De l origine des races à l enfance de l art. Parcours d une anthropologie (1893-1907) : Mécislas Golberg - article ; n°84 ; vol.24, pg 51-68
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De l'origine des races à l'enfance de l'art. Parcours d'une anthropologie (1893-1907) : Mécislas Golberg - article ; n°84 ; vol.24, pg 51-68

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Description

Romantisme - Année 1994 - Volume 24 - Numéro 84 - Pages 51-68
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 72
Langue Français
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Extrait

Mme Catherine Coquio
De "l'origine des races" à l'enfance de l'art. Parcours d'une
anthropologie (1893-1907) : Mécislas Golberg
In: Romantisme, 1994, n°84. pp. 51-68.
Citer ce document / Cite this document :
Coquio Catherine. De "l'origine des races" à l'enfance de l'art. Parcours d'une anthropologie (1893-1907) : Mécislas Golberg. In:
Romantisme, 1994, n°84. pp. 51-68.
doi : 10.3406/roman.1994.5951
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/roman_0048-8593_1994_num_24_84_5951Catherine COQUIO
De 'Torigine des races" à l'enfance de l'art
Parcours d'une anthropologie (1893-1907) : Mécislas Golberg
"On voit dans le paysage l'heure où on le contemple".
Mécislas Golberg.
Dans Modernité modernité, Henri Meschonnic oppose aux schémas historicistes de
représentation du moderne une notion critique positive de modernité comme travail du
sujet, actuel à l'infini comme l'inconnu en nous. Le primitivisme du début du siècle y
est valorisé comme détour de la subjectivité en art, recherche d'une "forme-sujet" par
"l'épreuve de l'altérité" \ bref comme un "révélateur" emblématique du pluriel de la
modernité - pluriel que prend à son tour le mot "primitivisme" 2. Critiquant le mythe
avant-gardiste des analyses formelles, reprochant à Goldwater et même à Rubin de
"sous-évaluer" le phénomène primitiviste en cédant encore au "démon de l'explication
génétique" ou "téléologique", il fait valoir contre les notions d'affinité ou d'influence
celle de "transformation", rapport syncrétique créateur à soumettre à l'histoire. Faire
l'histoire du primitivisme, ce serait donc faire l'histoire du sujet moderne se décou
vrant "grand primitif, d'une transformation du regard occidental sur l'autre et sur lui-
même, d'une "provocation à l'identité par l'altérité".
Cette histoire ne passe pas seulement par la confrontation des points de vue de
l'artiste, de l'historien de l'art et de l'ethnologue, indiquée et accomplie déjà, mais par
une redéfinition de l'objectif anthropologique, projet épistémologique explicite de
Meschonnic : sa Critique du rythme (1981) déclarait la guerre à la "théorie tradition
nelle" du signe dualiste et aux cloisonnements positivistes des sciences de l'homme,
au nom d'un empirisme linguistique réfléchi dans une dialectique du sujet et du
social. Or, la science de l'homme spécialisée en science de l'autre, l'anthropologie,
semble à son tour depuis quelques années se déclarer cette guerre à elle-même, mais
pour survivre. La "provocation à l'identité par l'altérité" accomplie en art, et que
Meschonnic donne en exemple à la modernité critique, elle l'effectue sur le plan
méthodologique, se préoccupant plus que jamais ď epistemologie, d'écriture et d'his
toire 3 - cherchant à sauver cette reflexivitě d'une dérive purement subjectiviste.
Préparé par les ethnologues à la fin du XIXe siècle, créé par les artistes au début
du XXe, puis étudié par les historiens de l'art, le primitivisme semble donc connaître,
par reflexivitě, un avatar particulier dans la théorie poétique et Г epistemologie des
sciences humaines. La tentation est grande d'examiner s'il y eut un équivalent, dès la
naissance du primitivisme et en rapport conscient avec elle, à cette position critique.
Position qu'il serait délicat d'appeler, pour l'époque, épistémologique 4, mais qui en
contiendrait l'esquisse théorique et la condition pratique en décloisonnant par le fait
les "disciplines" concernées par le phénomène primitiviste. L'oeuvre de Mécislas
Golberg présente ce cas de figure et constitue à ce titre une pièce notable pour com
prendre le primitivisme dans ses aspects théoriques autour de 1900, ainsi que sa
valeur de pierre de touche dans les rapports entre l'esthétique et les sciences de
l'homme. Mais qui est Golberg ?
Romantisme n°84 (1994-2) 52 Catherine Coquio
Connu parfois comme anarchiste, dreyfusiste, critique littéraire et esthéticien,
Mécislas Golberg (1869-1907) fut aussi sociologue, anthropologue, poète, philosophe,
historien d'art 5. Le caractère spécifique et méconnu de cette oeuvre polymorphe n'est
d'ailleurs pas sans lien avec la difficulté de l'identifier dans les catégories tradition
nelles auxquelles elle échappe, glissant de genre en genre et d'institution en institution
sans rien chercher d'autre pourtant qu'à préciser une idée fixe : idée qu'on pourrait
désigner grossièrement par le terme d'époque de "monisme" vital, déployé par
Golberg dans toutes ses implications : scientifiques, poétiques, éthiques, esthétiques,
épistémologiques. Or, au sens où le primitivisme est une "recherche des principes
dans toutes les origines" 6, ce monisme en est un, dont le principe - la vie une, esprit
et matière, sujet et objet - maintient l'origine dans un présent polarisateur qui la tire
vers l'avenir. Imprégnée de nietzschéisme et de dialectique - à la fois juive 7, hégé
lienne et renanienne -, la pensée de Golberg travaille à inclure le sujet empirique dans
une rationalité et une poétique nouvelles, adéquates au savoir moderne.
Jamais régressif, mais de tendance utopique, son anti-dualisme érige en mode de
connaissance privilégiée le processus d'abstraction immanente propre à l'oeuvre d'art,
et fait coïncider un vocabulaire évolutionniste avec une spéculation sur l'art et l'abs
traction. De ce qu'il appelle la "grande ligne universelle monique" de l'humanité,
déployée en dialectique spirituelle évolutive (De l'Esprit dialectique, 1900-1907),
Golberg en arrive, dans le champ esthétique, à la "vision unitaire" 8 primitive et
moderne, dont il interroge "l'intellect" à l'aide des sciences de son époque (La
Morale des lignes, 1908). L'usage méthodique qu'il fait de la psychophysiologie
(Wundt, Ribot, Lange) et de la psychiatrie (Charcot et Richer) lui fait mettre la notion
d'inconscient au centre de son éthique et de son esthétique, celle-ci cherchant les
règles du "cycle canal de l'inconscient ordonné", l'art, seul processus d'abstraction
capable d'utiliser les forces organiques en s'y soumettant 9. Ce principe - dont on
trouve la manifestation vivante dans toute l'oeuvre poétique de Golberg 10 - détermine
en partie sa pensée anthropologique et épistémologique. Appliqué, à la suite de J.-M.
Guyau, dans les domaines de l'éthique individuelle, mais aussi collective (Intuitions
sociales) n, il débouche sur la valorisation de l'esthétique comme "science de
demain".
Certains jalons essentiels - qu'on ne fera ici que présenter brièvement - font de
cette oeuvre une sorte de chaînon manquant, critique, du complexe culturel appelé pr
imitivisme. Golberg est à la fois en 1893 un des premiers à s'intéresser au continent
africain en anthropologue, et à comprendre en 1907 l'importance de Matisse et
Picasso - qui le connurent de près l'un et l'autre 12 ; importance qu'il fit saisir à
Apollinaire, dont Golberg fut en esthétique l'initiateur, et même, concernant Matisse,
le commanditaire 13. Par sa logique et son évolution internes, cette oeuvre est une
exception à la règle du hiatus, radical à la fin du XIXe siècle, entre l'étude des socié
tés primitives et la compréhension de leur art, l'une et l'autre n'émanant pas des
mêmes instances 14. D'un côté, l'anthropologie évolutionniste sacrifie à la thèse natu
raliste d'un art primitif imitatif (E. Grosse, Hadding, Lubbock) ; de l'autre, l'historien
d'art Worringer, dans Abstraktion und Einfiihlung (1908), défend à propos de l'art
byzantin la thèse d'une "genèse spontanée universelle du style géométrique" - s'ins-
crivant ainsi dans la filiation ď Alois Riegl, auteur en 1893 d'une étude systématique
des styles décoratifs primitifs (Stilfragen), et théoricien du "Kunstwollen" (Die spa-
trômische Kunstindus

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