America, America...  - article ; n°1 ; vol.38, pg 19-41
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Actes de la recherche en sciences sociales - Année 1981 - Volume 38 - Numéro 1 - Pages 19-41
America, America. Marshall-Plan und Import des «Managements». In den Fünfziger Jahren nehmen die Diskussionen um das amerikanische Modell einen gewichtigen Platz im sozialen und intellektuellen Leben Frankreichs ein. Dabei sind jedoch die wirtschaftlichen und militärischen Fragen (Marshall-Plan, Atlantisches Bündnis) von untergeordneter Bedeutung gegenüber der grundlegenderen nach der «Natur» der französischen Gesellschaft» im Vergleich zur «amerikanischen Gesellschaft». Drehpunkt der Diskussionen sind im wesentlichen «Unternehmenssteuerung», «Unternehmer» und «leitende Angestellte». Der Import sozialer Technologien (wie der Gruppenpsychologie), deren Verbreitung mithilft zur Etablierung neuer Formen sozialer Kontrolle, geschieht zunächst unter dem Gesichtspunkt der Ausbildung des Mittler-Personals.
America, America : The Marshall Plan and the Importing of «Management». The «American model» was a major topic of discussion in French intellectual and social life in the 1950s. Economic and political questions (the Marshall Plan, the Atlantic Alliance) took second place in the debates of the time to a more fundamental question : the «nature» of «French society» as compared with «American society». These debates were particularly concerned with the «management of industry», «bosses» (patrons) and «executives» (cadres). Social technologies, such as group psychology, were imported, initially for the training of the intermediate personnel of industry, but subsequently, as they became more widespread, they helped to establish new forms of social control.
America, America. Le Plan Marshall et l'importation du «management». Dans les années 1950, les discussions autour du modèle américain occupent une place très importante dans la vie intellectuelle et sociale française. Les questions économiques et militaires (Plan Marshall, Alliance atlantique) sont, dans les débats d'époque, subordonnées à une question plus fondamentale qui est celle de la «nature» de la «société française» comparée à la «société américaine». Ces débats portent particulièrement sur la «gestion des entreprises», sur les «patrons» et sur les «cadres». C'est d'abord pour former le personnel intermédiaire des entreprises que seront importées des technologies sociales (comme la psychologie de groupe) dont la diffusion contribuera à l'établissement de nouvelles formes de contrôle social.
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 4 Mo

Extrait

Luc Boltanski
America, America...
In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 38, mai 1981. pp. 19-41.
Citer ce document / Cite this document :
Boltanski Luc. America, America.. In: Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 38, mai 1981. pp. 19-41.
doi : 10.3406/arss.1981.2116
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arss_0335-5322_1981_num_38_1_2116Résumé
America, America. Le Plan Marshall et l'importation du «management».
Dans les années 1950, les discussions autour du modèle américain occupent une place très importante
dans la vie intellectuelle et sociale française. Les questions économiques et militaires (Plan Marshall,
Alliance atlantique) sont, dans les débats d'époque, subordonnées à une question plus fondamentale
qui est celle de la «nature» de la «société française» comparée à la «société américaine». Ces débats
portent particulièrement sur la «gestion des entreprises», sur les «patrons» et sur les «cadres». C'est
d'abord pour former le personnel intermédiaire des entreprises que seront importées des technologies
sociales (comme la psychologie de groupe) dont la diffusion contribuera à l'établissement de nouvelles
formes de contrôle social.
Abstract
America, America : The Marshall Plan and the Importing of «Management».
The «American model» was a major topic of discussion in French intellectual and social life in the
1950s. Economic and political questions (the Marshall Plan, the Atlantic Alliance) took second place in
the debates of the time to a more fundamental question : the «nature» of «French society» as compared
with «American society». These debates were particularly concerned with the «management of
industry», «bosses» (patrons) and «executives» (cadres). Social technologies, such as group
psychology, were imported, initially for the training of the intermediate personnel of industry, but
subsequently, as they became more widespread, they helped to establish new forms of social control.
Zusammenfassung
America, America. Marshall-Plan und Import des «Managements».
In den Fünfziger Jahren nehmen die Diskussionen um das amerikanische Modell einen gewichtigen
Platz im sozialen und intellektuellen Leben Frankreichs ein. Dabei sind jedoch die wirtschaftlichen und
militärischen Fragen (Marshall-Plan, Atlantisches Bündnis) von untergeordneter Bedeutung gegenüber
der grundlegenderen nach der «Natur» der französischen Gesellschaft» im Vergleich zur
«amerikanischen Gesellschaft». Drehpunkt der Diskussionen sind im wesentlichen
«Unternehmenssteuerung», «Unternehmer» und «leitende Angestellte». Der Import sozialer
Technologien (wie der Gruppenpsychologie), deren Verbreitung mithilft zur Etablierung neuer Formen
sozialer Kontrolle, geschieht zunächst unter dem Gesichtspunkt der Ausbildung des Mittler-Personals.lue boltanski
AMERICA
années 1960 (1). La découverte de l'Amérique do
mine alors la vie intellectuelle et sociale française
et les interrogations qui l'accompagnent sont loin
d'avoir seulement pour enjeu l'alliance militaire ou
l'aide économique. Ou, plus précisément, les ques
tions économiques et militaires sont, de façon très
explicite, subordonnées à une question plus fonda1 marshall le AMERICA du importation plan management et
mentale qui est celle de la «nature» de la «société
française» comparée à la «société américaine»,
c'est-à-dire, indissociablement, de son régime poli-
L'histoire des rapports entre la France et les Etats- tique et de sa structure sociale, de ses techniques
de gestion économique, de ses modes de contrôle Unis dans les années qui suivent la deuxième guerre
mondiale a surtout porté jusqu'ici, qu'il s'agisse de social et de règlement des conflits sociaux. Com
ment expliquer la dominance américaine, que peut- travaux américains ou de travaux français, d'études
savantes ou de «témoignages», sur les relations d on apprendre de l'Amérique, à quoi faut-il renonc
iplomatiques et militaires et sur les finan er, que faut-il adopter ou importer ?
cières. Toujours politiquement marqué, toujours Ce sont ces interrogations que l'on voudrait
polémique, le débat qui s'est instauré en France sur évoquer rapidement, en centrant l'enquête sur la
gestion des entreprises et, plus précisément encore, 1'« américanisation», surtout au milieu des années
sur la problématique sociale qui se constitue dans 1960 lorsque la France quitte l'Alliance atlantique
les années 1950 à propos de la nature du personnel et que de Gaulle s'oppose au rachat de certaines
de direction et d'«encadrement». Qui doit diriger ? entreprises françaises par des entreprises américain
Comment recruter, former, contrôler le es, puis autour de mai 1968 et à l'occasion de la
d'encadrement pour qu'il soit à la fois «efficace» guerre du Vietnam, a fonctionné comme une sorte
et toléré par la classe ouvrière ? de test projectif où les différents groupes investis
saient une représentation partielle et partiale de
l'Amérique définie de façon implicite par référence 1— Le Plan Marshall, les missions de productivité aux États- à la position qui était la leur dans la structure Unis, les interventions des «experts» américains en France sociale indigène et par référence aux intérêts qui lui ne tiennent, par exemple, pratiquement aucune place ni
étaient liés. A chacun sa «bonne» et sa «mauvaise» dans le livre de Claude Gruson, Origine et espoirs de la
planification française (Paris, Dunod, 1968) dont plusieurs Amérique et l'on pourrait par exemple montrer chapitres sont consacrés aux années 1945-1955, ni dans que la critique de la guerre du Vietnam et de l'ouvrage de Jean-Jacques Carré, Paul Dubois et Edmond 1'« impérialisme» a contribué aussi, à travers la célé Malinvaud, La croissance française, un essai d'analyse
bration du mouvement hippie des sit-in et des économique de l'après-guerre (Paris, Ed. du Seuil, 1972),
qui signale seulement en quelques lignes les «missions à protest songs, à la diffusion d'une image enchantée
l'étranger» (bel euphémisme !) des années 1949-1952 des Etats-Unis. (p. 605). Après des recherches, certainement incomplètes, Dans ces débats ambigus, une période de je n'ai pas trouvé dans les revues d'histoire sociale ou d'hisl'histoire culturelle récente semble un peu oubliée toire économique un seul article consacré aux «missions de
ou refoulée, qui va de la Libération au début des productivité» et à la «campagne pour la productivité». 20 Luc Boltanski
C'est d'abord dans l'intention de réformer Les missions de productivité
les «patrons» et de former le personnel interméd aux Etats-Unis iaire des entreprises que seront importées des
Etats-Unis des technologies sociales (comme la psy et L'introduction du management en France à l'américaine de Y human accompagne engineering les
chologie de groupe) dont la diffusion vers d'autres
changements économiques qui, en germe dans le univers sociaux (travail social, voire système sco
Premier Plan Monnet (et, avant, dans le Programlaire ou Eglise) contribuera par la suite à la général
me économique et social du Comité national de isation des nouvelles formes de contrôle social.
la Résistance), se développent autour des années On a tenté de ressaisir l'atmosphère intellec
1950 avec le Plan Marshall et les opérations de rtuelle et politique dans laquelle s'est opérée, entre
egroupement et de restructuration qui marquèrent 1945 et 1955 environ, la formation d'une nouvelle
les années 1948-1953, dès avant la création de la idéologie industrielle et d'une nouvelle représenta
Communauté européenne du charbon et de l'acier tion de l'espace social (qui domineront les années
(5). L'entreprise de modernisation de l'appareil 1960) en rapprochant des documents et des témoi
économique n'est pas seulement «technique». gnages empruntés à des domaines relativement éloi
Elle n'a pas seulement pour point d'application des gnés, de la presse pour «cadres» aux «séminaires de
objets matériels, hauts fourneaux ou laminoires. role playing», sans ignorer les risques qu'enfermait
Partiellement inspiré

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