fig. 1.1 L'Od e ilMerinoSupportd'agnéalnyésreiqueSouvent on observe que les transferts de connaissance les plus réussis consistent à ne jamais affirmer qu'une chose est ceci ou cela, mais plutôt à présenter les clés d'origine qui ont mené à l'idée que l'on se propose de faire passer. C'est dans cet esprit que je vous propose de découvrir l'Oeil de Merino, en partant des 15 ans d'observation et d'expérimentation en entreprise qui l'ont inspirée. A charge pour vous, donc, de vous faire votre propre opinion et de la faire vivre, en fonction des différents points de vue qui seront les vôtres à l'avenir.
Titre original La Théorie des Seuils L'Oeil de Merino Voici l'Oeil de Merino, le modèle qui comprend entièrement la Théorie des Seuils et permet sa mise en pratique au quotidien:
La fragmentation structurelle Ce qui frappe quand on observe les gens discuter dans une entreprise, c'est la place qu'occupe la structure lorsqu'il s'agit d'évaluer les réponses possibles à une situation donnée: "On ne maîtrise pas cette partie, c'est au département des opérations de dire comment on doit s'interfacer avec leur processus. " "On ne peut pas livrer cette commande à leur place. Seule notre filiale locale a les codes pour déstocker sur ce territoire." "Si on éteint cette machine, on risque de faire tomber notre réseau mondial. On ne peut pas la remplacer comme ça." "Notre logiciel de gestion commerciale ne permet pas de gérer ce nouveau type de barême." La fragmentation opérationnelle Ce qui frappe également quand on s'observe travailler, c'est la proportion que peut prendre l'absence d'une information complètement anodine: "J'attends de savoir comment il a mis ça en place; je préfère attendre son retour [de congé, de maladie, de déplacement] sinon je vais passer des heures à retrouver comment il a fait." "Oui, les informations sont sauvegardées toutes les nuits, et il m'avait montré comment les récupérer. Mais là c'est tout bête, je n'ai pas pensé à lui demander comment lire une bande magnétique qui n'est pas de la veille. Il va falloir trouver un spécialiste et ça va encore nous coûter bonbon." "C'est quoi la référence de ta pièce d'origine ? Le catalogue propose deux modèles, dont l'un est 3 fois plus cher et j'ai peur que l'autre ne soit pas compatible avec ton appareil. Normalement c'est marqué dessus. Tu n'as personne qui puisse te le dire ? Il faudrait le savoir avant 16 heures, sinon tu ne sera livré que dans 1 mois." "Bon sang, j'ai perdu au moins 3 heures aujourd'hui à rétablir le courant dans la salle. Je ne savais pas que la ligne était tirée sur un retour. On a passé toute l'après-midi à tester les relais dans le faux-plafond. On va encore se faire du minuit-une heure du matin pour rien."
Le temps et la cohésion Ces deux séries d'événements quotidiens se rapportent à deux grandes causes de vulnérabilité des entreprises: • les causes liées à la forme d'organisation (vulnérabilité structurelle) • les causes liées au mode de travail (vulnérabilité opérationnelle) L'une et l'autre de ces fragilités se combinent pour venir ensemble fragmenter les possibilités de l'entreprise, c'est-à-dire menacer son espérance de vie en épuisant ses ressources vitales: • le Temps • la Cohésion C'est pourquoi je vous invite maintenant à reconsidérer les principales formes d'entreprises - nonobstant leur forme juridique, économique ou d'organisation - sous cet angle synthétique des "possibles".
L'entreprise virtuelle Dans l'entreprise virtuelle on considère toute personne comme faisant partie de l'entreprise, à partir du moment où elle adhère à ses objectifs. Dans ce contexte l'appartenance juridique de cette personne à l'entreprise est secondaire. L'entreprise virtuelle est typiquement incarnée par un noyau de fondateurs, dont la mission est de centraliser la cohésion de l'ensemble des contributions. On parlera alors non plus de collaborateur (compris au sens d'employé, non-manager), mais de contributeur (susceptible également d'influencer ou de diriger des actions vitales pour l'entreprise). En parallèle le contributeur est presque toujours engagé dans une activité structurée, ce qui lui permet d'offrir à l'entreprise virtuelle: • une certaine tranquillité d'esprit (puisque déjà en poste par ailleurs) • des disponibilités ponctuelles (puisqu'en marge de son agenda primaire) • un engagement fort (puisque fondé sur un choix libre et motivé) Pour toutes ces raisons le contributeur va systématiquement rechercher l'excellence en matière de: • rapidité d'action (bien agir dans le peu de temps imparti à un rendez-vous) • rapidité de compréhension (bien comprendre dans le peu de temps passé avec les membres) Cest sur ce modèle que se forment depuis toujours les communautés dintérêt, ainsi que les "foetups" ces startups placentaires qui privilégient le développement à la croissance.
L'entreprise intermittente ou millésimée Dans l'entreprise intermittente, dès le départ on voit l'activité comme la répétition périodique d'un cycle bien maîtrisé (exemple : congrès et salons professionnels). La durée de ce qu'il est convenu d'appeler le "cycle d'édition" est connue a priori et peut donc être planifiée dans le détail (par exemple sur un an ou deux). Contrairement aux autres, l'entreprise intermittente n'a droit qu'à un seul essai (même une startup peut espérer avoir la chance d'agoniser avant de s'éteindre). Compte tenu des engagements financiers en jeu, très rares sont les organisateurs privés d'événements professionnels qui ont survécu à l'échec d'une édition. L'entreprise intermittente doit donc impérativement industrialiser ses processus et ce, dès leur mise en place. D'une édition à l'autre, tous les efforts vont alors porter sur l'optimisation de ce cycle. Au plan mécanique: • optimiser le rendement (commercialisation des espaces d'exposition, de la billeterie visiteurs, du fichier commercial de l'édition N-1) • augmenter la fiabilité (on va chercher à mettre en oeuvre les méthodes, techniques et procédés les plus éprouvés) Au plan pratique: • accélérer la cohésion (les nombreuses parties prenantes n'ont au mieux que 48 heures de mise en place pour apprendre à travailler ensemble...) • faciliter la répétition (tout ce qui peut resservir va être systématiquement rendu générique et pérenne, le reste sera classé "volatil" et remplaçable à tout moment sans aucun impact sur la survie ou les opérations de l'entreprise) Sur le terrain, l'entreprise intermittente adopte ses partenaires et interagit avec eux sans aucun protocole, indépendamment de leur degré d'intégration juridique (bailleur d'espaces, prestataire, vacataire, fournisseur, services publics...). Vue sous cet angle, l'entreprise intermittente est véritablement une forme spécialisée d'entreprise virtuelle.
L'entreprise structurelle ou à organigramme Dans l'entreprise structurelle tout est conduit en fonction de l'organisation des activités. Tout changement dans l'organisation: • hiérarchique, matricielle, par projet... • arrivées et départs de personnels Toute évolution dans les activités: • métier, marché, volume... introduction et retraits de produits/services • Impacte le coeur de l'entreprise dans ses deux ventricules: le système de gestion • • le système d'information Parce que ces modifications sont essentiellement de nature progressive, les changements qui vont être apportés au coeur de l'entreprise structurelle seront nécessairement incrémentaux. Or dans une structure établie, tout changement entraîne une fissure, même minime. Cette multiplicité de modifications va donc venir petit à petit: • fragmenter ses connaissances • limiter son champ d'action Au plan stratégique: • on perd la visibilité du plan d'ensemble • le schéma directeur d'origine se retrouve enseveli sous les strates évolutives Au plan opérationnel: • on s'enlise dans l'existant, car on ne peut pas tout modifier d'un coup • au risque de casser la structure toute entière • d'ailleurs toutes les modifications ne sont pas forcément documentées, ou leurs auteurs sont partis • quoi qu'il en soit l'historique se perd
Par nature, l'entreprise structurelle est vulnérable à terme, car elle est appelée à perdre son capital intellectuel, c'est-à-dire: • à voir diminuer son degré de connaissance intérieure, donc sa maîtrise • à voir se réduire sa liberté d'action, donc sa mobilité Dépendante d'une logique enfouie sous un amoncellement de choix historiques, elle est condamnée à se réincarner sous l'impact d'une reprise, d'un rachat ou d'une fusion: • en valorisant son savoir-vendre • mais en oubliant au passage l'essentiel de son savoir-faire L'entreprise étendue ou en réseau Dans l'entreprise étendue on considère tout organisme extérieur comme faisant partie intégrante du système écologique de l'entreprise, dès lors qu'il est en relation économique avec elle. L'entreprise étendue va donc tendre à intégrer ses partenaires économiques naturels (client, fournisseur, administration, association professionnelle). A ce titre on va chercher à normaliser les structures des différents partenaires pour gagner en: • rapidité d'enrichissement (commandes, paiements, logistique, gestion) • rapidité d'offre (commerce, positionnement, livraison, publicité) De ce point de vue, l'entreprise étendue ne fait que souder des entreprises structurelles dédiées, en une nouvelle structure partagée, typique de l'état présent du marché.
La startup La startup, contrairement à ce que l'on pourrait croire, est un hybride entre l'entreprise structurelle et l'entreprise étendue - et non pas entre l'entreprise virtuelle et l'entreprise intermittente. Contrairement à l'entreprise virtuelle, la startup va chercher à s'ancrer le plus vite possible dans une structure: • la sienne propre • celle d'un partenaire de type structurel • ou encore celle d'un acquéreur Contrairement à l'entreprise intermittente, la startup va remettre ANAP (as next as possible) l'industrialisation de ses procédés: • recrutement• conception/développement • fabrication vente/support client • Par contre elle va immédiatement rechercher la croissance, la respectabilité et les signes extérieurs de patrimoine: • partenariats grands comptes • politique de marque • valorisation financière Contrairement à l'entreprise structurelle, la startup manque cruellement de temps mais en contrepartie, la concentration de ses locaux lui assure - bon gré mal gré - un semblant de cohésion.
La nano-pollution Cependant on va retrouver partout les mêmes symptômes de fragmentation opérationnelle. Vous vous souvenez, l'information "anodine" - du moins en apparence... Et ce, indépendamment de la forme d'entreprise ambiante - biologique, ou minérale. Il y a donc de toute évidence un facteur, commun à toutes les formes d'activité, dont la qualité échappe à tout contrôle et ce, en dépit des procédures et des outils mis en place - aussi sophistiqués soient-ils. Ce dénominateur commun, c'est l'Homme. Et plus exactement, c'est la façon dont nous allons piloter - au plan individuel - tout un ensemble de choix discrets, au quotidien et pour l'entreprise. Pris isolément, chacun de ces choix est d'un poids si ténu qu'il échappe à toute consolidation, aux études organisationnelles comme aux audits de gestion. La plupart du temps, nous n'en avons d'ailleurs même pas conscience, car à l'échelle d'un projet par exemple, ils se situent encore en-dessous de l'échelle des tâches -quasiment au niveau de la gestuelle d'exécution. Or, la fragmentation opérationnelle toute entière est directement liée à la façon dont chacun va venir opérer ces choix discrets de l'entreprise. En effet ces choix discrets peuvent pénaliser ou au contraire sensiblement améliorer lergonomie de chacun des savoirs et de chacune des actions de lentreprise. La nano-écologie De même quil faut savoir pour agir, il faut agir pour savoir. Entre savoir et action en vérité il ny a aucune frontière. Donc dès que vous savez, vous avez les clés pour agir et réciproquement. Cest ce ticket d'entrée ce "permis d'aboutir" - que lon appelle ici un "seuil". Cest ici et à ce niveau que la Théorie des Seuils intervient et se propose de venir guider ces choix discrets, en fournissant un modèle suffisamment simple l'Oeil de
Merino - pour que chacun puisse lassimiler à un niveau réflexe et le pratiquer dinstinct.