Dieux souverains et rois dévots dans l ancienne royauté de la Vallée du Népal - article ; n°99 ; vol.26, pg 71-95
26 pages
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Dieux souverains et rois dévots dans l'ancienne royauté de la Vallée du Népal - article ; n°99 ; vol.26, pg 71-95

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Description

L'Homme - Année 1986 - Volume 26 - Numéro 99 - Pages 71-95
25 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1986
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Gérard Toffin
Dieux souverains et rois dévots dans l'ancienne royauté de la
Vallée du Népal
In: L'Homme, 1986, tome 26 n°99. pp. 71-95.
Citer ce document / Cite this document :
Toffin Gérard. Dieux souverains et rois dévots dans l'ancienne royauté de la Vallée du Népal. In: L'Homme, 1986, tome 26 n°99.
pp. 71-95.
doi : 10.3406/hom.1986.368714
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1986_num_26_99_368714GÉRARD TOFFIN
Dieux souverains et rois dévots
dans l'ancienne royauté
de la vallée du Népal
Népal. conception totalement Gérard types xvme supériorité dualité, déités accorde des relations siècle, de tantriques — Toffin, un dont divinités Les sécularisé. absolue de grand plaçaient entre on rois la Dieux royauté. privées, trouve rôle Malla, : les des souverains la aux prêtres râstradevatâ, des prospérité qui Le âgâ pouvoirs traces premier régnèrent dya Brahmanes. et ou et ces en surhumains reste rois dieux istadevatâ, la dans Inde, divinités défense marqué dévots Le d'État, la amène second, vallée et révèle de dans dont par religieux incarnation leur à du fortement la reconsidérer l'existence l'ancienne ils Népal polarité royaume tiraient du (de roi politique influencé du Kathmandou) de royauté entre leur initié l'idée pur deux pouvoir. les et aux par d'un versants du de mains Tantra. pays, l'impur le la roi du tantrisme, L'analyse vallée de hindou dans xme et Cette deux et des du au la
Les recherches récentes sur la royauté en Inde remettent sérieusement
en question la séparation entre pouvoir spirituel et pouvoir politique,
brahman et ksatra, dans laquelle certains anthropologues ont cru voir
une marque distinctive de la société indienne1. Le roi hindou n'est pas seu
lement un être laïque, un spécialiste du politique, un guerrier qui, du fait
de ses fonctions et de ses violences sur le champ de bataille, serait inca
pable d'atteindre les valeurs les plus hautes, réservées aux seuls prêtres
Brahmanes. Il cristallise de nombreuses représentations religieuses autour
de sa personne : on le compare souvent à un dieu, parfois même on l'ass
imile à une figure divine ; il participe aux côtés du Brahmane — avec
lequel il forme un couple indissociable — aux principaux sacrifices dont
dépendent le bien-être et l'ordre socio-cosmique du monde ; il a des affi
nités mystérieuses avec la pluie et la prospérité du royaume ; son trône se
1. Par ex. L. Dumont (1966 : 99 et 351-375), notamment dans sa théorie, bien mise à
l'épreuve, de la sécularisation de la royauté. Parmi les travaux récents sur cette question,
citons Inden 1981 ; Stein 1980 ; Marglin 1981 ; Mayer 1981 ; Kulke 1976 ; Biardeau
1978 et 1981. Certains de ces travaux ne sont pas eux-mêmes exempts d'erreurs d'appréc
iation.
L'Homme 99, juil.-sept. 1986, XXVI (3), pp. 71-95. 72 GÉRARD TOFFIN
trouve investi d'une sacralité immanente ; son palais est conçu comme le
centre de l'univers.
Le roi hindou n'est certes pas un dieu. Il ne fait pas l'objet d'un culte
dont il serait lui-même le prêtre suprême comme dans l'ancienne royauté
d'Egypte ou de Sumer, ou dans les royaumes khmer de l'Asie du Sud-Est.
Il est toujours inférieur, subordonné au prêtre Brahmane ; sur ce point, la
disjonction mise en avant par L. Dumont entre statut et pouvoir reste bien
un élément distinctif de cette forme de royauté. Mais les souverains n'en
sont pas moins des êtres sacrés autour desquels règne une atmosphère de
vénération religieuse. Leur pouvoir repose sur des assises symboliques qui
en déterminent la forme.
Je me propose de verser ici une nouvelle pièce à ce vaste dossier en
analysant les relations qu'entretient le roi avec quelques-unes des divinités
dont sa souveraineté est parée2. Comme point d'ancrage de l'exposé : la
vallée de Kathmandou, cette oasis de verdure et de terres fertiles, dominée
par la haute chaîne himalayenne. Ce bassin est le creuset d'une civilisation
d'un raffinement extrême, sans équivalent au Népal, fondée en grande
partie par les Néwar, population locale de langue tibéto-birmane aux ori
gines obscures. Malgré sa position périphérique par rapport aux princ
ipaux centres de brahmanité, cette région est profondément imprégnée de
culture indienne. En contact avec l'Inde dès le début de l'ère chrétienne,
elle a reçu de ce pays tous les éléments majeurs de sa brillante culture.
A partir du xve-xvie siècle, elle fit même figure de zone-refuge des vraies
valeurs de l'hindouisme face à une Inde occupée d'abord par des Musul
mans, puis, plus tard, par des Occidentaux. Bien que le bouddhisme ait
réussi à subsister et à exercer une influence non négligeable au plus haut
niveau de la royauté, l'hindouisme est omniprésent dans les institutions
politiques et les croyances religieuses. Les rois de ces anciens royaumes
étaient hindous et régnaient selon les prescriptions des textes
brahmaniques ; ils employaient des Brahmanes pour célébrer leurs cér
émonies, publiques et privées, et comptaient sur eux pour leur forger des
généalogies les rattachant aux grandes dynasties indiennes3.
On traitera principalement de la période dite Malla (xme-xviiie siècle),
du nom de la dynastie régnante, remontant parfois aux Licchavi (ve-
vme siècle) pour des faits plus anciens. Durant cette tranche d'histoire, la
Cette étude a fait l'objet d'une conférence au séminaire d'A. C. Mayer à la School of
Oriental and African Studies (Londres, 7 juin 1984). J'ai beaucoup profité des comment
aires de l'auditoire pour établir cette version corrigée.
La civilisation de la vallée de Kathmandou comprend également de nombreux éléments
autochtones antérieurs à la pénétration des idées et des institutions indiennes. Ce fonds
indigène, particulièrement patent dans la structure sociale des Néwar, l'est encore davan
tage dans celle des paysans Jyâpû qui constituent la caste la plus nombreuse de cette
ethnie (Toffin 1984). Dieux souverains et rois dévots 73
vallée de Kathmandou formait une ou plusieurs petites entités politiques
autonomes dominées par les Néwar. On l'appelait la « Vallée du Népal »,
nepâl mandala, ou nepâl desa, ou tout simplement nepâl. Le mot
Népal, on le sait, n'acquit son acception géographique actuelle qu'à la fin
du xvme siècle, lorsque cette vallée fut soumise par une nouvelle dynastie
qui unifia le pays tout entier. Il s'agit donc d'un travail d'anthropologie
historique, dans lequel mon expérience des sociétés néwar contemp
oraines, urbaines et rurales, ne fournit au mieux qu'un élément d'appréc
iation. Mes sources sont principalement les chroniques locales (vamsâ-
valï) rédigées dans l'entourage des souverains4 et sur des travaux d'histo
riens. Je suis conscient que ces chroniques n'ont été composées, à une
exception près, qu'au xixe siècle et ne sont donc pas contemporaines des
faits cités ; je sais aussi que les événements qui y sont rapportés sont par
fois douteux. Il n'empêche. En ce qui concerne l'histoire religieuse, dont il
sera abondamment question ici, elles sont des plus fidèles et puisent dans
un fonds de croyances très ancien. En tant qu'anthropologue, ce sont au
demeurant les faits de structure, ceux qui s'inscrivent dans la « longue
durée », qui retiennent avant tout mon attention. Les anecdotes citées ci-
après n'ont peut-être pas toujours eu réellement lieu, certaines sans doute
ont été déformées par l'imagination complaisante des prêtres et des scribes
qui les rapportent ; elles n'en sont pas moins significatives d'une manière
de penser, de réagir face à tel ou tel événement, elles sont riches d'ense
ignements sur les rapports entre société et religion.
Dans un précédent article (Toffin 1979), j'avais tenté de dégager les
aspects religieux de la royauté Malla tels qu'ils ressortent de l'organisation
spatiale des villes royales et de quelques grandes fêtes « palatiales »
comme Indra jâtrâ, Matsyendranâth jâtrâ et Bisket j

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