La contraction du temps dans la datation des souvenirs anciens - article ; n°1 ; vol.79, pg 7-21
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L'année psychologique - Année 1979 - Volume 79 - Numéro 1 - Pages 7-21
L'étude de la localisation dans le passé de souvenirs anciens a été entreprise de façon expérimentale en faisant estimer par des sujets la date d'événements publics connus (mort de de Gaulle, la première greffe cardiaque sur l'homme, etc.). La tendance générale des résultats est la sous-estimation de la date des événements anciens (1960-1971), c'est-à-dire qu'on rapproche l'événement du présent ; la sous-estimation est fonction de l'ancienneté de l'événement. A l'inverse, la date des événements récents (de 1971 à 1973 dans cette expérience) est surestimée. La théorie selon laquelle le temps estimé serait fonction de la quantité de souvenirs stockés est discutée.
An experimental study was performed to investigate the subject's ability to temporally locate memories about well-known events (e.g., the murder of president Kennedy, etc.). The main results indicated that dating of old events (1960-1971 in this experiment) is underestimated, while dating of recent events is overestimated. Furthermore, the underestimation is a function of the ancientness of the event. A theory predicting that the dating of events would be a function of the amount of stored memories is discussed.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1979
Nombre de lectures 8
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Alain Lieury
Patricia Caplain
Alain Jacquet
Christian Jolivet
La contraction du temps dans la datation des souvenirs anciens
In: L'année psychologique. 1979 vol. 79, n°1. pp. 7-21.
Résumé
L'étude de la localisation dans le passé de souvenirs anciens a été entreprise de façon expérimentale en faisant estimer par des
sujets la date d'événements publics connus (mort de de Gaulle, la première greffe cardiaque sur l'homme, etc.). La tendance
générale des résultats est la sous-estimation de la date des événements anciens (1960-1971), c'est-à-dire qu'on rapproche
l'événement du présent ; la est fonction de l'ancienneté de l'événement. A l'inverse, la date des événements
récents (de 1971 à 1973 dans cette expérience) est surestimée. La théorie selon laquelle le temps estimé serait fonction de la
quantité de souvenirs stockés est discutée.
Abstract
An experimental study was performed to investigate the subject's ability to temporally locate memories about well-known events
(e.g., the murder of president Kennedy, etc.). The main results indicated that dating of old events (1960-1971 in this experiment)
is underestimated, while dating of recent events is overestimated. Furthermore, the underestimation is a function of the
ancientness of the event. A theory predicting that the dating of events would be a function of the amount of stored memories is
discussed.
Citer ce document / Cite this document :
Lieury Alain, Caplain Patricia, Jacquet Alain, Jolivet Christian. La contraction du temps dans la datation des souvenirs anciens.
In: L'année psychologique. 1979 vol. 79, n°1. pp. 7-21.
doi : 10.3406/psy.1979.1349
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/psy_0003-5033_1979_num_79_1_1349L'Année Psychologique, 1979, 79, 7-22
Laboratoire de Psychologie expérimentale et comparée1
Université René-D es caries et EPHE: 3e section
Associé au CNRS
LA CONTRACTION DU TEMPS
DANS LA DATATION
DES SOUVENIRS ANCIENS
par Alain Lieury, Patricia Caplain,
Alain Jacquet et Christian Jolivet
SUMMARY
An experimental study was performed to investigate the subject's
ability to temporally locate memories about well-known events (e.g., the
murder of president Kennedy, etc.). The main results indicated that dating
of old events (1960-1971 in this experiment) is underestimated, while
dating of recent events is overestimated. Furthermore, the underestimation
is a function of the ancientness of the event. A theory predicting that the
dating of events would be a function of the amount of stored memories is
discussed.
D'après une tradition théorique qui remonte à Aristote
( — 384, — 322), la mémoire humaine se caractérise par une
référence au passé et implique donc la capacité d'estimer le temps.
Aristote (ive siècle av. J.-C.) définit ainsi la mémoire dans De
la mémoire et de la réminiscence : « c'est du passé qu'il y a mémoire ».
« On doit, en effet, quand on se souvient en acte, se dire, à l'inté
rieur de son propre esprit, qu'on a antérieurement entendu, ou
perçu, ou conçu telle chose. » « Par conséquent les animaux
qui ont la perception du temps sont les seuls à être doués de
mémoire, et l'organe par lequel nous percevons le temps2 est
aussi celui par lequel nous nous souvenons. »
1. 28, rue Serpente, 75006 Paris.
2. Pour Aristote, cet organe était le cœur. 8 A. Lieury, P. Caplain, A. Jacquet et C. Jolivel
II faut, semble-t-il, attendre la fin du xixe siècle, c'est-à-dire
vingt-trois siècles plus tard, pour trouver des hypothèses plus
précises sur les relations entre le temps et le souvenir. Hippolyte
Taine (1914 ; lre éd., 1870) remarque que si nos souvenirs étaient
parfaits, il nous faudrait le même temps pour nous rappeler un
événement que le temps objectif qui nous sépare de lui, « il
nous faudrait donc vingt-quatre heures pour nous rappeler
une sensation de la veille. A cela la nature a remédié par
reiïacement que subissent les images et par la propriété qu'ont
certaines images eminentes d'être les substituts abréviatifs du
groupe où elles sont incluses » (p. 213). « Plus l'événement est
antérieur, plus l'effacement des images est grand » (p. 214).
Néanmoins Taine ne déduit pas de ce mécanisme d'abréviation
du souvenir qu'il conduit à une localisation temporelle erronée
de l'événement, et il souligne que nous avons recours aux sys
tèmes chronologiques (notamment le calendrier) pour effectuer
cette localisation.
Théodule Ribot (1901) reprend ces hypothèses et relie plus
explicitement l'estimation du temps à la localisation du sou
venir : « Tout souvenir, si net qu'il soit, subit un énorme raccour
cissement. « II cite comme preuve les travaux de Vierordt sur
l'estimation du temps ; dans la situation de reproduction des
battements de métronome, « l'intervalle des battements imités
devenait trop long quand réel était court, trop
court quand l'intervalle réel était long ». Il ajoute qu' « avec
la complexité des états de conscience, l'erreur augmente encore...
Si je me représente mes dix dernières années par une ligne longue
d'un mètre, la dernière année s'étend sur 3 ou 4 dm ; la cinquième,
riche en événements, s'étend sur 2 dm ; les huit autres se res
serrent sur ce qui reste ».
Dans les recherches expérimentales contemporaines, le temps
d'une part et la mémoire d'autre part ont considérablement
été étudiés, mais, paradoxalement, très peu de recherches sem
blent avoir été entreprises sur le problème de la localisation
temporelle des souvenirs tel qu'il a été posé par Taine et Ribot.
On peut classer ces recherches en deux groupes : 1) la perspec
tive temporelle (Wallace et Rabin, 1960) ou horizon temporel
(Fraisse, 1967), et 2) la localisation temporelle d'événements
anciens.
La perspective temporelle peut être définie comme « la
totalité des vues d'un individu sur son passé psychologique et Datation des souvenirs anciens 9
son futur psychologique, existant à un moment donné » (Lewin,
1951, cité par Wallace et Rabin, 1960) ou comme « l'attitude
à l'égard du temps » (Zelkind et Spilka, 1965), passé, présent
et avenir. Dans une revue méthodique sur cette question,
Fraisse (1967, chap. VI) montre que l'horizon temporel se
construit chez l'enfant selon une même évolution que celle de
la mémoire (en tant que conduite impliquant une référence au
passé) et, symétriquement, les dissolutions pathologiques suivent
un même cours pour la mémoire et pour l'horizon temporel,
notamment dans le syndrome de Korsakov. L'auteur conclut
en notant que « l'horizon temporel est une perspective construite
à partir des indices que nous fournissent les repères temporels
de notre expérience et par nos efforts pour organiser ensemble
nos souvenirs en nous aidant de tous les principes possibles
d'ordination temporelle ».
Néanmoins, si l'horizon temporel est lié à la mémoire en
tant que conservation du passé, les deux problèmes ne se
confondent pas car si l'horizon temporel inclut le passé, le
présent et l'avenir, la mémoire n'inclut que le passé. Certes,
on peut considérer que l'avenir est une construction dérivée des
souvenirs (anticipations), mais il n'en reste pas moins une grande
différence avec les souvenirs. Dans l'étude des attitudes face
au futur (Future time perspective, Wallace et Rabin, 1960 ;
Ruiz, Reivich et Krauss, 1967 ; Cottle, 1968), les événements
énoncés par le sujet sont entièrement subjectifs et ne peuvent
être comparés à l'événement objectif lui-même ; tandis que
dans l'étude des souvenirs on essaie d'interroger le sujet sur
des événements objectifs dont le contenu ou la date sont
vérifiables.
La localisation temporelle des souvenirs n'a fait l'objet, à
notre connaissance, que de deux publications. Dans l'une, Squire,
Chace et Slater (1975) utilisent comme événements des pr
ogrammes télévisés (ex. : Cimarron, Ma sorcière bien-aimée, etc.).
Un titre est présenté parmi deux titres plus anciens de 5 ans
et le sujet doit dire quel titre est le plus r&

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