La bibliothèque d un devin syrien à Meskéné-Emar (Syrie) - article ; n°2 ; vol.124, pg 375-388
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Description

Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1980 - Volume 124 - Numéro 2 - Pages 375-388
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1980
Nombre de lectures 40
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Daniel Arnaud
La bibliothèque d'un devin syrien à Meskéné-Emar (Syrie)
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 124e année, N. 2, 1980. pp. 375-
388.
Citer ce document / Cite this document :
Arnaud Daniel. La bibliothèque d'un devin syrien à Meskéné-Emar (Syrie). In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des
Inscriptions et Belles-Lettres, 124e année, N. 2, 1980. pp. 375-388.
doi : 10.3406/crai.1980.13731
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1980_num_124_2_13731BIBLIOTHÈQUE D*UN DEVIN À MESKÉNÉ-EMAR 375 LA
COMMUNICATION
LA BIBLIOTHÈQUE D*UN DEVIN SYRIEN
À MESKÉNÉ-EMAR (SYRIE),
PAR M. DANIEL ARNAUD
Toute découverte importante au Proche-Orient asiatique ancien
naît de l'heureuse rencontre d'un hasard, d'une chance, du talent des
archéologues et de l'application des épigraphistes. Joignons-y la
volonté de faire connaître puis de publier. La République arabe
syrienne, désireuse de sauvegarder le plus d'antiquités possibles dans
la vallée de l'Euphrate en amont de Raqqa, avant la mise en eau
d'un barrage, avait invité des équipes pour fouiller ce qui allait
devenir dans un avenir proche, trop proche, le lac El Assad (bahr
el-Assad). C'est ainsi que M. Jean Margueron fut conduit à mener six
campagnes sur le site de Meskéné qadimé, sur la rive droite du fleuve,
de 1972 à 1976, et il a entretenu votre compagnie en 1975 des princ
ipaux résultats obtenus. Mon propos aujourd'hui est de rendre
compte, à grands traits car la matière est abondante, non pas de
l'ensemble de la trouvaille épigraphique mais de ce qui en constitue
l'élément le moins espéré : la bibliothèque d'un devin syrien au
xnie siècle avant notre ère.
Les fouilles de M. Jean Margueron ont dégagé, nous l'apprîmes
alors, l'antique ville d'Emar. On reconnaissait encore le quadrilatère
jadis clos de remparts où furent mis au jour un palais, quatre
temples, des maisons particulières et des rues. Épigraphiquement
le butin est à la fois important et bien distribué selon les chantiers.
Qu'il nous soit permis de rappeler que, sans sacrifier l'acribie à la
précipitation, nous avons édité un catalogue partiel et l'analyse de
tous les documents exhumés, exception faite des textes lexicogra-
phiques que leur caractère spécifique met à part.
La prosopographie montre que trois générations et demi ont vécu
à Emar. Devant la révolte de ses sujets syriens, le roi hittite Mour-
sili II mena une vaste campagne de reconquête dans le sud de
l'Empire. A cette occasion, il entreprend apparemment la construc
tion d'une ville neuve. L'historien en conclut que la cité ancienne
d'Emar était alors devenue inhabitable, qu'en fût responsable la
violence humaine ou plutôt la divagation soudaine et irrésistible de
l'Euphrate. Ce terminus a quo se placerait vers 1320 avant notre ère.
D'autre part, un contrat daté du roi babylonien Melichihou permet
de fixer à 1187 la destruction du site, premier terminus ad quem COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS 376
fourni par un document écrit jusqu'à présent en Syrie, qui permet
de rattacher au comput universel la fin de l'âge du bronze récent,
fin dont la position chronologique ne reposait jusqu'ici que sur un
faisceau de constatations archéologiques. Sous la conduite assez
molle d'une dynastie locale et sous la surveillance attentive de fonc
tionnaires anatoliens, Emar va vivre quelques cent trente ans d'une
vie de métropole provinciale dont le seul intérêt, stratégique, est de
fermer le passage d'est en ouest aux Assyriens, sournoisement ou
ouvertement hostiles aux Hittites, et de surveiller, au sud, la steppe
où se manifestaient les ambitions de princes, comme celui du Souhi,
qui montraient d'autant plus d'audace que les Égyptiens et les
Hittites affirmaient de moins en moins leur volonté de puissance.
Le Palais a fourni 22 textes, les temples de Ba'al et d'Astarté : 26,
le chantier C : 12 dont un poids inscrit, le chantier N une lettre en
hittite, les maisons A v, T et V respectivement : 5, 21 et 25, le
temple M2 une pierre dure gravée et quelques morceaux de contrats,
le Mx une centaine de documents, entreposés dans la sacristie
et quatre mille fragments, fragments et non tablettes, à l'estimation,
entassés dans la cella. L'importance de ce dernier lot ne vient pas du
nombre qu'il représente mais de son contenu car il apparut immédia
tement, au nettoyage sommaire fait sur place, qu'il s'agissait de
textes religieux et littéraires et non pas, comme partout ailleurs sur
le site, de documents de la pratique notariale ou administrative.
Affirmons hautement, mais nous aurons plusieurs fois l'occasion d'y
revenir, que le travail d'identification de cet ensemble exceptionnel
n'aurait pas été possible ou au moins aurait été retardé sans les
travaux de notre maître Jean Nougayrol sur la Syrie qui, après
avoir été un exemple, resta un guide, même parti pour la Terre-sans-
retour. Seize lettres, à sujet politique ou cultuel, furent dégagées
dans l'angle sud-est ; quelques inventaires se trouvaient aussi dans
la cella : qu'une bibliothèque contînt d'autres genres de textes que
ceux qui répondent à la définition du lieu est un fait avéré et banal
au Proche-Orient asiatique : la Ninive d'Assourbanipal en reste un
exemple fameux. La notion même en revanche de « bibliothèque »
mérite un bref examen : les Anciens, et les Emariotes comme eux,
employaient le mot commode dans son imprécision de bit tuppi,
« maison des tablettes ». En tout état de cause, la conservation
n'allant jamais sans l'enseignement et l'édition, à des fins à la fois
pédagogiques et pratiques, il faudrait plutôt parler de scriptorium
au sens médiéval du terme.
Cette trouvaille soulève bien des questions. Je retiendrai les
quatre qui s'imposent d'entrée. Je m'y limiterai : nous devons nous
préoccuper d'abord de savoir comment fonctionnait ce scriptorium,
établir en deuxième lieu le catalogue des textes, en rechercher pour LA BIBLIOTHÈQUE D*UN DEVIN À MESKÉNÉ-EMAR 377
la troisième étape l'origine et les voies de transmission, retrouver,
enfin, les thèmes qui obsédèrent les scribes émariotes.
L'organisation matérielle se laisse reconstituer sans trop de peine,
sans non plus trop d'incertitude. Les tablettes étaient classées dans
une pièce au-dessus de la cella d'où elles ont été précipitées lors de la
destruction du bâtiment ; après l'incendie et un abandon de plus de
vingt siècles, l'endroit a servi alors de cimetière aux Ayyoubides,
bêchant dans la masse effondrée et remettant au jour des fragments
qui ne résistèrent pas aux outrages des intempéries. A l'origine, les
pièces d'argile étaient disposées sur une ou plusieurs étagères contre
le mur le plus long, au contraire des documents de la pratique mis
dans des paniers ou des jarres. Le nombre exact des tablettes nous
échappe : il nous faudrait connaître celui des titres, celui des tablettes
dans chaque série, enfin celui des duplicats dans chaque cas. C'est
dire les difficultés de l'entreprise. Tout bien pesé, en faisant la part
la plus grande à l'incertitude, je proposerai le chiffre maximum de
400 titres. On remarquera que la longueur du mur, 10 m, permettait,
en théorie, le classement sur la tranche, comme d'usage, d'environ
500 pièces. A titre de comparaison, M. Laroche évalue à 1 200 titres
la seule littérature religieuse contenue dans la bibliothèque plus ou
moins contemporaine de Bogazkôy-Hattousa ; au vne siècle la
bibliothèque d'Assourbanipal aurait abrité 2 000 titres. On mesure
de toute façon l'ampleur des destructions et des pertes quand on voit,
exemple significatif et pitoyable à la fois, que l'épopée de Gilgamech
n'est plus attestée que par quatre éclats sur le plus grand desquels
on ne lit plus que douze mots intacts et aucun vers complet. Les
tablettes émariotes sont souvent de très grand gabarit, semblables
en cela à celles de l'Assour de Toukoulti-Ninourta Ier (1248-1206) ;
la variété de leurs mains évoque, d'autre part, ce

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