J. Bahloul, La Maison de mémoire. Ethnologie d une demeure judéo-arabe en Algérie (1937-1961)  ; n°130 ; vol.34, pg 199-201
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J. Bahloul, La Maison de mémoire. Ethnologie d'une demeure judéo-arabe en Algérie (1937-1961) ; n°130 ; vol.34, pg 199-201

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L'Homme - Année 1994 - Volume 34 - Numéro 130 - Pages 199-201
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Publié le 01 janvier 1994
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Langue Français

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Laurence Podselver
J. Bahloul, La Maison de mémoire. Ethnologie d'une demeure
judéo-arabe en Algérie (1937-1961)
In: L'Homme, 1994, tome 34 n°130. pp. 199-201.
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Podselver Laurence. J. Bahloul, La Maison de mémoire. Ethnologie d'une demeure judéo-arabe en Algérie (1937-1961). In:
L'Homme, 1994, tome 34 n°130. pp. 199-201.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/hom_0439-4216_1994_num_34_130_369761Comptes rendus 199
cette aire culturelle (mythologie du miel, origine du tabac, cosmologie, figure du grand
serpent d'eau, etc.) ; enfin avec des récits provenant d'un contexte élargi à l'ensemble de
l'Amérique du Sud (Lune au pénis géant, passeur impassible, etc.).
Une constante mise en relation des mythes avec la documentation ethnographique
apporte d'autre part un complément indispensable au déchiffrement d'une parole qui est
ainsi inscrite dans les relations sociales. Le rapport à la croyance et au rite (mythe de la
transformation d'un goinfre en cochon sauvage, qui rappelle le sort de celui qui rompt un
interdit) ou encore au trait psychologique (thème de la « modestie calculée » du beau
chanteur), restitue les mythes dans leur rôle de régulateurs de la vie sociale. Derrière la
forme éclatée sous laquelle se présente la matière mythique, P. Clastres tend des fils afin
de tisser la trame du discours implicite que la société chulupi tient sur elle-même. Au
nombre des contradictions sociales que les mythes ont pour fonction de traiter, les notes
de P. Clastres rendent compte des difficultés auxquelles doit faire face une société qui
repose à la fois sur l'institution de la matrilocalité avec prééminence de la lignée matern
elle, et sur l'institution de la guerre avec la valorisation machiste des vertus guerrières.
Le caractère particulièrement conflictuel des rapports entre les sexes que les Chulupi ont
en commun avec les autres sociétés du Chaco se traduit à plusieurs reprises dans les
mythes, soit sur le plan individuel par le récit de la condition périlleuse des femmes aban
données par leurs maris, soit sur le plan collectif par le refus de la communauté des
femmes d'obtempérer aux ordres des hommes. Dans d'autres cas, les différences entre les
variantes d'un même mythe sont à mettre sur le compte du sexe des narrateurs. Quant à la
guerre, les analyses de P. Clastres ont montré que les mythes chulupi pensent ensemble
l'origine de la guerre et l'apparition de l'ordre social. Le discours indigène, qui illustre
l'ethos guerrier que cette société partage avec les autres peuples du Gran Chaco, rejoint ici
la réflexion de l'ethnologue sur la guerre comme « condition de possibilité de l'être social
primitif».
Après E. Nordenskiöld et A. Métraux, P. Clastres apporte, avec cette Mythologie des
Indiens Chulupi, une précieuse contribution à l'étude d'une société encore peu connue. Ce
livre vient ainsi combler une des lacunes que déplorait Métraux.
Jacqueline Duvernay-Bolens
EPHE, Paris
Joëlle Bahloul, La Maison de mémoire. Ethnologie d'une demeure judéo-arabe en
Algérie (1937-1961). Paris, Éd. Métailié, 1992 (diff. Le Seuil), 247 p., gloss., bibl., fig.
Dans les récits familiaux, le nom d'un lieu et d'une maison constituent souvent un
point d'ancrage autour duquel s'arriment les souvenirs. Quand l'histoire familiale ren
contre la grande histoire, elle est, pour les juifs d'Algérie, synonyme de déracinement, de
guerre et d'exil. La maison semble alors projetée dans un passé irrémédiablement lointain
et hors de toute réalité tangible. Pourtant, pour ne pas se dissoudre et donner un contour
aux choses passées, les récits y retournent toujours. La maison, centre de l'épopée famil
iale maintes fois évoquée par le récit des proches, énigmatique et comme dans les limbes
de la mémoire partagée, doit être effectivement visitée pour que le dépositaire de celle-ci
en comprenne l'architecture et se fasse archéologue du souvenir.
Joëlle Bahloul, qui avait déjà montré que l'ethnologie du proche, par la mise à distance 200 Comptes rendus
objectivante, pouvait donner un sens aux pratiques quotidiennes dans lesquelles l'obser
vateur s'inscrit1, réitère son approche en tant qu'anthropologue appartenant à la tradi
tion qu'elle étudie. Son analyse de la maison familiale, celle de ses parents, n'en sombre
pas pour autant dans une description complaisante et égotiste des « gens de soi ». Se
rendant à Sétif, dans l'est algérien, pour retrouver Dar Refayil, la maison qui ponctuait
les récits du passé, l'auteur veut d'abord en percevoir la matérialité. Elle en dresse le
plan, ouvre les portes, parcourt les corridors, écoute le récit de ceux qui l'ont habitée et
de ceux qui s'y trouvent encore.
Inspirée à la fois par Bachelard et son goût pour la métaphore et par Bourdieu dans
l'établissement d'une typologie de la distinction, l'auteur trace les limites de la maison,
mais aussi les cloisonnements intérieurs, afin d'en repérer l'architecture. Insistant sur le
caractère féminin de la référence à la maison, J. Bahloul écrit : « Même si la langue
arabe désigne par dar la maison du père et son lignage, l'univers domestique est décrit
comme un enclos de la féminité, comme la maison mère associée à la maternité et à
l'engendrement [...] Pas de patronyme pour identifier les ménages, les prénoms suf
fisent » (p. 47). Dans cet espace fermé et circulaire où portes et fenêtres donnent sur la
cour intérieure, c'est par les prénoms féminins que s'inscrivent les lignages.
Cette demeure de trente pièces qui abritait dix-huit familles (unités domestiques),
dont huit musulmanes (soit, au total, soixante-quinze personnes en moyenne), exigeait
la mise en œuvre de repères de séparation et de hiérarchie implicites afin de remédier à
la densité et à la promiscuité. « L'esprit de distinction et de séparation régnait à Dar
Refayil comme si on tentait de combattre l'exiguïté par un souci de cloisonnement et de
compartimentation de l'espace » (p. 56). Dans le plan d'occupation de la maison se
lisent les hiérarchies de l'Algérie coloniale et la position des juifs comme population
intermédiaire entre Français et Musulmans.
Au centre de la cour, un arbre bénéfique et vénéré par tous marquait le lien entre les
communautés et protégeait toute la maisonnée. Si les mémoires racontent la proximité
affective des juifs et des arabes dans cette croyance commune et dans le respect mutuel
de leur mode de vie ponctué par le calendrier religieux de chacun, elles laissent
entendre aussi leur méfiance hors de la maison. Même si, « dans le souvenir juif, la dis
corde judéo-arabe était provoquée par l'antisémitisme français », la rue, espace virtuel
du mélange, modifiait le sentiment des uns et des autres, comme si hors de l'espace
domestique l'abolition des distinctions devenait source de dangers (p. 73). Fenêtres et
portes tournées vers la cour, comme une matrice définissant l'appartenance et le repli
sur la famille, symbolisent aussi, quand — mais cela est rare — elles ouvrent sur la rue,
la société ouverte et le désir de se conformer au modèle européen, synonyme d'ascen
sion sociale : c'est le cas de l'appartement des propriétaires. L'opposition permanente
intérieur/extérieur exprime les rapports à l'autre lointain et émancipateur, à la fois
proche et redouté.
Les juifs, français depuis le décret Crémieux de 1870, échappent juridiquement au
statut d'indigène et se tournent vers le modèle métropolitain pour leurs projets d'aven
ir. Si l'éducation, la réussite sociale, l'attirance pour les grandes villes, l'adoption du
français comme langue devaient marquer leur « évolution » — les Moché deviennent
Marcel, les Sultana, Reine et les Abraham, Albert — , les juifs n'en demeurèrent pas
moins, face aux chrétiens et par leur culture, des « autochtones » en marge de la
communauté européenne (p. 71). Lors des temps forts que sont les fêtes religieuses et
familiales, ils retrouvent la nourriture et le vêtement traditionnel, la langue arabe pour
dire la convivialité, le bonheur d'être ensemble malgré des difficultés matérielles qui
faisaient vivre chacun « au jour le jour » (p. 109). Aujourd'hui, l'évocation des souven
irs enregistrés

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