La première partie des Aïeux d Adam Mickiewicz : sa genèse - article ; n°1 ; vol.8, pg 5-45
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La première partie des Aïeux d'Adam Mickiewicz : sa genèse - article ; n°1 ; vol.8, pg 5-45

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Description

Revue des études slaves - Année 1928 - Volume 8 - Numéro 1 - Pages 5-45
41 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1928
Nombre de lectures 7
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Stanislaw Pigo
La première partie des Aïeux d'Adam Mickiewicz : sa genèse
In: Revue des études slaves, Tome 8, fascicule 1-2, 1928. pp. 5-45.
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Pigoń Stanislaw. La première partie des Aïeux d'Adam Mickiewicz : sa genèse. In: Revue des études slaves, Tome 8, fascicule
1-2, 1928. pp. 5-45.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/slave_0080-2557_1928_num_8_1_7397LA PREMIERE PARTIE
DES «AÏEUX» D'ADAM MICKIEWICZ
SA GENÈSE,
РАИ
STANISŁAW PIGON.
On a l'habitude de placer en tête de la littérature romantique
polonaise les Ballades et romances (Ballady i romanse") d'Adam Mic
kiewicz, comme la première œuvre poétique appartenant au
courant nouveau. Cette préséance revient d'office, au point de vue
chronologique, à une autre œuvre du même poète, Les aïeux
(Dziady^, car on ne saurait contester l'affirmation des critiques
qui reportent la partie primitive de ce poème — noyau de la
grande œuvre postérieure — à l'époque des premières Ballades,
par conséquent avant la plus grande partie des œuvres dont se
compose le premier volume de poésies du maître.
Que nous cherchions à voir comment cette œuvre représenle un
nouveau courant littéraire avec ses aspirations capitales et ses pré
occupations les plus caractéristiques, et nous constaterons sans
peine que Les aïeux, tant par leur programme que par leur struc
ture (caractère populaire, mysticisme de l'au-delà, archaïsme des
coutumes, etc.), sont plus romantiques que le premier volume des
poésies de Mickiewicz et surtout que sa préface. Il ne s'agissait là,
en effet, que de conquérir pour la poésie romantique non pas la
primauté, mais l'égalité des droits avec d'autres écoles et d'autres
genres, et l'auteur se contentait de fixer le nouveau courant litté
raire dans les limites du juste milieu, — tandis que dans Les
aïeux, comme dans Romantisme (Romantyczność}, nous trouvons la
réalisation d'une formule poétique sans aucun doute plus extré
miste.
C'est un simple accident qui a rejeté Les aïeux, ou plus exact
ement les « Préaïeux » (pré-Dziady) , à la seconde place dans l'ordre
bibliographique de l'histoire du romantisme polonais. L'historien ,
Revue des Etudes slaves, tome VIII, 1928, fasc. t -2. STANISŁAW PIGON.
qui se préoccupe d'assurer à chaque œuvre à la fois sa place propre
dans le temps et sa valeur en dehors du temps, peut voir à juste
litre dans ce poème en son état primitif la cellule embryonnaire
d'où est sorti tout un monde puissant — et aussi, on peut le dire
en un certain sens, le microcosme du romantisme polonais. Il est
frappant de voir combien les rapports sont étroits entre le poème
et le romantisme polonais, entre le microcosme el le macrocosme.
Les deux organismes littéraires se développent pendant un temps
assez long, et les sillons qu'ils tracent courent parallèlement l'un à
l'autre. Les étapes successives de l'élaboralion des Aïeux devancent
et annoncent la transformation du mouvement romantique en Po
logne, et elles présentent en même temps comme le schéma fidèle
de l'évolution qui se prépare. C'est ainsi qu'à des degrés successifs
de du poème, à travers la IVe partie et Les dieux de
Dresde, nous apercevons non seulement les diverses phases par où
l'âme du poète a passé, mais encore le rythme même suivant l
equel tout notre romantisme a évolué, du culte de ia poésie popul
aire et du fantastique, — à travers l'individualisme, la poésie du
cœur blessé — , à la glorification de l'héroïsme national et à l'assimi
lation profonde d'éléments politiques et religieux. On pourrait dire
que tout le romantisme polonais s'est condensé en « trois courtes
heures » dans les trois parties éditées des Aïeux. Nous trouvons là
la synthèse d'une époque entière, avec les aspirations et les méta
morphoses de toute une génération, et l'esprit du temps comme
emprisonne dans une œuvre poétique.
Il n'en est que plus important pour nous de connaître la forme
primitive de ce microcosme et la conception qui s'y est cristallisée.
L'œuvre est née dans une atmosphère encore classique et à l'époque
du sentimentalisme. Le problème essentiel est de déterminer quels
éléments elle a puisés dans le terrain préromantique et comment
elle les a incorporés en les transformant. Nous serons à même, une
fois ce problème élucidé, de définir les idées principales qui ont
alimenté le romantisme polonais à ses débuts.
Si, ayant étudié la technique créatrice de Mickiewicz, l'on exa
mine Les aïeux en l'état où ils se présentaient encore à Kowno et à
Wilno, puis que l'on dépouille les travaux critiques relatifs à cette
œuvre, on ne peut qu'être frappé par l'insuffisance des résultats PREMIERE; PARTIR DES « AÏEUX » D'ADAM MICKIEWICZ. 7 LA
obtenus. Les grandes œuvres de Mickiewicz, nous le savons, ne sont
pas nées tout d'un coup; elles n'ont pas jailli dans l'imagination du
poète avec leurs proportions définitives. Mais, du point de dépjirt
d'une conception primitive assez étroite, par étapes successives,
par l'introduction soudaine d'éléments nouveaux, elles se sont dé
veloppées en des cercles de plus en plus larges. Le travail du poète
sur chacune de ses grandes œuvres nous laisse saisir sur le vif cette
sorte de pulsation du flot nourricier, ce rythme de l'inspiration qui
va et vient et qui transforme les éléments précédemment absorbés.
Nous voyons comment Mickiewicz élargit progressivement sa con
ception, à mesure qu'il découvre des horizons, et comment aussi
il développe en conséquence le plan de son œuvre. Ainsi, nous
voyons comment il «s'attelle à un labeur de plus en plus dur»,
s'écriant comme son jeune Lacédémonien : « Je suis devenu plus
fort, donnez-moi une plus lourde armure » [Silniejszy jestem, cięższą
podajcie mi zbroję). Le procès de la création était exactement inverse,
par exemple, chez Goszczyński : on sait que ce poète prenait dès
l'abord un essor dépassant ses forces, puis qu'épuisé par les diff
icultés il s'effondrait en plein vol, abandonnant son plan ou bien se
contentant d'une exécution incomplète et fragmentaire.
Cette observation en appelle une autre. Un critique a comparé
la première conception d'une des œuvres de Mickiewicz à un « sau
vageon ». Cette image est exacte et peut être généralisée. Nous con
statons en effet, pour chaque œuvre de Mickiewicz, qu'il y a entre
la première conception et la dernière rédaction la même différence
qu'entre un sauvageon et l'arbre épanoui sur un tronc noblement
greffé. C'est la même souche maternelle, et c'est la même poussée,
mais le bouquet né de la greffe est bien plus parfait que ľarbre
primitif, et cette perfection n'aurait jamais été atteinte par la
simple évolution : elle est due à une métamorphose créatrice subite,
analogue à la greffe.
Jetons les yeux sur l'œuvre de Mickiewicz. Pour Konrad Wallen-
rod, par exemple, le poète a rejeté la première ébauche en raison
de sa ressemblance avec Lara de Byron, et il a conduit ensuite son
poème par des chemins tout différents. Les Livres de la nation polo
naise et des Pèlerins polonais {Księgi narodu polskiego i pielgrzymstwa
polskiego) ont été conçus comme le catéchisme de l'émigration po
lonaise. Monsieur Thadée (Pan Tadeusz) devait être primitivement
une idylle de modeste dimension , et l'exemple de son histoire est
le plus caractéristique : pendant l'exécution, le poète a remanié le
plan à maintes reprises, à mesure que de nouveaux apports s'ajou- STANISŁAW PIliON.
taient à la conception première. C'est là un procès de la création
littéraire habituel à Mickiewicz, et qui ne souffre pas d'exception.
La source sourd sous sa plume, le flot grossit, et il se transforme
au fur et à mesure, il s'éloigne sensiblement de ľétroite source d'où
il vient, il change son cours non pas en évoluant, mais

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