Le rôle du tertiaire supérieur dans la domination de l économie  ivoirienne - article ; n°61 ; vol.16, pg 113-134
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Le rôle du tertiaire supérieur dans la domination de l'économie ivoirienne - article ; n°61 ; vol.16, pg 113-134

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Description

Tiers-Monde - Année 1975 - Volume 16 - Numéro 61 - Pages 113-134
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1975
Nombre de lectures 25
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Marie-Claude Guerrini
Le rôle du tertiaire supérieur dans la domination de l'économie
ivoirienne
In: Tiers-Monde. 1975, tome 16 n°61. pp. 113-134.
Citer ce document / Cite this document :
Guerrini Marie-Claude. Le rôle du tertiaire supérieur dans la domination de l'économie ivoirienne. In: Tiers-Monde. 1975, tome
16 n°61. pp. 113-134.
doi : 10.3406/tiers.1975.2536
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1975_num_16_61_2536ÉTUDES DE CAS
LE ROLE DU TERTIAIRE SUPÉRIEUR
DANS LA DOMINATION
DE L'ÉCONOMIE IVOIRIENNE
par Marie-Claude Guerrini*
La Côte-d'Ivoire, pays d'indépendance récente, est un des Etats d'Afrique
francophone à avoir connu, depuis 1961, une croissance très rapide. Cependant
la faiblesse des capitaux nationaux et les structures héritées de la colonisation
permettent aux puissances impérialistes de dominer encore très directement
l'économie ivoirienne. Cette domination s'exerce en particulier par le secteur
tertiaire qui tient une place importante dans l'économie du pays. Nous n'étu
dierons ici que quelques aspects de cette domination à travers certaines acti
vités tertiaires.
I. — La mise en place des activités tertiaires
L'intégration de la Côte-d'Ivoire et de l'Afrique occidentale au système
capitaliste mondial, assez ancienne, n'a cependant été dans les premiers temps
que très partielle. L'intérêt des Européens lors du développement du capi
talisme s'est d'abord porté sur les pays d'outre-Atlantique où l'abondance du
métal précieux a permis un enrichissement rapide des marchands. Le dévelop
pement des cultures commerciales en Amérique a provoqué un besoin en
main-d'œuvre qui a été résolu par un transfert massif de Noirs d'Afrique.
Ainsi au xviie siècle, l'Afrique participe-t-elle à ce commerce « triangulaire »,
mais les installations européennes restent très ponctuelles, situées essentiell
ement sur les côtes. De là, des accords avec les chefs locaux permettent aux
trafiquants de se faire livrer les hommes qui sont embarqués pour l'Amérique.
* Technicienne au C.N.R.S.
113 MARIE-CLAUDE GUERRINI
Ce n'est qu'au xixe siècle que l'Afrique noire devient l'objet de convoitise
des puissances européennes en quête de matières premières et de débouchés
nouveaux nécessaires à l'accumulation du capital et aux produits finis résultant
des révolutions industrielles; en effet, les capitalistes doivent faire face aux
risques de suraccumulation. Les manifestations impérialistes aboutissent à un
partage de l'Afrique et la Côte-d'Ivoire revient alors aux Français. Ce partage
correspond à une attitude politique destinée à fixer les limites d'influence
d'Empires rivaux, tous suffisamment développés pour prétendre gérer et uti
liser les vastes espaces explorés au cours de la deuxième moitié du xixe siècle.
La Côte-d'Ivoire devient une colonie française en 1893; comme les autres
territoires d'Afrique occidentale et centrale qui deviennent possessions fran
çaises, elle va subir un type d'organisation destiné à répondre aux besoins
de la métropole. En effet, il ne s'agit pas d'une colonie de peuplement, mais
d'une source d'approvisionnement et d'un marché potentiel. Les buts réels
poursuivis sont d'ailleurs assez franchement avoués et Roger Villamur dans
le livre qu'il publie en 1903 l'indique assez clairement : « Le Français au tempé
rament colonisateur a, dans nos territoires d'outre-mer, orienté ses efforts
non plus vers la vie agricole, pastorale, familiale et sédentaire, mais vers les
grandes entreprises industrielles et commerciales. Il s'adonne non à créer des
nouvelles Frances (...) mais à constituer des débouchés où il puisse échanger
les marchandises d'Europe contre des produits indigènes, propres à alimenter
les industries de la zone tempérée » (1).
Cette volonté d'exploitation systématique des territoires colonisés conduit
les colonisateurs à être des agents de l'exploitation et de la répression, faisant
fort peu de cas des populations autochtones. Quelques administrateurs en
furent conscients, comme M. Delafosse qui en 192 1 écrivait : « Si nous condes
cendons à être francs vis-à-vis de nous-mêmes, nous sommes bien forcés
d'avouer que ce n'est pas l'altruisme qui nous a conduit en Afrique, au moins
en tant que nation (...). Tantôt nous voulions assurer les débouchés à notre
commerce ou des ressources de matières premières à notre industrie, tantôt
nous éprouvions le besoin de protéger la sécurité de nos nationaux ou le besoin
de ne pas nous laisser devancer par des rivaux étrangers (...). En aucun cas
je ne découvre comme mobile de notre expansion coloniale en Afrique, la
volonté réelle et raisonnée de contribuer au bonheur des populations que nous
sommes allés subjuguer. C'est là une excuse que nous donnons facilement
après coup, ce ne fut jamais un dessein... » (2).
(1) R. Villamur et L. Richaud, Notre colonie de la Côte-d'Ivoire, Paris, A. Challamel,
1903, p. 132.
(2) M. Delafosse, Sur l'orientation de la politique indigène en Afrique noire, cité par J. Suret-
Canale, in U Afrique noire occidentale et centrale. Uhre coloniale (igoo-ig45), Paris, Ed. Sociales,
P- 397-
114 L'ÉCONOMIE IVOIRIENNE
Pour réaliser ces buts, les principaux agents d'intervention sont donc dans
un premier temps les militaires et l'administration; les commerçants viennent
s'installer parallèlement. C'est donc essentiellement un « encadrement »
tertiaire qui est mis en place dans la nouvelle colonie. Se heurtant à une cer
taine résistance, l'armée intervient pour permettre l'installation de l'administ
ration. Certains administrateurs sont même partisans de la manière forte,
estimant que l'indigène, être inférieur, doit être amené à respecter l'Européen
et devenir réceptif à la civilisation occidentale. Cette théorie a été longuement
développée par le gouverneur Angoulvant : « Ce que je ne veux pas, c'est que
nous fassions, dans ce pays où les esprits au moins sont encore à conquérir,
étalage d'une sensiblerie sans résultat. Dussions-nous ne pas sembler tenir
compte, dès l'abord, des désirs de l'indigène, il importe que nous suivions sans
faiblesse l'unique voie susceptible de nous mener au but. Il ne faut pas s'y
tromper : ces désirs indigènes sont essentiellement improductifs, opposés à
tous progrès. Les respecter, c'est vouloir différer indéfiniment l'établissement
de l'ordre » (i).
La Côte-d'Ivoire ne possédant pas de grands royaumes organisés, on a
recours à l'administration directe dans laquelle l'administrateur, représentant
du gouvernement français, possède des pouvoirs étendus : il peut être appelé
à remplir des fonctions de juge de paix, greffier, huissier et notaire; il est chargé
de faire construire, puis d'assurer l'entretien des ouvrages d'intérêt public
(écoles, routes, ponts, bâtiments administratifs divers) enfin c'est à lui
qu'incombe la charge d'assurer « l'ordre » pour permettre l'exploitation des
régions ouvertes au commerce qu'on assujettit à l'impôt et à l'obligation des
cultures d'exportation. Bien évidemment le système lui-même implique que
l'indigène soit fort peu considéré; et même lorsque le développement de
l'administration oblige à recourir à des agents indigènes, ceux-ci n'occupent
que des postes subalternes. Il faut attendre la Conférence de Brazzaville (1944)
pour que, en théorie du moins, soit reconnue l'égalité entre les Africains et
les Européens : « Les professions les plus diverses doivent être progressive
ment réservées aux indigènes..., il est désirable notamment dans toutes les
colonies africaines que les emplois des cadres d'exécution soient le plus rap
idement possible tenus par les indigènes quel que soit leur statut personnel.
Cette accession aux divers cadres, sur la base de l'égalité des titres avec les
fonctionnaires européens, doit comporter, à compétence égale,

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