Deux contes otomis. - article ; n°1 ; vol.27, pg 1-12
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Description

Journal de la Société des Américanistes - Année 1935 - Volume 27 - Numéro 1 - Pages 1-12
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1935
Nombre de lectures 14
Langue Français

Extrait

Jacques Soustelle
Deux contes otomis.
In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 27 n°1, 1935. pp. 1-12.
Citer ce document / Cite this document :
Soustelle Jacques. Deux contes otomis. In: Journal de la Société des Américanistes. Tome 27 n°1, 1935. pp. 1-12.
doi : 10.3406/jsa.1935.1914
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jsa_0037-9174_1935_num_27_1_1914DEUX CONTES OTOMIS,
Par Jacques SOUSTELLE.
Les Otomis semblent avoir conservé très peu de leur ancien folklore.
De toutes les peuplades du Mexique central, c'est peut-être, avec les
Aztèques, celle qui a été soumise à Г evangelisation la plus poussée et la
plus pénétrante ; les auteurs des xvie et xviie siècles sont unanimes à louer
la docilité de ces indigènes et leur promptitude à adopter la religion
importée *. Leurs idées mythologiques, leurs contes et leurs traditions ont
donc subi une usure puissante et rapide, qui a rejeté dans l'oubli les
conceptions originales des Otomis pour les remplacer par une idéologie
étrangère à leur mentalité et à leur culture. C'est peut-être à cette dernière
raison qu'il faut attribuer le fait que la mythologie d'origine chrétienne,
les contes et légendes concernant les saints par exemple, ne se soit nul
lement développée chez eux, de sorte que le folklore indigène n'a pas été
remplacé par un folklore basé sur les croyances nouvelles. La ruine des
productions originales de la conscience autochtone a été presque complète,
et rien n'a remplacé ce qui a été détruit2.
Le peu que l'on retrouve encore est donc d'un caractère nettement
« pré-évangélique »; il s'agit là de restes, de lambeaux de tradition qui
ont échappé à l'effacement, et qui n'ont pas été pénétrés par l'influence
extérieure. Tels sont les deux contes qu'on va lire. L'informateur auquel
je les dois est un Otomi de San José del Sitio, municipalité de Jiquipilco,
État de Mexico, sur le haut plateau de Toluca. Cet indigène, nommé Boni
facio Castillo, est un esprit très ouvert, d'une intelligence très vive, et
d'une discrétion, aussi, par laquelle il ne diffère pas des autres Otomis
en général. Il fallut plus d'un an de relations constantes et très amicales
entre lui et moi pour qu'il consentît à lever le voile sur ce recoin de la
mentalité des Otomis, car on les a tellement convaincus du caractère
1. Par exemple : « Estas dos generaciones (les Otomis et les Ghichimèques) son
las de más bajo metal y de más servil gente de toda la Nueva Espaňa : pero habiles
para recibir la fe, y muy bien han venido al bautismo ». Motolinia, Memoriales, Paris,
1903, p. 12.
2. Par contre le langage indigène persiste et ne montre aucune tendance à
s'éteindre.
Société des Américanisies, 1935. 1 .
2 SOCIÉTÉ DES AMÉRICAMSTES
païen et blâmable de leurs traditions, qu'ils se montrent d'une extrême
circonspection pour rapporter à un observateur étranger le peu qu'ils en
connaissent présentement. Il faut ajouter que, ce pas franchi, mon info
rmateur a tenu à dire tout ce qu'il savait, ce qui d'ailleurs n'était pas
considérable. Le langage dans lequel ces contes sont rapportés est un dia
lecte otomi commun à San José del Sitio, Jiquipilco, Temoaya, Capul-
huac et à diverses « haciendas » comme Maní, Mostejé, Nijiní, Santa
Isabel, c'est-à-dire à toute la partie Est du plateau d'Ixtlahuaca, Etat de
Mexico. Ce dialecte est naturellement très analogue à l'Otomi, plus
répandu, des Etats de Hidalgo et Querétaro et du nord de l'Etat de
Mexico, mais présente quelques traits phonétiques et grammaticaux par
ticuliers.
Le personnage central commun à ces deux contes est un être mythique
appelé dok'inyo. Le mot est composé de do, « pierre », etk'inyq, « serpent » ;
le mode de composition semble impliquer que le premier élément corres
pond à la matière de l'objet désigné par le second. Ainsi doiïinyô voudrait
dire « serpent de pierre », comme dok* way, par exemple, signifie « cou
teau de pierre » [k'tvay couteau). Le substantif préfixé joue alors le rôle
d'un adjectif, comme dans l'anglais « stone-snake » ou « stone-knife ».
En Otomi, l'adjectif est très fréquemment placé avant le substantif et fait
corps avec lui dans la prononciation, comme on le voit dans des noms de
lieux tels que ťasťoho, le volcan de Toluca (littéralement « la montagne
blanche », de t'asi, blanc, et ťoho, montagne).
Quel peut être le sens de l'expression « serpent de pierre » ? Interrogé
là-dessus, mon informateur déclare qu'à son avis c'était une allusion à
l'habitat de ce serpent mythologique, qui vivrait dans des pierres, dans
les régions pierreuses de la montagne : car, comme tous les Otomis du
plateau, il localise dans les montagnes tout ce qui lui paraît étrange et
mystérieux. Mais lui-même ne considérait pas cette explication comme
certaine. « Serpent vivant dans les pierres » se dirait plutôt liinyodo, le
substantif suffixe correspondant à une relation plus vague que celle de
matière ou de composition. Par exemple on dit ťowada (montagne (cou
verte) d'agaves, c'est-à-dire Metepec, Etat de Mexico), dçhedo (eau (qui
contient des) pierres), le village de San Juan Dehedó, Etat de Querétaro.
Il faut donc reconnaître que cette appellation demeure extrêmement
obscure, et l'on ne trouve rien pour l'instant, dans la littérature ancienne
sur les Otomis, qui concerne un être mythique de ce genre. De toute façon,
il s'agit là d'un être malfaisant, dont l'activité, d'autre part, est liée dire
ctement avec les femmes, auxquelles il s'attaque particulièrement ; il est
difficile de ne pas être frappé par le caractère nettement sexuel de ce
dok'inyo, surtout dans le deuxième conte. Un autre trait de ce serpent DKUX CONTKS OTOMIS d
mythologique est le pouvoir, qu'il manifeste dans le second conte aussi,
d'endormir ses victimes d'une façon irrésistible.
Il est probable qu'une recherche systématique portant sur les thèmes
des deux contes (par exemple celui du petit enfant privé par un serpent
du lait de sa mère) amènerait à rencontrer des similitudes capables d'éclai
rer toute cette question. Je me contente présentement de reproduire les
deux textes. J'emploie le système de transcription phonétique en usage à
l'Institut d'ethnologie de l'Université de Paris 1, adapté particulièrement
à l'Otomi et aux autres langages de la même famille ; il suffira de noter
ici les signes particuliers :
1. Voyelles.
Les voyelles qui ne portentpasde signe d'ouverture (c) sont« moyennes»
(légèrement fermées).
L'accent circonflexe " indique la nasalisation.
0 est un ô très fermé, presque identique à ii.
2. Consonnes.
L'apostrophe ' ik\ ť) accompagne les consonnes prononcées avec occlu
sion glottale et un léger arrêt (« fortis form »).
r désigne un son vibrant analogue à celui de l'espagnol.
h est un souffle vélaire semblable à la jota espagnole.
a; : occlusion glottale sourde.
x '. sonore (avec vibration).
/ : souffle nasal, air expiré par les narines, précédant l'émission de n
ou m.
Prrmier conte.
1. Otomi : nar bpiyo m;.bw'j(\.) nar tiwmi{'2). mirti^o (3).
2. mot à mot : Une femme avait un petit bébé. Il était joli.
1. binam'w'jto binlni. bindodyo (Щ kaVw.i mimoni.
2. Il commauçi fut mdacle(4;. Il rruigrit et aussi pleurait.
1. niHmipiiihô (6) te mik'a. minygniho niť i
2. Ils ne savaient pas ce que il faisait(7). Ils demandaient des remèdes
\. padiyotehj (8) . himitotibô ( 9 ) ka r ( 10 ) remedy о (11).
Ils ne trouvaient pas le remède. 2. pour le guérir.
1. ka na sûi bimpldih'j ЫЬеЫЬэ (12) kar ngû.
2. Et une nuit ils surveillèrent ils veillèrent la maison.
1. Cohen, Marcel, Instructions d'enqaîte linguistique. Paris, Institut d'ethnologie,
1928, 125 p. SOCIÉTÉ DES AMÉR1CAN1STES
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La femme se coucha à l'intérieur et les hommes
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