L isolat esquimau de Thulé (Groenland) - article ; n°4 ; vol.7, pg 675-692
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L'isolat esquimau de Thulé (Groenland) - article ; n°4 ; vol.7, pg 675-692

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Description

Population - Année 1952 - Volume 7 - Numéro 4 - Pages 675-692
A plusieurs reprises, dans cette revue, nous avoirs attiré l'attention sur l'intérêt que présente, à la fois pour le démographe et le généticien de population, la connaissance des groupes humains isolés. Les notions d'isolat et de population minimum peuvent, certes, faire l'objet de recherches théoriques mais pour être utiles en pratique, elles doivent s'appuyer sur des faits observés et, pourrait~on dire, sur des structures expérimentales. Les documents recueillis par Jean Malaurie sur la tribu esquimaude de Thulé contribueront à éclairer d'importantes questions, non seulement dans le domaine de la démographie et de la génétique, mais dans celui des diverses branches de l'anthropologie.
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1952
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean Malaurie
Léon Tabah
Jean Sutter
L'isolat esquimau de Thulé (Groenland)
In: Population, 7e année, n°4, 1952 pp. 675-692.
Résumé
A plusieurs reprises, dans cette revue, nous avoirs attiré l'attention sur l'intérêt que présente, à la fois pour le démographe et le
généticien de population, la connaissance des groupes humains isolés. Les notions d'isolat et de population minimum peuvent,
certes, faire l'objet de recherches théoriques mais pour être utiles en pratique, elles doivent s'appuyer sur des faits observés et,
pourrait~on dire, sur des structures expérimentales. Les documents recueillis par Jean Malaurie sur la tribu esquimaude de Thulé
contribueront à éclairer d'importantes questions, non seulement dans le domaine de la démographie et de la génétique, mais
dans celui des diverses branches de l'anthropologie.
Citer ce document / Cite this document :
Malaurie Jean, Tabah Léon, Sutter Jean. L'isolat esquimau de Thulé (Groenland). In: Population, 7e année, n°4, 1952 pp. 675-
692.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_1952_num_7_4_2828L'ISOLAT ESQUIMAU
DE THULË (GROENLAND)
l'attention A plusieurs sur l'intérêt reprises, que dans présente, cette revue, à la fois nous pour avoirs le démoattiré
graphe et le généticien de population, la connaissance des
groupes humains isolés. Les notions d'isolat et de population
minimum peuvent, certes, faire l'objet de recherches théo
riques mais pour être utiles en pratique, elles doivent s'ap
puyer sur des faits observés et, pourrait~on dire, sur des
structures expérimentales. Les documents recueillis par
Jean Malaurie sur la tribu esquimaude de Thulé contribue
ront à éclairer d'importantes questions, non seulement dans
le domaine de la démographie et de la génétique, mais
celui des diverses branches de l'anthropologie.
INTRODUCTION
Les esquimaux polaires fixés dans le district de Thulé, sur la
côte nord-ouest du Groenland (76-79* degrés de latitude nord) repré
sentent la population la plus septentrionale du globe (Fig. 1). L'objet
de l'expédition conduite en 1950 par Jean Malaurie auprès de ce
groupe humain, pour le compte du Centre National de la Recherche
Scientifique, était essentiellement d'ordre géographique et sociolo
gique. Toutefois, lors de l'hivernage de 1950-1951, il a pu être ras
semblé par enquête directe, au prix de multiples déplacements,
dans chacun des dix campements de la tribu *, une documentation
démographique complète sur cette population (fig. 2). Les résultats
définitifs des importantes données rapportées par la mission devant
faire l'objet d'une prochaine thèse, nous nous contenterons de pré-
* Etah, Neke, Siorapaluk, Kangerdluarssuk, Kuinissut, Kekertat, Nunatarssuak,
Thulé, Kekertak, Savigssivik. 676 l'isolât esquimau de thulé (Groenland)
Fig. 1. — Situation géographique de Thulé.
senter ici les premières conclusions démographiques et d'en souli
gner l'importance à ceux qu'intéresse la connaissance de la struc
ture de cette population.
I. LA POPULATION ET SON MILIEU
Peu nombreuse, puisqu'elle comprend seulement 302 individus,
selon notre recensement nominatif arrêté le 31-12-51, cette tribu
est isolée du sud du Groenland par la Baie de Melville, de la terre
de Baffin par le Smith Sound, les terres inhabitées d'Ellesmerre et
du Devon, les détroits de Jones et de Lancaster (Fig. 2). Elle se pré
sente dans les conditions d'un isolement total. A notre connaissance,
aucune étude démographique approfondie n'a été jusqu'ici publiée
sur un groupe esquimau aussi réduit. ■
.
I
I
.
l'isolât esquimau de thulé (Groenland) 677
1ПЕО 57 52
Stations fixes.
Stations avec Européens
Les surfaces des cercles sont proportionn
elles aux nombres d'habitants indiques
par les chiffres (1-12 -1951)
1 1 Glacier
• Surface dégagée cW« glaces
•>••_• Itinéraires d'hiver suivis
par l'expédition
Echelle
Fig. 2. — Les campements de la tribu de Thulé au moment de l'expédition
et itinéraires d'hiver subis par J. M*l\urie.
Provenant vraisemblablement du sud-ouest (terre de Baffin) et
fixée sur cette côte sinon avant l'an 1000, certainement au moins
depuis le xne et xiii" siècle, cette tribu n'a été découverte qu'en 1818
(John Ross) et recensée officiellement pour la première fois en 1895
par l'expédition R. E. Peary. Placé sur la route de toutes les migrat
ions qui ont conduit les esquimaux du Canada vers la côte occiden- 678 l'isolât esquimau de thulé (Groenland)
taie aussi bien qu'orientale du Groenland, ce groupe a été coupé
de la côte ouest (Upernavik) aux environs de 1600. C'est en effet
à partir de cette époque que, grâce notamment aux remarquables
recherches d'Eric Holtved, on peut distinguer une civilisation
esquimaude polaire spécifique.
En 1818, John Ross nous rapporte que ces hommes n'avaient
aucune idée précise de l'existence d'autres peuplades vivant plus au
Sud. L'on sait en outre que, depuis la fondation de la colonie danoise
d'Upernavik (1771), aucune migration venant du nord ne s'est pro
duite. C'est entre 1862 et 1870, d'autre part, qu'a eu lieu la dernière
migration venant du Canada (terre de Baffin) et dont environ
10 sujets seulement atteignirent Thulé. C'est de ce groupe que les
esquimaux polaires apprirent, ou réapprirent, l'emploi du kayak,
de l'arc, la pratique de la chasse au renne, l'usage de la pêche au
saumon qu'ils ignoraient lors de leur découverte en 1818, à la diff
érence des esquimaux de la côte occidentale du Groenland. Ces te
rmes chronologiques étant posés, notons que de 1904 à 1909, année
de la fondation d'un comptoir européen à Thulé, les chasseurs indi
gènes, sur l'exemple d'une expédition danoise (1904-1906), avaient
pris la coutume de partir annuellement en expédition à travers la
banquise de Melville vers le comptoir d'Upernavik, à seule fin de
se ravitailler en tabac, sucre, café, fusils, cartouches.
Les conditions géographiques très particulières qui ont présidé
à l'occupation humaine de ce territoire déterminent évidemment
un mode de vie original. Semi-nomade, cette population de race
esquimaude se déplace périodiquement tous les deux ou trois ans
entre les neuf stations du district qui s'étendent sur 500 km. environ
du nord (Etah) au sud (Savigssivik). Les conditions de glace (mor
cellement de la banquise) de la baie de Melville et du détroit de
Lancaster, interdisent de nos jours des mouvements plus étendus.
Les déplacements limités à la seule dimension du district se font au
printemps, au retour du soleil. Le matériel est alors entassé sur le
traineau et la famille toute entière, au prix de longues journées de
marche, se dirige gaiement vers un nouveau campement.
La littérature n'a pas manqué d'insister sur l'instabilité, le goût
du changement qui se manifeste généralement chez ces indigènes.
On peut remarquer, qu'à Thulé au moins, ce caractère peut s'expl
iquer par un souci instinctif, et plus ou moins conscient, en ce groupe
de dimension réduite, d'établir et de maintenir le plus grand nombre
de contacts humains. Le climat est des plus rudes : trois mois
d'obscurité hivernale. Trois mois de l'année seulement, juin, juillet,
août, connaissent une température moyenne supérieure à 0 degré
centigrade (Thulé, observations de 1916 à 1920). Le thermomètre au
cours des jours les plus froids de l'hiver peut s'abaisser au-dessous
de 40 degrés C; aussi, la mer ne dégèle-t-elle à Siorapaluk qu'au
début de juillet, la banquise se reformant dès novembre. En ce mi- L'ISOLAT ESQUIMAU DE THULÉ (GROENLAND) 679
lieu austère, l'économie reste du type traditionnel. Tournée vers la
chasse, elle dépend étroitement des ressources locales en morses,
phoques, renards, accessoirement des chasses à l'ours, narval, ren
nes, de moins en moins nombreux.
A la latitude où vivent ces hommes, les marges d'existence pour
raient sembler réduites. Il n'en est rien. Les ressources naturelles
sont variées et importantes, comparées à celles des autres dist

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