De l invocation à Timor ouest - article ; n°132 ; vol.34, pg 121-131
12 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

De l'invocation à Timor ouest - article ; n°132 ; vol.34, pg 121-131

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
12 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

L'Homme - Année 1994 - Volume 34 - Numéro 132 - Pages 121-131
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 28
Langue Français

Extrait

Andrew Mcwilliam
De l'invocation à Timor ouest
In: L'Homme, 1994, tome 34 n°132. Anthropologie de la prière. pp. 121-131.
Citer ce document / Cite this document :
Mcwilliam Andrew. De l'invocation à Timor ouest. In: L'Homme, 1994, tome 34 n°132. Anthropologie de la prière. pp. 121-131.
doi : 10.3406/hom.1994.369831
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1994_num_34_132_369831Andrew McWilliam
De l'Invocation à Timor ouest
Andrew McWilliam, De l'Invocation à Timor ouest. — À travers deux rituels propitia
toires chez les Meto de l'ouest de Timor — une prière pour la pluie et une prière au
dieu des abeilles pour une bonne récolte de miel — , devenus aujourd'hui rares, l'auteur
s'interroge sur la relation entre la communauté des hommes et le monde des esprits.
Caractérisé par son formalisme et l'appariement de formules, le discours rituel exprime
des thèmes métaphoriques majeurs et constitue une sorte de répertoire. Aujourd'hui,
cependant, la signification religieuse du discours rituel a perdu de sa force spirituelle.
Dans les montagnes du sud-ouest de Timor la religion dominante est le
protestantisme1. Bien que les activités des missionnaires protestants se
soient développées au moment de l'intervention victorieuse du gou
vernement néerlandais dans la région au début du XXe siècle, ce n'est que vers
les années 60 qu'eurent lieu des conversions en masse. En 1955, le district du
centre-sud de Timor fut marqué par un renouveau évangélique. Ce « mouve
ment de l'esprit », ainsi qu'il fut dénommé2, suscita la création de groupes qui
se déplaçaient à travers les montagnes pour répandre les paroles de l'Évangile
et le message revivaliste, exprimant ainsi un fort désaveu de l'ancienne religion
indigène qui fleurissait dans l'île depuis des siècles. Les nouveaux convertis
étaient encouragés à rejeter les anciennes croyances et pratiques, et à détruire
une grande partie de l'attirail rituel associé à la tradition ancestrale.
Depuis cette période, l'Église, et particulièrement l'Église évangélique de
Timor (GMIT, Gereja Masehi Injili Timor), a consolidé sa position et les
paroles de l'Évangile ont même pénétré les hameaux de montagne les plus iso
lés. Cependant, pour beaucoup de montagnards, l'adhésion au christianisme se
fit à l'âge adulte. La connaissance de l'ancienne tradition subsiste parmi les
hommes et les femmes d'un certain âge.
1. 89,5 % de la population du centre et du sud de Timor (voir NTT Dalam Angka 1980. Kupang 1981).
2. Voir Fox 1980 : 235 et Brookes 1980 : 120-143.
L'Homme 132, oct.-déc. 1994, XXXIV (4), pp. 121-131. 122 ANDREW MCWILLIAM
J'étudierai ici deux aspects du passé religieux et de la pratique rituelle, qui
représentent des exemples d'invocations religieuses. Le premier est une prière
pour demander la pluie dans le cadre du cycle agricole, le second est une invo
cation associée à un rituel de collecte du miel sauvage. Ces prières ne sont plus
pratiquées dans cette partie de Timor.
Onen ulan : une prière pour la pluie
Durant des siècles, l'agriculture, particulièrement la riziculture en champs
secs (aen meto) et la culture du maïs (pena) furent étroitement liées à la religion
indigène et au monde des esprits qui, croyait-on, avaient une influence sur les
récoltes. Chaque étape du cycle des cultures était marquée par des cérémonies
rituelles destinées à faire prospérer les productions agricoles.
Les Meto, population du sud-ouest de Timor, croyaient que le royaume spi
rituel était dominé par un être suprême appelé Seigneur du Ciel, Seigneur de la
Terre (Uis Neno, Uis F ah). Ce dieu était le garant de la production et de la
reproduction de toute vie terrestre. Ils se référaient à l'être suprême à l'aide de
deux phrases conjointes : Neno tunan/Pah apiñan (le Ciel-au-dessus / la Terre-
en-dessous). En concevant la divinité de cette façon duale, les Meto manifest
aient, sous une forme transcendantale, un souci de classification duale de la
société. Cette alliance d'éléments asymétriques dans le domaine social exprime
la notion d'unité et de complémentarité présupposant une communication sui
vie à travers l'échange ; par exemple, dans le cas des échanges de mariage, les
groupes de donneurs de femmes (atoin amonet, les « hommes ») établissent des
relations durables d'alliance avec les preneurs de femmes (atoin amafet, les
« femmes »). Les rituels de transition comme les naissances, circoncisions et
funérailles s'effectuent à travers cette interaction symbolique des éléments
appariés, qui s'exprime par les termes intérieur/extérieur, dedans/dehors
(nanan/kotin), chaud/froid (maputu/manikin) et la catégorie masculin/féminin
(feto/mone). Les Meto conçoivent les relations entre les humains et le monde
des esprits de la même façon. Ainsi mes informateurs m'énonçaient-ils lacon
iquement : « la mère est la Terre (enaf es Pah) et le père est le Ciel (amaf es
Neno) ». Cette phrase met en évidence cette vérité culturelle que la vie n'est
possible qu'à travers cette conjugaison complémentaire des contraires.
Outre les rites sacrificiels adressés à la divinité (Uis Neno/Uis Pah), les
Meto procèdent à des invocations rituelles aux esprits ancestraux (nitu) de la
maison et du groupe clanique auxquels ils appartiennent. En échange
d'offrandes rituelles et de prières, les esprits des ancêtres veillent et partagent la
vie des membres vivants de la communauté. Quoi qu'il en soit, négliger les
ancêtres attire la mauvaise fortune et la maladie3.
3. Un troisième et vaste groupe d'esprits englobant divers êtres malveillants sont censés habiter en
dehors du monde du hameau et du foyer, dans la forêt et les ravines. Les personnes qui meurent de L'invocation à Timor 123
Les ancêtres de la maison et du clan sont supposés habiter un espace inte
rmédiaire situé entre le monde de la communauté et la sphère transcendante de
l'être suprême. Les prières et les offrandes de nourriture sont le vecteur de la
communication. Un autel composé d'un bâton fourchu surmonté d'une pierre
plate et ronde constitue le lieu typique de telles invocations sacrificielles. C'est
là qu'on adresse des prières en plaçant des offrandes sur cette pierre surélevée.
Dans les chants invocatoires, l'usage métaphorique de l'arbre et de la pierre est
une référence explicite à cet autel. En effet, une glose du nom de l'ancienne
religion des Meto le donne à penser : l'expression hau le 'u faut le'u, qui pourr
ait se traduire par l'arbre sacré / la pierre sacrée. Dans le passé les chefs de
groupe, de clans ou de segments de clans entretenaient ces autels pour invoquer
les esprits. Chaque foyer possédait, en outre, dans le périmètre de la maison,
une pierre de prière particulière (faut le'u) qui était utilisée pour les prières pri
vées dédiées aux esprits ancestraux du foyer.
Ces multiples rituels invocatoires concernant la maison et le groupe cla-
nique sont englobés dans des rituels collectifs destinés à assurer la prospérité du
territoire dans son ensemble. Ils sont accomplis sous la responsabilité d'un spé
cialiste, a na'amnes (littéralement : celui qui tient le riz du sacrifice), associé à
la garde rituelle des ressources de la terre et des forêts qui étaient sous sa juri
diction. Dans le passé, ces domaines rituels couvraient parfois jusqu'à 50 km2
et comprenaient une douzaine de hameaux, parfois plus. La gestion rituelle de
ce territoire tend à compléter et soutenir le pouvoir exécutif détenu par un clan
central dominant. Les domaines traditionnels à Timor ouest se sont institués à
la fois politiquement et rituellement. Parmi ses devoirs, le a na'amnes est re
sponsable des prières et des invocations qui marquent le début et la fin du cycle
agricole rituel. Un des traits du climat aux saisons marquées est le très variable
et imprévisible début de la mousson. Dans ce contexte, le a na 'amnes jouait un
rôle important dans le rituel des pluies dont dépend la subsistance. Les invocat
ions pour la pluie s'opèrent sur des lieux précis du domaine. Ces points

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents