La diffusion d une nouvelle histoire : les avatars de Clio au XVIIIe siècle - article ; n°3 ; vol.44, pg 359-374
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Revue d'histoire des sciences - Année 1991 - Volume 44 - Numéro 3 - Pages 359-374
RÉSUMÉ. — Contrairement à une opinion encore répandue, l'histoire au XVIIIe siècle entend rompre avec une tradition millénaire, et se constituer en science. Mais elle éprouve des difficultés à conquérir son autonomie en face d'autorités ecclésiastiques ou politiques qui lui avaient apporté un soutien intéressé. Prise entre deux feux, elle a réussi, non sans peine, à toucher de nouveaux publics et à diffuser les acquis d'une manière déjà très moderne d'aborder l'étude du passé. Mais il faudra quand même attendre le siècle suivant pour que l'on prenne pleinement conscience de l'originalité de ces travaux pionniers.
SUMMARY. — Contrary to an opinion still widely held, during the 18th century history intended to break off with a thousand-year-old tradition and to become a science. But it met with difficulties in winning its autonomy, because it was faced with ecclesiastic or political authorities who had brought it a support that was not disinterested. Caught between two fires, it succeeded, not without difficulty, at reaching new audiences and at diffusing established fact in a way of taking up the study of the past which was already quite modern. But despite that it was only during the 19th century that one became fully conscious of the originality of these 18th-century pioneer works.
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M HENRI DURANTON
La diffusion d'une nouvelle histoire : les avatars de Clio au
XVIIIe siècle
In: Revue d'histoire des sciences. 1991, Tome 44 n°3-4. pp. 359-374.
Résumé
RÉSUMÉ. — Contrairement à une opinion encore répandue, l'histoire au XVIIIe siècle entend rompre avec une tradition
millénaire, et se constituer en science. Mais elle éprouve des difficultés à conquérir son autonomie en face d'autorités
ecclésiastiques ou politiques qui lui avaient apporté un soutien intéressé. Prise entre deux feux, elle a réussi, non sans peine, à
toucher de nouveaux publics et à diffuser les acquis d'une manière déjà très moderne d'aborder l'étude du passé. Mais il faudra
quand même attendre le siècle suivant pour que l'on prenne pleinement conscience de l'originalité de ces travaux pionniers.
Abstract
SUMMARY. — Contrary to an opinion still widely held, during the 18th century history intended to break off with a thousand-year-
old tradition and to become a science. But it met with difficulties in winning its autonomy, because it was faced with ecclesiastic or
political authorities who had brought it a support that was not disinterested. Caught between two fires, it succeeded, not without
difficulty, at reaching new audiences and at diffusing established fact in a way of taking up the study of the past which was
already quite modern. But despite that it was only during the 19th century that one became fully conscious of the originality of
these 18th-century pioneer works.
Citer ce document / Cite this document :
DURANTON HENRI. La diffusion d'une nouvelle histoire : les avatars de Clio au XVIIIe siècle. In: Revue d'histoire des sciences.
1991, Tome 44 n°3-4. pp. 359-374.
doi : 10.3406/rhs.1991.4195
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhs_0151-4105_1991_num_44_3_4195La diffusion d'une nouvelle histoire :
les avatars de Clio au xvme siècle
xvme RÉSUMÉ. siècle entend — rompre Contrairement avec une à tradition une opinion millénaire, encore et répandue, se constituer l'histoire en science. au
Mais elle éprouve des difficultés à conquérir son autonomie en face d'autorités
ecclésiastiques ou politiques qui lui avaient apporté un soutien intéressé. Prise
entre deux feux, elle a réussi, non sans peine, à toucher de nouveaux publics
et à diffuser les acquis d'une manière déjà très moderne d'aborder l'étude du
passé. Mais il faudra quand même attendre le siècle suivant pour que l'on prenne
pleinement conscience de l'originalité de ces travaux pionniers.
SUMMARY. — Contrary to an opinion still widely held, during the 18th
century history intended to break off with a thousand-year-old tradition and to
become a science. But it met with difficulties in winning its autonomy, because
it was faced with ecclesiastic or political authorities who had brought it a support
that was not disinterested. Caught between two fires, it succeeded, not without
difficulty, at reaching new audiences and at diffusing established fact in a way
of taking up the study of the past which was already quite modern. But despite
that it was only during the 19th century that one became fully conscious of
the originality of these 18th-century pioneer works.
Vulgarisation scientifique sous-entend qu'il y a bien science,
et dans notre cas, suppose le problème résolu. Parler de l'histoire
dans une étude de la diffusion scientifique au xvnie siècle n'est
donc pas un acte neutre; il implique une prise de position qui
mérite une justification préalable.
L'histoire est-elle bien une science? Question ressassée, pont
aux ânes de la réflexion sur les « sciences sociales », déjà beau
coup débattue au temps des Lumières (1). En d'autres termes, il
est vrai. On ne songe pas encore à lui contester cette qualité en
(1) Pour le dire vite, les esprits classiques, amateurs d'antiquité, en font un art, dont
ils cherchent à codifier la pratique. En revanche, les milieux intellectuels héritiers de l'huma
nisme la considèrent tacitement comme une science. Pour s'en tenir à deux indices, le
Journal des savants, jusqu'à la Révolution, reste très ouvert à l'histoire, et on appelle
encore couramment « savants », au xvme siècle, des écrivains qui seraient pour nous indi
scutablement des « historiens » ou mieux encore des « érudits ».
Rev. Hist. Set., 1991, XLIV/3-4 360 Henri Duranton
l'opposant à des « sciences dures » en voie de constitution, et qui
ne sont pas encore guettées par la tentation qu'elles connaîtront
plus tard d'un discours hégémonique. Bien au contraire, la ten
dance dominante serait plutôt de la maintenir dans les limites d'un
« art de l'histoire » qui relève plus de l'esthétique que de la recherche
de la vérité. Les historiens grecs et latins, tant admirés, en seraient,
aux yeux de certains qui se veulent juges autorisés (2), une preuve
irréfutable.
On se gardera bien d'entrer dans le débat. Mais si, par science,
on entend une discipline qui se constitue selon des règles intellec
tuelles strictes, s'assigne l'objectivité pour idéal, se dicte des pro
tocoles d'expérience et d'analyse du réel — celui-ci fût-il le passé
humain — , s'accorde sur des méthodes de travail et les constitue
en un corpus susceptible d'enrichissements continuels, alors on peut
bien parler au xvme siècle d'une science historique, à tout le moins
d'une attitude scientifique.
On peut même remonter plus haut. Tout commence réellement
au xvie siècle, au moment où des jurisconsultes érudits, les Alciats,
Budés et autres Hotmans ont très consciemment voulu dégager leur
discipline de l'arbitraire antérieur (3), et, par le biais de l'analyse
philologique, ont commencé à élaborer des techniques d'interpré
tation des textes anciens qu'on peut bien déjà appeler scientifi
ques. Pour l'exprimer en termes moins anachroniques, en cet instant
naît l'érudition telle qu'elle se pratique encore aujourd'hui.
Certes, l'historiographie médiévale n'avait pas méconnu les ex
igences élémentaires de la critique historique (4). De l'humanisme
érudit pourtant date réellement une nouvelle pratique de l'histoire,
qui va connaître un développement continu dans les deux siècles
(2) Les artes historicae constituent à eux seuls un genre autonome qui connaît son apogée
au xvne siècle. Citons parmi bien d'autres, le Discours des vertus et des vices de l'histoire
et de la manière de la bien écrire (1620) de Gomberville, De l'histoire (1670) du P. Le Moyne,
De l'usage de l'histoire (1671) de Saint-Réal, etc (sauf exception signalée, tous les ouvrages
cités ici, et dans la suite ont été publiés à Paris). Dans les générations ultérieures, les
plus grands noms, de Fénelon à Fontenelle, de D'Alembert à Voltaire, ne dédaigneront
pas de s'y exercer. En 1787, l'avocat Deperthes propose encore une anthologie au titre
significatif : Traités sur l'utilité de l'histoire [...] Collection nécessaire à ceux qui veulent
lire avec fruit l'histoire ou qui veulent l'écrire avec succès.
(3) Sur cette question, voir le livre essentiel de Donald R. Kelley : Foundations of modem
historical scholarship. Language, law and history in the French Renaissance (New York-
Londres, 1970).
(4) Voir les nombreux travaux de Bernard Guénée sur « le métier d'historien » au Moyen
Age. Il y fait justice de l'attitude condescendante qui était de mise en la matière il n'y
a pas encore si longtemps. avatars de Clio au XVIIIe siècle 361 Les
suivants : des règles sont édictées, des manuels rédigés, des équipes
de recherche se forment et, plus largement, une communauté scien
tifique ayant ses rites, ses pratiques, ses méthodes de travail. Le
De re diplomatica (1681) est traditionnellement reçu comme l'expres
sion achevée de cette scientificité historique. Dans le livre fonda
teur de Mabillon en effet s'affirme ouvertement la volonté
d'échapper à l'arbitraire, d'inventer des règles applicables à tout
examen de documents anciens, de les fondre en un trésor de pro
cédures indéfiniment réutilisables.
Une science, c'est aussi un ensemble d'instruments de travail.
Le xvir2 siècle finissant en a eu une claire conscience et s'est appliqué

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