De la communauté des convertis amakholwa à la naissance de l'Inkatha. - article ; n°137 ; vol.35, pg 133-161

Véronique Faure

Description

Cahiers d'études africaines - Année 1995 - Volume 35 - Numéro 137 - Pages 133-161
Abstract ~~From the Converted Amakholwa Community to the Birth of the Inkatha.~~ — In 1879, as Zulu armies were capitulating to British colonial forces, missionary activities were intensified in southern Africa. The Maria Stern Monastery of Bosnia decided to found a Trappist order in South Africa. Despite their lack of missionary experience, the Trappists were enormously successful. Thus emerged a new class of converted Africans, called amakholwa in Zulu, attached to the values of modernity. In the 1920s, these Christians created the first African cooperatives and associations. The latter became part of the Zulu cultural movement, itself in competition with the fast growing labor movement. Under the national government's policy of retribalization, these associations became involved in politics. By analyzing the role played by this Christian elite in founding organizations that would later become the ANC and Inkatha, we can better understand how the ambiguous relations between these last two organizations arose. We can also catch a glimpse of alliances and issues in the question of Zulu identity and in the civil war that, erroneously called an ethnie conflict, has been raging in Natal-KwaZulu for over ten years.
Résumé En 1879, tandis que les armées zouloues capitulaient face aux troupes coloniales britanniques, l'activité missionnaire s'intensifiait dans la zone australe du continent. La décision était prise, depuis le monastère Maria Stern en Bosnie, de fonder un monastère trappiste en Afrique du Sud. Malgré l'inexpérience des Trappistes en matière missionnaire, le succès de leur entreprise fut énorme et déboucha sur la formation d'une nouvelle classe africaine de petits propriétaires christianisés, rompus aux vertus de la « modernité ». On les appela les « convertis », en zoulou amakholwa. Répondant aux besoins de leur communauté et mettant en pratique l'enseignement acquis dans les missions, ces amakholwa, dans les années 1920, créèrent les premières coopératives et associations africaines. Devenant presque aussitôt des mouvements culturels zoulous, ces associations se trouvèrent en compétition avec le mouvement ouvrier et syndical socialiste, en pleine expansion à la même période, et se politisèrent rapidement, sous l'influence du gouvernement central lancé dans une politique de retribalisation des Africains. L'analyse du rôle que jouèrent les élites africaines chrétiennes dans la création des congrès nationaux africains — le South African Native National Congress et le Natal Native Congress, qui, respectivement, allaient devenir l'ANC et l'Inkatha — permet de mieux comprendre comment est née entre les deux organisations l'ambiguïté que cultive Mangosuthu Buthelezi depuis 1975, et aide à saisir la complexité des alliances et des enjeux contemporains autour de la question identitaire zouloue et, en particulier, de la guerre civile qui, décrite à tort comme un conflit ethnique, fait rage au Natal-KwaZoulou depuis plus de dix ans.
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: CAHIERS_D-ETUDES_AFRICAINES
• Publié le: 01 janvier 1995
• Nombre de lectures: 34
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 2 Mo

Extrait

Madame Véronique Faure
De la communauté des convertis amakholwa à la naissance de
l'Inkatha.
In: Cahiers d'études africaines. Vol. 35 N°137. 1995. pp. 133-161.
Citer ce document / Cite this document :
Faure Véronique. De la communauté des convertis amakholwa à la naissance de l'Inkatha. In: Cahiers d'études africaines. Vol.
35 N°137. 1995. pp. 133-161.
doi : 10.3406/cea.1995.2027
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cea_0008-0055_1995_num_35_137_2027Abstract
Abstract
From the Converted Amakholwa Community to the Birth of the Inkatha. — In 1879, as Zulu armies were
capitulating to British colonial forces, missionary activities were intensified in southern Africa. The Maria
Stern Monastery of Bosnia decided to found a Trappist order in South Africa. Despite their lack of
missionary experience, the Trappists were enormously successful. Thus emerged a new class of
converted Africans, called amakholwa in Zulu, attached to the values of "modernity". In the 1920s, these
Christians created the first African cooperatives and associations. The latter became part of the Zulu
cultural movement, itself in competition with the fast growing labor movement. Under the national
government's policy of retribalization, these associations became involved in politics. By analyzing the
role played by this Christian elite in founding organizations that would later become the ANC and
Inkatha, we can better understand how the ambiguous relations between these last two organizations
arose. We can also catch a glimpse of alliances and issues in the question of Zulu identity and in the
civil war that, erroneously called an ethnie conflict, has been raging in Natal-KwaZulu for over ten years.
Résumé
En 1879, tandis que les armées zouloues capitulaient face aux troupes coloniales britanniques, l'activité
missionnaire s'intensifiait dans la zone australe du continent. La décision était prise, depuis le
monastère Maria Stern en Bosnie, de fonder un monastère trappiste en Afrique du Sud. Malgré
l'inexpérience des Trappistes en matière missionnaire, le succès de leur entreprise fut énorme et
déboucha sur la formation d'une nouvelle classe africaine de petits propriétaires christianisés, rompus
aux vertus de la « modernité ». On les appela les « convertis », en zoulou amakholwa.
Répondant aux besoins de leur communauté et mettant en pratique l'enseignement acquis dans les
missions, ces amakholwa, dans les années 1920, créèrent les premières coopératives et associations
africaines. Devenant presque aussitôt des mouvements culturels zoulous, ces se
trouvèrent en compétition avec le mouvement ouvrier et syndical socialiste, en pleine expansion à la
même période, et se politisèrent rapidement, sous l'influence du gouvernement central lancé dans une
politique de retribalisation des Africains.
L'analyse du rôle que jouèrent les élites africaines chrétiennes dans la création des congrès nationaux
africains — le South African Native National Congress et le Natal Native Congress, qui, respectivement,
allaient devenir l'ANC et l'Inkatha — permet de mieux comprendre comment est née entre les deux
organisations l'ambiguïté que cultive Mangosuthu Buthelezi depuis 1975, et aide à saisir la complexité
des alliances et des enjeux contemporains autour de la question identitaire zouloue et, en particulier, de
la guerre civile qui, décrite à tort comme un conflit ethnique, fait rage au Natal-KwaZoulou depuis plus
de dix ans.Véronique Faure
De la communauté des convertis
amakholwa la naissance
de lnkatha
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Amakholwa en zoulou signifie convertis est ainsi que se désignaient les
premiers chrétiens zoulous
Cahiers tudes africaines 137 XXXV-1 1995 pp 133-161 134 RONIQUE FAURE
premier Inkatha Ces communautés bien adhérant la trilogie mora
lité modernité et respectabilité et repoussant les valeurs tribales
elles décrivent comme barbares avéreront analyse ne pas en
être si éloignées Les sources employées seront majoritairement histo
riques se référant aux travaux les plus récents des spécialistes mais aussi
aux voix zouloues est-à-dire aux récits de vie de certains de ces
produits des missions comme on les parfois appelés de manière
péjorative
Ces premiers convertis ont été les pionniers dans la tentative qui se
voulait la fois digne et respectueuse une ouverture aux valeurs du
monde occidental désormais trop envahissantes pour être contournées
Les défenseurs de la cause culturaliste ont vu en eux des traîtres la cause
ethnique les plus radicaux sur la scène politique ont dénoncé leur coopé
ration avec le gouvernement central alors ils étaient en réalité les pre
miers Africains se placer en interlocuteurs authentiques des autorités
coloniales En effet ces communautés organisées et articulées selon la
logique de envahisseur attachent la défense des biens et du peuple
noir par intermédiaire un réseau international conscience noire
réseaux religieux et coopératives démocratiques Ce sont enfin eux les
amakholwa hamba kahle qui ont été les premiers organiser en
associations qui allaient au début du siècle donner naissance ANC
On peut donc la lumière du rôle que jouèrent les communautés
amakholwa dans la création des congrès nationaux indigènes qui plus
tard appeleraient ANC et Inkatha mieux comprendre comment naît
entre les deux organisations ambiguïté que cultive Buthelezi
depuis 1975
Une intense activité missionnaire
Le xixe siècle est caractérisé par une considérable réémergence de acti
vité missionnaire travers le monde Tandis que les terrains américain et
asiatique déjà anciens continuaient être exploités de nouvelles sociétés
missionnaires se lan aient assaut de Afrique Frère Libermann le
grand missionnaire des Nègres envoyait les Pères du Saint Esprit en
Afrique de Ouest au moment même où les Blancs avan aient
depuis le nord et est vers intérieur du continent
partir de 1820 les missions méthodistes se multiplient en pays xhosa Les
evangelistes anglais initient aux langues vernaculaires pour traduire les psaumes
et cherchent former une élite noire En 1841 ils fondent Lovedale un établisse
ment enseignement où émergera la fin du siècle intelligentsia africaine
Hamba kahle est la réponse une salutation dont la traduction serait bien
merci tout va bien ou allez en paix Ce sobriquet zoulou signifie que les
amakholwa optaient toujours pour la solution la moins conflictuelle DE INKATHA 135 NAISSANCE
Dans les années 1830 les méthodistes sont rejoints par les Fran ais des Missions
évangéliques de Paris des Wesleyans écossais des Allemands de la Mission rhé
nane ainsi que des pasteurs de American Bound qui implantent en pays zou-
lou Coquerel 1992 32)
Les missionnaires catholiques ont chois