. Lettres inédites de Benoît d Azy à Lamennais (1825- 1833) - article ; n°3 ; vol.73, pg 363-444
83 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Un fidèle ami de Lamennais, le comte Benoît d'Azy. Lettres inédites de Benoît d'Azy à Lamennais (1825- 1833) - article ; n°3 ; vol.73, pg 363-444

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
83 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Annales de Bretagne - Année 1966 - Volume 73 - Numéro 3 - Pages 363-444
82 pages

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1966
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Louis Le Guillou
Un fidèle ami de Lamennais, le comte Benoît d'Azy. Lettres
inédites de Benoît d'Azy à Lamennais (1825- 1833)
In: Annales de Bretagne. Tome 73, numéro 3, 1966. pp. 363-444.
Citer ce document / Cite this document :
Le Guillou Louis. Un fidèle ami de Lamennais, le comte Benoît d'Azy. Lettres inédites de Benoît d'Azy à Lamennais (1825-
1833). In: Annales de Bretagne. Tome 73, numéro 3, 1966. pp. 363-444.
doi : 10.3406/abpo.1966.2362
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1966_num_73_3_2362Louis LE GUILLOU
UN FIDÈLE AMI DE LAMENNAIS
LE COMTE BENOIT D'AZY
LETTRES INEDITES DE D'AZY A LAMENNAIS
(1825-1833)
Quel peut être, penseront certains, l'intérêt de la publi
cation des lettres d'un Benoît d'Azy ? Les commérages d'un
bon bourgeois du XIXe siècle, les soucis d'un père de
famille qui trouve que ses enfants se multiplient un peu
trop vite à son gré, sicut novellae olivariim (1), tout cela,
même émaillé de quelques réflexions piquantes sur les
événements et les personnages du temps, mérite-t-il qu'on
s'y arrête longtemps ? Mais Benoît d'Azy n'est pas le pre
mier venu : issu d'une grande famille de la haute bour
geoisie qui a rendu des services à la cause royale pendant
la Révolution, secrétaire de légation à Francfort, inspecteur
général des Finances, directeur de la Dette publique (son
père Vincent étant lui-même jusqu'en 1828 directeur génér
al des contributions indirectes), puis directeur des forges
d'Alès, député de 1841 à 1848, vice président de l'Assem-
Législative, député à l'Assemblée Nationale en 1871, le
comte Benoît d'Azy est un de ces hommes qui, nés avec le
siècle (en 1796 exactement) en ont connu au mieux les dif
férents aspects. Cette mission de témoin de son époque,
sa correspondance prouve qu'il l'assumait pleinement avec
beaucoup de franchise et de spontanéité. Aussi pour l'e
xploration du milieu mennaisien que nous avons entreprise,
(1) Lettre du 12 avril 1830. 364 UN FIDÈLE AMI DE LAMENNAIS
les 56 lettres de Benoît d'Azy (2) que grâce à l'amabilité et
la bienveillante compréhension de M. et Mme Sansen, con
servateurs de la Bibliothèque Universitaire de Rennes, nous
avons retrouvées dans le Fonds Duine, sont capitales.
Elles sont, en tout premier lieu, un document sur la fer
veur particulière, voire le culte dont Féli était l'objet. Cert
es, Denis Benoît doit beaucoup à Lamennais et en particul
ier le réveil de sa foi : à l'âge de vingt-deux ans, en 1818,
la lecture de VEssai sur l'Indifférence que lui avait conseil
lée Mme de Lacan, la future baronne Cottu (3), encore une
convertie de Féli, transforma toute sa vie. Il fit le « pèleri
nage » de la Chênaie et toujours garda de l'accueil du
Maître un souvenir ému. En 1827, c'est avec nostalgie qu'il
évoque « ces bonnes promenades que nous faisions il y a
huit ans » (4), « ce bon temps où je te voyais », écrit-il,
« tous les jours, où mon cœur jouissait dans toute sa plé
nitude du bonheur de cette tendre affection, un des plus
grands biens que Dieu m'ait donné en ce monde » (5). En
1828 encore : « Je regrette, mon bon frère ce tems où nous
nous voyons tous les jours, ou même celui où je pouvais
t'écrire tous les jours et où toi-même au milieu de tout ce
qui t'occupait alors tu m'écrivais tous les jours » (6). L'on
peut s'étonner de la force de cet attachement qui va unir
deux hommes que quatorze années d'âge séparent : il est
impossible de nier la profondeur de l'amitié de Féli pour
Denis, la chaleur de l'affection de Benoît pour celui qu'il
appelle « son ange gardien en ce monde » (7).
(2) Nous avons déjà publié vingt de ces lettres, celles qui vont du
20 novembre 1833 au 13 avril 1850, dans la Revue des Sciences
humaines, n° 121, de janvier-mars 1966. Cf. également notre thèse,
L'évolution de la pensée religieuse de F. Lamennais, Colin. 1966.
(3) Sur le personnage on consultera avec profit Le prêtre et l'ami.
Lettres inédites de Lamennais à la Baronne Cottu (1818-1834) publiées
par le comte d'Haussonville, Paris, 1910, et les Lettres de Mme Lacan
à Benoit d'Azy publiées par Laveille dans Revue du Clergé fran
çais du 15 mai 1896.
(4) Lettre du 2 septembre 1827.
(5)du 23 décembre 1827.
(6) Lettre du 26 août 1828.
(7)du 23 décembre 1827. FIDÈLE AMI DE LAMENNAIS 365 UN
Cette amitié qui lui permet de comprendre Féli « ex
intimo corde » l'amène à redouter les précipices que côtoie
très inconsciemment son ami,à lui conseiller la prudence à
lui qui est souvent si entier, si impulsif, si cassant. En jan
vier 1829, Benoît d'Azy demande à Lamennais et obtient le
retrait d'une phrase de la Préface des Progrès de la Révol
ution et de la guerre contre l'Eglise, phrase jugée comme
indigne de la « position » et « du caractère » du grand
écrivain. Son cœur saigne de voir son « bon frère » exposé
à « une guerre d'invectives, à ces haines passionnées de
gens qui prêchent la charité » (8) de gens qui l'attaquent
sans avoir pris la peine de lire ses ouvrages ou qui ne le
comprennent pas (9).
Comment être surpris pourtant des coups qui pleuvent,
puisque la croisade est ouverte et que le but visé est de
réunir tout le clergé en état de crise (10) sous une même
bannière (11), de donner à une France qui jouit certes
d'une grande prospérité matérielle mais qui n'a pas de
« doctrines » (12) une âme, c'est-à-dire une unité spiri
tuelle et morale ? La Révolution de 1789 n'est pas encore
bien loin et des émules du curé Meslier sévissent :
témoin ce curé incrédule d'un petit village de la Brie qui
meurt « sans appeler les secours de cette religion qu'il
avait si souvent professée sans y croire » (13). Mais quelle
joie lorsque l'on peut annoncer la convertion au catholi
cisme d'un ami intime, ancien camarade de collège Samuel
Dannery, qui du déisme était tombé dans un athéisme
presque complet et dont les yeux souvrent à la lumière.
« Remercie Dieu avec nous, mon bon frère » écrit Benoît à
Féli, car ce sont peut-être ou tes paroles ou celles que tu
m'as inspirées ou l'exemple que je te dois qui ont fructifié
à la longue dans ce cœur élevé. Je frémis en pensant que
(8) Lettre du 5 avril 1829.
(9)du 12 mars 1829.
(10) Lettre du 20 novembre 1829.
(11)du 21 septembre 1828.
(12) Lettre du 27 décembre
(13)du 6 mai 1830. 366 UN FIDÈLE AMI DE LAMENNAIS
j'ai pu être l'instrument de la Providence ; je me trouve si
loin de ce que je devrais être moi-même » (14).
Pour qui y regarde de près, les lettres de Benoît d'Azy
sont donc — et c'est ce qui en fait l'intérêt — le journal
d'un siècle. En 1828, nous pouvons y lire son jugement sur
Juilly et l'enseignement tout nouveau qu'on y dispense :
« Je suis persuadé », écrit-il à Lamennais « que l'étude des
sciences physiques s'allierait beaucoup mieux qu'on ne le
pense ordinairement avec la mémoire et l'intelligence des
enfants. Je crois qu'on est bien plus susceptible à 15 ans
d'étudier la physique et la chimie, la minéralogie et la bota
nique que la rhétorique et la philosophie et cependant ce
sont ordinairement les seules choses auxquelles on appli
que l'esprit des jeunes gens » (15). En 1833, c'est une véri
table mise en garde qui est envoyée à Lamennais à propos
de la légitimité : « Parce que la légitimité a souvent dégé
néré en absurde tyrannie, en voulant devenir absolue et en
prétendant placer son titre non seulement dans l'origine
divine du pouvoir en lui-même, mais dans une sorte de
communication directe de ce pouvoir divin, ce n'est pas une
raison pour ne juger cette institution que par l'abus qui en a
été fait quelquefois » (16). A lire ces lettres et les questions
qu'elles évoquent, on peut raisonnablement penser qu

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents