Des négociants au long cours s'arrêtent à Dimbokro (Côte-d'Ivoire). - article ; n°124 ; vol.31, pg 475-486

Sylvie Bredeloup

Description

Cahiers d'études africaines - Année 1991 - Volume 31 - Numéro 124 - Pages 475-486
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: CAHIERS_D-ETUDES_AFRICAINES
• Publié le: 01 janvier 1991
• Nombre de lectures: 69
• Langue: Français

Extrait

Madame Sylvie Bredeloup
Des négociants au long cours s'arrêtent à Dimbokro (Côte-
d'Ivoire).
In: Cahiers d'études africaines. Vol. 31 N°124. 1991. pp. 475-486.
Abstract
S. Bredeloup — Long-Distance Traders Stop in Dimbokro, Ivory Coast.
On the basis of biographies gathered in the field, the occupational, cultural, family and social mobility of individuals is shown to be
tied to the history of Dimbokro, a history shaped by migrations. Achievement and then a fall for M'Ba, a Malinke teenager who
came from his hometown of Sikasso to live with his uncle. Owing to its infrastructure, Dimbokro, a major trading center, grew until
the Daoukro road was built. Then separated from major circuits of trade, the town declined; and business fell off for M'Ba. A new
generation of long-distance traders has emerged, and two sorts are compared: the "solidarity" ones who create trading
relationships out of kinship, and the "solitary" ones who choose such relationships on their own. Given the similar fates of both,
mobility is still the way to social success, itself dependent on Dimbokro's growth or decline.
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Bredeloup Sylvie. Des négociants au long cours s'arrêtent à Dimbokro (Côte-d'Ivoire). In: Cahiers d'études africaines. Vol. 31
N°124. 1991. pp. 475-486.
doi : 10.3406/cea.1991.1567
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cea_0008-0055_1991_num_31_124_1567Sylvie Bredeloup
Des négociants au long cours
arrêtent Dimbokro
Côte-divoire
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Rémunéré 35 francs il cultivait nettoyait réparait Suivant exemple de
ses frères il avait élu domicile dans le village des étrangers le quartier
Dioulakro construit très tôt et relégué au bord des marigots entre le rail
et une large boucle du Nzi alors que la ville européenne érigée sur le pla
teau affirmait sa domination par la hauteur de ses constructions
Quand les aménagements de la voie ferrée furent achevés la plupart
des Malinké quittèrent Dimbokro pour suivre la progression du rail plus
au nord Quelques-uns cependant continuèrent travailler proximité de
la gare déchargeant les trains ou approvisionnant les marchés de la ville
au moyen de charrettes hui les baraninyi ou ceux qui
cherchent du travail sont originaires du Burkina-Faso du Mali et du
Niger autres encore persévèrent dans activité commerciale ap
puyant sur un vaste réseau social innervant plusieurs pays Afrique de
Ouest ils réactivèrent les anciens circuits échanges parallèlement aux
structures coloniales officielles Recherchés par administration ces
négociants au long cours de la communauté dioula évitaient les axes de
communication récemment tracés pour emprunter les anciennes voies
caravanières désertées Intermédiaires efficaces ils prospectaient la noix
de kola et la commercialisaient dans leur région origine En un mois et
demi ils parcouraient pied les pistes reliant Oumé-Dimbokro-Bouaké-
Sikasso-Ségou Au retour ils rapportaient dans le cercle du Nzi-Comoë
poisson séché et beurre de karité Leur talent fut exploité par les maisons
de commerce qui les recrutaient pour vendre des produits importés en
échange de produits de la cueillette puis plus tard des cultures indus
trielles
Alors que Dimbokro troisième ville du rail devenait la plaque tour
nante de économie de traite et connaissait un second souffle alors que la
forêt se métamorphosait en une multitude de cacaoyères les commer
ants dioula renfor aient leurs positions dans les secteurs concédés par
le capitalisme international au capitalisme autochtone Amselle 1977
271 son niveau le jeune Ba dont la situation financière était amé
liorée au fil des années profita de la réorientation économique du terri
toire colonial développement des cultures commerciales et diffusion des
moyens de communication pour se lancer dans le négoce Dans les
années trente il allait chercher du riz Sikasso du poisson Mopti du
beurre de karité du maïs du petit mil et de huile de palme dans autres
régions du Mali Plutôt que écouler ces produits au compte-goutte
exemple des colporteurs dioula il louait un camion sur le lieu de produc
tion puis commercialisait la marchandise en grosses quantités Dix ans
plus tard Ba imposait comme le seul dépositaire régional des pro
duits alimentaires consommés par la population africaine non ivoirienne
sans avoir travailler sous la tutelle européenne
est absence de circuit officiel de redistribution des produits de
grande consommation qui permit Ba de faire fortune Il aménagea un
vaste entrepôt dans le quartier de Dioulakro pour stocker la marchandise GOCIANTS AU LONG COURS 477 LES
et élargir sa clientèle Il commercialisa de nouveaux produits comme
igname précoce très appréciée par les populations autochtones Sa noto
riété étendait bien au-delà du cercle de Dimbokro Les clients parti
culiers ou commer ants se dépla aient de Bongouanou Bocanda mais
aussi de Gagnoa Daloa et Abengourou pour approvisionner chez lui Il
était courant que des grossistes achètent pour équivalent de 800 000
francs CFA de marchandises était une époque florissante la région
concentrait les plus hauts revenus par tête du pays le cercle de Dimbokro
était devenu le plus gros producteur de café et de cacao de la Côte-
Ivoire La ville capitale de la Boucle du Cacao entrait dans une phase
explosion démographique1 et offre en produits vivriers avait un avenir
assuré
Très vite Ba dut limiter ses déplacements pour satisfaire sa clien
tèle Il passait commande et ses fournisseurs le livraient directement
Jamais il ne associa un compatriote enquête éclaire guère sur les
raisons de ce choix Dans les années cinquante lui était expédié quoti
diennement équivalent de cinq six camions de cinq dix tonnes cha
cun Il pouvait alors écouler chaque jour près de quatre tonnes ignames
Le magasin croulait sous les flots de produits et entrepreneur fit
construire une villa en dur Dimbokro pour héberger sa famille gran
dissante
La route de Daoukro tout gâté
exemple de certaines villes camerounaises Dimbokro est devenue
une ville marginalisée au lendemain de indépendance nationale
autres temps autres priorités en matière de transport La route
constituait le nouveau vecteur de développement imposé par les besoins
de économie spéculative sans que des liaisons rail-route soient envisa
gées pour une meilleure irrigation du territoire est dans ce contexte
que opéra la percée 1957 puis le bitumage 1963 de axe routier
Kotobi-Adzopé nouveau tracé qui court-circuita la gare ferroviaire de
Dimbokro La ville fut bie