La protection des plantations et la conservation des récoltes à Madagascar - article ; n°2 ; vol.29, pg 193-215
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Description

Journal de la Société des Africanistes - Année 1959 - Volume 29 - Numéro 2 - Pages 193-215
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1959
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Raymond Decary
La protection des plantations et la conservation des récoltes à
Madagascar
In: Journal de la Société des Africanistes. 1959, tome 29 fascicule 2. pp. 193-215.
Citer ce document / Cite this document :
Decary Raymond. La protection des plantations et la conservation des récoltes à Madagascar. In: Journal de la Société des
Africanistes. 1959, tome 29 fascicule 2. pp. 193-215.
doi : 10.3406/jafr.1959.2241
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/jafr_0037-9166_1959_num_29_2_2241LA PROTECTION DES PLANTATIONS
ET LA CONSERVATION DES RÉCOLTES
A MADAGASCAR
PAR
R. DECARY
I. — La protection.
Si l'on met à part les maladies des plantes contre lesquelles l'i
ndigène, réduit à ses seules ressources, est évidemment désarmé,
on peut diviser en trois groupes les différents dangers contre lesquels
les plantations doivent être protégées : du fait des con
ditions météorologiques, dangers du fait des animaux vertébrés
et insectes, dangers enfin provenant de l'homme lui-même, et
notamment des vols. De son côté, le genre de protection peut-être
de deux sortes ; il est ou « naturel » (barrières, épouvantails), ou
« surnaturel », et fait alors appel au pouvoir des forces invisibles,
des enchantements et des talismans.
Protection contre les éléments. — Le danger le plus grave
est la sécheresse, plus encore que l'excès d'eau. Contre l'irrégula
rité des précipitations, les procédés magiques sont seuls utilisables :
prières et invocations aux ancêtres d'une part, et talismans d'autre
part.
Les prières, en cas de sécheresse prolongée, donnent lieu à d'im
portantes cérémonies et s'accompagnent de sacrifices de bœufs.
Nous avons décrit autrefois en détails l'une d'elles, à laquelle nous
avons assisté chez les Sakalava de Maromandia (province de Ma-
junga), et renvoyons à ce travail К Les cérémonies de cette nature
sont surtout fréquentes dans l'ouest et le sud de l'île, en fin de saison
sèche, quand le régime des pluies tarde à s'établir, risquant de com
promettre la soudure dans le cycle des cultures.
Les ody ou talismans pour faire pleuvoir sont de nature très variée.
1. R. Decary, Notes ethnographiques sur les populations du district de Maromandia (Sakalava
et Tsimihety). Rev. d'Ethnogr. et des Traditions populaires, n° 20, 4e trim. 1924, p. 343. 194 SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES
Ils peuvent être la propriété d'un individu ou au contraire appart
enir à la collectivité. Certains portent des noms personnels. Dans
le Betsileo, le talisman Raisosa, très réputé, est enterré sur la place
du village. Quand on désire la pluie, les femmes se réunissent, por
tant chacune une cruche pleine d'eau, qu'elles vont verser sur l'em
placement de Yody, tout en chantant : « II pleut !... Que d'eau !...
Nous sommes toutes mouillées l... etc. » Et bientôt, la pluie tombe \
II s'agit là d'une opération de magie sympathique.
Raisosa est un talisman « spécifique », qui n'a d'influence que sur
la pluie ; d'autres sont polyvalents. Rabehaza était autrefois une
idole royale ou sampy, très célèbre chez les Sihanaka et les Merina ;
il protégeait contre les balles, les maladies, les sauterelles, éloignait
les voleurs et faisait tomber la pluie. Ralampana, à Sambaina dans
le sud de Tananarive, avait aussi des vertus multiples : il défendait
contre la grêle, les inondations, les sauterelles, les maladies, les
balles, etc. Chez les Bezanozano, Manjakarano, dont le nom signifie
« roi de l'eau » avait le pouvoir de faire tomber ou au contraire
repousser la pluie, et aussi de guérir les maladies.
Les chutes de grêle étaient autrefois considérées en Imerina comme
des manifestations de la colère de l'idole Kelimalaza, et la destruc-
truction du riz était une des punitions qu'il infligeait aux humains ;
aussi existait-il des cérémonies et des amulettes spéciales contre le
fléau. En cas d'arrivée d'un nuage supposé dangereux, on procédait
pour le détourner, au tolapaditra. Les gens du village menacé com
mençaient par jeter vers le sud 2 des poignées de cendre prises à leur
foyer ; au bord des rizières, des feux étaient allumés, dont la fumée
montait vers le ciel ; en même temps plantés des ody spéciaux
auxquels une invocation était adressée : « Protégez-nous contre la
grêle qui menace de hacher le riz de la population. Vous êtes notre
confiance et notre force. Ne permettez pas que les mauvais sorts nous
atteignent, car c'est vous qui nous protégez et qui montez bonne
garde ; ne permettez pas que les méchants puissent nous ensorceler
et détruire notre riz. » Et la grêle alors s'éloignait pour aller s'abattre
sur les collines incultes...
En l'honneur de ces talismans, on immolait de temps en temps
un mouton au poil roux et à la tête blanche, ou un coq au plumage
rouge. Le sacrifice avait notamment lieu après la récolte du riz.
Chaque cultivateur apportait en outre trois, cinq ou sept épis, qui
1. C. Renel, Les amulettes malgaches, ody et sampy. Bull. Acad. malg. Nouv. série, t. II, 1951,
p. 173.
2. Fréquemment, au cours des conjurations du mauvais sort, c'est vers le Sud, région néiaste
où le soleil ne va pas, que se font les jets d'objets souillés ou devenus impurs. PROTECTION DES PLANTATIONS ET CONSERVATION DES RÉCOLTES 195
étaient suspendus dans la case du gardien de Vody comme offrande
de prémices. Les épis demeuraient ainsi jusqu'au temps des semailles
suivantes et étaient alors mélangés au riz qui allait être mis en
terre 4
Une multitude de fady ou interdits, heureusement disparus pour
la plupart, réglaient autrefois l'existence du Malgache, qui vivait
dans la crainte constante de violer ces tabous, lesquels s'appliquaient
aux moindres actes. En voici quelques-uns, dont la violation se tra
duisait par la chute de la grêle et la dévastation des cultures.
Marcher à cloche-pied pendant la saison des pluies ; se servir d'une
fronde pendant la saison des pluies ; laisser tomber du riz blanc hors
de la maison pendant la saison des pluies ; marcher sur des échasses
au moment de la maturité du riz ; jouer au katra ou au fanorona en
saison des pluies ; faire de la musique avec de la paille de riz quand
les épis sont encore dans la rizière ; laisser tomber dans le foyer des
graines de citrouille ou du riz blanc ; jeter la peau des pistaches dans
le foyer ; prendre des semences dans du riz qui a subi la grêle fera
tomber celle-ci quand la plante poussera, etc.
Protection contre les quadrupèdes. — Deux espèces sont
surtout nuisibles, les potamochères ou sangliers, et occasionnellement
les bœufs.
Le sanglier malgache, Potamochaerus larvatus ou lambo, qui vit
par bandes pouvant dépasser dix individus, se nourrit de racines et
tubercules qu'il découvre en labourant le sol, et ses dégâts dans les
plantations de manioc et de patates sont souvent importants. Dans
les contrées où il abonde, on tente de protéger les champs avec des
palissades longues parfois de plusieurs centaines de mètres et établies
grossièrement avec de quelconques branchages. Dans la région de
Bekodoka, en pays Sakalava, elles sont en troncs de palmier mokotro ;
chez les Betsimisaraka du Nord, dans la région d'Ambodisakoa,
elles sont faites de tiges de bambous. Cette défense est souvent un
peu illusoire, les animaux trouvant facilement dans les barricades
plus ou moins bien entretenues, des points faibles ; ils les brisent
ou fouissent des passages en dessous, si même ils ne parviennent pas
à les franchir d'un saut. Ces palissades peuvent, d'autre part, être
interrompues en certains endroits par des passages dissimulant une
fosse, dont le fond est garni de pieux acérés et sur lesquels le sanglier
vient s'embrocher 2.
1. D'après le Tantaranny Andriana, traduction française, t. I, p. 408.
2. R. Decary, La chasse et le piégeage chez les indigènes de Madagascar. Journ. Soc. African
istes, t. IX, 1939, p. 3. SOCIÉTÉ DES AFRICANISTES 196
Dans les pays Вага et Antandroy, on allume aussi dans les champs
des feux de nuit ; dans la région d'Ampany, on dissémine dans les
plantations de grosses pierres blanches qui effraient les animaux et
servent d'épouvantails.
Dans le Mahafaly ainsi que dans toute la partie centrale et m

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