Corriger le Rhône et les Valaisans : trois siècles de travaux et de débats - article ; n°3 ; vol.92, pg 51-61
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Description

Revue de géographie alpine - Année 2004 - Volume 92 - Numéro 3 - Pages 51-61
Chaque projet met en lumière la dynamique sociale et permet au-delà de comprendre la dimension politique des relations de l'homme à son environnement. Le XVIIIe siècle proclame sans agir, le XIXe siècle est conquérant mais affaibli par ses divisions, le XXe siècle est arrogant tandis que le XIXe siècle accouche d'une version modeste où les ingénieurs suggèrent de rendre au fleuve une partie de son dû.
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Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Gabriel Bender
Corriger le Rhône et les Valaisans : trois siècles de travaux et
de débats
In: Revue de géographie alpine. 2004, Tome 92 N°3. pp. 51-61.
Résumé
Chaque projet met en lumière la dynamique sociale et permet au-delà de comprendre la dimension politique des relations de
l'homme à son environnement. Le XVIIIe siècle proclame sans agir, le XIXe siècle est conquérant mais affaibli par ses divisions,
le XXe siècle est arrogant tandis que le XIXe siècle accouche d'une version modeste où les ingénieurs suggèrent de rendre au
fleuve une partie de son dû.
Citer ce document / Cite this document :
Bender Gabriel. Corriger le Rhône et les Valaisans : trois siècles de travaux et de débats. In: Revue de géographie alpine.
2004, Tome 92 N°3. pp. 51-61.
doi : 10.3406/rga.2004.2308
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rga_0035-1121_2004_num_92_3_2308Corriger le Rhône et les Valaisans : trois siècles
de travaux et de débats
Gabriel Bender
Sociologue et historien Haute école Santé-Social Valais
gabriel.bender@hevs2.ch.
Chaque projet met en lumière la dynamique Résumé : L'encaissement de la vallée du
sociale et permet au-delà de comprendre la Rhône dans son parcours alpin (environ 150
dimension politique des relations de l'homme km du Glacier au Lac Léman) est sa princi
à son environnement. Le XVIIIe siècle pale caractéristique géographique. Le régime
proclame sans agir, le XIXe siècle est du fleuve, varie fortement en fonction de la
conquérant mais affaibli par ses divisions, le rétention nivale et glacière, ceci le classe
XXe siècle est arrogant tandis que le XIXe siècle parmi les cours glaciaires les plus caractéris accouche d'une version modeste où les tiques d'Europe. ingénieurs suggèrent de rendre au fleuve une
partie de son dû. Depuis plus de trois cent ans, divers
aménagements ont été réalisés pour se MotS-dés : corrections des eaux, Valais,
politique de l'environnement, endiguement protéger des crues et pour assécher la plaine.
La bibliographie est présentée en page 70
En juin 2000, un document présente la synthèse des études commandées à divers
bureaux d'ingénieurs suite aux importantes crues du Rhône en Valais en 1987 et
1993. Il s'ouvre par un appel du conseiller d'état Jean-Jacques Rey-Bellet, chef du
Département des transports, de l'équipement, et de l'environnement, ministre en charge
de ce dossier. Le hasard des calendriers, les regroupements administratifs, les rapports de
force politique ont réuni sous un seul toit administratif, dirigé par un ministre à la
formation d'ingénieur, des domaines aussi divers que les transports publics, la
surveillance des cours d'eau, la gestion du patrimoine bâti, les monuments historiques,
l'archéologie, les forêts et le paysage. Ce qui apparaît à première vue disparate participe
bien du même système, surtout en Valais où le Rhône, la ligne de chemin de fer et les
voies routières se disputent la surface souvent exiguë de la vallée (document 1). De plus,
le destin du chemin de fer est tellement lié à l'endiguement du Rhône que l'historien ne
sait plus établir de généalogie. Qui a permis la réalisation de l'autre ? Il est certain par
contre que chaque projet de correction du fleuve met en lumière la dynamique sociale et
permet au-delà de comprendre la dimension politique des relations de l'homme à son
environnement. Le XVIIIe siècle proclame sans agir, le XIXe siècle est conquérant mais
affaibli par les divisions qui le rongent, le XXe siècle est arrogant et certain de son bon
droit. Le XXIe siècle accouche d'une version modeste où le ministre-ingénieur suggère de
rendre au fleuve une partie de son dû.
51
La rtvue de géographie alpint 2004 №3 GABRIEL BENDER
Le Rhône, fleuve paresseux
L'encaissement du Rhône est sa principale caractéristique géographique ; il coule à 500
mètres d'altitude dans la région de Martigny, alors que les montagnes qui l'entourent
culminent à 3000 voire 4000 mètres. A cette altitude, la plupart des pluies tombent sous
forme de neige et sont retenues en partie par les glaciers. Le régime du fleuve, ainsi que
celui de ses principaux affluents, varie donc fortement en fonction de la rétention nivale
et glacière. Ceci classe le Rhône valaisan parmi les cours glaciaires les plus caractéristiques
d'Europe. En hiver les débits sont les plus faibles, en juin la fonte des neiges amène les
hautes eaux, en juillet et août, ce sont les affluents de type glaciaire qui atteignent leur
débit maximal.
Le régime du Rhône est également tributaire des cônes d'alluvions de ses affluents avec
lesquels il est en compétition et qui l'obligent à faire des méandres pour les éviter.
Lorsque cela n'est pas possible, il forme un lac comblé de sable et de pierres avec les
siècles (document 1). Le profil en long du fleuve est donc irrégulier ; il combine une
pente presque nulle avec des dépressions. La pente du Rhône entre Brigue et Léman est
relativement faible, elle est « défectueuse » écrivait en 1861 l'ingénieur Blotzniki ce que
confirme un géologue un siècle plus tard : « Transporteur poussif, il n'est pas capable de
convoyer jusqu'au Léman tout le matériel que ses affluents lui confient. Poussif et
négligent, le fleuve abandonne ce là où il coule, soit dans son lit, ce qui a pour
résultat de surélever ce lit. En conditions naturelles, après quelques années, il quitte ce lit
pour aller en établir un nouveau dans les bas fonds qui vont à leur tour être comblés ».
Les crues exceptionnelles, les débordements et les inondations proviennent généralement
d'une conjonction de facteurs. Elles sont dues soit à la fusion des neiges et des glaces
provoquée par une température élevée et prolongée, activée encore par un vent chaud,
soit à la fusion et à de violentes pluies d'orages, soit encore, en automne, à de fortes
pluies méditerranéennes débordant par-dessus les Alpes pennines et faisant fondre les
premières neiges tombées à haute altitude.
Barricades
Depuis le Moyen-Age, on élève « des barrières au fleuve » pour se préserver des crues.
Ces travaux sont réalisés par corvées qui ont lieu dans l'arrière automne et en hiver. Il
s'agit le plus souvent de caissons de bois, remplis de gravier et arrimés au sol par des
pieux. Les Conseils communaux nomment les responsables des travaux, appelés
directeurs, qui tiennent à jour la liste des manœuvriers et des gardes. Ces tâches,
légèrement rétribuées, sont assurées par les notables villageois. A partir du XVIIIe siècle,
l'esprit des manœuvres se transforme. Celles-ci ne sont plus considérées comme du
travail obligatoire, mais comme un impôt qui peut être payé par du travail d'intérêt
public. Pour renforcer la confusion, les manœuvres et le relevé de l'impôt figurent
souvent dans le même registre.
1 • Marcel Buri, VS, le mensuel du Valais, juin 1995.
52
La revue de géographie alpine 2004 №3 CORRIGER LE RHÔNE ET LES VALAISANS : TROIS SIÈCLES DE TRAVAUX ET DE DÉBATS
Les textes du XVIIIe et du XIXe siècle présente le fleuve comme une personne avec son
caractère, sa grandeur d'âme et ses humeurs. Le Rhône est classé parmi les souverains
furieux, voisins irascibles qui ne supportent pas qu'on empiète sur son jardin. « Le
Rhône, en maître absolu, vagabondait librement entre les deux chaînes de montagnes
qui, seules, avec quelques cônes d'alluvions, limitaient son empire. (...) Pour préserver
quelques langues de terre, les bordiers élevaient contre quelques bras du Rhône des
barrières ou des barres, d'où les noms locaux encore en usage : les Barrières, les Barres et
Grands Barres. » (Carron, 1942) Mais à mesure que croissait la population, l'injustice
du partage devenait plus insupportable : une moitié pour le fleuve, l'autre pour les riches
paysans qui possédaient du bétail, des chevaux ou des ânes et à qui étaient réservés les
pâturages de la plaine. Les riverains, surtout les plus pauvres, se mirent de plus en plus
ouvertement à contester cette alliance entre un fleuve et un système qui les
marginalisent.
Tirer le Rhône en droiture : un

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