Au bonheur des généalogistes : Tiercelet en 1510
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Au bonheur des généalogistes : Tiercelet en 1510

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AU BONHEUR DES GENEALOGISTES : TIERCELET EN 1510.. Alain Simmer, Le Pays-Haut 1999 n° 1-2, p. 18-21. Affirmer que la généalogie s'est hissée, en quelques années, au rang de sport national (avant le foot ?), reste probablement bien en dessous de la vérité. En règle générale, on remonte - en principe - jusqu'au milieu du XVII e siècle. Et les rares bienheureux qui ont réussi a tisser leur toile généalogique au delà de cette période savent qu'ils se heurtent alors à un écueil insurmontable: l'absence d'actes d'état-civil. Avant 1539 en effet, point de salut. Même si cette date butoir est rarement atteinte dans les recherches, nul n'ignore qu'elle constitue la naissance officielle de l'état-civil français. C'est par l'ordonnance de Villers-Cotterets que l'administration royale fit en effet obligation aux prêtres d'enregistrer les variations de population dans leur paroisse. Bien qu'un certain nombre de registres aient été rédigés dès ce moment, fort peu de villages ont conservé des actes de cette époque. Quant aux périodes antérieures, elles n'existent quasiment pas et restent soumises, au propre comme au figuré, à la grâce de Dieu. A moins que l'administration civile ou religieuse ait fait place à l'histoire... C'est en effet alors, non plus à la grâce de Dieu, mais à celle des hommes que l'on doit de pouvoir remonter plus loin.

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Publié le 25 août 2014
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Langue Français

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AU BONHEUR DES GENEALOGISTES : TIERCELET EN 1510.. Alain Simmer,Le Pays-Haut 1999 n° 1-2, p. 18-21.
Affirmer que la généalogie s'est hissée, en quelques années, au rang de sport national (avant le foot ?), reste probablement bien en dessous de la vérité. En règle générale, on remonte - en principe - jusqu'au milieu du XVII e siècle. Et les rares bienheureux qui ont réussi a tisser leur toile généalogique au delà de cette période savent qu'ils se heurtent alors à un écueil insurmontable: l'absence d'actes d'état-civil. Avant 1539 en effet, point de salut. Même si cette date butoir est rarement atteinte dans les recherches, nul n'ignore qu'elle constitue la naissance officielle de l'état-civil français. C'est par l'ordonnance de Villers-Cotterets que l'administration royale fit en effet obligation aux prêtres d'enregistrer les variations de population dans leur paroisse. Bien qu'un certain nombre de registres aient été rédigés dès ce moment, fort peu de villages ont conservé des actes de cette époque. Quant aux périodes antérieures, elles n'existent quasiment pas et restent soumises, au propre comme au figuré, à la grâce de Dieu.
A moins que l'administration civile ou religieuse ait fait place à l'histoire... C'est en effet alors, non plus à la grâce de Dieu, mais à celle des hommes que l'on doit de pouvoir remonter plus loin. Mais il est indispensable, pour cela, que l'on ait, sous une forme ou sous une autre, conservé le nom de quelques personnages, en nombre suffisant pour pouvoir pallier l'absence d'état-civil et espérer reconstituer quelques filières généalogiques.
Et la chance a voulu que de telles circonstances aient été réunies en 1510... à Tiercelet ! Un heureux hasard a en effet permis de préserver une liste de contribuables du village, ce qui devait exister à des dizaines d'exemplaires un peu partout, mais qui a rarement survécu. 66 Tiercelins vont ainsi, l'espace d'un instant, retrouver vie et peut-être permettre à divers passionnés de renouer un écheveau qu'ils croyaient définitivement stérile.
1
Quelques précisions toutefois. C'est à l'abbé Jean-Baptiste Kaiser, chercheur infatigable, que l'on doit cette découverte. Elle provient du chartrier de la famille de Malberg, seigneur, entre autres, d'Audun-le-Tiche durant tout le Moyen Age: des
milliers d'actes, de toutes époques, essentiellement consacrés à la seigneurie d'Audun,
d'où furent tirés de nombreuses études, tant sur la sorcellerie, la Guerre de Trente Ans,
1 les forges de Villerupt que sur la famille de Malberg elle-même. Leur intérêt, dépasse,
de fort loin, le cadre des études strictement locales: les biens des Malberg s'étendaient sur tout le Pays Haut - jusqu'en Allemagne - et il est bien peu de villages des alentours qui n'aient eu, d'une manière ou d'une autre, un rapport avec eux, fût-il éphémère. L'enchevêtrement des alliances amenait en effet de multiples cessions de biens: c'est de cette manière que Tiercelet se retrouva, en partie, dans le giron de la famille de Malberg.
On en connaît les circonstances: totalement dévolue à la puissante famille d'Autel, au moins jusqu'au XIVe siècle, la seigneurie de Tiercelet échut en partie aux Malberg au XVe siècle. C'est à la suite du mariage d'Isabelle d'Argier - veuve en premières noces de Thierry d'Autel - avec Jean de Malberg en 1456, que la seigneurie changea partiellement de mains. Le douaire de la dame, représentant la moitié du 2 village, demeura ensuite dans la famille de Malberg pour plusieurs siècles . C'était l'époque où les hommes étaient étroitement attachés à la terre: et la moitié de la seigneurie signifiait également la moitié des habitants...
3 En 1510, date de l'acte , c'est Robert de Malberg, le plus célèbre de la famille, qui était seigneur en titre. Il occupa de hautes fonctions, tant à la cour de Lorraine qu'à
er 4 celle de France; devenu chambellan de l'empereur François 1 , il participa, entre autres, aux guerres d'Italie et il y a beaucoup de chances qu'il ait accompagné le roi à 5 Marignan .
1 J.-B. KAISER,La sorcellerie dans la seigneurie d'Audun-le-Tiche aux XVe et XVIe siècles, ASHAL, t.45, 1935.La guerre dans la seigneurie d'Audun-le-Tiche de 1634 à 1648, ASHAL , t. 46, 1937.Laforge de Villerupt au XVII e siècleA. SIMMER,, ASHAL t.47, 1938; cf également Les seigneurs d'Audun-le-Tiche, Joeuf, 1984. 2 C. de LADOMCHAMPS,Histoire de Tiercelet, Le Pays-Haut, 1959 n° 3, p 117 et sq. 3 Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, E 275. 4 C. AIMOND,Les relations de la France et du Verdunois, reprint Genève, 1975, p. 338, 357, 390. 5 A. SIMMER,op. cit., p 80- 86.
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2
Comment [S]:
C'est à une échéance fiscale -die Schaf von Laar - "l'impôt de Tiercelet" dont étaient redevables les habitants - que l'on doit ce document, rédigéden II ten tag nach Remigyjour après la saint Rémi" (soit le 2 ou le 3 octobre)., "le deuxième Trop occupé ailleurs, Robert de Malberg ne séjournait sans doute que rarement à Audun: c'est pour cette raison que le compte a été rédigé pour une femme -probablement son épouse - car le receveur de la seigneurie a mentionné :hast meyn Edle frauw empfangen,"ma noble dame a reçu" ...
Le document se présente sous la forme de deux listes, l'une de 29 noms, l'autre de 37: les raisons cette partition demeurent inconnues, la redevance notée étant la même.
Engelman Decker Jan Lardenois Conrad Wirdt Janne Sun Meyers Jan Mochels Jan Schele Flip Meyers Sontag Schwetzers Ely Nene Flip Feltens Engel Martin Schneider Gorgien Pestien Beckers Michel Zy Bade Schomachers Jan Willems Tyl Nelis Schnyder Clesse TyWagner Nellis Kune Jacob CluClopschertiens TrinBore Jan icus ? Sontag Simons Sun Simons Dieten Schmitz Peetien Claiss Mansjan Claisman Jan Willems
Pertz Peetien Willems Simet Sadelers Jan Carps Steffen BoCrepHansen Simet junge CrepJander der Hans Scher Remis Jan Andres Keller Trin Lodemans Mertin Lodemans Anna der Huberts meyer Oestien Croner Jan Willems Margret Willems Schennet Sadelers Simet Hans Jacop Sadelers Zy Schochien von Kheil HuHuwer Jacop wer Elz Jan dicken Jennet Jacop Nu wes Jan NuBarbaren Trinwes Jans Jan gro Schneider Sontag Pfiffer Schneider Michel Schalons Margrit Bitziens Michel Hans Schmit Dieten Steinmetzer Eler Jantien
GroPeetien von Russingen
3
Cette liste amène quelques remarques. La première concerne la langue: l'allemand y est omniprésent. Sans vouloir se lancer dans une étude linguistique, on sait que la famille de Malberg, originaire de l'Eifel, aujourd'hui en Allemagne, était germanophone. Mais elle n'a pas pu influer sur la langue parlée à Tiercelet à cette époque: le village était donc de langue allemande, et ce probablement depuis bien longtemps en fonction de l'écrasante majorité des anthroponymes germaniques relevés. On remarquera que les quelques commentaires portés en marge le sont également en allemand, mais ils peuvent très bien provenir d'un receveur originaire d'Audun.
Tiercelet relevait donc de l'aire germanique: il est vrai que la frontière 6 linguistique n'était pas loin . Mais au Pays-Haut, la zone germanophone a dû couvrir une aire plus vaste que prévu et connaître des variations, phénomène qui mériterait une étude approfondie, car Tiercelet a toujours été considéré comme de langue romane. Le doubletTiercelet/Laar atteste pourtant du contraire et divers lieux-dits germaniques subsistent toujours au cadastre communal: parmi eux, on ne relèvera queLoterbusch,noté parfoisAuterbusch,(cité dès le XVI e siècle), "le bois d'Audun (Oth)", qui rappelle ainsi la tutelle de ces seigneurs d'Audun germanophones. Quant à l'onomastique, elle est classique: les noms uniques, telsOestienetAndres sont rares et les patronymes semblent solidement fixés, bien que beaucoup portent encore le -s final d' un ancien génitif marquant le complément de nom et qui rappelle que, peu de temps auparavant, il s'agissait encore d'anciens noms communs. Beaucoup de noms de métiers sont devenus anthroponymes:Decker(couvreur)Beckers(boulanger) Schnyder/ Schneider(tailleur d'habits),Schmitz (maréchal-ferrant) Schomacher(cordonnier)Sadelers (sellier)Wirdt (aubergiste)Bore(= Bauer, paysan) Wagner(charron)Steinmetzer(taillleur de pierre),Meyer(métayer) .
Les appellatifs d'origine sont nettement plus rares:Lardenois,seul nom à le consonance romane (Ardennais),Tyl, qui rappelle sans doute le village limitrophe de Thil etSchwetzerscomme noms(Suisse). De même type, mais encore assez mal ancrés
6 e A. SIMMER,L'origine de la frontière linguistique en Lorraine, la fin des mythes ?, Knutange, 1995, (2 édition, 1998).
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de famille:Schochien von Kheil(Kayl, aujourd'hui au Luxembourg),groPectien von Russingen(Russange). La majorité provient en fait de simples prénoms, tant masculins que féminins: Jan, Nellis, Jacob, Simon, Steffen, Willem, Andres, MartinOn remarquera bon etc. nombre de formes abrégées et populaires:Margrit (Marguerite),Jenet (Jeannette)Trin (Catherine)Flip (Philippe)Ty (Matheis = Mathieu)Cless (Nicolas) Sontag(Dimanche/ Dominique),Elz (Elisabeth),Peetien(sans doute Peter) etc. Les qualificatifs commejung(jeune),gro(grand) oudick(gros) sont plus rares:der jungeCrep,JangroSchneider, Jan dicken Jenet.peut peut-être y adjoindre On bo(méchant) avecBoHansen Simet.Quant àder Hubertz meyeroù il faut remarquer - l'emploi d'un article - il doit s'agir d'un métayer de l'abbaye de Saint-Hubert (Belgique), qui possédait de nombreux biens dans la région.
Sans pouvoir tout expliquer - certains restent énigmatiques (Zy Bade ... et bien d'autres) - il faut néanmoins noter un certain désordre dans ces listes: on commence par le prénom suivi du nom (Jan Lardenois), mais l'ordre s'inverse très vite (Bore Jan) pour devenir ensuite totalement aléatoire (Bitziens Michel, Hans Schmit): le rédacteur de l'acte ne connaissait-il pas les Tiercelins ? C'est fort probable, opinion qui se renforce encore lorsqu'on considère la graphie hésitante et approximative de certains noms. Autre remarque: on n'est certainement pas en présence de toute la population de Tiercelet; seule la fraction des villageois dépendant des Malberg est citée, et uniquement les familles imposées. Impossible donc d'en tirer des conclusions démographiques; on soulignera cependant une forte endogamie, sensible d'après de nombreux patronymes identiques. Malgré tout, le grand nombre de noms féminins reste surprenant: des veuves ou des femmes seules, une bonne vingtaine au moins, soit un tiers du total. Il faut certainement y voir une conséquence de l'état de la région à la fin du XVe siècle, où les guerres de Bourgogne, puis lade Metz guerre cuisants souvenirs: tout le laissèrent de Pays-Haut resta en alerte durant plusieurs dizaines d'années. Divers châteaux furent 7 endommagés et les campagnes régulièrement ravagées : comme toujours en pareils cas, c'étaient les pauvres gens de nos campagnes qui en pâtissaient les premiers. Le nombre excessif de veuves au sein de la population de Tiercelet le confirme largement.
7 Les seigneurs d'Audun, p. 223.
5
Puisque c'est à la famille de Malberg que l'on doit ce plongeon généalogique, quelques détails complémentaires, toujours extraits des biens familiaux qui, sans aller bien loin, permettront de faire revivre d'autres villageois, et quelques fantômes historico-géographiques... Tout près, aux sources de la Vacherie -le ruisseau qui descend et flue 8 vers Auldeulx et la mauvaise Aix...moulin de Tutange (ou Thutange), disparu, le depuis des lustres: de 1570 à 1589, le meunier se nommaitClausse Domerorre; avec sa femmeMarie, ils demeuraient à Thil; en 1573, on citePeltre d'Ameror- certainement le même nom, difficile à identifier - comme maire deMichviller: Micheville était alors encore autre chose qu'une simple annexe de Villerupt. Un peu plus tard, en 1597, le successeur au moulin de Tutange seraHenry de Tifferdange, qui aura comme héritiers, en 1601,Didier Herzusa femme et  Jeannette.Toujours au même moulin on connaît9 Claude Herzuet, de Russange, Maurisse de la Forge .
Et ce nom rappelle de fort belle manière que la sidérurgie des environs de Villerupt n'était pas née d'hier.  Alain Simmer
8 Archives départementales de la Meuse, B 1947. 9 Archives départementales de Meurthe-et-Moselle, E 267.
68/25/20144:45 PM
6
Comment [S]:
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